JORF n°0089 du 17 avril 2018

ANNEXE 2
OÙ EN EST L'ÉCART DE PRODUCTION EN FRANCE ?

En principe, l'écart de production évalue la capacité de l'appareil productif à répondre à la demande sans tensions sur les facteurs d'offre, c'est-à-dire notamment sans tensions sur les prix. En pratique, les mesures de l'écart de production tentent de matérialiser le lien théorique entre ces tensions et l'accélération des prix ou l'écart entre l'inflation et la cible des banques centrales. Toutefois, depuis la crise, la corrélation empirique n'est plus aussi nettement vérifiée, remettant en question les modalités de cette relation.
Selon qu'on examine le niveau de l'inflation (nettement inférieure à la cible de la BCE) et l'augmentation des salaires nominaux ou leurs variations (et notamment la remontée de l'inflation sous-jacente, en début d'année 2018), il n'apparaît que la production française ait encore atteint son potentiel.
Par ailleurs, des écarts significatifs existent entre les évaluations de l'écart de production par les différentes institutions, mais également entre les évaluations successives d'une même institution pour une année donnée (12), en raison notamment de la dépendance inévitable des méthodes utilisées aux dernières observations disponibles. De ce fait, l'estimation de l'écart de production courant peut faire l'objet de révisions substantielles a posteriori.
Les estimations de l'écart de production peuvent être rapprochées d'indicateurs qui présentent une relation avec le cycle économique. Leur analyse directe peut apporter un éclairage utile sur la situation à court terme, à l'aune de leurs caractéristiques économiques et de leurs performances historiques. A moyen terme, a dynamique des facteurs de production peut permettre, le cas échéant, d'atténuer les contraintes.
Parmi les indicateurs conjoncturels analysés, certains sont explicitement des indicateurs de tensions sur l'appareil de production : taux d'utilisation des capacités, goulots de production, difficultés de recrutement. Ils sont corrélés à l'écart entre la production effective et la production soutenable à court terme ; ils portent essentiellement sur l'industrie. Quoique plus volatils que l'écart de production, ces indicateurs paraissent en pratique corrélés au cycle économique, voire légèrement en avance de phase. En 2017, ils se sont établis nettement au-dessus de leur moyenne de long terme, quelques-uns approchant même de leurs plus hauts niveaux historiques. Ces indicateurs peuvent conduire à considérer que l'économie française est plus proche de la fermeture de son écart de production qu'estimé jusqu'à présent, voire que celui-ci est déjà positif.
Cette situation s'est de fait déjà produite en 2000 et en 2007. En septembre 2000, le FMI estimait l'écart de production courant de la France à -0,6 point de PIB (contre +1,2 aujourd'hui), alors que les indicateurs de tension s'étaient très nettement et largement redressés à partir du second semestre 1999, atteignant les niveaux les plus hauts jamais constatés. En 2007, la Commission européenne estimait, dans ses prévisions d'automne, l'écart de production de la France à -0,3 point de PIB pour l'année en cours, alors que les indicateurs de tension sur l'appareil productif s'établissaient à des niveaux élevés depuis le second semestre 2006 et de plus en plus élevés au cours de 2007. Depuis, l'estimation de l'écart de production pour 2007 a été largement révisé par la Commission européenne, qui l'évalue aujourd'hui à 2,9 points de PIB.
D'autres indicateurs issus d'enquêtes de conjoncture, qui ne sont pas directement des mesures de tensions, sont empiriquement corrélés au cycle ou à l'activité au cours du cycle ; c'est le cas des indicateurs de climat des affaires ou des ESI (Economic Sentiment Indicator), sectoriels et agrégés. Plutôt que de l'écart de production, ils semblent représentatifs de la croissance (en écart à la croissance potentielle), donc de la vitesse de fermeture de l'écart de production. Historiquement, les indicateurs du climat des affaires sont en phase avec le cycle de croissance. Ils ont atteint en 2017 des niveaux proches de leurs pics passés.
En Allemagne, l'indicateur agrégé de climat des affaires s'établit depuis 2014 à un niveau supérieur à sa moyenne de long terme Dans le même temps, le taux d'utilisation des capacités a fortement progressé pour se rapprocher de son niveau le plus élevé. Jusqu'à présent, ce niveau élevé des taux d'utilisation des capacités ne semble toutefois pas avoir pesé sur la croissance allemande.

Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page

(12) Comme le Haut Conseil l'a rappelé en septembre 2017 dans son avis sur le projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022.


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ANNEXE 2

OÙ EN EST L'ÉCART DE PRODUCTION EN FRANCE ?

En principe, l'écart de production évalue la capacité de l'appareil productif à répondre à la demande sans tensions sur les facteurs d'offre, c'est-à-dire notamment sans tensions sur les prix. En pratique, les mesures de l'écart de production tentent de matérialiser le lien théorique entre ces tensions et l'accélération des prix ou l'écart entre l'inflation et la cible des banques centrales. Toutefois, depuis la crise, la corrélation empirique n'est plus aussi nettement vérifiée, remettant en question les modalités de cette relation.

Selon qu'on examine le niveau de l'inflation (nettement inférieure à la cible de la BCE) et l'augmentation des salaires nominaux ou leurs variations (et notamment la remontée de l'inflation sous-jacente, en début d'année 2018), il n'apparaît que la production française ait encore atteint son potentiel.

Par ailleurs, des écarts significatifs existent entre les évaluations de l'écart de production par les différentes institutions, mais également entre les évaluations successives d'une même institution pour une année donnée (12), en raison notamment de la dépendance inévitable des méthodes utilisées aux dernières observations disponibles. De ce fait, l'estimation de l'écart de production courant peut faire l'objet de révisions substantielles a posteriori.

Les estimations de l'écart de production peuvent être rapprochées d'indicateurs qui présentent une relation avec le cycle économique. Leur analyse directe peut apporter un éclairage utile sur la situation à court terme, à l'aune de leurs caractéristiques économiques et de leurs performances historiques. A moyen terme, a dynamique des facteurs de production peut permettre, le cas échéant, d'atténuer les contraintes.

Parmi les indicateurs conjoncturels analysés, certains sont explicitement des indicateurs de tensions sur l'appareil de production : taux d'utilisation des capacités, goulots de production, difficultés de recrutement. Ils sont corrélés à l'écart entre la production effective et la production soutenable à court terme ; ils portent essentiellement sur l'industrie. Quoique plus volatils que l'écart de production, ces indicateurs paraissent en pratique corrélés au cycle économique, voire légèrement en avance de phase. En 2017, ils se sont établis nettement au-dessus de leur moyenne de long terme, quelques-uns approchant même de leurs plus hauts niveaux historiques. Ces indicateurs peuvent conduire à considérer que l'économie française est plus proche de la fermeture de son écart de production qu'estimé jusqu'à présent, voire que celui-ci est déjà positif.

Cette situation s'est de fait déjà produite en 2000 et en 2007. En septembre 2000, le FMI estimait l'écart de production courant de la France à -0,6 point de PIB (contre +1,2 aujourd'hui), alors que les indicateurs de tension s'étaient très nettement et largement redressés à partir du second semestre 1999, atteignant les niveaux les plus hauts jamais constatés. En 2007, la Commission européenne estimait, dans ses prévisions d'automne, l'écart de production de la France à -0,3 point de PIB pour l'année en cours, alors que les indicateurs de tension sur l'appareil productif s'établissaient à des niveaux élevés depuis le second semestre 2006 et de plus en plus élevés au cours de 2007. Depuis, l'estimation de l'écart de production pour 2007 a été largement révisé par la Commission européenne, qui l'évalue aujourd'hui à 2,9 points de PIB.

D'autres indicateurs issus d'enquêtes de conjoncture, qui ne sont pas directement des mesures de tensions, sont empiriquement corrélés au cycle ou à l'activité au cours du cycle ; c'est le cas des indicateurs de climat des affaires ou des ESI (Economic Sentiment Indicator), sectoriels et agrégés. Plutôt que de l'écart de production, ils semblent représentatifs de la croissance (en écart à la croissance potentielle), donc de la vitesse de fermeture de l'écart de production. Historiquement, les indicateurs du climat des affaires sont en phase avec le cycle de croissance. Ils ont atteint en 2017 des niveaux proches de leurs pics passés.

En Allemagne, l'indicateur agrégé de climat des affaires s'établit depuis 2014 à un niveau supérieur à sa moyenne de long terme Dans le même temps, le taux d'utilisation des capacités a fortement progressé pour se rapprocher de son niveau le plus élevé. Jusqu'à présent, ce niveau élevé des taux d'utilisation des capacités ne semble toutefois pas avoir pesé sur la croissance allemande.

Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page

(12) Comme le Haut Conseil l'a rappelé en septembre 2017 dans son avis sur le projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022.