V. - Sur les modalités de déclassement des dispositions
de forme législative et de nature réglementaire
A. - Selon la saisine, la codification par ordonnance favoriserait un détournement de la procédure prévue par le deuxième alinéa de l'article 37 de la Constitution pour constater que des dispositions de forme législative sont de nature réglementaire.
Aux yeux des requérants, l'intervention du Conseil constitutionnel serait requise dans tous les cas où il s'agit de remettre en cause des dispositions de forme législative adoptées après l'entrée en vigueur de la Constitution de 1958, mais relevant du domaine réglementaire.
B. - Cette thèse est erronée.
La procédure prévue par le deuxième alinéa de l'article 37 ne concerne que le cas où le Gouvernement souhaite faire usage de son pouvoir réglementaire pour modifier par décret une telle disposition. Il lui faut alors l'accord du Conseil constitutionnel.
Elle n'est, en revanche, pas applicable lorsque c'est le législateur lui-même qui entend modifier ou abroger des dispositions législatives pour quelque motif que ce soit. Rien ne s'oppose, en particulier, à ce qu'une abrogation intervienne parce que le législateur considère que la disposition en cause relève du domaine du règlement, et estime préférable que le Gouvernement la reprenne par décret, le cas échéant en lui apportant les modifications jugées nécessaires.
Dans ces conditions, rien ne s'oppose non plus à ce qu'une telle abrogation soit le fait d'une ordonnance prise en application de l'article 38 de la Constitution, dès lors qu'il résulte de cet article que les auteurs d'une ordonnance disposent, dans le champ de l'habilitation, des pouvoirs du législateur ordinaire, y compris donc celui d'abroger des dispositions législatives pour quelque motif que ce soit, sous la seule réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences constitutionnelles. On remarquera que cette dernière hypothèse ne saurait se rencontrer lorsqu'il s'avère que les dispositions qu'il s'agit d'abroger ressortissent, en réalité, au domaine du règlement.
Appliquée à la codification, cette liberté du législateur délégué est seulement encadrée par la double nécessité de préserver l'état du droit en vigueur, tout en procédant, le cas échéant, aux reclassements qu'implique le respect de la hiérarchie des normes, celles-ci incluant les principes de répartition des compétences découlant des articles 34 et 37 de la Constitution. La conciliation de ces exigences conduit la loi - ou, en l'espèce, l'ordonnance - à laquelle est annexée la partie législative du code à subordonner l'entrée en vigueur des abrogations motivées par de tels reclassement à celle de la partie réglementaire dans laquelle les dispositions en cause seront reprises.
1 version