JORF n°172 du 27 juillet 2006

La CRE a été saisie, le 7 juin 2006, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et par le ministre délégué à l'industrie, d'un projet d'arrêté fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000.

I. - CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

  1. Contexte législatif et réglementaire
    1.1. Cadre communautaire

La politique européenne dans le domaine de l'environnement est définie au titre XIX du traité instituant la Communauté européenne. En matière de financement, elle établit le principe de pollueur-payeur.
Les critères de compatibilité des dispositifs de financement public avec le marché commun sont précisés par un encadrement communautaire des aides d'Etat pour la protection de l'environnement (2001/C 37/03). Dans le domaine des aides au fonctionnement accordées aux énergies renouvelables, quatre options sont admises :
- une aide correspondant à l'écart entre le coût de production et le prix de marché de l'énergie en cause, ne pouvant excéder l'aide nécessaire pour assurer l'amortissement des installations augmentée d'une « juste » rémunération du capital ;
- une aide basée sur des mécanismes de marché tels que, par exemple, les certificats verts ;
- une aide au fonctionnement calculée sur la base des coûts externes évités, plafonnée à 5 cEUR/kWh ;
- une aide conforme aux dispositions générales.
Le dispositif d'obligation d'achat envisagé apparaît conforme à cet encadrement, pour autant que le financement des aides soit bien supporté par les secteurs économiques à l'origine de la pollution et que le niveau du soutien prévu corresponde bien au strict apport nécessaire pour assurer l'amortissement des installations, augmenté d'une juste rémunération du capital.

1.2. Cadre législatif et réglementaire national

Les projets d'arrêtés fixant les conditions d'achat sont pris en application de l'article 10 de la loi 2000-108 du 10 février 2000, modifié par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 et du décret n° 2001-410 du 10 mai 2001. L'article 10 de la loi prévoit que, pour chacune des filières, le tarif d'achat est égal aux coûts d'investissement et d'exploitation évités aux acheteurs, auxquels peut s'ajouter une prime prenant en compte la contribution de la production livrée ou des filières à la réalisation des objectifs définis au deuxième alinéa de l'article 1er de la même loi, soit :
- l'indépendance et la sécurité d'approvisionnement ;
- la qualité de l'air et la lutte contre l'effet de serre ;
- la gestion optimale et le développement des ressources nationales ;
- la maîtrise de la demande d'énergie ;
- la compétitivité de l'activité économique ;
- la maîtrise des choix technologiques d'avenir ;
- l'utilisation rationnelle de l'énergie.
Comme il n'existe pas d'approche rationnelle permettant d'évaluer la plupart des contributions à ces objectifs, la loi laisse au pouvoir réglementaire une marge d'appréciation très importante, qui rend difficile l'analyse du tarif proposé.
De surcroît, la loi dispose que le niveau de la prime ne peut conduire à ce que la rémunération des capitaux immobilisés dans les installations bénéficiant de ces conditions d'achat excède une rémunération normale des capitaux, compte tenu des risques inhérents à ces activités et de la garantie dont bénéficient ces installations d'écouler l'intégralité de leur production à un tarif déterminé.

  1. Détermination des coûts évités aux acheteurs

L'article 5 de la loi du 10 février 2000 prévoit que, pour la prise en compte des surcoûts résultant des dispositions de l'article 10 dans la compensation des charges de service public, en France continentale, les coûts évités aux acheteurs sont calculés par référence aux prix de marché de l'électricité ou, pour les distributeurs non nationalisés, par référence aux tarifs de cession, à proportion de la part de l'électricité acquise à ces tarifs dans leur approvisionnement total.
Cette méthode, qui porte sur une seule année et sur des quantités d'électricité constatées, ne saurait suffire à évaluer les tarifs d'achat. En effet, les tarifs examinés sont appelés à être appliqués sur une longue période (12 à 20 ans), et les arrêtés tarifaires eux-mêmes n'ont pas de limite dans le temps, alors que les prix de marché disponibles sont concentrés sur les courts et moyens termes. Le calcul à partir des prix de marché s'avère donc impossible, d'autant qu'il requiert d'émettre des hypothèses, sur de très longues périodes, sur les quantités installées et leur impact sur les prix. Il aurait nécessité, en outre, d'adopter des références distinctes pour le cas où l'acheteur est EDF ou un distributeur non nationalisé bénéficiant du tarif de cession.
Ainsi, pour l'évaluation des coûts évités aux acheteurs sur la durée d'exécution des contrats, il convient de déterminer à quelle technologie se substituent les moyens de production bénéficiant de l'obligation d'achat.

2.1. Description des technologies auxquelles se substituent les installations de production
bénéficiant de l'obligation d'achat
2.1.1. En France continentale

En France continentale, se référer au nucléaire permet de tenir compte de la structure réelle du parc de production national dans les quinze prochaines années, composé majoritairement de nucléaire et d'hydraulique, et d'une hypothèse de renouvellement par du nucléaire au-delà.
Se référer au cycle combiné au gaz ou à une centrale au charbon revient à se fonder sur une hypothèse de renouvellement à long terme (15-25 ans) du parc de production français qui se réaliserait, au moins en partie, avec la technologie du cycle combiné au gaz ou de la centrale au charbon, en fonction de l'évolution comparée du coût des combustibles et de celui des émissions de CO2.

Les coûts de production retenus dans ce qui suit sont fondés sur les hypothèses de coûts publiées en 2003 par la direction de la demande et des marchés énergétiques (DIDEME) du ministère délégué à l'industrie dans le document « Coûts de référence de la production électrique ». Ils ont été mis à jour par la CRE pour prendre en compte l'évolution du prix des combustibles. Le taux d'actualisation retenu est de 8 % nominal, correspondant au coût moyen pondéré du capital pour les grands électriciens européens. Le régime de fonctionnement retenu, qui conditionne la composante de coût fixe, est un fonctionnement en base.
La centrale au gaz retenue est une unité de 900 MW net, fonctionnant en cycle combiné, dotée d'une efficacité de 57,1 % et implantée à l'écart d'un centre urbain. Le prix du gaz retenu est celui du contrat TROLL (1) en mai 2006. Il s'établit à 23,4 EUR/MWh PCS (2).
La centrale au charbon retenue est une unité de 900 MW net, fonctionnant au charbon pulvérisé, en régime supercritique, dotée d'une efficacité de 43,1 % et implantée à l'écart d'un centre urbain. Le prix du charbon retenu est celui de la référence CIF ARAS (3) en avril 2006. Il s'établit à 53,2 EUR/t.
La technologie de séquestration du CO2 n'est pas étudiée, compte tenu des incertitudes quant à sa disponibilité à l'échelle industrielle, à l'échéance considérée et aux coûts de mise en oeuvre.


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Version 1

La CRE a été saisie, le 7 juin 2006, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et par le ministre délégué à l'industrie, d'un projet d'arrêté fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000.

I. - CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

1. Contexte législatif et réglementaire

1.1. Cadre communautaire

La politique européenne dans le domaine de l'environnement est définie au titre XIX du traité instituant la Communauté européenne. En matière de financement, elle établit le principe de pollueur-payeur.

Les critères de compatibilité des dispositifs de financement public avec le marché commun sont précisés par un encadrement communautaire des aides d'Etat pour la protection de l'environnement (2001/C 37/03). Dans le domaine des aides au fonctionnement accordées aux énergies renouvelables, quatre options sont admises :

- une aide correspondant à l'écart entre le coût de production et le prix de marché de l'énergie en cause, ne pouvant excéder l'aide nécessaire pour assurer l'amortissement des installations augmentée d'une « juste » rémunération du capital ;

- une aide basée sur des mécanismes de marché tels que, par exemple, les certificats verts ;

- une aide au fonctionnement calculée sur la base des coûts externes évités, plafonnée à 5 cEUR/kWh ;

- une aide conforme aux dispositions générales.

Le dispositif d'obligation d'achat envisagé apparaît conforme à cet encadrement, pour autant que le financement des aides soit bien supporté par les secteurs économiques à l'origine de la pollution et que le niveau du soutien prévu corresponde bien au strict apport nécessaire pour assurer l'amortissement des installations, augmenté d'une juste rémunération du capital.

1.2. Cadre législatif et réglementaire national

Les projets d'arrêtés fixant les conditions d'achat sont pris en application de l'article 10 de la loi 2000-108 du 10 février 2000, modifié par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 et du décret n° 2001-410 du 10 mai 2001. L'article 10 de la loi prévoit que, pour chacune des filières, le tarif d'achat est égal aux coûts d'investissement et d'exploitation évités aux acheteurs, auxquels peut s'ajouter une prime prenant en compte la contribution de la production livrée ou des filières à la réalisation des objectifs définis au deuxième alinéa de l'article 1er de la même loi, soit :

- l'indépendance et la sécurité d'approvisionnement ;

- la qualité de l'air et la lutte contre l'effet de serre ;

- la gestion optimale et le développement des ressources nationales ;

- la maîtrise de la demande d'énergie ;

- la compétitivité de l'activité économique ;

- la maîtrise des choix technologiques d'avenir ;

- l'utilisation rationnelle de l'énergie.

Comme il n'existe pas d'approche rationnelle permettant d'évaluer la plupart des contributions à ces objectifs, la loi laisse au pouvoir réglementaire une marge d'appréciation très importante, qui rend difficile l'analyse du tarif proposé.

De surcroît, la loi dispose que le niveau de la prime ne peut conduire à ce que la rémunération des capitaux immobilisés dans les installations bénéficiant de ces conditions d'achat excède une rémunération normale des capitaux, compte tenu des risques inhérents à ces activités et de la garantie dont bénéficient ces installations d'écouler l'intégralité de leur production à un tarif déterminé.

2. Détermination des coûts évités aux acheteurs

L'article 5 de la loi du 10 février 2000 prévoit que, pour la prise en compte des surcoûts résultant des dispositions de l'article 10 dans la compensation des charges de service public, en France continentale, les coûts évités aux acheteurs sont calculés par référence aux prix de marché de l'électricité ou, pour les distributeurs non nationalisés, par référence aux tarifs de cession, à proportion de la part de l'électricité acquise à ces tarifs dans leur approvisionnement total.

Cette méthode, qui porte sur une seule année et sur des quantités d'électricité constatées, ne saurait suffire à évaluer les tarifs d'achat. En effet, les tarifs examinés sont appelés à être appliqués sur une longue période (12 à 20 ans), et les arrêtés tarifaires eux-mêmes n'ont pas de limite dans le temps, alors que les prix de marché disponibles sont concentrés sur les courts et moyens termes. Le calcul à partir des prix de marché s'avère donc impossible, d'autant qu'il requiert d'émettre des hypothèses, sur de très longues périodes, sur les quantités installées et leur impact sur les prix. Il aurait nécessité, en outre, d'adopter des références distinctes pour le cas où l'acheteur est EDF ou un distributeur non nationalisé bénéficiant du tarif de cession.

Ainsi, pour l'évaluation des coûts évités aux acheteurs sur la durée d'exécution des contrats, il convient de déterminer à quelle technologie se substituent les moyens de production bénéficiant de l'obligation d'achat.

2.1. Description des technologies auxquelles se substituent les installations de production

bénéficiant de l'obligation d'achat

2.1.1. En France continentale

En France continentale, se référer au nucléaire permet de tenir compte de la structure réelle du parc de production national dans les quinze prochaines années, composé majoritairement de nucléaire et d'hydraulique, et d'une hypothèse de renouvellement par du nucléaire au-delà.

Se référer au cycle combiné au gaz ou à une centrale au charbon revient à se fonder sur une hypothèse de renouvellement à long terme (15-25 ans) du parc de production français qui se réaliserait, au moins en partie, avec la technologie du cycle combiné au gaz ou de la centrale au charbon, en fonction de l'évolution comparée du coût des combustibles et de celui des émissions de CO2.

Les coûts de production retenus dans ce qui suit sont fondés sur les hypothèses de coûts publiées en 2003 par la direction de la demande et des marchés énergétiques (DIDEME) du ministère délégué à l'industrie dans le document « Coûts de référence de la production électrique ». Ils ont été mis à jour par la CRE pour prendre en compte l'évolution du prix des combustibles. Le taux d'actualisation retenu est de 8 % nominal, correspondant au coût moyen pondéré du capital pour les grands électriciens européens. Le régime de fonctionnement retenu, qui conditionne la composante de coût fixe, est un fonctionnement en base.

La centrale au gaz retenue est une unité de 900 MW net, fonctionnant en cycle combiné, dotée d'une efficacité de 57,1 % et implantée à l'écart d'un centre urbain. Le prix du gaz retenu est celui du contrat TROLL (1) en mai 2006. Il s'établit à 23,4 EUR/MWh PCS (2).

La centrale au charbon retenue est une unité de 900 MW net, fonctionnant au charbon pulvérisé, en régime supercritique, dotée d'une efficacité de 43,1 % et implantée à l'écart d'un centre urbain. Le prix du charbon retenu est celui de la référence CIF ARAS (3) en avril 2006. Il s'établit à 53,2 EUR/t.

La technologie de séquestration du CO2 n'est pas étudiée, compte tenu des incertitudes quant à sa disponibilité à l'échelle industrielle, à l'échéance considérée et aux coûts de mise en oeuvre.