- Analyse de l'évolution en structure des tarifs réglementés de vente
La part acheminement des tarifs réglementés de vente envisagés a été établie en fonction du tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité en vigueur (TURPE 3).
La part production des tarifs résulte de la nouvelle structure des coûts de production sous-jacents élaborée en 2009 et sur le fondement de laquelle a déjà été réalisé le mouvement tarifaire en structure d'août 2009.
3.1. Caractéristiques du mouvement
Deux principes structurants président à l'évolution en structure des grilles tarifaires proposées :
― la résorption des situations de trappes tarifaires et parts production négatives (cf. 3.2 ci-après) ;
― la limitation de la dispersion des valeurs des rubans tarifaires (cf. 3.3) de façon à assurer que chaque client paye un prix de l'énergie reflétant le coût supporté pour la produire.
Par ailleurs, par rapport au mouvement 2009, une contrainte nouvelle a été introduite : les parts variables des grilles tarifaires ne doivent pas baisser par rapport aux valeurs 2009.
3.2. Impact sur les trappes tarifaires
Trois types de trappes sont essentiellement visés par la restructuration tarifaire : les petites puissances des tarifs bleus (3 et 6 kVA), les tarifs à effacement pour toutes les catégories tarifaires et enfin les sites à consommation estivale, aux tarifs jaunes et verts (hors effacement). Le mouvement tarifaire proposé a pour conséquence une réduction des trappes :
― de plus de 90 % pour les sites à faible puissance en tarif bleu ;
― de plus de 80 % pour les sites à consommation estivale ;
― de plus de 80 % pour les sites à tarifs à effacement.
Plus généralement, la grille tarifaire proposée permet de réduire les trappes profondes de l'ordre de 82 % en sites et en volume. Sur les tarifs en parts production négatives, la réduction est de 90 % en nombre de sites et de 69 % en volume.
3.3. Impact sur l'égalisation des rubans
L'effet de la nouvelle grille tarifaire sur la dispersion des parts ruban peut être appréhendé à l'aide du tableau ci-après :
| RUBAN | APRÈS MOUVEMENT 2009 | APRÈS MOUVEMENT 2010 | | |
|--------------------|-----------------------------------|------------------------|-----------------------------------|------------------------|
| |Nombre de sites
(en milliers)|Répartition
(en %)|Nombre de sites
(en milliers)|Répartition
(en %)|
|Inférieur à 20 €/MWh| 1 500 | 4,6 % | 300 | 1 % |
| 20 - 30 €/MWh | 11 500 | 35,5 % | 600 | 1,9 % |
| 30 - 35 €/MWh | 16 000 | 49,4 % | 13 000 | 40 % |
| 35 - 40 €/MWh | 2 500 | 7,7 % | 16 700 | 51,5 % |
| 40 - 45 €/MWh | 450 | 1,4 % | 800 | 2,5 % |
|Supérieur à 45 €/MWh| 450 | 1,4 % | 1 000 | 3,1 % |
Source : calculs CRE sur la base de données EDF.
Les parts ruban sont désormais concentrées pour plus de 90 % des sites dans la fourchette 30 - 40 €/MWh, contre 57,1 % après le mouvement du 15 août 2009.
3.4. Analyse des effets de l'évolution des grilles tarifaires
3.4.1. Arbitrages entre options tarifaires
L'analyse a porté sur les clients fournis aux tarifs bleus. Elle a consisté à quantifier et à comparer, sur la base des profils de consommation et de la base clientèle 2008 d'EDF, l'évolution des flux de clientèle entre les différentes options du tarif réglementé actuellement en vigueur et du tarif envisagé.
Transfert de clientèle d'un tarif « base » vers un tarif « heure pleine/heure creuse » :
Sur l'ensemble de la gamme tarifaire proposée, une analyse sur la clientèle aux tarifs bleus montre que l'incitation à passer d'un tarif « base » à un tarif « heure pleine/heure creuse » (« HP/HC ») progresse légèrement en nombre de sites, mais que l'incitation financière se réduit sensiblement.
Toutefois, une analyse complémentaire par type de clients fait apparaître certaines disparités comportementales. En effet, le nombre de clients professionnels incités à souscrire l'option « HP/HC » augmente, mais l'intérêt financier d'une telle souscription se réduit. A l'inverse, le nombre de clients résidentiels intéressés au transfert se réduit, mais l'incitation financière reste élevée.
Transfert de clientèle d'un tarif « HP/HC » vers un tarif « base » :
Sur la gamme tarifaire proposée pour les clients bleus résidentiels, et contrairement à ce qui avait été observé en 2009, l'incitation globale à passer d'un tarif « HP/HC » à un tarif « base » progresse légèrement (de l'ordre de 15 %). Le phénomène est plus particulièrement sensible pour les tarifs de puissance souscrite de 12 et 15 kVA. Au-delà de 18 kVA, la mise en extinction des tarifs « base » interdira désormais ce type de transferts, qui aurait pu concerner 67,5 milliers de site.
En revanche, pour ce qui concerne les clients bleus professionnels, la tendance observée l'année dernière se poursuit : l'incitation globale à passer d'un tarif « HP/HC » à un tarif « base » diminue de 50 %.
Transfert de clientèle des tarifs résidentiels « base » et « HP/HC » vers le tarif « TEMPO » :
L'incitation à choisir un tarif « TEMPO » pour un client actuellement au tarif « base » ou « HP/HC » reste encore importante, bien qu'en diminution sensible (de l'ordre de 15 %). Ce phénomène est dû, d'une part, à la quasi-suppression des trappes pour ce type de tarif ― et, corrélativement, la suppression des effets d'aubaine observés pour les tarifs à effacement ― et, d'autre part, à l'absence de mouvement en structure sur ce tarif.
Seuls les clients ayant des comportements de consommation en adéquation avec les incitations tarifaires du tarif « TEMPO » auront désormais intérêt à choisir ce tarif.
Conclusion :
Au regard des flux de clientèle identifiés ci-dessus, la CRE estime que la structure du tarif bleu proposé évolue de manière satisfaisante. Toutefois, elle recommande qu'une étude approfondie des incitations à souscrire des tarifs horosaisonnalisés ainsi que des transferts de clientèle entre les options tarifaires « base » et « HP/HC » soit menée préalablement au prochain mouvement tarifaire.
3.4.2. Principales évolutions et tendances
résultant du double mouvement en structure et en niveau du barème actuel
Tarifs bleus :
La différenciation des tarifs bleus entre clients domestiques et clients professionnels est maintenue. Toutefois, si les subdivisions introduites l'année dernière entre « clients domestiques collectifs et agricoles », « clients professionnels et services publics non communaux » et « services publics communaux et intercommunaux » sont également maintenues, les barèmes correspondants disposent désormais d'abonnements et de prix variables égaux.
Cette remise à égalité des barèmes permet ainsi d'éviter les éventuels arbitrages tarifaires entre catégories de clients (entre deux subdivisions de clients professionnels par exemple) que la CRE avait mis en évidence dans son avis du 11 août 2009.
Tarifs bleus en « base » :
Afin de permettre la résorption des trappes tarifaires existant sur les tarifs bleus résidentiels de petite puissance, des augmentations de facture modérées leur ont été appliquées, d'autant plus faibles que la consommation du site est élevée.
Le phénomène s'inverse sur l'ensemble des autres tarifs bleus résidentiels de la gamme, avec des baisses de facture parfois importantes sur les petites consommations en 12 et 15 kVA. Il est à noter que les tarifs mis en extinction (de puissance souscrite supérieure à 18 kVA) connaissent tous des baisses de facture (de l'ordre de 1 % en moyenne).
Les tarifs bleus professionnels évoluent très différemment et à la hausse dans leur intégralité. Toutes les puissances souscrites sont concernées par des augmentations de facture d'autant plus élevées que la consommation du site est faible, à l'exception du tarif correspondant à la puissance souscrite 3 kVA qui connaît une hausse linéaire en fonction de la consommation.
Les tarifs en « base » sont globalement à la baisse pour les clients résidentiels (― 0,8 %) et globalement à la hausse pour les clients professionnels (+ 4,7 %).
Tarifs bleus en « HP/HC » :
A l'instar du mouvement en structure de 2009, sur l'ensemble des tarifs « HP/HC » toutes catégories confondues, la facture augmente d'autant plus que la consommation totale du site augmente, incitant ainsi les consommateurs à réduire leur consommation.
Toutefois, contrairement à 2009, la facture augmente désormais d'autant plus que la consommation en heures creuses est faible, phénomène qui s'explique par le maintien de l'écart entre les prix variables en heures pleines et en heures creuses. Cette tendance vertueuse incite naturellement les consommateurs à déporter leur consommation sur les heures creuses.
Les tarifs en « HP/HC » sont globalement à la hausse pour les clients résidentiels (+ 1,4 %), dans la ligne du mouvement 2009, mais également globalement à la hausse pour les clients professionnels (+ 2,2 %), contrairement à 2009.
Tarifs bleus à effacement :
Les tarifs bleus à effacement « EJP » et « TEMPO » ne subissent aucune évolution en structure au titre de ce mouvement et progressent respectivement de l'ordre de 2,7 % et 3 % pour la clientèle résidentielle.
- Analyse du mouvement en niveau
4.1. Couverture des coûts du fournisseur EDF
La CRE a élaboré, sur la base des données transmises par EDF, le compte de résultat de l'activité de fourniture aux tarifs réglementés pour chacune des catégories tarifaires bleu, jaune et vert.
Les coûts de production sont ventilés entre les différentes catégories au moyen de clés de répartition. Ces clés sont calculées à partir des courbes de charge des catégories tarifaires et des coûts de production sous-jacents à la structure de la part production des tarifs de vente. Pour chaque catégorie, la part fourniture des tarifs de vente est obtenue en retranchant du tarif de vente moyen de la catégorie la moyenne du tarif d'utilisation des réseaux publics applicable au 1er août 2010 aux clients de cette catégorie.
Pour 2010, le modèle financier prend en compte des hypothèses économiques sur les facteurs d'évolution des charges. Environ 50 % des charges d'exploitation dépendent des achats de combustibles et d'énergie, dont une partie est fortement volatile. En conséquence, seuls les ordres de grandeur des estimations obtenues sont à considérer.
Sur la base de la valeur historique des actifs pour la détermination des capitaux engagés, et en tenant compte du taux de rémunération des capitaux d'EDF, la part fourniture des tarifs réglementés de vente envisagés permet comme l'année précédente de couvrir les coûts de fourniture sur chacune des catégories tarifaires bleu, jaune et vert.
Compte tenu des hausses différenciées selon les tarifs, les parts « ruban » (6) des différentes couleurs tarifaires restent assez proches (écart maximal entre deux catégories égal à 1,1 €/MWh). Toutefois, en raison d'une hausse différenciée appliquée pour la première fois en 2010 sur les tarifs bleus résidentiels et non résidentiels, les parts rubans qui correspondent à ces deux sous-catégories de clientèle s'écartent sensiblement.
A la suite de la requête en annulation de l'arrêté du 12 août 2008 relatif au prix de l'électricité de la société POWEO, le Conseil d'Etat a enjoint aux ministres de l'énergie et de l'économie, par sa décision du 1er juillet 2010, de prendre un nouvel arrêté fixant les tarifs réglementés jaune et vert de l'électricité, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, afin d'assurer le nécessaire rattrapage, au titre de la période d'un an avant son adoption, des écarts significatifs entre les tarifs fixés par l'arrêté du 12 août 2008 et les coûts. En effet, le Conseil d'Etat a considéré que les tarifs jaune et vert résultant de l'arrêté du 13 août 2007 étaient insuffisants pour assurer la couverture des coûts moyens complets exposés par EDF pour la fourniture de l'électricité à chacun de ces tarifs sur la période d'application de ces dits tarifs.
La CRE constate que l'évolution des tarifs réglementés de vente jaune et vert envisagée permet d'aller au-delà de la seule couverture des coûts de fourniture d'EDF sur l'année 2010, ce qui va dans le sens de l'exécution de la décision précitée du Conseil d'Etat.
4.2. Couverture des coûts des DNN
Pour fournir leurs clients aux tarifs réglementés de vente, les DNN s'approvisionnent auprès d'EDF aux tarifs de cession. La marge nette théorique de l'activité de fourniture des DNN, dégagée par les tarifs réglementés de vente envisagés, doit être suffisante pour assurer la continuité de leur mission de fourniture, quelles que soient les particularités de leur fourniture.
Elle est calculée par différence entre la moyenne du tarif réglementé de vente et la somme des moyennes des tarifs de cession, du TURPE et du coût standard de commercialisation. La CRE a retenu le coût de commercialisation d'EDF comme coût standard de référence, considéré comme supérieur ou égal aux coûts de commercialisation des DNN. Les éléments de coûts dont elle dispose pour quelques DNN sont conformes à cette hypothèse.
La marge a été calculée pour deux catégories extrêmes de DNN : la première correspond aux DNN dont la répartition des clients aux tarifs réglementés de vente est proche de la répartition nationale ; la deuxième correspond à ceux fournissant uniquement des clients résidentiels au tarif de vente bleu. Les résultats sont présentés ci-dessous pour les tarifs de cession en vigueur et ceux envisagés.
Marge nette théorique de l'activité de fourniture aux tarifs réglementés de vente (en €/MWh)
| |À L'ORIGINE DU DÉCRET
tarif de cession|AU 15 AOÛT 2009|APRÈS HAUSSES ENVISAGÉES
des tarifs de vente et de cession|
|------------------------------------------------------------|--------------------------------------------|---------------|----------------------------------------------------------------|
|DNN de 1re catégorie (répartition nationale de la clientèle)| 2,9 | 7,5 | 5,5 |
| DNN de 2e catégorie (clientèle résidentielle) | 3,7 | 8,2 | 5,6 |
Les évolutions simultanées des tarifs de cession et des tarifs réglementés de vente ont pour effet de diminuer les marges des DNN par rapport à la situation au 15 août 2009. Toutefois, la marge de l'activité de fourniture aux tarifs réglementés de vente des DNN reste significative.
Par ailleurs, il serait souhaitable de prévoir une concertation associant les DNN à l'occasion des futurs mouvements des tarifs de cession.
(6) La part « ruban » de la part production d'un tarif évalue les recettes « production » devant couvrir les coûts de production imputables à la consommation d'un client théorique qui consommerait la même quantité d'électricité à chaque instant pendant une année entière. En théorie, les parts « ruban » doivent être identiques sur tous les tarifs.
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