JORF n°172 du 27 juillet 2006

  1. Analyse

Compte tenu de l'hypothèse de financement et du scénario fiscal retenus, le calcul fait apparaître une rentabilité des fonds propres de 20 à 50 % environ pour les installations de méthanisation et de 80 à 100 % pour les installations de valorisation du biogaz de décharge. Cette rentabilité est très supérieure, dans les deux cas, à la rentabilité moyenne des fonds propres des entreprises du secteur. Il apparaît que l'avantage fiscal accroît considérablement la rentabilité du projet.
La rentabilité est particulièrement élevée pour les installations valorisant le biogaz de décharge. L'argument qu'une majoration de la rémunération en regard de celle strictement nécessaire à l'exploitation des installations de valorisation électrique doit inciter l'exploitant à un meilleur captage du biogaz ne saurait être légitimement soutenu, car une telle disposition imposerait au consommateur d'électricité de remédier, en méconnaissance du principe de pollueur-payeur, à la difficulté de l'Etat à faire exécuter, avec toute la rigueur nécessaire, par les exploitants de centres de stockage, l'obligation réglementaire de prise en charge du captage des polluants résultant de leur activité.
Enfin, le tarif applicable au biogaz de décharge présente un biais lié aux variations de la production du biogaz, sur la durée du contrat. Dans la mesure où le niveau de la rémunération est déterminé en fonction de la puissance installée, l'exploitant est incité à sous-dimensionner son installation au regard de la ressource disponible, afin d'en optimiser la rentabilité.

V. - CONSÉQUENCES DU TARIF PROPOSÉ

Les conséquences du tarif proposé sur l'évolution des charges de service public sont évaluées au regard des objectifs de développement de la filière à l'horizon 2015, tels que définis dans le rapport au Parlement du 9 juin 2006 relatif à la programmation pluriannuelle des investissements de production électrique (PPI). Ces objectifs ont été déclinés en scénarios haut et bas, établis conformément au tableau ci-après. Au-delà de 2015, le développement a été estimé pour le scénario bas ; il est considéré achevé pour le scénario haut.

Scénarios de développement de la filière biogaz

Sources : rapport sur la PPI & hypothèses CRE.

La figure suivante présente le surcoût d'achat cumulé dû au tarif proposé, en euros constants 2006, pour chacun des deux scénarios envisagés, sur la base de prix de marché de 35 /MWh et 45 EUR/MWh sur la période.

Evolution du surcoût annuel dû au tarif proposé
pour la filière biogaz (hypothèses hautes et basses)

Le développement de la filière sous les nouvelles conditions tarifaires proposées induirait, a minima, un surcoût annuel d'environ 10 M à l'horizon 2015. Le strict respect des objectifs hauts prévus par le rapport sur la PPI conduirait à un montant de 25 M dès 2010 et de 100 MEUR en 2015.
Ces conditions tarifaires sont susceptibles d'entraîner une augmentation non négligeable du coût du service public de l'électricité, malgré une production relativement faible (< 1,2 TWh). La contribution unitaire, due au soutien à la filière biogaz par le tarif proposé, pourrait, ainsi, représenter 0,25 EUR/MWh environ dès 2015.

VI. - AVIS DE LA CRE

Le tarif proposé augmente substantiellement par rapport au tarif actuellement en vigueur.
Analyse du gain pour la collectivité :
Que l'énergie issue de la valorisation du biogaz se substitue à celle produite par une centrale nucléaire, une centrale au gaz fonctionnant en cycle combiné ou une centrale au charbon de technologie moderne, le tarif d'achat proposé est très supérieur aux coûts et externalités environnementales évités.
En Corse, dans les DOM et à Mayotte, où une part importante de la production d'électricité est assurée par des centrales au charbon et au fuel de faible puissance, relativement coûteuses et polluantes, le développement de la production d'électricité à partir de biogaz pourrait représenter une économie dès aujourd'hui, tout en réduisant le coût de la péréquation tarifaire dans ces zones.
Du fait des caractéristiques du parc de production national, la production d'électricité à partir du biogaz ne contribuera que marginalement à la réduction des émissions françaises de gaz à effet de serre. Or, il existe des alternatives à l'emploi de biogaz, dans les transports ou en réinjection dans le réseau de gaz naturel. La CRE recommande une analyse comparative de ces solutions afin d'éviter qu'un tarif excessivement élevé, soutenu par la contribution financière des consommateurs d'électricité, ne détourne cette ressource d'usages où son emploi s'avérerait plus pertinent.
Au surplus, la CRE relève que ce projet d'arrêté imposerait au consommateur d'électricité de prendre en charge le traitement de polluants ou la réduction des impacts environnementaux de secteurs d'activités auxquels il est étranger, en méconnaissance du principe de pollueur-payeur.
Analyse de la rentabilité :
Compte tenu des conditions de financement accessibles aux groupes industriels concernés et des dispositifs fiscaux très favorables, le tarif occasionne une rentabilité des fonds propres, après impôts, très importante : de l'ordre de 20 à 50 % par an pour les installations de méthanisation de déchets ménagers et de 80 à 100 % pour les installations valorisant le biogaz de décharge, garantie sur 15 ans.
La CRE recommande, donc, pour l'élaboration des tarifs d'achat une meilleure prise en compte des dispositifs fiscaux et des conditions de financement dont bénéficient les entreprises du secteur.
Conséquences sur les charges de service public :
Compte tenu de perspectives de développement limitées par le gisement disponible, l'impact du tarif proposé sur les charges de service public resterait contenu entre 10 et 90 millions d'euros par an, en 2015, soit une augmentation maximale de 0,25 EUR/MWh de la contribution unitaire, actuellement fixée à 4,5 EUR/MWh.

*
* *

Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, la Commission de régulation de l'énergie considère que le tarif proposé, qui s'ajoute à l'ensemble des dispositifs fiscaux en vigueur, constitue un soutien à la filière biogaz très supérieur au bénéfice attendu. Il pourrait conduire, de surcroît, à faire financer par le consommateur d'électricité l'élimination de polluants issus de la filière « déchets » et la réduction des impacts environnementaux du secteur des services énergétiques aux entreprises et aux collectivités, en méconnaissance du principe de pollueur-payeur.
Elle émet, en conséquence, un avis défavorable sur ce projet d'arrêté.
Fait à Paris, le 29 juin 2006.


Historique des versions

Version 1

2. Analyse

Compte tenu de l'hypothèse de financement et du scénario fiscal retenus, le calcul fait apparaître une rentabilité des fonds propres de 20 à 50 % environ pour les installations de méthanisation et de 80 à 100 % pour les installations de valorisation du biogaz de décharge. Cette rentabilité est très supérieure, dans les deux cas, à la rentabilité moyenne des fonds propres des entreprises du secteur. Il apparaît que l'avantage fiscal accroît considérablement la rentabilité du projet.

La rentabilité est particulièrement élevée pour les installations valorisant le biogaz de décharge. L'argument qu'une majoration de la rémunération en regard de celle strictement nécessaire à l'exploitation des installations de valorisation électrique doit inciter l'exploitant à un meilleur captage du biogaz ne saurait être légitimement soutenu, car une telle disposition imposerait au consommateur d'électricité de remédier, en méconnaissance du principe de pollueur-payeur, à la difficulté de l'Etat à faire exécuter, avec toute la rigueur nécessaire, par les exploitants de centres de stockage, l'obligation réglementaire de prise en charge du captage des polluants résultant de leur activité.

Enfin, le tarif applicable au biogaz de décharge présente un biais lié aux variations de la production du biogaz, sur la durée du contrat. Dans la mesure où le niveau de la rémunération est déterminé en fonction de la puissance installée, l'exploitant est incité à sous-dimensionner son installation au regard de la ressource disponible, afin d'en optimiser la rentabilité.

V. - CONSÉQUENCES DU TARIF PROPOSÉ

Les conséquences du tarif proposé sur l'évolution des charges de service public sont évaluées au regard des objectifs de développement de la filière à l'horizon 2015, tels que définis dans le rapport au Parlement du 9 juin 2006 relatif à la programmation pluriannuelle des investissements de production électrique (PPI). Ces objectifs ont été déclinés en scénarios haut et bas, établis conformément au tableau ci-après. Au-delà de 2015, le développement a été estimé pour le scénario bas ; il est considéré achevé pour le scénario haut.

Scénarios de développement de la filière biogaz

Sources : rapport sur la PPI & hypothèses CRE.

La figure suivante présente le surcoût d'achat cumulé dû au tarif proposé, en euros constants 2006, pour chacun des deux scénarios envisagés, sur la base de prix de marché de 35 /MWh et 45 EUR/MWh sur la période.

Evolution du surcoût annuel dû au tarif proposé

pour la filière biogaz (hypothèses hautes et basses)

Le développement de la filière sous les nouvelles conditions tarifaires proposées induirait, a minima, un surcoût annuel d'environ 10 M à l'horizon 2015. Le strict respect des objectifs hauts prévus par le rapport sur la PPI conduirait à un montant de 25 M dès 2010 et de 100 MEUR en 2015.

Ces conditions tarifaires sont susceptibles d'entraîner une augmentation non négligeable du coût du service public de l'électricité, malgré une production relativement faible (< 1,2 TWh). La contribution unitaire, due au soutien à la filière biogaz par le tarif proposé, pourrait, ainsi, représenter 0,25 EUR/MWh environ dès 2015.

VI. - AVIS DE LA CRE

Le tarif proposé augmente substantiellement par rapport au tarif actuellement en vigueur.

Analyse du gain pour la collectivité :

Que l'énergie issue de la valorisation du biogaz se substitue à celle produite par une centrale nucléaire, une centrale au gaz fonctionnant en cycle combiné ou une centrale au charbon de technologie moderne, le tarif d'achat proposé est très supérieur aux coûts et externalités environnementales évités.

En Corse, dans les DOM et à Mayotte, où une part importante de la production d'électricité est assurée par des centrales au charbon et au fuel de faible puissance, relativement coûteuses et polluantes, le développement de la production d'électricité à partir de biogaz pourrait représenter une économie dès aujourd'hui, tout en réduisant le coût de la péréquation tarifaire dans ces zones.

Du fait des caractéristiques du parc de production national, la production d'électricité à partir du biogaz ne contribuera que marginalement à la réduction des émissions françaises de gaz à effet de serre. Or, il existe des alternatives à l'emploi de biogaz, dans les transports ou en réinjection dans le réseau de gaz naturel. La CRE recommande une analyse comparative de ces solutions afin d'éviter qu'un tarif excessivement élevé, soutenu par la contribution financière des consommateurs d'électricité, ne détourne cette ressource d'usages où son emploi s'avérerait plus pertinent.

Au surplus, la CRE relève que ce projet d'arrêté imposerait au consommateur d'électricité de prendre en charge le traitement de polluants ou la réduction des impacts environnementaux de secteurs d'activités auxquels il est étranger, en méconnaissance du principe de pollueur-payeur.

Analyse de la rentabilité :

Compte tenu des conditions de financement accessibles aux groupes industriels concernés et des dispositifs fiscaux très favorables, le tarif occasionne une rentabilité des fonds propres, après impôts, très importante : de l'ordre de 20 à 50 % par an pour les installations de méthanisation de déchets ménagers et de 80 à 100 % pour les installations valorisant le biogaz de décharge, garantie sur 15 ans.

La CRE recommande, donc, pour l'élaboration des tarifs d'achat une meilleure prise en compte des dispositifs fiscaux et des conditions de financement dont bénéficient les entreprises du secteur.

Conséquences sur les charges de service public :

Compte tenu de perspectives de développement limitées par le gisement disponible, l'impact du tarif proposé sur les charges de service public resterait contenu entre 10 et 90 millions d'euros par an, en 2015, soit une augmentation maximale de 0,25 EUR/MWh de la contribution unitaire, actuellement fixée à 4,5 EUR/MWh.

*

* *

Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, la Commission de régulation de l'énergie considère que le tarif proposé, qui s'ajoute à l'ensemble des dispositifs fiscaux en vigueur, constitue un soutien à la filière biogaz très supérieur au bénéfice attendu. Il pourrait conduire, de surcroît, à faire financer par le consommateur d'électricité l'élimination de polluants issus de la filière « déchets » et la réduction des impacts environnementaux du secteur des services énergétiques aux entreprises et aux collectivités, en méconnaissance du principe de pollueur-payeur.

Elle émet, en conséquence, un avis défavorable sur ce projet d'arrêté.

Fait à Paris, le 29 juin 2006.