JORF n°0034 du 9 février 2017

Annexe

ANNEXE

Le Garde des Sceaux
Ministre de la justice,
Paris, le 08 février 2017
Madame Adeline HAZAN
Contrôleure générale des lieux de privation de liberté
16/18, quai de la Loire
BP 10301
75921 PARIS CEDEX 19
Madame la Contrôleure générale,
Par lettre en date du 22 décembre 2016, vous m'avez fait parvenir votre projet d'avis relatif au travail et à la formation professionnelle en détention, sur lequel vous souhaitez obtenir mes observations avant sa publication au Journal officiel.
Dans cet avis, vous relevez que les personnes détenues sont exclues du bénéfice du droit commun du travail et soulignez l'insuffisance du nombre de postes proposés, le caractère peu qualifié de ces emplois et la faiblesse des rémunérations. Afin de remédier à cette situation, vous sollicitez le renforcement de la protection des travailleurs pénitentiaires et le développement d'une offre de travail adaptée aux personnes détenues et tournée vers l'emploi.

  1. S'agissant de l'encadrement légal du travail en détention
    Concernant le cadre juridique des relations entre la personne détenue travaillant et le chef d'établissement, le Conseil constitutionnel a, dans le cadre de questions prioritaires de constitutionnalité en 2013 puis en 2015 (QPC n° 2013-320 et 321 du 14 juin 2013 et QPC n° 2015-485 du 25 septembre 2015), affirmé l'existence légale de l'acte d'engagement pour le travail en détention.
    Il a jugé que l'acte d'engagement ne prive pas de garanties légales les droits et libertés énoncés par les cinquième à huitième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946, dont sont susceptibles de bénéficier les personnes détenues dans les limites inhérentes à la détention, et a confirmé que l'acte d'engagement constitue un acte de droit public régissant les relations entre l'administration pénitentiaire et la personne détenue travaillant. Ces décisions renforcent ainsi la légitimité de l'acte d'engagement pour le travail en détention.
    Au regard de l'existence des dispositions du code de procédure pénale (CPP) et des pratiques de chaque établissement, il semble plus opportun de renforcer le cadre juridique existant que d'en créer un nouveau.
    La nécessité de rapprocher l'organisation et les méthodes de travail des activités professionnelles extérieures (D. 433 du CPP) est un objectif que l'administration pénitentiaire s'efforce d'atteindre, en s'assurant notamment de la construction, voire de la rénovation d'établissements pénitentiaires et d'ateliers de production respectant les normes d'hygiène et de sécurité. Le parc pénitentiaire offre aujourd'hui près de 205 500 m2 de zones d'ateliers, permettant ainsi à plus de 400 entreprises concessionnaires et au service de l'emploi pénitentiaire (SEP) de proposer du travail et une activité. Ces concessionnaires et le SEP interviennent dans des domaines d'activités divers, allant de la fabrication de textiles et de matériels pour les transports automobiles et aériens, à l'industrie du papier et de la reproduction d'enregistrements. Cela peut, le cas échéant, mobiliser des chaînes de production industrielle variées et modernes.
    En 2016, les données chiffrées relatives au travail en détention sont :

- travail au service général : 13,50 % de la population écrouée a travaillé en tant qu'auxiliaire, représentant l'édition de près de 108 600 fiches de paie. La masse salariale du service général s'est élevée à 24 372 100 € pour 11 745 200 heures ;
- travail en ateliers de production : 13,33 % de la population écrouée a travaillé en tant qu'opérateur en concession, représentant l'édition de 107 200 fiches de paie. La masse salariale du régime de la concession s'est élevée à 29 360 900 € pour 7 839 500 heures travaillées. La rémunération horaire moyenne en concession a été de 4,41 € ;
- enfin, 1,43 % de la population écrouée a travaillé en tant qu'opérateur du SEP, représentant l'édition de 11 500 fiches de paie (13 900 en 2015). La masse salariale du régime de la régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP) s'est élevée à 5 446 400 € pour 1 022 200 heures travaillées. La rémunération horaire moyenne du SEP-RIEP a été de 5,17 €.

  1. S'agissant des conditions de travail en détention
    Vous recommandez une harmonisation des modalités d'accès au travail.
    Le travail en détention et la formation professionnelle inscrivent la personne détenue dans un processus de respect des règles, concourant à son équilibre personnel, à l'entretien des liens avec la société et le monde professionnel et procurant une activité rémunératrice, qualifiante et valorisante.
    L'administration pénitentiaire s'assure du respect des règles d'hygiène et de sécurité (D. 433-7 du CPP), de l'exécution des tâches du service général, de la présence d'encadrement technique dans les ateliers de production (D. 433-5 du CPP), de l'organisation d'une journée de travail favorisant le bon déroulement de l'activité (annexe à l'article R. 57-6-18 du CPP relatif au règlement intérieur des établissements pénitentiaires), et de l'articulation avec d'autres activités (R. 57-9-1 du CPP).
    Outre le bilan d'évaluation, d'orientation et de l'entretien individuel, une demande de classement est examinée devant la commission pluridisciplinaire unique (CPU) de l'établissement, pour avis. La décision de classement appartient au chef d'établissement. Pour améliorer la traçabilité et le formalisme des demandes de classement et inscriptions sur une liste d'attente, la circulaire relative aux modalités de fonctionnement de la CPU de 2012 fera l'objet d'un travail d'actualisation au second semestre 2017.
    Certains des critères de classement au travail sont énumérés à l'article D. 432-3 du code de procédure pénale. Cependant, il faut également prendre en compte des critères individualisés, en lien avec le parcours pénal de la personne détenue, ainsi que l'articulation du travail avec la participation à d'autres activités. Concernant le cas particulier du service général, la gestion du nombre de postes proposés reste de la compétence du chef d'établissement, au regard du budget alloué. Le nombre de postes en ateliers est, quant à lui, davantage conditionné par la surface disponible.
    Concernant le cadre juridique du travail en détention, l'acte administratif, nommé acte d'engagement, est signé par la personne détenue classée au travail et le chef de l'établissement (article 33 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire). Cet acte énonce les droits et obligations de la personne détenue, ainsi que ses conditions de travail et de rémunération, et présente « la description du poste de travail, le régime de travail, les horaires de travail, les missions principales à réaliser et, le cas échéant, les risques particuliers liés au poste » (R. 57-9-2 du CPP). Un travail d'harmonisation de l'acte d'engagement a été engagé, dans l'objectif de décrire le contenu du poste d'affection, les droits et devoirs de la personne détenue et du chef d'établissement et les conditions de rupture.
    A ce titre, un projet d'acte d'engagement unique vient d'être rédigé, sa diffusion et sa mise en œuvre effective dans tous les établissements pourront intervenir à la fin du premier semestre 2017.
    Les personnes détenues en situation de handicap, comme en droit commun du travail, ont la possibilité d'exercer un travail en détention, en application de l'alinéa 3 de l'article 33 de la loi du 24 novembre 2009. L'administration pénitentiaire tient compte de leur état de santé physique et mental pour déterminer les postes auxquels elles peuvent prétendre, conformément à l'article D. 432-3 du CPP.
    Vous préconisez le développement de postes thérapeutiques permettant le classement des personnes souffrant d'une incapacité physique et l'engagement d'une réflexion sur d'autres modes d'activités permettant une occupation de ces personnes.
    L'établissement et service d'aide par le travail (ESAT) implanté au sein du centre de détention du Val-de-Reuil est un exemple d'expérience innovante, menée au bénéfice des personnes détenues en situation de handicap psychique. Une décision du 11 décembre 2012 a autorisé cette expérimentation pour une durée de cinq ans. Cette dernière a débuté le 12 février 2014, avec une capacité de dix places. Les admissions sont prononcées, à la suite de la décision d'orientation de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), dans le cadre d'une commission pluridisciplinaire unique, intégrant notamment le service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) et l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire (USMP). L'ESAT, géré par l'Association laïque pour l'éducation, la formation, la prévention et l'autonomie (ALEFPA), propose un travail à des personnes dont la situation de handicap psychique ne leur permet pas de réaliser une activité de travail pénitentiaire classique. La prise en charge adaptée vise la socialisation et le renforcement de l'autonomie des personnes isolées. Fin décembre 2017, une évaluation de l'expérimentation sera menée, en vue du renouvellement de l'autorisation. Il sera alors envisagé, le cas échéant, une extension à d'autres établissements pénitentiaires, dans le cadre d'un partenariat à conduire avec le ministère des affaires sociales et de la santé.
    L'inaptitude ou l'aptitude à un poste de travail, ne peut être examinée et constatée par la délivrance d'un certificat établi par un médecin du travail. Les médecins exerçant qu'au sein des unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP) n'ont pas cette compétence et ne peuvent effectuer cette appréciation dans le cadre de leur fonction hospitalière au sein de l'USMP.
    Des discussions seront initiées avec le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social afin de déterminer les modalités d'accès, pour les personnes détenues, à la médecine de prévention et en particulier la délivrance d'un avis d'aptitude à un poste de travail.
    Dans l'attente, en application de l'article R. 57-8-1 du CPP, une personne détenue qui présente une incapacité à exercer un travail en raison de son état de santé, peut solliciter son examen par le médecin exerçant au sein de l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire. Si celui-ci constate que l'état de santé de la personne détenue l'empêche d'exercer un travail de façon temporaire ou permanente (telle que décrite par la personne), le médecin en informe la personne détenue et lui remet une attestation descriptive de son état. En cas d'incapacité temporaire, il a la possibilité de rédiger un avis médical d'arrêt de travail. Il revient à la personne détenue de transmettre cette attestation à l'administration pénitentiaire.
    Vos observations sur les conditions de travail, ne respectant pas, selon votre avis, la législation applicable aux travailleurs détenus, appellent de ma part les précisions suivantes.
    Dans le cadre du travail en cours d'harmonisation de l'acte d'engagement et de formalisation de l'organisation du travail, il est prévu d'apporter une clarification sur la durée et les conditions de rupture de la période d'essai.
    Votre avis évoque les avantages de la journée continue. L'organisation des journées de travail sous ce format, ainsi qu'autour de pauses quotidiennes et des congés hebdomadaires, est prévue par les dispositions de l'article 15 du règlement intérieur des établissements pénitentiaires (annexe à l'article R. 57-6-18 du CPP). Ce fonctionnement est en œuvre dans près de cinquante établissements pénitentiaires.
    Concernant l'inspection du travail, une grande majorité des établissements pénitentiaires a sollicité l'intervention de ses services en application des dispositions de l'article D. 433-8 du CPP. Au cours de l'année 2016, plus d'une trentaine d'établissements ont été inspectés. Si la direction générale du travail (DGT) a constaté que l'inspection du travail est de plus en plus sollicitée, elle considère néanmoins que son champ d'intervention se limite exclusivement aux salariés relevant du droit commun du travail. De plus, en vertu du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail, ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, la DGT considère que l'administration pénitentiaire pourrait faire intervenir les inspecteurs santé et sécurité au travail, ainsi que les comités d'hygiène de sécurité et des conditions de travail, afin de s'assurer du respect des mesures, tant sur les lieux de travail du service général qu'au sein des ateliers de production.
    Un état des lieux des pratiques des inspecteurs santé et sécurité au travail sera initié en 2017, dans la perspective d'échanges entre la DAP et la DGT, visant à la signature d'un protocole commun dans le courant de l'année 2018.
    Concernant la rémunération des personnes détenues travaillant pour le service général, les taux indiqués à l'article D. 432-1 du CPP sont communiqués aux directions interrégionales des services pénitentiaires (DISP) dès revalorisation du salaire minimum interprofessionnel de croissance.
    Ces taux sont ensuite renseignés dans le système d'information Genesis permettant l'édition des fiches de paie. Si des établissements pénitentiaires ont pu rémunérer les auxiliaires à un forfait journalier ne se basant pas sur le taux horaire de chaque classe, l'administration pénitentiaire met fin à cette pratique. Enfin, l'attribution de primes est laissée à la libre appréciation des chefs d'établissement et des entreprises concessionnaires, les gratifications n'ayant plus d'existence juridique depuis l'abrogation de l'article D. 111 du CPP.
    Concernant la traçabilité des heures effectivement réalisées, le système d'information Genesis permet de renseigner la présence des personnes détenues travaillant au service général et en production, par demi-journée de travail. Dans les ateliers de production en gestion déléguée, les titulaires des marchés doivent mettre en place des systèmes de pointeuse pour les zones d'ateliers. Ce système présente, pour le moment, des complexités de mise en œuvre pour le service général.
    Au sujet du bénéfice restreint des droits à la retraite, la faible cotisation des personnes détenues a pour seule origine la faible rémunération perçue, le taux de cotisation étant identique au droit commun (R. 381-104 du CSS). L'éventuel alignement du calcul des trimestres de retraite selon les règles spécifiques du service général, à savoir sur la base de 67 heures travaillées par mois (R. 381-1058 du CSS), ne saurait être du ressort exclusif de l'administration pénitentiaire et nécessite une étude d'impact.
    L'absence du bénéfice de l'assurance chômage s'explique par l'absence de cotisation des personnes détenues travaillant. La notion évoquée de chômage technique ou d'indemnités de chômage partiel impliquerait des négociations avec les acteurs économiques, au regard de la charge financière qu'ils devraient supporter.
    S'agissant des procédures de déclassement, les motifs de suspension et de rupture de l'acte d'engagement sont d'ordre professionnel (D. 432-4 du CPP) ou disciplinaire (R. 57-7 à R. 57-7-3 et R. 57-7-22 du CPP). Une réflexion est en cours afin de préciser ces motifs et d'assurer une bonne application des sanctions prises au cours d'une procédure de déclassement.
    En effet, si les motifs disciplinaires de déclassement sont prévus par des normes réglementaires, l'interprétation des motifs professionnels de suspension ou de rupture de l'acte d'engagement, évoqués à l'article D. 432-4 du CPP, appellent une meilleure définition. Au premier semestre 2017, des définitions desdits motifs seront proposées afin de formaliser une procédure de déclassement pour des motifs d'ordre professionnel d'ici la fin de l'année 2017.
    Quant aux dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et particulièrement la procédure contradictoire préalable à toute décision individuelle défavorable prise en tant que sanction, leur application, commandée par des dispositions législatives, s'impose à l'administration pénitentiaire.
  2. S'agissant de la diversification des formes du travail pénitentiaire
    Vous recommandez la création d'un opérateur national du travail. Le modèle du travail pénitentiaire est effectivement questionné, en raison du contexte économique et du diagnostic critique du système actuel.
    L'administration pénitentiaire a engagé une étude afin de repenser les orientations stratégiques en matière de travail pénitentiaire, développer le travail, revoir la gouvernance et l'organisation actuelle. L'objectif est d'aboutir rapidement à des propositions concrètes visant à développer et promouvoir le travail pénitentiaire en milieu fermé (travail productif et service général). Les axes de réflexion sont :

- la définition des objectifs en matière de travail pénitentiaire ;
- les normes encadrant la relation de travail des personnes détenues ;
- les leviers de développement de la fonction travail à court et moyen terme ;
- l'opportunité et la faisabilité d'un opérateur national du travail et de la formation professionnelle en milieu fermé. La notion d'opérateur est entendue au sens large d'une entité sous l'autorité de l'administration pénitentiaire.

La création d'un opérateur apparaît comme une voie privilégiée pour développer la fonction travail, dans la mesure où elle permettrait une mise en cohérence globale de cette fonction (en matière de coordination des actions envers les différentes parties prenantes du travail, de lisibilité, de pilotage, de cohérence des parcours des personnes détenues), une optimisation de la régulation (ex. : contrôle du respect des règles de rémunération, visibilité nationale offre/demande), et une meilleure performance, via la définition d'une stratégie de développement et d'organisation de la fonction, et la mise en place d'une structure efficiente. Son périmètre inclurait : le travail en production (concessions, reprise des fausses concessions, ateliers en propre), le service général, la formation professionnelle et les activités d'insertion par l'activité économique en détention. Les missions rattachées à l'opérateur serait de quatre ordres : la maîtrise d'ouvrage déléguée sur l'ensemble du périmètre, la maîtrise d'ouvrage sur les ateliers en propre, une contribution à l'orientation et au classement des personnes détenues, enfin des missions support.
S'agissant du dispositif de l'insertion par l'activité économique en détention (IAE), les décrets relatifs à l'article 33 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire ont été publiés le 23 décembre 2016. Le décret porté par le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, a quant à lui été publié le 27 avril 2016.
La mise en place des sept projets prévus dans le cadre de la phase pilote a débuté progressivement en 2016. En effet, trois projets IAE conventionnés ont été mis en œuvre au sein des établissements suivants :

- au centre de détention d'Oermingen (DISP de Strasbourg), un atelier chantier d'insertion (ACI), porté par Emmaüs, a été installé le 23 mai 2016. Il a pour activité la rénovation et la personnalisation de meubles destinés à la revente. Cinq équivalents temps plein (ETP) ont intégré le dispositif avec une montée en charge progressive de dix ETP ;
- au centre pénitentiaire de Saint-Denis de La Réunion (Mission outre-mer), un ACI, porté par l'association TI TANG RECUP a été installé le 2 novembre 2016. Il a pour activité la transformation de textiles. Dix ETP ont été recrutés pour ce dispositif ;
- à la maison d'arrêt de Moulins (DISP de Lyon), un ACI porté par l'association Avenir et le réseau Chantier école, a été installé le 5 décembre 2016. Il a pour activité la restauration, la distribution de repas, l'entretien et le nettoyage. Dix ETP ont été recrutés pour intégrer ce dispositif.

Au premier trimestre 2017, quatre projets sont en cours de conventionnement :
- au centre pénitentiaire de Perpignan, un ACI porté par l'association Recyclage Catalan, ayant pour activité le démantèlement et le recyclage des produits informatiques, sera mis en place prochainement. 10 ETP ont été repérés et intégreront le dispositif ;
- à la maison d'arrêt de Périgueux, un ACI porté par l'association Atelier de récupération et de traitement pour l'environnement, l'écologie et la créativité (ARTEEC), sera mis en place, avec pour activité la fabrication de meubles en bois avec des palettes non traitées qui seront vendus dans le magasin ARTEEC ;
- à la maison d'arrêt de Meaux-Chauconin (DISP de Paris), au sein du quartier nouveau concept, un ACI porté par GEPSA et le groupe Ares ayant pour activité du conditionnement, est en cours d'étude ;
- à la maison d'arrêt de Bonneville, une entreprise d'insertion portée par l'association API, ayant pour activité de la sous-traitance industrielle, sera mise en œuvre prochainement.

Deux projets à venir courant 2017, concernant le centre de détention de Muret (DISP de Toulouse) et la maison d'arrêt de Douai (DISP de Lille), sont en cours d'analyse.
Concernant les autres formes de travail possibles, particulièrement le travail des personnes détenues pour leur propre compte (D. 432-3 du CPP), une étude est actuellement en cours afin d'apprécier dans quelles conditions les personnes détenues peuvent obtenir ou faire valoir leur statut de micro-entrepreneur. L'adaptation de ce régime de droit commun au travail en détention pourrait avoir des conséquences financières, impliquerait une possible modification de l'affiliation à un régime de la sécurité sociale et nécessiterait d'adapter les circuits des rémunérations, (le micro-entrepreneur de droit commun doit notamment disposer d'un compte bancaire propre pour percevoir les versements de ses facturations).
4. S'agissant du développement de la formation professionnelle
La formation professionnelle des personnes détenues a fait l'objet d'un processus de décentralisation prévu dans le cadre de la loi du 5 mars 2014. Ce processus, très largement engagé, aboutira au 1er janvier 2018, date d'échéance des marchés pour les établissements relevant de la gestion déléguée.
Dans le contexte de transfert de compétence aux régions, l'administration pénitentiaire encourage le développement de la formation professionnelle et veille à ce que l'offre de formation réponde aux contraintes du milieu fermé et aux besoins des publics pris en charge.
Une réflexion est en cours et devra aboutir en 2018 afin de permettre à l'ensemble des personnes détenues d'avoir connaissance des formations dispensées sur toute la France via un portail numérique accessible en détention.
Depuis la fin de l'année 2015, l'évaluation des besoins professionnels des personnes détenues est renforcée, grâce à la prescription du programme personnalisé d'accompagnement à l'insertion professionnelle (PPAIP). Il vise à dresser un diagnostic personnalisé des acquis et des potentiels des personnes écrouées, inscrites de manière volontaire dans le dispositif, afin de sécuriser et pérenniser un parcours d'insertion ou de réinsertion professionnelle. Dans le cadre du parcours d'exécution de la peine en milieu ouvert et en milieu fermé, ce diagnostic doit permettre de définir un projet réaliste et réalisable, en favorisant l'égalité des chances et l'individualisation des peines et en respectant le principe de gratuité de la prestation d'accompagnement. Ainsi, selon le diagnostic adapté aux compétences de chaque personne détenue, l'accès à un certain nombre de formations professionnelles susceptibles de favoriser son retour à l'emploi et à la vie à l'extérieur, sera établi.
En ce qui concerne l'accès à la formation, les difficultés rencontrées au sein du centre pénitentiaire de Baie Mahault et de la maison d'arrêt de Basse-Terre sont conjoncturelles et liées au transfert de la compétence aux régions. Pour la région Ile-de-France, il a aussi fallu un temps d'adaptation et certaines formations, qui avaient pris du retard à Villepinte ou à Meaux, ont été in fine réalisées.
En prenant en charge la formation professionnelle au sein des établissements pénitentiaires, un temps d'adaptation au milieu et aux spécificités de la détention était nécessaire pour les régions. Une collaboration de qualité entre les régions et l'Administration pénitentiaire a facilité la mise en œuvre des actions de formation professionnelle dans le nouveau cadre de compétence.
Si la question du transfert des personnels dédiés à la formation professionnelle a été réglée par la tenue de la commission nationale de conciliation du 9 novembre 2016, celle du transfert financier demeure. La date du 1er janvier 2017 a été retenue pour les compensations financières, à défaut de transfert physique des agents. Le transfert financier portant sur les établissements en gestion publique devrait être prochainement entériné par un arrêté.
Dans les établissements en gestion délégué, il reste à déterminer quelle autorité doit prendre en charge les investissements liés aux plateaux techniques, au matériel et à leurs frais d'entretien, lorsque les anciens prestataires ne les ont pas laissés en place. Suite à la commission consultative sur l'évaluation des charges, qui s'est tenue le 10 janvier 2017, cette question sera envisagée dans le cadre d'un groupe de travail réunissant la DAP, la direction générale des collectivités locales du ministère de l'intérieur et l'Association des régions de France.
Je précise que les projets de construction de nouveaux établissements pénitentiaires intègrent les besoins en matière de formation professionnelle.
Par ailleurs, pour garantir une bonne articulation entre la formation professionnelle et le travail, deux décrets du 23 décembre 2016 (nos 2016-1850 et 2016-1853) posent le cadre nécessaire à l'implantation en milieu fermé de structures d'insertion par l'activité économique visant les personnes détenues rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières.
L'article D. 90 du CPP, modifié par l'article 2016-1853, prévoit que, dorénavant, le représentant du SEP est membre de la commission pluridisciplinaire unique. L'article D. 433-1 est complété de l'alinéa suivant : « Le service de l'emploi pénitentiaire, au vu des difficultés sociales et professionnelles que peuvent rencontrer les personnes détenues qu'il prend en charge, leur propose des activités d'insertion, de formation professionnelle et de travail, en vue de leur insertion, de la préparation de leur sortie de détention et de la lutte contre la récidive. »
Enfin, nous avons installé en 2016, une mission spécifique au développement et à l'avenir du travail au sein des établissements pénitentiaires. Les travaux en cours, qui aboutiront dans le courant de l'année 2017, visent au renforcement de l'articulation entre formation professionnelle et travail, afin d'optimiser les parcours d'exécution de peine et de préparation à la sortie.
Je vous prie d'agréer, Madame la Contrôleure générale, l'expression de ma considération distinguée.
Jean-Jacques URVOAS