- Analyse
2.1. Eoliennes implantées à terre
2.1.1. En France métropolitaine continentale
Source : DIDEME, analyse CRE et ExternE.
Quelle que soit la filière thermique substituée, le coût pour la collectivité de la filière éolienne à terre en métropole continentale est très supérieur au coût évité. La hausse récente du prix des combustibles concomitante à l'augmentation du tarif envisagée ne permet pas d'inverser ce rapport.
Pour ce qui concerne l'objectif de maîtrise des choix technologiques d'avenir, il convient de souligner que la filière éolienne est aujourd'hui mature. Son marché est largement développé, et il y a peu à attendre de l'évolution des technologies et des effets d'échelle. Au contraire, à performances comparables, le prix des machines a connu, en l'espace d'une année, une forte augmentation sous l'effet conjugué de la hausse du prix des matériaux et d'une demande mondiale soutenue, entretenue par la généralisation des politiques de subventions publiques. Enfin, une dégressivité insuffisante du tarif exclut que la filière parvienne, dans la prochaine décennie, à un niveau de compétitivité suffisant pour lui permettre de poursuivre son développement sans subvention.
2.1.2. En Corse, dans les départements d'outre-mer et à Mayotte
Source : DIDEME, ExternE, analyse CRE.
En Corse, dans les départements d'outre-mer et à Mayotte, le coût pour la collectivité de la filière éolienne à terre est approximativement couvert par les coûts évités.
En Corse, la construction d'une centrale fonctionnant en cycle combiné, alimentée en gaz naturel, permettrait un gain environnemental et économique, en comparaison des centrales existantes. Toutefois, l'alignement du tarif applicable à la production éolienne sur le tarif continental préserve l'intérêt de cette filière sur l'île.
Il s'agit, donc, de territoires où les énergies renouvelables se développeraient sous l'effet de la seule initiative privée si les prix de vente de l'électricité pratiqués reflétaient les coûts de production. Ce n'est pas le cas en raison de la péréquation des prix avec ceux de la métropole.
2.2. Eoliennes implantées sur le domaine public maritime
ou dans la zone économique exclusive
Source : DIDEME, ExternE, analyse CRE.
Quelle que soit la filière thermique substituée, le coût pour la collectivité de la filière éolienne en mer est très supérieur au coût évité. Compte tenu de l'importance de l'écart, il est peu probable que le soutien à ces installations puisse se traduire, même à long terme, par un bénéfice pour la collectivité.
Les perspectives d'évolution offrent peu d'espoir de baisse des coûts. Les technologies d'implantation sont dérivées de celles employées dans le domaine de l'exploitation pétrolière et bénéficient déjà d'une longue expérience acquise par ce secteur. Il existe même un risque, en cas d'intensification de l'activité pétrolière maritime, que la filière soit affectée par une tension sur la disponibilité des moyens de construction, de nature à retarder les projets et à en accroître le coût. Enfin, les économies d'échelle sont limitées par l'hétérogénéité des conditions d'implantation.
IV. - COMPARAISON DU TARIF PROPOSÉ
AVEC LES COÛTS DE PRODUCTION DE LA FILIÈRE
- Principes
1.1. Détermination des coûts de la filière
Le tarif d'achat est comparé aux coûts de production de la filière, afin de vérifier que la rémunération accordée n'excède pas une rémunération normale des capitaux immobilisés.
Pour les éoliennes implantées à terre, les valeurs de coûts retenues sont issues des contributions soumises par les participants au groupe de travail mis en place par la DIDEME pour élaborer les nouveaux tarifs. Des hypothèses hautes et basses de coûts sont considérées pour prendre la mesure de l'étendue des points de vue sur cette question. La valeur résiduelle de l'installation, à l'issue des 15 ans du contrat d'obligation d'achat, est prise égale à la valeur actualisée de la production, vendue au prix de marché, sur la durée de vie résiduelle de l'installation, évaluée à 5 ans.
L'analyse est réalisée pour des machines aux caractéristiques différentes, afin de s'assurer que le tarif incite à retenir celle qui maximise les volumes produits et conduit au coût d'achat unitaire le plus faible. La rentabilité est donnée in fine en fonction de la vitesse de vent moyenne au moyeu, en retenant la configuration des machines la plus favorable au producteur.
L'hypothèse fiscale retenue est celle d'un amortissement exceptionnel de l'investissement la première année, avec report en avant du déficit fiscal ainsi généré. Elle influe favorablement sur la rentabilité. Le scénario de remontée des déficits à la maison mère n'a pas été envisagé, car la majorité des industriels actifs en France ne disposent pas de cette possibilité, compte tenu de la composition de leur actionnariat. Un tel scénario tendrait, cependant, à relever encore davantage la rentabilité.
1.2. Détermination du niveau de rentabilité normale des installations
L'approche adoptée par la CRE vise à s'assurer que le tarif proposé induit une rentabilité des fonds propres investis dans le projet cohérente avec celle constatée pour les entreprises agissant dans le secteur considéré. Dans le cas de la production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, le secteur pris en référence est celui des entreprises de production d'électricité dont le parc de production comporte une proportion importante d'aérogénérateurs. Au sein de celui-ci, l'analyse des entreprises et projets comparables conduit à retenir un financement par la dette à hauteur de 80 % et un niveau de rentabilité des fonds propres cible de 13,5 % environ.
- Analyse
2.1. Eoliennes implantées à terre
2.1.1. En métropole
Le graphique ci-après donne, pour les projets en métropole, le taux de rentabilité interne (TRI) sur fonds propres après impôts atteint pour les hypothèses hautes et basses de coûts, en fonction de la vitesse moyenne de vent mesurée à hauteur du moyeu.
Rentabilité des projets éoliens en métropole
en fonction de la vitesse de vent sur le site d'implantation
En métropole, pour une vitesse de vent supérieure ou égale à 6,5 m/s, qui correspond, approximativement, à une installation fonctionnant plus de 2 200 h/an en équivalent pleine puissance, le tarif occasionne une rentabilité des capitaux propres trop importante au regard de ce qui serait nécessaire pour susciter l'investissement dans ces moyens de production, même dans l'hypothèse de coûts la plus défavorable. En comparaison du tarif en vigueur publié en 2001, la modification des tranches tarifaires, à laquelle s'ajoute un doublement de la durée de la première période durant laquelle le tarif est maximal, a plus que compensé l'augmentation des coûts sur la période. Dans la structure envisagée, le tarif applicable sur les dix premières années est fixé à un niveau si élevé que la diminution applicable de la onzième à la quinzième année seulement ne suffit pas à compenser un tel excès.
Le biais du tarif en vigueur, qui permettait à un producteur d'obtenir une meilleure rentabilité de son installation en sous-dimensionnant ses machines (12), est éliminé par l'allongement de la première période tarifaire. Ce biais avait pour inconvénient, à vitesse de vent donnée, de maximiser concomitamment la rentabilité pour l'investisseur et le coût unitaire pour la collectivité et de minimiser les volumes produits. Cependant, l'allongement envisagé de la première période, qui ne s'accompagne d'aucune diminution du tarif en niveau constitue, in fine, un revenu supplémentaire. En première approche, il eût été préférable de déterminer des tarifs haut et bas, à des niveaux indépendants des caractéristiques de l'installation ou du site, et de conditionner le passage de l'un à l'autre au volume de production.
Le nombre de projets déposés en préfecture (13) depuis la publication de l'arrêté tarifaire du 8 juin 2001, pour beaucoup entravés par des difficultés d'acceptation, et la spéculation foncière, matérialisée par la forte augmentation des loyers sur les sites d'implantation, démontrent l'attractivité du tarif en vigueur. Le relèvement envisagé risque d'accroître la pression des investisseurs et d'exacerber les conflits aux dépens du consommateur et de la mission de service public de l'électricité. La Commission de régulation de l'énergie en appelle à une meilleure organisation des procédures d'agrément et souligne l'avantage économique et social dont bénéficierait la collectivité à adapter le rythme et les objectifs de développement de la filière à la capacité d'acceptation locale.
L'ensemble des données qui précèdent conduit la CRE à considérer que le tarif proposé est trop élevé si on le compare aux coûts de la filière éolienne. Dans les conditions de financement et de marché actuelles, même dans l'hypothèse de coûts la plus défavorable, un tarif diminué d'au moins 6 % pour les installations fonctionnant 2 400 h/an (soit 5 EUR/MWh durant les dix premières années) et de 10 % pour les installations fonctionnant 2 600 h/an suffirait à rémunérer les investisseurs.
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