JORF n°0088 du 14 avril 2016

Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement le 5 avril 2016, en application de l'article 17 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, établi au titre de la coordination des politiques économiques des Etats membres de l'Union européenne. Le Haut Conseil a adopté, après en avoir délibéré lors de ses séances du 8 et du 12 avril 2016, le présent avis.

Synthèse

Après deux années de stagnation en 2013 et 2014, la zone euro connaît depuis un an une reprise modérée (à un rythme annuel légèrement supérieur à 1,5 %).
Ce regain de croissance s'explique par trois évolutions concomitantes : la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l'euro et la réduction des ajustements budgétaires. La politique monétaire est, en outre, de plus en plus expansive, et les taux d'intérêt sont, en conséquence, exceptionnellement bas. Enfin les tensions sur les marchés et sur les conditions de crédit qui pénalisaient les pays périphériques de la zone euro se sont nettement apaisées.
La reprise européenne pourrait toutefois ne pas résister à une nouvelle aggravation de la conjoncture extra-européenne (fléchissement de la croissance chinoise, difficultés des pays producteurs de pétrole, risques pesant sur la capacité de l'économie américaine à maintenir son rythme de croissance à moyen terme) ou à l'apparition de certains freins en Europe même (restauration des contrôles aux frontières ; éventuelle sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne ; risques géopolitiques et menaces terroristes).
Les prévisions de croissance présentées par le Gouvernement sont inchangées par rapport au projet de loi de finances pour 2016 en ce qui concerne l'année 2016 (1,5 %) et par rapport à celles du programme de stabilité d'avril 2015 en ce qui concerne les années 2017-2018 (respectivement à 1,5 % et 1 ¾ %). Pour 2019, la croissance prévue est de 1,9 %.
S'agissant de 2016, le Haut Conseil considère que la prévision de croissance du Gouvernement, tout en se situant en haut de la fourchette des prévisions économiques, est encore atteignable. Il estime un peu élevée la prévision du Gouvernement d'une augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016. La révision à la baisse de la prévision d'inflation opérée par le Gouvernement lui paraît justifiée et la hausse des prix à la consommation en moyenne annuelle devrait être à peu près nulle en 2016.
S'agissant de 2017 à 2019, le Haut Conseil estime que le scénario de croissance du PIB est plausible, même si l'hypothèse d'accélération de l'activité en fin de période est fragile. Il souligne aussi l'importance des risques affectant ce scénario, qu'ils concernent la croissance mondiale ou qu'ils portent plus spécifiquement sur la zone euro.
Toutefois, la croissance potentielle présentée par le Gouvernement lui paraît surévaluée, en particulier en 2016-2017, et le maintien d'un écart de production important tout au long de la période peu vraisemblable.
Le Haut Conseil considère que cet écart de production important, supérieur à la plupart des estimations existantes, tend à majorer la composante conjoncturelle du déficit, et donc à sous-estimer le déficit structurel. Il souligne que cette sous-estimation amplifie en apparence l'effort structurel déjà réalisé et minimise l'effort à engager pour atteindre l'équilibre des finances publiques à moyen terme.

Observations liminaires

  1. Sur le périmètre du présent avis
    Aux termes de l'article 17 de la loi organique du 17 décembre 2012, le Haut Conseil des finances publiques est saisi pour avis des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le programme de stabilité.
    Le présent avis ne porte donc pas sur le scénario de finances publiques lui-même. Toutefois, en raison de l'impact des finances publiques sur la croissance à court comme à moyen termes, le Haut Conseil doit tenir compte, pour apprécier la cohérence du scénario macroéconomique qui lui est présenté, d'éléments relatifs à la trajectoire de finances publiques.
  2. Sur les informations transmises
    Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, le 5 avril 2016, du cadrage macroéconomique du projet de programme de stabilité. Cette saisine a été accompagnée de réponses détaillées à un questionnaire qui avait été adressé au préalable par le Haut Conseil aux administrations compétentes.
  3. Sur la méthode utilisée par le Haut Conseil
    Pour apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité, le Haut Conseil a examiné les hypothèses retenues ainsi que les enchaînements économiques attendus jusqu'à l'horizon de la prévision. Il s'est fondé sur les dernières statistiques disponibles et sur les informations qui lui ont été communiquées concernant les mesures de politique économique décidées par le Gouvernement à la date de publication du présent avis.
    Le Haut Conseil s'est appuyé sur les dernières prévisions produites par un ensemble d'organismes comprenant des institutions internationales - la Commission européenne, le Fonds monétaire international (FMI) et l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) -, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la Banque de France et des instituts de conjoncture tels que COE-Rexecode et l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
    Il a par ailleurs procédé, comme le permet l'article 18 de la loi organique, à des auditions des représentants des administrations compétentes (direction générale du Trésor, direction du budget), de l'INSEE ainsi que d'organismes et experts extérieurs à l'administration des finances (1).

Après une analyse du contexte général - une reprise européenne modérée et une croissance mondiale ralentie - (I), le Haut Conseil formule son appréciation des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de programme de stabilité du Gouvernement pour 2016 (II) ainsi que pour les années 2017 à 2019 (III).

I. - Le contexte : une reprise européenne modérée, une croissance mondiale ralentie

Le Haut Conseil observe une reprise modérée dans la zone euro depuis un an (1), confortée par de nouveaux éléments de soutien à la croissance au cours des derniers mois (2), mais dans un contexte de menaces sur la croissance mondiale (3).

  1. Une reprise modérée dans la zone euro depuis un an
    Après deux années de stagnation en 2013 et 2014, la zone euro connaît depuis un an une reprise modérée (à un rythme annuel légèrement supérieur à 1,5 %).
    Ce regain de croissance s'explique par trois évolutions concomitantes : la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l'euro et la réduction des ajustements budgétaires. La politique monétaire est, en outre, de plus en plus expansive, et les taux d'intérêt sont, en conséquence, exceptionnellement bas. Enfin les tensions sur les marchés et sur les conditions de crédit qui pénalisaient les pays périphériques de la zone euro se sont nettement apaisées.

Vous pouvez consulter l'image dans le fac-similé du
JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

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Ces évolutions se sont traduites par un regain de la demande intérieure qui est le fait majeur de la conjoncture européenne récente. La demande intérieure de la zone euro avait diminué en 2012 et 2013 du fait notamment d'une très forte contraction dans les pays du Sud. Elle progresse désormais à un rythme annuel moyen proche de 2 %, avec des augmentations supérieures à cette moyenne en Espagne, en Allemagne et aux Pays-Bas. Si ce regain porte avant tout sur la consommation, l'investissement y contribue également depuis le début de l'année 2015. En outre, les écarts de croissance entre pays sont moindres que les années précédentes.
Cette reprise de la demande interne s'accompagne d'une accélération des échanges intra-européens et d'une forte augmentation des importations de la zone euro, alors que les exportations de celle-ci sont pénalisées par la morosité de la conjoncture dans le reste du monde. Les échanges extérieurs contribuent donc négativement à la croissance de la zone.
2. De nouveaux éléments de soutien de la croissance au cours des derniers mois
Certains des facteurs favorables à la croissance se sont renforcés dans la période récente. Le prix du pétrole a de nouveau baissé à la fin de 2015 et se situe autour de 40 $ soit environ 15 $ au-dessous du niveau de l'été 2015. Cette baisse supplémentaire se répercute sur les prix à la consommation et contribue à l'amélioration du pouvoir d'achat des ménages et du taux de marge des entreprises.
Les politiques budgétaires en Europe n'exercent plus d'effets restrictifs à court terme. Leur orientation globale devrait être neutre voire faiblement expansive en 2016. Plusieurs pays relâchent leur effort après avoir retrouvé l'équilibre ou ramené leur déficit au-dessous de 3 %. Selon la Commission européenne, les finances publiques auraient en 2016 un effet légèrement expansif en Allemagne, en Italie et aux Pays-Bas et pratiquement neutre en Espagne.
Enfin, la Banque centrale européenne a annoncé le 10 mars dernier un nouvel assouplissement de sa politique monétaire, qui a renforcé les pressions à la baisse sur les taux d'intérêt et leur convergence au sein de la zone euro.
En revanche, le taux de change de l'euro a cessé de se déprécier. Il est même légèrement remonté au cours des dernières semaines.
La croissance de la zone euro pourrait se poursuivre sur plus longue période et dépasser son rythme potentiel, compte tenu de la capacité de rattrapage que suggèrent des écarts de production négatifs dans la plupart des pays de la zone. Toutefois, elle pourrait être affectée par la réalisation de risques majeurs.
3. Des menaces sur la croissance mondiale et des risques propres à la zone euro
La reprise européenne s'est engagée dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale. Elle pourrait ne pas résister à une nouvelle aggravation de la conjoncture extra-européenne ou à l'apparition de certains freins en Europe même.
La croissance du commerce mondial en volume est tombée à des rythmes historiquement très faibles : elle est estimée à environ 2,5 % en 2015, contre 6,5 % par an en moyenne sur les années 2000-2007. Elle ne devrait se redresser que modérément en 2016. Cette faiblesse tient probablement pour partie à l'arrêt de la fragmentation géographique de certains processus de production et peut être le signe d'un affaiblissement des gains de croissance liés aux échanges internationaux.
La croissance chinoise a nettement fléchi et ce ralentissement s'accompagne d'une montée des risques financiers. La situation est très dégradée dans de nombreux pays émergents producteurs de pétrole et d'autres matières premières, particulièrement en Russie et au Brésil où la récession devrait se prolonger.
Aux Etats-Unis, l'économie connaît une croissance modérée proche de 2,5 % par an. Toutefois, dans un contexte de faiblesse des gains de productivité et d'un retour à une situation proche du plein emploi, il existe des incertitudes fortes sur la capacité de l'économie américaine à maintenir son rythme de croissance à moyen terme.
D'autres risques importants pèsent plus spécifiquement sur l'Europe : une restauration des contrôles aux frontières qui pénaliserait les échanges intra-européens ; une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne ; les risques géopolitiques et les menaces terroristes ; l'attentisme lié à certaines échéances électorales… En outre, malgré les renforcements qui sont intervenus ces dernières années en matière de régulation financière, des éléments de fragilité demeurent dans certains pays.
Ces risques sont difficiles à quantifier. Ils appellent à la prudence dans l'appréciation des perspectives de croissance.

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II. - Observations sur les prévisions pour 2016

  1. Le scénario du Gouvernement
    Selon la saisine du Gouvernement, « […] La croissance se renforcerait progressivement en zone euro avec une moindre hétérogénéité des rythmes de croissance au sein de la zone. Les prix du pétrole bas, la dépréciation passée de l'euro et la politique monétaire accommodante de la BCE soutiendraient l'activité, qui accélérerait en 2016 portée par la demande intérieure. »
    S'agissant de la France, « tant les importations que les exportations ralentiraient en 2016 après une année 2015 marquée par un fort dynamisme […]. Au total, la contribution comptable du commerce extérieur serait de - 0,3 point en 2015 et - 0,3 point en 2016 […]. »
    « La reprise de la consommation se poursuivrait en 2016 […] (+1,6 %), dans un contexte d'amélioration des perspectives sur le marché du travail. » […] « La reprise de l'emploi total s'est confirmée en 2015 […] soutenue notamment par le CICE et la mise en œuvre du Pacte de responsabilité. L'emploi accélérerait en 2016 (+ 190 000 en moyenne annuelle), grâce notamment au dispositif “Embauche PME”. »
    « L'investissement des entreprises progresserait plus vivement en 2016 […] qu'en 2015 (+ 3,2 % après + 2,0 %), favorisé par le vif redressement du taux de marge et par les mesures de politique économique, en particulier la mesure de suramortissement des investissements productifs. »
    « Au total, la reprise de l'économie française se confirmerait en 2016 […] (+ 1,5 % […] après + 1,2 % en 2015) […]. L'inflation serait quasi nulle en 2016 (+ 0,1 %) essentiellement du fait de la nouvelle baisse du prix du pétrole jusqu'en mars 2016. »
  2. Appréciation du Haut Conseil
    a) La croissance de l'activité
    La prévision de croissance du Gouvernement, de 1,5 % en 2016, est inchangée par rapport à la prévision associée au projet de loi de finances pour 2016. Sa composition est cependant légèrement modifiée : elle repose désormais davantage sur la constitution des stocks industriels (cf. encadré) alors que la demande des ménages (tant en termes de consommation que d'investissement) ainsi que les exportations ont été révisées à la baisse.

Les incertitudes sur la contribution des stocks

Les comptes trimestriels présentent une contribution de la variation des stocks à la croissance de l'activité de 0,7 point au 3e trimestre et de 0,6 point au 4e trimestre 2015 (après - 0,5 au 2e trimestre), soit une contribution de la variation des stocks à la croissance du PIB de 0,4 point sur l'ensemble de l'année 2015 et un acquis à l'issue du 4e trimestre 2015 pour l'année 2016 de l'ordre de 0,6 à 0,7 point.
Pour l'année 2016, du fait de cet acquis, la prévision du Gouvernement comporte une contribution positive des mouvements de stocks à la croissance en moyenne annuelle de 0,4 point, ce qui la distingue de la plupart des autres prévisions disponibles (notamment de celles des organisations internationales). Elle est néanmoins cohérente avec la note de conjoncture de l'INSEE de mars 2016.
Il est possible que la composition de la croissance en fin d'année 2015 soit révisée au profit d'autres éléments de demande. Au demeurant, des contributions positives des stocks deux années de suite ne sont pas inhabituelles. Elles ont déjà été observées dans le passé à plusieurs reprises et pour des pourcentages plus élevés.

Le Haut Conseil note que le Gouvernement a fortement revu à la baisse son hypothèse d'évolution en volume du commerce mondial pour 2016 par rapport au projet de loi de finances (3,2 % au lieu de 5,2 %) et que celle-ci est désormais proche de celles retenues par les organisations internationales (3,5 % pour la Commission européenne, 3,1 % pour le FMI et 3,3 % pour l'OCDE). Le Haut Conseil avait souligné le caractère optimiste de cette hypothèse dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2016. Le Haut Conseil estime que la stabilisation des parts de marché à l'exportation est une hypothèse crédible compte tenu des gains de compétitivité enregistrés récemment.
La demande intérieure devrait, quant à elle, bénéficier de certaines conditions favorables, en particulier grâce à une augmentation du pouvoir d'achat des ménages dans un contexte de taux d'épargne élevé.
Le redressement du taux de marge des entreprises qui a résulté de la baisse du prix du pétrole et des réductions de prélèvements (impôts et cotisations sociales) améliore la capacité des entreprises à financer leurs projets et pourrait favoriser la reprise de l'investissement.
En septembre dernier, le Haut Conseil avait considéré, dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016, que la prévision de croissance pour 2016 ne pouvait plus être qualifiée de « prudente » (comme elle l'avait été en avril 2015) mais que, compte tenu de la demande interne et européenne, elle demeurait « atteignable ».
Le Gouvernement a maintenu sa prévision alors que les organisations internationales ont généralement révisé les leurs à la baisse depuis l'automne. De ce fait, elle se situe désormais dans le haut de fourchette par rapport aux consensus des économistes (1,3 % selon le Consensus Forecasts de mars) et aux organisations internationales (1,2 % pour l'OCDE, 1,3 % pour la Commission européenne et 1,1 % pour le FMI). Pour leur part, les prévisions des organismes nationaux consultés sont plus contrastées (1,6 % pour l'OFCE et 1,2 % pour COE Rexecode).
Toutefois, la prévision du Gouvernement est compatible avec les derniers comptes trimestriels et avec les prévisions à court terme présentées par l'INSEE dans sa note de conjoncture publiée fin mars (2). Les enquêtes de conjoncture restent bien orientées même si elles sont en léger recul sur les derniers mois.
Au total, le Haut Conseil considère que la prévision de croissance du Gouvernement, tout en se situant en haut de la fourchette des prévisions économiques, est encore atteignable.
b) L'emploi et la masse salariale
La reprise de l'emploi projetée par le Gouvernement est cohérente avec celle de l'activité, mais l'accroissement du nombre d'emplois prévu pour 2016 (+ 130 000 emplois en moyenne annuelle dans le secteur marchand non agricole) semble élevé, en raison notamment d'estimations assez hautes des effets des politiques de l'emploi (CICE, Pacte de responsabilité et de solidarité, prime à l'embauche).
La prévision d'emploi du Gouvernement pour 2016 est ainsi supérieure à ce que laissent attendre les prévisions de l'INSEE pour le 1er semestre (37 000 emplois supplémentaires sur le 1er semestre 2016, sur le même champ).
Pour ce qui est de la masse salariale privée, le Haut Conseil avait considéré comme élevée la prévision d'une augmentation de 2,8 % associée au projet de loi de finances pour 2016. Cette prévision est revue sensiblement à la baisse (à 2,3 %) dans le programme de stabilité.
Elle reste cependant plus élevée que les prévisions de l'Unedic (2,0 % en moyenne annuelle pour 2016) et de l'ACOSS (1,9 % en glissement annuel à l'issue du premier semestre 2016).
Le Haut Conseil estime encore un peu élevée la prévision du Gouvernement d'une augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016.
c) La hausse des prix à la consommation
Dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016, le Haut Conseil avait estimé que la hausse des prix à la consommation pouvait être inférieure à la prévision de 1,0 % alors retenue par le Gouvernement.
Le Gouvernement a nettement révisé à la baisse cette prévision en la ramenant à 0,1 % dans le programme de stabilité d'avril 2016. Cette révision résulte essentiellement de la nouvelle baisse des cours du pétrole observée depuis l'été 2015.
Le glissement annuel des prix est actuellement négatif (- 0,2 % à fin février) et devrait revenir autour de 0 % à la fin du semestre.
Le Haut Conseil considère que la révision à la baisse de la prévision d'inflation opérée par le Gouvernement est justifiée et que la hausse des prix à la consommation en moyenne annuelle devrait être à peu près nulle en 2016.

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III. - Observations sur les prévisions pour les années 2017 à 2019

  1. Le scénario du Gouvernement
    Selon la saisine du Gouvernement, « l'activité progresserait de 1,5 % en 2017, 1¾ % en 2018 puis de 1,9 % en 2019. […] Cette accélération de l'activité ne permettrait qu'une résorption très progressive de l'écart de production, lequel demeurerait encore très creusé à l'horizon de la programmation, témoignant du caractère prudent du scénario de croissance effective. »
    « L'inflation se redresserait en 2017 (+ 1,0 %), notamment sous les effets conjugués de la hausse mécanique de l'inflation volatile (le prix du pétrole et les taux de change étant conventionnellement gelés en prévision) et de l'accroissement de la fiscalité énergétique. […] L'inflation sous-jacente accélérerait également (+ 1,1 % après + 0,8 %), notamment du fait de l'inflation des services, qui serait soutenue par le redémarrage des salaires. Ensuite, l'inflation serait de 1,4 % en 2018 et de 1 ¾ % en 2019. »
  2. Observations sur la croissance potentielle et l'écart de production
    a) Des hypothèses de croissance potentielle élevées
    La croissance potentielle retenue par le Gouvernement (1,5 % pour les deux années 2016 et 2017, puis 1,4 % pour 2018 et 1,3 % pour 2019) est identique pour les années 2015 à 2018 à celle du programme de stabilité d'avril 2015 (3).

Retour sur les hypothèses de croissance potentielle retenues par le Gouvernement

La loi de programmation des finances publiques 2014-2019, votée en décembre 2014, qui s'applique aujourd'hui et sert de référence pour les avis du Haut Conseil, retenait des hypothèses de croissance potentielle qui étaient à l'époque calées sur les estimations de la Commission européenne pour la France (estimations connues en septembre 2014 qui dataient en fait de mai 2014).

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

En avril 2015, c'est-à-dire quelques mois seulement après le vote de la loi de programmation, le Gouvernement a révisé l'estimation de la croissance potentielle à la hausse de 0,2 point pour les années 2016 et suivantes. Le Haut Conseil a signalé, dans son avis du 13 avril 2015 relatif à l'examen du programme de stabilité d'avril 2015 (4), que cette révision de la croissance potentielle quelques mois après son adoption posait un problème de principe.
Cet ajout de 0,2 point représentait selon le Gouvernement l'incidence des réformes structurelles alors engagées et notamment celle de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (dite « loi Macron »). Cette estimation n'a pas été documentée précisément par le Gouvernement.
Le Gouvernement conserve dans le nouveau programme de stabilité les hypothèses du programme précédent. De son côté, la Commission européenne a révisé ses estimations pour la France à la baisse depuis 2014, de 0,2 point pour 2016 et de 0,1 point pour 2017.

Le Haut Conseil observe que la croissance potentielle présentée par le Gouvernement (1,5 % pour les deux années 2016 et 2017) est désormais nettement supérieure aux estimations des organisations internationales (situées entre 1,1 % et 1,2 % pour les années 2016-2017), comme le montre le graphique ci-dessous.

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

Au-delà de cet écart, le Haut Conseil s'interroge sur le profil de cette croissance potentielle, qui connaîtrait un point haut en 2016-2017 pour ralentir ensuite en 2018 et 2019. Ce profil paraît peu cohérent avec la montée en régime d'une reprise comportant une accélération progressive de l'investissement.
Au total, le Haut Conseil considère que la croissance potentielle présentée par le Gouvernement est vraisemblablement surévaluée, en particulier en 2016-2017.
b) Un écart de production très creusé sur toute la période
Les chroniques de croissance potentielle et de croissance effective retenues par le Gouvernement étant inchangées jusqu'en 2018, il en est de même de l'écart de production. Celui-ci est identique à ce qu'il était dans le programme de stabilité d'avril 2015, c'est-à-dire très important sur toute la période. Constant à - 3,3 % de 2014 à 2017, il ne commencerait à diminuer qu'en 2018 pour se situer encore autour de - 2,5 % en fin de période.
Dans son avis sur le programme de stabilité d'avril 2015 (5), le Haut Conseil s'étonnait du maintien d'un écart de production aussi creusé sur une aussi longue période.
Le Haut Conseil continue de considérer que ce maintien est peu vraisemblable. Il estime aussi, comme il l'avait déjà souligné, qu'« une sous-utilisation aussi importante et aussi durable des facteurs de production ne s'accorde pas avec l'accélération de l'investissement et de l'inflation retenue dans le scénario du Gouvernement ». Si un rattrapage important des pertes de production de la crise devait se produire, il devrait se situer dans le prolongement de la reprise actuelle. L'écart de production serait alors en grande partie comblé d'ici 2019 et le resserrement de l'écart de production plus prononcé que dans le scénario du Gouvernement. A l'inverse, l'absence d'un tel rattrapage avant 2019 signifierait que les pertes de production sont en grande partie définitives et donc impliquant un écart de production sensiblement plus faible sur toute la période.

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

En effet, la capacité de l'économie française à profiter pleinement d'une reprise de la demande (intérieure et extérieure) pose question. La crise financière des années 2008-2009 et la longue période de stagnation qui a suivi ont affecté l'appareil productif français. Elles ont diminué structurellement son niveau potentiel d'activité. L'interrogation est également suscitée par la tenue des échanges extérieurs. Les pertes de parts de marché à l'exportation subies par la France sur la décennie 2000-2010 lui ont coûté plusieurs points de croissance. Elles se sont atténuées à partir de 2011. La performance française s'est redressée en 2015, en partie grâce à des ventes exceptionnelles.
Les importations se sont révélées très dynamiques sur les derniers trimestres au regard de la demande intérieure, ce qui peut dénoter une difficulté de l'offre industrielle à satisfaire la demande. Si les études mettent en évidence l'amélioration de la compétitivité coût de la France sur la période récente, certaines insistent sur le retard sur la compétitivité hors coût, en particulier du fait de freins structurels qui subsistent.

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 973. Appréciation du scénario macroéconomique 2017-2019
Les prévisions de croissance présentées par le Gouvernement sont inchangées sur les années 2017-2018 par rapport à celles du programme de stabilité d'avril 2015 (6). Le Haut Conseil avait alors considéré que, nonobstant les risques financiers, ces prévisions étaient prudentes.
Le scénario présenté par le Gouvernement n'intègre pas les risques potentiels mentionnés dans la première partie. Au-delà de la matérialisation de ces risques, l'interrogation, qui est présente dans tous les exercices de prévision depuis plusieurs années, porte sur l'importance du potentiel de rattrapage de l'économie française par rapport à son PIB potentiel (l'écart de production), et sur le rythme de ce rattrapage, c'est-à-dire le rythme de fermeture de l'écart de production.
Au regard de ses hypothèses de croissance potentielle et d'écart de production, le scénario de moyen terme présenté par le Gouvernement peut apparaître comme prudent, puisque la fermeture de l'écart de production ne commencerait qu'en 2018 et serait très limitée, laissant ainsi subsister des marges de croissance importantes pour l'avenir.
Cependant, le Haut Conseil estime que la croissance potentielle pourrait être plus faible, notamment en 2016-2017, et que l'écart de production initial pourrait être moins marqué. Dans ces conditions, en retenant par exemple les hypothèses de la Commission européenne, le scénario présenté se traduirait par une fermeture presque complète de l'écart de production à horizon 2019. Cette évolution est possible mais ne constitue plus alors un scénario particulièrement prudent.
Le Haut Conseil estime que le scénario de croissance du PIB présenté dans le programme de stabilité d'avril 2016 pour les années 2017 à 2019 est plausible, même si l'hypothèse d'accélération de l'activité en fin de période est fragile. Il souligne aussi l'importance des risques affectant ce scénario qu'ils concernent la croissance mondiale ou qu'ils portent plus spécifiquement sur la zone euro.
La reprise de l'inflation retenue dans le scénario du Gouvernement à partir de 2017 résulte pour une large part de l'hypothèse d'arrêt de la baisse du prix des matières premières, mais va au-delà de son effet mécanique. Compte tenu des effets de diffusion de la nouvelle baisse des cours du pétrole, de la légère appréciation récente de l'euro et d'un niveau de chômage toujours élevé, le Haut Conseil estime que la remontée de l'inflation pourrait être plus progressive que dans le scénario du Gouvernement.
4. Les conséquences des estimations de l'écart de production pour l'appréciation de la situation structurelle des finances publique
Le Haut Conseil estime que l'hypothèse retenue par le Gouvernement d'un écart de production très important et supérieur à la plupart des estimations existantes tend à majorer la composante conjoncturelle du déficit, et donc à sous-estimer le déficit structurel. Il souligne que cette sous-estimation amplifie en apparence l'effort structurel déjà réalisé et minimise l'effort à engager pour atteindre l'équilibre des finances publiques à moyen terme.

Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française et joint au programme de stabilité lors de sa transmission par le Gouvernement au Conseil de l'Union européenne et à la Commission européenne.


Historique des versions

Version 1

Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement le 5 avril 2016, en application de l'article 17 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de programme de stabilité pour les années 2016 à 2019, établi au titre de la coordination des politiques économiques des Etats membres de l'Union européenne. Le Haut Conseil a adopté, après en avoir délibéré lors de ses séances du 8 et du 12 avril 2016, le présent avis.

Synthèse

Après deux années de stagnation en 2013 et 2014, la zone euro connaît depuis un an une reprise modérée (à un rythme annuel légèrement supérieur à 1,5 %).

Ce regain de croissance s'explique par trois évolutions concomitantes : la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l'euro et la réduction des ajustements budgétaires. La politique monétaire est, en outre, de plus en plus expansive, et les taux d'intérêt sont, en conséquence, exceptionnellement bas. Enfin les tensions sur les marchés et sur les conditions de crédit qui pénalisaient les pays périphériques de la zone euro se sont nettement apaisées.

La reprise européenne pourrait toutefois ne pas résister à une nouvelle aggravation de la conjoncture extra-européenne (fléchissement de la croissance chinoise, difficultés des pays producteurs de pétrole, risques pesant sur la capacité de l'économie américaine à maintenir son rythme de croissance à moyen terme) ou à l'apparition de certains freins en Europe même (restauration des contrôles aux frontières ; éventuelle sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne ; risques géopolitiques et menaces terroristes).

Les prévisions de croissance présentées par le Gouvernement sont inchangées par rapport au projet de loi de finances pour 2016 en ce qui concerne l'année 2016 (1,5 %) et par rapport à celles du programme de stabilité d'avril 2015 en ce qui concerne les années 2017-2018 (respectivement à 1,5 % et 1 ¾ %). Pour 2019, la croissance prévue est de 1,9 %.

S'agissant de 2016, le Haut Conseil considère que la prévision de croissance du Gouvernement, tout en se situant en haut de la fourchette des prévisions économiques, est encore atteignable. Il estime un peu élevée la prévision du Gouvernement d'une augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016. La révision à la baisse de la prévision d'inflation opérée par le Gouvernement lui paraît justifiée et la hausse des prix à la consommation en moyenne annuelle devrait être à peu près nulle en 2016.

S'agissant de 2017 à 2019, le Haut Conseil estime que le scénario de croissance du PIB est plausible, même si l'hypothèse d'accélération de l'activité en fin de période est fragile. Il souligne aussi l'importance des risques affectant ce scénario, qu'ils concernent la croissance mondiale ou qu'ils portent plus spécifiquement sur la zone euro.

Toutefois, la croissance potentielle présentée par le Gouvernement lui paraît surévaluée, en particulier en 2016-2017, et le maintien d'un écart de production important tout au long de la période peu vraisemblable.

Le Haut Conseil considère que cet écart de production important, supérieur à la plupart des estimations existantes, tend à majorer la composante conjoncturelle du déficit, et donc à sous-estimer le déficit structurel. Il souligne que cette sous-estimation amplifie en apparence l'effort structurel déjà réalisé et minimise l'effort à engager pour atteindre l'équilibre des finances publiques à moyen terme.

Observations liminaires

1. Sur le périmètre du présent avis

Aux termes de l'article 17 de la loi organique du 17 décembre 2012, le Haut Conseil des finances publiques est saisi pour avis des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le programme de stabilité.

Le présent avis ne porte donc pas sur le scénario de finances publiques lui-même. Toutefois, en raison de l'impact des finances publiques sur la croissance à court comme à moyen termes, le Haut Conseil doit tenir compte, pour apprécier la cohérence du scénario macroéconomique qui lui est présenté, d'éléments relatifs à la trajectoire de finances publiques.

2. Sur les informations transmises

Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, le 5 avril 2016, du cadrage macroéconomique du projet de programme de stabilité. Cette saisine a été accompagnée de réponses détaillées à un questionnaire qui avait été adressé au préalable par le Haut Conseil aux administrations compétentes.

3. Sur la méthode utilisée par le Haut Conseil

Pour apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques associées au projet de programme de stabilité, le Haut Conseil a examiné les hypothèses retenues ainsi que les enchaînements économiques attendus jusqu'à l'horizon de la prévision. Il s'est fondé sur les dernières statistiques disponibles et sur les informations qui lui ont été communiquées concernant les mesures de politique économique décidées par le Gouvernement à la date de publication du présent avis.

Le Haut Conseil s'est appuyé sur les dernières prévisions produites par un ensemble d'organismes comprenant des institutions internationales - la Commission européenne, le Fonds monétaire international (FMI) et l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) -, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la Banque de France et des instituts de conjoncture tels que COE-Rexecode et l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Il a par ailleurs procédé, comme le permet l'article 18 de la loi organique, à des auditions des représentants des administrations compétentes (direction générale du Trésor, direction du budget), de l'INSEE ainsi que d'organismes et experts extérieurs à l'administration des finances (1).

Après une analyse du contexte général - une reprise européenne modérée et une croissance mondiale ralentie - (I), le Haut Conseil formule son appréciation des prévisions macroéconomiques sur lesquelles repose le projet de programme de stabilité du Gouvernement pour 2016 (II) ainsi que pour les années 2017 à 2019 (III).

I. - Le contexte : une reprise européenne modérée, une croissance mondiale ralentie

Le Haut Conseil observe une reprise modérée dans la zone euro depuis un an (1), confortée par de nouveaux éléments de soutien à la croissance au cours des derniers mois (2), mais dans un contexte de menaces sur la croissance mondiale (3).

1. Une reprise modérée dans la zone euro depuis un an

Après deux années de stagnation en 2013 et 2014, la zone euro connaît depuis un an une reprise modérée (à un rythme annuel légèrement supérieur à 1,5 %).

Ce regain de croissance s'explique par trois évolutions concomitantes : la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l'euro et la réduction des ajustements budgétaires. La politique monétaire est, en outre, de plus en plus expansive, et les taux d'intérêt sont, en conséquence, exceptionnellement bas. Enfin les tensions sur les marchés et sur les conditions de crédit qui pénalisaient les pays périphériques de la zone euro se sont nettement apaisées.

Vous pouvez consulter l'image dans le fac-similé du

JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

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Ces évolutions se sont traduites par un regain de la demande intérieure qui est le fait majeur de la conjoncture européenne récente. La demande intérieure de la zone euro avait diminué en 2012 et 2013 du fait notamment d'une très forte contraction dans les pays du Sud. Elle progresse désormais à un rythme annuel moyen proche de 2 %, avec des augmentations supérieures à cette moyenne en Espagne, en Allemagne et aux Pays-Bas. Si ce regain porte avant tout sur la consommation, l'investissement y contribue également depuis le début de l'année 2015. En outre, les écarts de croissance entre pays sont moindres que les années précédentes.

Cette reprise de la demande interne s'accompagne d'une accélération des échanges intra-européens et d'une forte augmentation des importations de la zone euro, alors que les exportations de celle-ci sont pénalisées par la morosité de la conjoncture dans le reste du monde. Les échanges extérieurs contribuent donc négativement à la croissance de la zone.

2. De nouveaux éléments de soutien de la croissance au cours des derniers mois

Certains des facteurs favorables à la croissance se sont renforcés dans la période récente. Le prix du pétrole a de nouveau baissé à la fin de 2015 et se situe autour de 40 $ soit environ 15 $ au-dessous du niveau de l'été 2015. Cette baisse supplémentaire se répercute sur les prix à la consommation et contribue à l'amélioration du pouvoir d'achat des ménages et du taux de marge des entreprises.

Les politiques budgétaires en Europe n'exercent plus d'effets restrictifs à court terme. Leur orientation globale devrait être neutre voire faiblement expansive en 2016. Plusieurs pays relâchent leur effort après avoir retrouvé l'équilibre ou ramené leur déficit au-dessous de 3 %. Selon la Commission européenne, les finances publiques auraient en 2016 un effet légèrement expansif en Allemagne, en Italie et aux Pays-Bas et pratiquement neutre en Espagne.

Enfin, la Banque centrale européenne a annoncé le 10 mars dernier un nouvel assouplissement de sa politique monétaire, qui a renforcé les pressions à la baisse sur les taux d'intérêt et leur convergence au sein de la zone euro.

En revanche, le taux de change de l'euro a cessé de se déprécier. Il est même légèrement remonté au cours des dernières semaines.

La croissance de la zone euro pourrait se poursuivre sur plus longue période et dépasser son rythme potentiel, compte tenu de la capacité de rattrapage que suggèrent des écarts de production négatifs dans la plupart des pays de la zone. Toutefois, elle pourrait être affectée par la réalisation de risques majeurs.

3. Des menaces sur la croissance mondiale et des risques propres à la zone euro

La reprise européenne s'est engagée dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale. Elle pourrait ne pas résister à une nouvelle aggravation de la conjoncture extra-européenne ou à l'apparition de certains freins en Europe même.

La croissance du commerce mondial en volume est tombée à des rythmes historiquement très faibles : elle est estimée à environ 2,5 % en 2015, contre 6,5 % par an en moyenne sur les années 2000-2007. Elle ne devrait se redresser que modérément en 2016. Cette faiblesse tient probablement pour partie à l'arrêt de la fragmentation géographique de certains processus de production et peut être le signe d'un affaiblissement des gains de croissance liés aux échanges internationaux.

La croissance chinoise a nettement fléchi et ce ralentissement s'accompagne d'une montée des risques financiers. La situation est très dégradée dans de nombreux pays émergents producteurs de pétrole et d'autres matières premières, particulièrement en Russie et au Brésil où la récession devrait se prolonger.

Aux Etats-Unis, l'économie connaît une croissance modérée proche de 2,5 % par an. Toutefois, dans un contexte de faiblesse des gains de productivité et d'un retour à une situation proche du plein emploi, il existe des incertitudes fortes sur la capacité de l'économie américaine à maintenir son rythme de croissance à moyen terme.

D'autres risques importants pèsent plus spécifiquement sur l'Europe : une restauration des contrôles aux frontières qui pénaliserait les échanges intra-européens ; une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne ; les risques géopolitiques et les menaces terroristes ; l'attentisme lié à certaines échéances électorales… En outre, malgré les renforcements qui sont intervenus ces dernières années en matière de régulation financière, des éléments de fragilité demeurent dans certains pays.

Ces risques sont difficiles à quantifier. Ils appellent à la prudence dans l'appréciation des perspectives de croissance.

*

II. - Observations sur les prévisions pour 2016

1. Le scénario du Gouvernement

Selon la saisine du Gouvernement, « […] La croissance se renforcerait progressivement en zone euro avec une moindre hétérogénéité des rythmes de croissance au sein de la zone. Les prix du pétrole bas, la dépréciation passée de l'euro et la politique monétaire accommodante de la BCE soutiendraient l'activité, qui accélérerait en 2016 portée par la demande intérieure. »

S'agissant de la France, « tant les importations que les exportations ralentiraient en 2016 après une année 2015 marquée par un fort dynamisme […]. Au total, la contribution comptable du commerce extérieur serait de - 0,3 point en 2015 et - 0,3 point en 2016 […]. »

« La reprise de la consommation se poursuivrait en 2016 […] (+1,6 %), dans un contexte d'amélioration des perspectives sur le marché du travail. » […] « La reprise de l'emploi total s'est confirmée en 2015 […] soutenue notamment par le CICE et la mise en œuvre du Pacte de responsabilité. L'emploi accélérerait en 2016 (+ 190 000 en moyenne annuelle), grâce notamment au dispositif “Embauche PME”. »

« L'investissement des entreprises progresserait plus vivement en 2016 […] qu'en 2015 (+ 3,2 % après + 2,0 %), favorisé par le vif redressement du taux de marge et par les mesures de politique économique, en particulier la mesure de suramortissement des investissements productifs. »

« Au total, la reprise de l'économie française se confirmerait en 2016 […] (+ 1,5 % […] après + 1,2 % en 2015) […]. L'inflation serait quasi nulle en 2016 (+ 0,1 %) essentiellement du fait de la nouvelle baisse du prix du pétrole jusqu'en mars 2016. »

2. Appréciation du Haut Conseil

a) La croissance de l'activité

La prévision de croissance du Gouvernement, de 1,5 % en 2016, est inchangée par rapport à la prévision associée au projet de loi de finances pour 2016. Sa composition est cependant légèrement modifiée : elle repose désormais davantage sur la constitution des stocks industriels (cf. encadré) alors que la demande des ménages (tant en termes de consommation que d'investissement) ainsi que les exportations ont été révisées à la baisse.

Les incertitudes sur la contribution des stocks

Les comptes trimestriels présentent une contribution de la variation des stocks à la croissance de l'activité de 0,7 point au 3e trimestre et de 0,6 point au 4e trimestre 2015 (après - 0,5 au 2e trimestre), soit une contribution de la variation des stocks à la croissance du PIB de 0,4 point sur l'ensemble de l'année 2015 et un acquis à l'issue du 4e trimestre 2015 pour l'année 2016 de l'ordre de 0,6 à 0,7 point.

Pour l'année 2016, du fait de cet acquis, la prévision du Gouvernement comporte une contribution positive des mouvements de stocks à la croissance en moyenne annuelle de 0,4 point, ce qui la distingue de la plupart des autres prévisions disponibles (notamment de celles des organisations internationales). Elle est néanmoins cohérente avec la note de conjoncture de l'INSEE de mars 2016.

Il est possible que la composition de la croissance en fin d'année 2015 soit révisée au profit d'autres éléments de demande. Au demeurant, des contributions positives des stocks deux années de suite ne sont pas inhabituelles. Elles ont déjà été observées dans le passé à plusieurs reprises et pour des pourcentages plus élevés.

Le Haut Conseil note que le Gouvernement a fortement revu à la baisse son hypothèse d'évolution en volume du commerce mondial pour 2016 par rapport au projet de loi de finances (3,2 % au lieu de 5,2 %) et que celle-ci est désormais proche de celles retenues par les organisations internationales (3,5 % pour la Commission européenne, 3,1 % pour le FMI et 3,3 % pour l'OCDE). Le Haut Conseil avait souligné le caractère optimiste de cette hypothèse dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2016. Le Haut Conseil estime que la stabilisation des parts de marché à l'exportation est une hypothèse crédible compte tenu des gains de compétitivité enregistrés récemment.

La demande intérieure devrait, quant à elle, bénéficier de certaines conditions favorables, en particulier grâce à une augmentation du pouvoir d'achat des ménages dans un contexte de taux d'épargne élevé.

Le redressement du taux de marge des entreprises qui a résulté de la baisse du prix du pétrole et des réductions de prélèvements (impôts et cotisations sociales) améliore la capacité des entreprises à financer leurs projets et pourrait favoriser la reprise de l'investissement.

En septembre dernier, le Haut Conseil avait considéré, dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016, que la prévision de croissance pour 2016 ne pouvait plus être qualifiée de « prudente » (comme elle l'avait été en avril 2015) mais que, compte tenu de la demande interne et européenne, elle demeurait « atteignable ».

Le Gouvernement a maintenu sa prévision alors que les organisations internationales ont généralement révisé les leurs à la baisse depuis l'automne. De ce fait, elle se situe désormais dans le haut de fourchette par rapport aux consensus des économistes (1,3 % selon le Consensus Forecasts de mars) et aux organisations internationales (1,2 % pour l'OCDE, 1,3 % pour la Commission européenne et 1,1 % pour le FMI). Pour leur part, les prévisions des organismes nationaux consultés sont plus contrastées (1,6 % pour l'OFCE et 1,2 % pour COE Rexecode).

Toutefois, la prévision du Gouvernement est compatible avec les derniers comptes trimestriels et avec les prévisions à court terme présentées par l'INSEE dans sa note de conjoncture publiée fin mars (2). Les enquêtes de conjoncture restent bien orientées même si elles sont en léger recul sur les derniers mois.

Au total, le Haut Conseil considère que la prévision de croissance du Gouvernement, tout en se situant en haut de la fourchette des prévisions économiques, est encore atteignable.

b) L'emploi et la masse salariale

La reprise de l'emploi projetée par le Gouvernement est cohérente avec celle de l'activité, mais l'accroissement du nombre d'emplois prévu pour 2016 (+ 130 000 emplois en moyenne annuelle dans le secteur marchand non agricole) semble élevé, en raison notamment d'estimations assez hautes des effets des politiques de l'emploi (CICE, Pacte de responsabilité et de solidarité, prime à l'embauche).

La prévision d'emploi du Gouvernement pour 2016 est ainsi supérieure à ce que laissent attendre les prévisions de l'INSEE pour le 1er semestre (37 000 emplois supplémentaires sur le 1er semestre 2016, sur le même champ).

Pour ce qui est de la masse salariale privée, le Haut Conseil avait considéré comme élevée la prévision d'une augmentation de 2,8 % associée au projet de loi de finances pour 2016. Cette prévision est revue sensiblement à la baisse (à 2,3 %) dans le programme de stabilité.

Elle reste cependant plus élevée que les prévisions de l'Unedic (2,0 % en moyenne annuelle pour 2016) et de l'ACOSS (1,9 % en glissement annuel à l'issue du premier semestre 2016).

Le Haut Conseil estime encore un peu élevée la prévision du Gouvernement d'une augmentation de la masse salariale de 2,3 % en 2016.

c) La hausse des prix à la consommation

Dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2016, le Haut Conseil avait estimé que la hausse des prix à la consommation pouvait être inférieure à la prévision de 1,0 % alors retenue par le Gouvernement.

Le Gouvernement a nettement révisé à la baisse cette prévision en la ramenant à 0,1 % dans le programme de stabilité d'avril 2016. Cette révision résulte essentiellement de la nouvelle baisse des cours du pétrole observée depuis l'été 2015.

Le glissement annuel des prix est actuellement négatif (- 0,2 % à fin février) et devrait revenir autour de 0 % à la fin du semestre.

Le Haut Conseil considère que la révision à la baisse de la prévision d'inflation opérée par le Gouvernement est justifiée et que la hausse des prix à la consommation en moyenne annuelle devrait être à peu près nulle en 2016.

*

III. - Observations sur les prévisions pour les années 2017 à 2019

1. Le scénario du Gouvernement

Selon la saisine du Gouvernement, « l'activité progresserait de 1,5 % en 2017, 1¾ % en 2018 puis de 1,9 % en 2019. […] Cette accélération de l'activité ne permettrait qu'une résorption très progressive de l'écart de production, lequel demeurerait encore très creusé à l'horizon de la programmation, témoignant du caractère prudent du scénario de croissance effective. »

« L'inflation se redresserait en 2017 (+ 1,0 %), notamment sous les effets conjugués de la hausse mécanique de l'inflation volatile (le prix du pétrole et les taux de change étant conventionnellement gelés en prévision) et de l'accroissement de la fiscalité énergétique. […] L'inflation sous-jacente accélérerait également (+ 1,1 % après + 0,8 %), notamment du fait de l'inflation des services, qui serait soutenue par le redémarrage des salaires. Ensuite, l'inflation serait de 1,4 % en 2018 et de 1 ¾ % en 2019. »

2. Observations sur la croissance potentielle et l'écart de production

a) Des hypothèses de croissance potentielle élevées

La croissance potentielle retenue par le Gouvernement (1,5 % pour les deux années 2016 et 2017, puis 1,4 % pour 2018 et 1,3 % pour 2019) est identique pour les années 2015 à 2018 à celle du programme de stabilité d'avril 2015 (3).

Retour sur les hypothèses de croissance potentielle retenues par le Gouvernement

La loi de programmation des finances publiques 2014-2019, votée en décembre 2014, qui s'applique aujourd'hui et sert de référence pour les avis du Haut Conseil, retenait des hypothèses de croissance potentielle qui étaient à l'époque calées sur les estimations de la Commission européenne pour la France (estimations connues en septembre 2014 qui dataient en fait de mai 2014).

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

En avril 2015, c'est-à-dire quelques mois seulement après le vote de la loi de programmation, le Gouvernement a révisé l'estimation de la croissance potentielle à la hausse de 0,2 point pour les années 2016 et suivantes. Le Haut Conseil a signalé, dans son avis du 13 avril 2015 relatif à l'examen du programme de stabilité d'avril 2015 (4), que cette révision de la croissance potentielle quelques mois après son adoption posait un problème de principe.

Cet ajout de 0,2 point représentait selon le Gouvernement l'incidence des réformes structurelles alors engagées et notamment celle de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (dite « loi Macron »). Cette estimation n'a pas été documentée précisément par le Gouvernement.

Le Gouvernement conserve dans le nouveau programme de stabilité les hypothèses du programme précédent. De son côté, la Commission européenne a révisé ses estimations pour la France à la baisse depuis 2014, de 0,2 point pour 2016 et de 0,1 point pour 2017.

Le Haut Conseil observe que la croissance potentielle présentée par le Gouvernement (1,5 % pour les deux années 2016 et 2017) est désormais nettement supérieure aux estimations des organisations internationales (situées entre 1,1 % et 1,2 % pour les années 2016-2017), comme le montre le graphique ci-dessous.

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

Au-delà de cet écart, le Haut Conseil s'interroge sur le profil de cette croissance potentielle, qui connaîtrait un point haut en 2016-2017 pour ralentir ensuite en 2018 et 2019. Ce profil paraît peu cohérent avec la montée en régime d'une reprise comportant une accélération progressive de l'investissement.

Au total, le Haut Conseil considère que la croissance potentielle présentée par le Gouvernement est vraisemblablement surévaluée, en particulier en 2016-2017.

b) Un écart de production très creusé sur toute la période

Les chroniques de croissance potentielle et de croissance effective retenues par le Gouvernement étant inchangées jusqu'en 2018, il en est de même de l'écart de production. Celui-ci est identique à ce qu'il était dans le programme de stabilité d'avril 2015, c'est-à-dire très important sur toute la période. Constant à - 3,3 % de 2014 à 2017, il ne commencerait à diminuer qu'en 2018 pour se situer encore autour de - 2,5 % en fin de période.

Dans son avis sur le programme de stabilité d'avril 2015 (5), le Haut Conseil s'étonnait du maintien d'un écart de production aussi creusé sur une aussi longue période.

Le Haut Conseil continue de considérer que ce maintien est peu vraisemblable. Il estime aussi, comme il l'avait déjà souligné, qu'« une sous-utilisation aussi importante et aussi durable des facteurs de production ne s'accorde pas avec l'accélération de l'investissement et de l'inflation retenue dans le scénario du Gouvernement ». Si un rattrapage important des pertes de production de la crise devait se produire, il devrait se situer dans le prolongement de la reprise actuelle. L'écart de production serait alors en grande partie comblé d'ici 2019 et le resserrement de l'écart de production plus prononcé que dans le scénario du Gouvernement. A l'inverse, l'absence d'un tel rattrapage avant 2019 signifierait que les pertes de production sont en grande partie définitives et donc impliquant un écart de production sensiblement plus faible sur toute la période.

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 97

En effet, la capacité de l'économie française à profiter pleinement d'une reprise de la demande (intérieure et extérieure) pose question. La crise financière des années 2008-2009 et la longue période de stagnation qui a suivi ont affecté l'appareil productif français. Elles ont diminué structurellement son niveau potentiel d'activité. L'interrogation est également suscitée par la tenue des échanges extérieurs. Les pertes de parts de marché à l'exportation subies par la France sur la décennie 2000-2010 lui ont coûté plusieurs points de croissance. Elles se sont atténuées à partir de 2011. La performance française s'est redressée en 2015, en partie grâce à des ventes exceptionnelles.

Les importations se sont révélées très dynamiques sur les derniers trimestres au regard de la demande intérieure, ce qui peut dénoter une difficulté de l'offre industrielle à satisfaire la demande. Si les études mettent en évidence l'amélioration de la compétitivité coût de la France sur la période récente, certaines insistent sur le retard sur la compétitivité hors coût, en particulier du fait de freins structurels qui subsistent.

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JOnº 0088 du 14/04/2016, texte nº 973. Appréciation du scénario macroéconomique 2017-2019

Les prévisions de croissance présentées par le Gouvernement sont inchangées sur les années 2017-2018 par rapport à celles du programme de stabilité d'avril 2015 (6). Le Haut Conseil avait alors considéré que, nonobstant les risques financiers, ces prévisions étaient prudentes.

Le scénario présenté par le Gouvernement n'intègre pas les risques potentiels mentionnés dans la première partie. Au-delà de la matérialisation de ces risques, l'interrogation, qui est présente dans tous les exercices de prévision depuis plusieurs années, porte sur l'importance du potentiel de rattrapage de l'économie française par rapport à son PIB potentiel (l'écart de production), et sur le rythme de ce rattrapage, c'est-à-dire le rythme de fermeture de l'écart de production.

Au regard de ses hypothèses de croissance potentielle et d'écart de production, le scénario de moyen terme présenté par le Gouvernement peut apparaître comme prudent, puisque la fermeture de l'écart de production ne commencerait qu'en 2018 et serait très limitée, laissant ainsi subsister des marges de croissance importantes pour l'avenir.

Cependant, le Haut Conseil estime que la croissance potentielle pourrait être plus faible, notamment en 2016-2017, et que l'écart de production initial pourrait être moins marqué. Dans ces conditions, en retenant par exemple les hypothèses de la Commission européenne, le scénario présenté se traduirait par une fermeture presque complète de l'écart de production à horizon 2019. Cette évolution est possible mais ne constitue plus alors un scénario particulièrement prudent.

Le Haut Conseil estime que le scénario de croissance du PIB présenté dans le programme de stabilité d'avril 2016 pour les années 2017 à 2019 est plausible, même si l'hypothèse d'accélération de l'activité en fin de période est fragile. Il souligne aussi l'importance des risques affectant ce scénario qu'ils concernent la croissance mondiale ou qu'ils portent plus spécifiquement sur la zone euro.

La reprise de l'inflation retenue dans le scénario du Gouvernement à partir de 2017 résulte pour une large part de l'hypothèse d'arrêt de la baisse du prix des matières premières, mais va au-delà de son effet mécanique. Compte tenu des effets de diffusion de la nouvelle baisse des cours du pétrole, de la légère appréciation récente de l'euro et d'un niveau de chômage toujours élevé, le Haut Conseil estime que la remontée de l'inflation pourrait être plus progressive que dans le scénario du Gouvernement.

4. Les conséquences des estimations de l'écart de production pour l'appréciation de la situation structurelle des finances publique

Le Haut Conseil estime que l'hypothèse retenue par le Gouvernement d'un écart de production très important et supérieur à la plupart des estimations existantes tend à majorer la composante conjoncturelle du déficit, et donc à sous-estimer le déficit structurel. Il souligne que cette sous-estimation amplifie en apparence l'effort structurel déjà réalisé et minimise l'effort à engager pour atteindre l'équilibre des finances publiques à moyen terme.

Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française et joint au programme de stabilité lors de sa transmission par le Gouvernement au Conseil de l'Union européenne et à la Commission européenne.