- Analyse de la CRE et de la CNMC concernant les avantages du projet
L'analyse coûts/avantages présentée par GRTgaz reprend les résultats de l'étude menée par le cabinet Pöyry, qui a analysé trois scénarios d'évolution du contexte international, en particulier de prix du gaz naturel liquéfié. La méthodologie retenue consiste à évaluer les effets de la création d'une zone de marché unique sur la formation des prix en fonction des arbitrages effectués par les acteurs de marché et selon l'évolution des schémas de flux associés à l'élimination des congestions entre le Nord et le Sud.
Dans le scénario de référence, qui prolonge les conditions de marché actuelles, GRTgaz retient que le projet Val de Saône produit un bénéfice évalué à 1 681 millions d'euros pour la période 2019-2038. La prise en compte des écarts de prix observés entre le PEG Nord et le PEG Sud, 7,4 €/MWh en moyenne de novembre 2013 à janvier 2014 montre que ces bénéfices pourraient être encore plus importants. L'analyse de sensibilité montre toutefois que, si l'Europe devait devenir durablement plus attractive pour le GNL, les bénéfices pourraient décroître de manière significative.
En ce qui concerne les bénéfices transfrontaliers, l'étude du cabinet Pöyry établit que la création d'une zone de marché unique en France apporterait des bénéfices à l'Espagne en la connectant à un marché liquide lui-même bien interconnecté avec les places de marché du nord-ouest de l'Europe. Dans le scénario de référence, sur la période 2019-2038, les gains réalisés par l'Espagne en vertu d'une baisse des prix du gaz sont évaluées à 515 millions d'euros, indépendamment de l'amélioration des possibilités d'arbitrage offertes aux acteurs de marché situés en Espagne. Dans les scénarios alternatifs, où le prix du GNL baisserait, ces bénéfices seraient moins importants et pourraient même être nuls du strict point de vue de la formation des prix.
La CRE et la CNMC ont analysé conjointement ces résultats qu'elles ont nuancés au regard du fonctionnement actuel du marché espagnol en ne prenant pas en considération les gains d'arbitrage pour les acteurs espagnols sur le marché du GNL. En revanche, la CRE et la CNMC soulignent l'intérêt pour la péninsule Ibérique d'être directement raccordée à une place de marché de la taille du PEG France. Considérant les résultats de l'analyse coûts/avantages et à la lumière des facteurs qualitatifs relatifs à l'intérêt du projet Val de Saône dans la perspective de la création d'une zone de marché unique, la France tire un bénéfice net positif du projet à même de justifier sa réalisation. Les bénéfices pour l'Espagne caractérisent l'intérêt transfrontalier de ce projet.
- Estimation des coûts et de l'impact tarifaire du projet
Le coût du projet Val de Saône estimé par GRTgaz dans le cadre de l'analyse coûts/avantages est de 650 millions d'euros avec une incertitude évaluée à plus ou moins 20 %. Consistant en un renforcement du cœur de réseau de GRTgaz, et dans la mesure où la création d'une zone de marché unique en France conduirait à la perte des revenus collectés à la liaison Nord-Sud, la réalisation du projet Val de Saône conduirait à une augmentation moyenne des niveaux tarifaires de GRTgaz de 9,5 % en 2018. Dans le même temps, la France s'est engagée dans un programme d'investissements importants complémentaires au projet Val de Saône pour la réalisation de la zone de marché unique ainsi qu'à des développements visant, notamment, à l'intégration du terminal méthanier de Dunkerque et à la création de capacité d'interconnexion physique de la France vers la Belgique.
Par la position de la France dans le marché européen, l'ensemble de ces investissements contribue à l'achèvement du marché intérieur et à la sécurité d'approvisionnement. Une aide financière de l'Union pour le projet Val de Saône constituerait donc un moyen efficace de réduire l'effet de l'accroissement des charges de transport pour les utilisateurs des infrastructures situées en France, en particulier pour les échanges transfrontaliers. Elle permettrait de réduire l'incertitude quant aux bénéfices effectifs du projet du point de vue des prix de marché en cas de forte baisse des prix internationaux du GNL.
- Décision de la CRE
La CRE adopte la décision relative au traitement de la demande de GRTgaz de répartition transfrontalière des coûts, qui a été rédigée conjointement par la CRE et la CNMC et est annexée à la présente délibération.
Cette décision conjointe prend en compte les recommandations de l'ACER publiées le 25 septembre 2013 qui préconisent, s'agissant des projets d'intérêt commun figurant sur la première liste établie par la Commission européenne, que les compensations transfrontalières devraient être limitées aux cas où le pays hôte d'un projet subit un bénéfice net négatif. Après avoir étudié l'analyse coûts/avantages proposée par GRTgaz et en avoir conclu que la France tire un bénéfice net positif du projet Val de Saône, la CRE et la CNMC décident que la France en supportera l'ensemble des coûts. Ces coûts, dans la mesure où ils correspondent à ceux d'un opérateur efficace, seront intégrés aux tarifs de GRTgaz, après déduction des éventuelles aides financières de l'Union. L'Espagne ne sera donc pas sollicitée pour une contribution financière aux coûts d'investissement.
La présente délibération sera transmise à la CNMC et à l'ACER.
La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 10 avril 2014.
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