VI. - Sur le respect des articles 74 et 77 de la Constitution
A. - Les auteurs du recours font valoir que les matières sur lesquelles portera la codification touchent aux compétences des territoires d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie. Ils en déduisent que la loi contestée porte atteinte à ces compétences et aurait dû faire l'objet des consultations requises par la Constitution. La première branche de cette argumentation doit sans doute être comprise comme signifiant que la loi aurait empiété sur la compétence exclusive que les articles 74 et 77 de la Constitution attribuent au législateur organique pour déterminer les compétences exercées par les collectivités d'outre-mer en cause.
B. - Le Conseil constitutionnel ne saurait faire sienne l'argumentation ainsi soulevée.
- S'agissant des compétences, il convient de rappeler que les ordonnances ne peuvent intervenir que dans des matières relevant de la loi ordinaire, sans empiéter sur le domaine réservé à la loi organique. Or seule une loi organique aurait pu, en vertu des articles 74 et 77 de la Constitution, toucher aux compétences des collectivités en cause. Les ordonnances ne le pourront donc pas.
Au demeurant, l'exposé des motifs du projet de loi souligne qu'elles ne porteront que sur les matières relevant des compétences de l'Etat.
- Quant aux consultations des organes délibérants de ces collectivités, leur nécessité juridique ne peut, en l'état actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, se réclamer d'aucun des critères qui permettent d'identifier les cas dans lesquels elle est obligatoire, même s'il est clair qu'elles sont souvent opportunes.
En effet, il est désormais bien établi, depuis la clarification opérée par la décision no 94-342 DC du 7 juillet 1994, que la consultation des assemblées d'outre-mer n'est nécessaire, en vertu de l'article 74 applicable à la Polynésie française et aux îles Wallis-et-Futuna, que dans la mesure où est véritablement en cause l'organisation particulière du territoire, ce que la jurisprudence a défini comme ne concernant que les cas dans lesquels un projet de loi introduit, modifie ou supprime des dispositions spécifiques au territoire et touchant son organisation particulière.
C'est un critère semblable que retient, pour la Nouvelle-Calédonie, l'article 90 de la loi organique du 19 mars 1999 prise en application de l'article 77 de la Constitution, ce qui appelle donc nécessairement la même interprétation.
Si l'on s'en tient à celle que le Conseil constitutionnel a fait prévaloir en 1994, on est conduit à considérer que les consultations n'étaient pas juridiquement obligatoires dès le stade la loi d'habilitation, dès lors que celle-ci ne procède pas, par elle-même, à l'introduction, à la modification ou à la suppression de dispositions spécifiques à l'une ou l'autre de ces collectivités d'outre-mer. Elle se borne à permettre l'édiction d'ordonnances qui seront éventuellement susceptibles d'avoir de tels effets, dans la mesure où le Gouvernement fera usage de la faculté, qui lui est ouverte par la dernière phrase de l'article 1er de la loi déférée, d'étendre à ces collectivités l'application des dispositions codifiées, moyennant les adaptations nécessaires. Les ordonnances qui contiendront de telles dispositions seront naturellement soumises à l'avis des organes compétents.
En tout état de cause, on soulignera que le moyen tiré du défaut de consultation manque en fait. En effet, la consultation des organes délibérants des différentes collectivités d'outre-mer susceptibles d'être concernées a été effectuée. Seule l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna s'est expressément prononcée, par un avis de sa commission permanente du 16 juin 1999, tandis que les délais impartis au congrès de Nouvelle-Calédonie et à l'assemblée de Polynésie française expiraient respectivement les 18 et 26 juin 1999. Ces différents éléments ont été portés à la connaissance des Assemblées et, en particulier, le Sénat en était informé avant l'examen du texte en première lecture.
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En définitive, le Gouvernement considère qu'aucun des moyens invoqués n'est de nature à justifier la censure de la loi déférée. Aussi le Conseil constitutionnel ne pourra-t-il que rejeter le recours dont il est saisi.
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