JORF n°0302 du 30 décembre 2015

Participaient à la séance : Catherine EDWIGE, Hélène GASSIN, Yann PADOVA, et Jean-Pierre SOTURA, commissaires.

  1. Contexte

L'interruptibilité consiste à réduire de manière instantanée et avec un préavis très court la puissance de soutirage d'un utilisateur raccordé au réseau public de transport d'électricité. Ce type de services peut être mobilisé par RTE en cas de situations graves et fortuites du système électrique résultant d'un déséquilibre entre la production et la consommation ou d'une contrainte de réseau.
Ce dispositif, introduit par loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, est en vigueur depuis la publication de l'arrêté du 10 décembre 2012 pris en application de l'article L. 321-19 du code de l'énergie. Dans ce cadre, la CRE avait rendu dans sa délibération du 19 avril 2012 un avis favorable au projet d'arrêté qui lui avait été présenté.
L'article L. 321-19 du code de l'énergie, modifié par l'article 158 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dispose désormais que « lorsque le fonctionnement normal du réseau public de transport est menacé de manière grave et immédiate ou requiert des appels aux réserves mobilisables, le gestionnaire du réseau public de transport procède, à son initiative, à l'interruption instantanée de la consommation des consommateurs finals raccordés au réseau public de transport et à profil d'interruption instantanée.
Les sujétions de service public ainsi imposées aux consommateurs finals agréés à profil d'interruption instantanée font l'objet d'une compensation par le gestionnaire du réseau public de transport au titre du coût de la défaillance à éviter, dans la limite d'un plafond annuel de 120 € par kilowatt.
Le niveau des tarifs d'utilisation du réseau de transport d'électricité prend en compte les effets d'une modification des conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de transport compense les sujétions imposées aux consommateurs finals agréés, dès l'entrée en vigueur de cette modification.
Le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport est fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie.
Les conditions d'agrément des consommateurs finals à profil d'interruption instantanée, les modalités techniques générales de l'interruption instantanée et les conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de transport compense les consommateurs finals agréés sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie ».
En application de ces nouvelles dispositions, la ministre de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie, et le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique ont saisi la CRE par courrier du 5 novembre 2015 pour avis sur un projet d'arrêté détaillant les modalités techniques et économiques de mise en œuvre du dispositif.
Un second projet d'arrêté fixant le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport a par ailleurs été présenté au Conseil supérieur de l'énergie (CSE) le 3 novembre 2015. Il fait état d'un objectif total de 1600 MW de capacités interruptibles réparti en deux catégories de sites. L'adoption de cet arrêté n'est pas subordonnée à un avis de la CRE.
La CRE a auditionné RTE le 26 novembre 2015 afin de recueillir ses remarques en tant que gestionnaire du réseau de transport d'électricité quant aux modalités techniques du projet d'arrêté et au coût total du dispositif.

  1. Modalités contenues dans le projet d'arrêté

Le projet d'arrêté soumis à l'avis de la CRE introduit des modifications significatives par rapport au précédent dispositif en place concernant les catégories de sites interruptibles, l'engagement de disponibilité, et les modalités de cumul avec d'autres dispositifs.

2.1. Deux catégories de sites à profil d'interruption instantanée proposées

L'article L.321-19 du Code de l'énergie dispose que « le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport est fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie ».
Les objectifs en volume, tels qu'envisagés dans le second projet d'arrêté présenté pour avis au CSE (la CRE n'a pas eu à se prononcer sur cet arrêté), sont en très forte hausse par rapport au dispositif actuellement en vigueur. Ils représentent 1600 MW de capacité interruptible à partir de 2016.
Pour accompagner cette augmentation des objectifs, deux catégories de sites à profil d'interruption instantanée sont définies avec des critères d'éligibilité et de rémunération différents :

- la catégorie 1, pour les sites présentant une disponibilité annuelle minimale de 7 500 heures, une puissance interruptible minimale de 40 MW, et pouvant être activés dans un délai inférieur ou égal à cinq secondes à compter de la réception de l'ordre de début d'activation. Pour cette catégorie, la compensation pourra atteindre au maximum 90 000 €/MW/an, avec un volume cible fixé à 1 000 MW.
- la catégorie 2, pour les sites présentant une disponibilité annuelle minimale de 4 500 heures, une puissance interruptible minimale de 25 MW, et pouvant être activés dans un délai inférieur ou égal à trente secondes à compter de la réception de l'ordre de début d'activation. Pour cette catégorie, la compensation pourra atteindre au maximum 30 000 €/MW/an, avec un volume cible fixé à 600 MW.

2.2. Engagement de disponibilité

RTE s'assure de la réalisation de l'interruption en comparant la consommation réalisée sur le site avec le programme prévisionnel de consommation du site concerné. Ce dernier doit être disponible à chaque instant, et s'interrompre d'une puissance égale à sa puissance interruptible.
L'élargissement du dispositif prévu par la loi relative à la transition énergétique par la croissance verte nécessite de définir des modalités, d'une part plus souples pour permettre à d'autres sites de participer et, d'autre part plus simples pour faciliter les contrôles tout en préservant l'efficacité du dispositif.
Désormais, RTE devra s'assurer que les bénéficiaires ne dépassent pas une certaine puissance de soutirage lors des activations, et ce indépendamment de leur niveau de consommation avant l'activation.

2.3. Possibilité de cumuler l'interruptibilité avec la participation à d'autres réserves d'équilibrage contractualisées par RTE

Le projet d'arrêté prévoit la possibilité pour un site de cumuler la participation au dispositif d'interruptibilité avec d'autres mécanismes : « la puissance interruptible d'un site à profil d'interruption instantanée peut participer aux mécanismes prévus par les articles L. 321-10, L. 321-11 et L. 271-1 du code de l'énergie ».
Il est par ailleurs prévu que « l'énergie effectivement activée et valorisée sur l'un des mécanismes précités ne peut faire l'objet d'une rémunération au titre de l'interruptibilité ».
Les modalités proposées permettront aux sites retenus de continuer à participer aux dispositifs de contractualisation de réserves organisés par RTE et de bénéficier de la rémunération associée (notamment s'agissant des réserves primaire, secondaire, rapide et complémentaire).

  1. Analyse de la CRE

Conditions de sélection et d'agrément des sites à profil d'interruption instantanée :
Les modalités d'obtention de l'agrément préalable de la part de RTE ne sont pas précisées dans le projet d'arrêté soumis à l'avis de la CRE. Elles ont toutefois été mises à disposition des acteurs sur le site de RTE.
Ainsi qu'elle l'avait souligné dans son avis du 19 avril 2012, la CRE rappelle qu'il est essentiel que l'attribution de l'agrément soit effectuée en toute transparence et selon des modalités non discriminatoires.
Modalités de compensation des sites :
L'article L. 321-19 dispose que « les sujétions de service public ainsi imposées aux consommateurs finals agréés à profil d'interruption instantanée font l'objet d'une compensation par le gestionnaire du réseau public de transport au titre du coût de la défaillance à éviter, dans la limite d'un plafond annuel de 120 € par kilowatt ».Ainsi que la CRE l'avait souligné dans son avis du 19 avril 2012, il est difficile d'estimer la valeur économique réelle d'un service de type assurantiel au regard du coût de la défaillance à éviter. Au-delà de ce constat, la CRE relève néanmoins que si les niveaux de compensation contenus dans le projet d'arrêté, pour les deux catégories de sites présentées, sont inférieurs au plafond de 120 € par kilowatt par an, prévu par l'article L. 321-19 du code l'énergie précité, le niveau de plafond de 90 € par kilowatt est toutefois très supérieur au plafond précédemment en vigueur.
Modalités de cumul avec d'autres dispositifs :
L'augmentation significative des objectifs en volumes et l'élargissement subséquent du nombre de sites industriels éligibles à l'interruptibilité combinée à celle de la rémunération conduiront à inclure dans ce dispositif un nombre croissant de sites qui participent par ailleurs aux réserves d'équilibrage contractualisées par RTE.
Certains sites pourraient être incités, en l'absence de modalités de cumul, à effectuer un arbitrage entre les différents dispositifs, qui pourrait générer une hausse du coût de contractualisation des réserves d'équilibrage, le dispositif d'interruptibilité offrant un bilan coût bénéfice plus intéressant pour les sites industriels éligibles.
Dans son précédent avis du 19 avril 2012, la CRE avait souligné que « le mécanisme retenu ne doit pas créer d'effet d'aubaine ou venir assécher le gisement d'effacements au détriment de mécanismes qui contribuent efficacement au renforcement de la sécurité d'approvisionnement, et, in fine, à la réduction de la facture des consommateurs finals ».
La CRE considère que les modalités de cumul proposées permettent d'éviter cet assèchement des gisements d'effacements actifs et un renchérissement possible du coût des réserves d'équilibrage. Elle relève toutefois que la possibilité de cumuler la participation au dispositif d'interruptibilité avec les dispositifs permettant de fournir à RTE les réserves d'équilibrage permettra à certains sites de bénéficier d'une rémunération additionnelle. Ce cumul pourrait avoir un impact concurrentiel sur les dispositifs de réserve d'équilibrage auxquels participent d'autres sites (de consommation ou de production) ne disposant pas de cette rémunération.
Coût du dispositif :
L'article L. 321-19 du Code de l'énergie prévoit que le niveau des tarifs d'utilisation du réseau de transport d'électricité prend en compte les impacts financiers du dispositif pour RTE dès l'entrée en vigueur du nouveau dispositif.
Les sites seront retenus par RTE en fonction du prix proposé. Le nouveau dispositif pourrait entrer en vigueur au 1er juillet 2016, selon les éléments présentés par RTE. Dans l'attente, le dispositif actuel sera maintenu en vigueur.
Compte tenu de ces éléments, le coût total du dispositif d'interruptibilité pourrait atteindre 63 M€ en 2016, et 108 M€ en année pleine à partir de 2017, alors que le dispositif actuel a un coût de 18 M€/an. En année pleine, le nouveau dispositif pourrait donc conduire à un surcoût de 90 M€, soit environ 2 % du TURPE transport.

  1. Avis de la CRE

La CRE prend acte des modalités techniques et économiques contenues dans le projet d'arrêté.


Historique des versions

Version 1

Participaient à la séance : Catherine EDWIGE, Hélène GASSIN, Yann PADOVA, et Jean-Pierre SOTURA, commissaires.

1. Contexte

L'interruptibilité consiste à réduire de manière instantanée et avec un préavis très court la puissance de soutirage d'un utilisateur raccordé au réseau public de transport d'électricité. Ce type de services peut être mobilisé par RTE en cas de situations graves et fortuites du système électrique résultant d'un déséquilibre entre la production et la consommation ou d'une contrainte de réseau.

Ce dispositif, introduit par loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, est en vigueur depuis la publication de l'arrêté du 10 décembre 2012 pris en application de l'article L. 321-19 du code de l'énergie. Dans ce cadre, la CRE avait rendu dans sa délibération du 19 avril 2012 un avis favorable au projet d'arrêté qui lui avait été présenté.

L'article L. 321-19 du code de l'énergie, modifié par l'article 158 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dispose désormais que « lorsque le fonctionnement normal du réseau public de transport est menacé de manière grave et immédiate ou requiert des appels aux réserves mobilisables, le gestionnaire du réseau public de transport procède, à son initiative, à l'interruption instantanée de la consommation des consommateurs finals raccordés au réseau public de transport et à profil d'interruption instantanée.

Les sujétions de service public ainsi imposées aux consommateurs finals agréés à profil d'interruption instantanée font l'objet d'une compensation par le gestionnaire du réseau public de transport au titre du coût de la défaillance à éviter, dans la limite d'un plafond annuel de 120 € par kilowatt.

Le niveau des tarifs d'utilisation du réseau de transport d'électricité prend en compte les effets d'une modification des conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de transport compense les sujétions imposées aux consommateurs finals agréés, dès l'entrée en vigueur de cette modification.

Le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport est fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie.

Les conditions d'agrément des consommateurs finals à profil d'interruption instantanée, les modalités techniques générales de l'interruption instantanée et les conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de transport compense les consommateurs finals agréés sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, après avis de la Commission de régulation de l'énergie ».

En application de ces nouvelles dispositions, la ministre de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie, et le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique ont saisi la CRE par courrier du 5 novembre 2015 pour avis sur un projet d'arrêté détaillant les modalités techniques et économiques de mise en œuvre du dispositif.

Un second projet d'arrêté fixant le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport a par ailleurs été présenté au Conseil supérieur de l'énergie (CSE) le 3 novembre 2015. Il fait état d'un objectif total de 1600 MW de capacités interruptibles réparti en deux catégories de sites. L'adoption de cet arrêté n'est pas subordonnée à un avis de la CRE.

La CRE a auditionné RTE le 26 novembre 2015 afin de recueillir ses remarques en tant que gestionnaire du réseau de transport d'électricité quant aux modalités techniques du projet d'arrêté et au coût total du dispositif.

2. Modalités contenues dans le projet d'arrêté

Le projet d'arrêté soumis à l'avis de la CRE introduit des modifications significatives par rapport au précédent dispositif en place concernant les catégories de sites interruptibles, l'engagement de disponibilité, et les modalités de cumul avec d'autres dispositifs.

2.1. Deux catégories de sites à profil d'interruption instantanée proposées

L'article L.321-19 du Code de l'énergie dispose que « le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport est fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie ».

Les objectifs en volume, tels qu'envisagés dans le second projet d'arrêté présenté pour avis au CSE (la CRE n'a pas eu à se prononcer sur cet arrêté), sont en très forte hausse par rapport au dispositif actuellement en vigueur. Ils représentent 1600 MW de capacité interruptible à partir de 2016.

Pour accompagner cette augmentation des objectifs, deux catégories de sites à profil d'interruption instantanée sont définies avec des critères d'éligibilité et de rémunération différents :

- la catégorie 1, pour les sites présentant une disponibilité annuelle minimale de 7 500 heures, une puissance interruptible minimale de 40 MW, et pouvant être activés dans un délai inférieur ou égal à cinq secondes à compter de la réception de l'ordre de début d'activation. Pour cette catégorie, la compensation pourra atteindre au maximum 90 000 €/MW/an, avec un volume cible fixé à 1 000 MW.

- la catégorie 2, pour les sites présentant une disponibilité annuelle minimale de 4 500 heures, une puissance interruptible minimale de 25 MW, et pouvant être activés dans un délai inférieur ou égal à trente secondes à compter de la réception de l'ordre de début d'activation. Pour cette catégorie, la compensation pourra atteindre au maximum 30 000 €/MW/an, avec un volume cible fixé à 600 MW.

2.2. Engagement de disponibilité

RTE s'assure de la réalisation de l'interruption en comparant la consommation réalisée sur le site avec le programme prévisionnel de consommation du site concerné. Ce dernier doit être disponible à chaque instant, et s'interrompre d'une puissance égale à sa puissance interruptible.

L'élargissement du dispositif prévu par la loi relative à la transition énergétique par la croissance verte nécessite de définir des modalités, d'une part plus souples pour permettre à d'autres sites de participer et, d'autre part plus simples pour faciliter les contrôles tout en préservant l'efficacité du dispositif.

Désormais, RTE devra s'assurer que les bénéficiaires ne dépassent pas une certaine puissance de soutirage lors des activations, et ce indépendamment de leur niveau de consommation avant l'activation.

2.3. Possibilité de cumuler l'interruptibilité avec la participation à d'autres réserves d'équilibrage contractualisées par RTE

Le projet d'arrêté prévoit la possibilité pour un site de cumuler la participation au dispositif d'interruptibilité avec d'autres mécanismes : « la puissance interruptible d'un site à profil d'interruption instantanée peut participer aux mécanismes prévus par les articles L. 321-10, L. 321-11 et L. 271-1 du code de l'énergie ».

Il est par ailleurs prévu que « l'énergie effectivement activée et valorisée sur l'un des mécanismes précités ne peut faire l'objet d'une rémunération au titre de l'interruptibilité ».

Les modalités proposées permettront aux sites retenus de continuer à participer aux dispositifs de contractualisation de réserves organisés par RTE et de bénéficier de la rémunération associée (notamment s'agissant des réserves primaire, secondaire, rapide et complémentaire).

3. Analyse de la CRE

Conditions de sélection et d'agrément des sites à profil d'interruption instantanée :

Les modalités d'obtention de l'agrément préalable de la part de RTE ne sont pas précisées dans le projet d'arrêté soumis à l'avis de la CRE. Elles ont toutefois été mises à disposition des acteurs sur le site de RTE.

Ainsi qu'elle l'avait souligné dans son avis du 19 avril 2012, la CRE rappelle qu'il est essentiel que l'attribution de l'agrément soit effectuée en toute transparence et selon des modalités non discriminatoires.

Modalités de compensation des sites :

L'article L. 321-19 dispose que « les sujétions de service public ainsi imposées aux consommateurs finals agréés à profil d'interruption instantanée font l'objet d'une compensation par le gestionnaire du réseau public de transport au titre du coût de la défaillance à éviter, dans la limite d'un plafond annuel de 120 € par kilowatt ».Ainsi que la CRE l'avait souligné dans son avis du 19 avril 2012, il est difficile d'estimer la valeur économique réelle d'un service de type assurantiel au regard du coût de la défaillance à éviter. Au-delà de ce constat, la CRE relève néanmoins que si les niveaux de compensation contenus dans le projet d'arrêté, pour les deux catégories de sites présentées, sont inférieurs au plafond de 120 € par kilowatt par an, prévu par l'article L. 321-19 du code l'énergie précité, le niveau de plafond de 90 € par kilowatt est toutefois très supérieur au plafond précédemment en vigueur.

Modalités de cumul avec d'autres dispositifs :

L'augmentation significative des objectifs en volumes et l'élargissement subséquent du nombre de sites industriels éligibles à l'interruptibilité combinée à celle de la rémunération conduiront à inclure dans ce dispositif un nombre croissant de sites qui participent par ailleurs aux réserves d'équilibrage contractualisées par RTE.

Certains sites pourraient être incités, en l'absence de modalités de cumul, à effectuer un arbitrage entre les différents dispositifs, qui pourrait générer une hausse du coût de contractualisation des réserves d'équilibrage, le dispositif d'interruptibilité offrant un bilan coût bénéfice plus intéressant pour les sites industriels éligibles.

Dans son précédent avis du 19 avril 2012, la CRE avait souligné que « le mécanisme retenu ne doit pas créer d'effet d'aubaine ou venir assécher le gisement d'effacements au détriment de mécanismes qui contribuent efficacement au renforcement de la sécurité d'approvisionnement, et, in fine, à la réduction de la facture des consommateurs finals ».

La CRE considère que les modalités de cumul proposées permettent d'éviter cet assèchement des gisements d'effacements actifs et un renchérissement possible du coût des réserves d'équilibrage. Elle relève toutefois que la possibilité de cumuler la participation au dispositif d'interruptibilité avec les dispositifs permettant de fournir à RTE les réserves d'équilibrage permettra à certains sites de bénéficier d'une rémunération additionnelle. Ce cumul pourrait avoir un impact concurrentiel sur les dispositifs de réserve d'équilibrage auxquels participent d'autres sites (de consommation ou de production) ne disposant pas de cette rémunération.

Coût du dispositif :

L'article L. 321-19 du Code de l'énergie prévoit que le niveau des tarifs d'utilisation du réseau de transport d'électricité prend en compte les impacts financiers du dispositif pour RTE dès l'entrée en vigueur du nouveau dispositif.

Les sites seront retenus par RTE en fonction du prix proposé. Le nouveau dispositif pourrait entrer en vigueur au 1er juillet 2016, selon les éléments présentés par RTE. Dans l'attente, le dispositif actuel sera maintenu en vigueur.

Compte tenu de ces éléments, le coût total du dispositif d'interruptibilité pourrait atteindre 63 M€ en 2016, et 108 M€ en année pleine à partir de 2017, alors que le dispositif actuel a un coût de 18 M€/an. En année pleine, le nouveau dispositif pourrait donc conduire à un surcoût de 90 M€, soit environ 2 % du TURPE transport.

4. Avis de la CRE

La CRE prend acte des modalités techniques et économiques contenues dans le projet d'arrêté.