JORF n°0176 du 31 juillet 2013

I. ― Prévention des atteintes à la probité

  1. La CNCDH regrette que les projets de loi en cours de discussion ne prévoient pas un net renforcement de la dimension préventive, éducative et culturelle de la lutte contre les atteintes à la confiance et la probité publiques. A titre d'exemple, elle regrette l'absence d'évaluation préalable du fonctionnement des organes de prévention, comme le service central de prévention de la corruption (SCPC), ainsi que l'absence de régimes de coordination entre les aspects préventifs et répressifs de cette lutte.
  2. Deux types de techniques de prévention peuvent être distingués : les règles d'incompatibilité, d'une part, et les règles de transparence, d'autre part. Si la CNCDH approuve la volonté du législateur d'étendre ses mécanismes et d'assurer leur effectivité, elle identifie certaines lacunes ou incohérences dans les projets de loi déposés.

I-1. Haute Autorité de la transparence de la vie publique

  1. Les deux projets de loi relatifs à la transparence créent une Haute Autorité de la transparence de la vie publique qui se voit reconnaître une place centrale dans ce dispositif : elle est chargée de contrôler l'exactitude de la déclaration de la situation patrimoniale de l'élu et de la déclaration faisant apparaître les intérêts détenus à la date de son élection et dans les cinq années précédant cette date, ainsi que la liste des activités professionnelles ou d'intérêt général, même non rémunérées, qu'il envisage de conserver. Elle peut également adresser des injonctions à l'élu qui n'aurait pas communiqué l'ensemble des éléments demandés ou qui n'aurait pas fait cesser un conflit d'intérêt.
  2. La Haute Autorité remplace la Commission pour la transparence financière, qui avait été créée en 1998, et vient s'ajouter à différentes instances compétentes en matière de probité publique et de lutte contre la corruption, comme la Commission nationale des comptes de campagne et du financement politique (1990), TRACFIN (1990), le service central de prévention de la corruption (1993), la Commission de déontologie de la fonction publique (1995) et la commission consultative des marchés publics (créée en 2006 et supprimée en 2013). Ces différentes instances viennent compléter différentes formes plus traditionnelles de contrôle de l'action de l'Etat, des collectivités et des agents publics au premier rang desquels le contrôle de légalité, le contrôle des comptes ainsi que le contrôle judiciaire.
    La CNCDH recommande que, concomitamment à la création de la Haute Autorité, un bilan de l'activité des différentes autorités et des moyens financiers et juridiques dont elles disposent soit réalisé. Une éventuelle intégration de ces institutions ou, le cas échéant de certaines de leurs missions dans la nouvelle Haute Autorité devrait être davantage envisagée. En tout état de cause, des principes clairs de coordination des différents acteurs de la prévention et de la lutte contre les atteintes à la confiance et la probité publique devraient être mis en place.
  3. La composition de la Haute Autorité doit lui garantir une indépendance à l'égard du pouvoir politique et une légitimité suffisante. Selon l'article 4 du projet de loi organique, le président est nommé par décret après avis de la commission chargée des lois constitutionnelles, conformément à la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution (13). Les six autres membres sont élus par des magistrats. La commission des lois de l'Assemblée nationale a adjoint à ces membres quatre personnalités qualifiées n'appartenant pas au monde politique ; celles-ci sont désignées par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat après avis des commissions compétentes. Il est cependant à craindre que ceux-ci ne puissent participer réellement à la Haute Autorité, puisque leur fonction n'est pas rémunérée.
    La CNCDH recommande qu'une telle entité de contrôle de la probité de la vie publique et des décideurs politiques, au cœur du système démocratique français, dont la mission n'est que partiellement technique et juridique, ait une composition pluraliste et plus représentative de la diversité de la société française. En outre la CNCDH estime que, pour pouvoir assurer sa mission, la Haute Autorité de la transparence doit être composée de membres dont c'est l'activité principale et doit disposer de services administratifs conséquents.

(13) L'article 13 de la Constitution prévoit notamment que « Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »


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Version 1

I. ― Prévention des atteintes à la probité

9. La CNCDH regrette que les projets de loi en cours de discussion ne prévoient pas un net renforcement de la dimension préventive, éducative et culturelle de la lutte contre les atteintes à la confiance et la probité publiques. A titre d'exemple, elle regrette l'absence d'évaluation préalable du fonctionnement des organes de prévention, comme le service central de prévention de la corruption (SCPC), ainsi que l'absence de régimes de coordination entre les aspects préventifs et répressifs de cette lutte.

10. Deux types de techniques de prévention peuvent être distingués : les règles d'incompatibilité, d'une part, et les règles de transparence, d'autre part. Si la CNCDH approuve la volonté du législateur d'étendre ses mécanismes et d'assurer leur effectivité, elle identifie certaines lacunes ou incohérences dans les projets de loi déposés.

I-1. Haute Autorité de la transparence de la vie publique

11. Les deux projets de loi relatifs à la transparence créent une Haute Autorité de la transparence de la vie publique qui se voit reconnaître une place centrale dans ce dispositif : elle est chargée de contrôler l'exactitude de la déclaration de la situation patrimoniale de l'élu et de la déclaration faisant apparaître les intérêts détenus à la date de son élection et dans les cinq années précédant cette date, ainsi que la liste des activités professionnelles ou d'intérêt général, même non rémunérées, qu'il envisage de conserver. Elle peut également adresser des injonctions à l'élu qui n'aurait pas communiqué l'ensemble des éléments demandés ou qui n'aurait pas fait cesser un conflit d'intérêt.

12. La Haute Autorité remplace la Commission pour la transparence financière, qui avait été créée en 1998, et vient s'ajouter à différentes instances compétentes en matière de probité publique et de lutte contre la corruption, comme la Commission nationale des comptes de campagne et du financement politique (1990), TRACFIN (1990), le service central de prévention de la corruption (1993), la Commission de déontologie de la fonction publique (1995) et la commission consultative des marchés publics (créée en 2006 et supprimée en 2013). Ces différentes instances viennent compléter différentes formes plus traditionnelles de contrôle de l'action de l'Etat, des collectivités et des agents publics au premier rang desquels le contrôle de légalité, le contrôle des comptes ainsi que le contrôle judiciaire.

La CNCDH recommande que, concomitamment à la création de la Haute Autorité, un bilan de l'activité des différentes autorités et des moyens financiers et juridiques dont elles disposent soit réalisé. Une éventuelle intégration de ces institutions ou, le cas échéant de certaines de leurs missions dans la nouvelle Haute Autorité devrait être davantage envisagée. En tout état de cause, des principes clairs de coordination des différents acteurs de la prévention et de la lutte contre les atteintes à la confiance et la probité publique devraient être mis en place.

13. La composition de la Haute Autorité doit lui garantir une indépendance à l'égard du pouvoir politique et une légitimité suffisante. Selon l'article 4 du projet de loi organique, le président est nommé par décret après avis de la commission chargée des lois constitutionnelles, conformément à la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution (13). Les six autres membres sont élus par des magistrats. La commission des lois de l'Assemblée nationale a adjoint à ces membres quatre personnalités qualifiées n'appartenant pas au monde politique ; celles-ci sont désignées par le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat après avis des commissions compétentes. Il est cependant à craindre que ceux-ci ne puissent participer réellement à la Haute Autorité, puisque leur fonction n'est pas rémunérée.

La CNCDH recommande qu'une telle entité de contrôle de la probité de la vie publique et des décideurs politiques, au cœur du système démocratique français, dont la mission n'est que partiellement technique et juridique, ait une composition pluraliste et plus représentative de la diversité de la société française. En outre la CNCDH estime que, pour pouvoir assurer sa mission, la Haute Autorité de la transparence doit être composée de membres dont c'est l'activité principale et doit disposer de services administratifs conséquents.

(13) L'article 13 de la Constitution prévoit notamment que « Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. »