Vu les observations en défense, enregistrées le 7 juin 2011, présentées par la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 444 608 442, dont le siège social est situé 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris-La Défense Cedex, représentée par son secrétaire général, M. François ABKIN, et ayant pour avocat Me Romain GRANJON, cabinet ADAMAS, 55, boulevard des Brotteaux, 69006 Lyon.
La société ERDF indique que la demande de raccordement de la société Soleol II est soumise à la version 6 de sa procédure de traitement des demandes de raccordement des installations de production d'électricité aux réseaux publics de distribution, identifié « ERDF-PRO-RES_21E ».
Elle fait valoir que son article 4.9 était opposable à la demande de raccordement de la société Soleol II en août 2009. Elle rappelle que ce paragraphe dispose que la « fourniture par le producteur d'un des documents suivants est nécessaire pour l'entrée en file d'attente : pour les installations soumises à permis de construire, une copie de la décision accordant le permis de construire spécifiée à l'article R. 421-29 du code de l'urbanisme [...] la date d'entrée en file d'attente est fixée à la date de réception par ERDF de ce document ».
La société ERDF expose qu'avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions règlementaires découlant du décret du 19 novembre 2009, la société Soleol II ne disposait d'aucun permis de construire. Elle en déduit que c'est à bon droit qu'elle a décidé la sortie du projet de la file d'attente.
Elle ajoute que si les règles issues de la procédure de traitement des demandes de raccordement l'engagent contractuellement, elles sont, également, opposables aux demandeurs de raccordement.
La société ERDF indique que les constructions développées par le projet de la société Soleol II entraient au minimum dans le champ d'application de l'article R. 421-9 du code de l'urbanisme, lequel dispose que les « constructions ayant pour effet de créer une surface hors œuvre brute supérieure à deux mètres carrés et inférieures ou égale à vingt mètres carrés » doivent être précédées d'une déclaration préalable de travaux.
Elle explique que la régularité de la demande de raccordement était subordonnée à la production de la déclaration de travaux et que le dossier de la société Soleol II ne comportait pas cette pièce.
La société ERDF ajoute qu'il importe peu qu'elle ait délivré une proposition technique et financière à la société Soleol II dans la mesure où cette circonstance ne peut couvrir le vice qui entache la demande initiale.
Elle soutient, par ailleurs, que dans la mesure où la société Soleol II lui a transmis son accord sur la seconde proposition technique et financière, le 6 décembre 2010, c'est à bon droit qu'elle en a déduit que le projet entrait dans le champ d'application du moratoire instauré par le décret du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil, l'accord ayant été adressé postérieurement au 1er décembre 2010.
La société ERDF demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de rejeter la demande de la société Soleol II.
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Vu les observations en réplique, enregistrées le 22 juin 2011, présentées par la société Soleol II.
La société Soleol II indique que sa lettre du 8 juin 2010, dans laquelle elle constatait la sortie de file d'attente de son projet, à la suite du courrier envoyé par la société ERDF le 20 mai 2010 et présentait immédiatement une demande d'étude détaillée de raccordement afin de rentrer de nouveau en file d'attente, n'a été motivée que par la « rédaction illégale de la documentation technique de référence » de la société ERDF, retranscrite dans ladite lettre du 20 mai 2010.
Elle précise que trois interprétations de cette lettre du 8 juin 2010 sont possibles :
― tout d'abord, ce courrier peut être purement recognitif et n'emporter nulle décision de sa part de retirer son projet de la file d'attente ;
― ensuite, il peut s'agir d'une décision de rompre le contrat né de l'acceptation de la proposition technique et financière. Cette décision résulterait d'une erreur de droit, causée par l'autre partie et elle serait, dès lors affectée d'un vice du consentement ;
― enfin, une fois purgée de l'interprétation erronée des textes, la lettre a pu avoir pour objet de compléter le dossier avec l'arrêté délivrant le permis de construire, exigé aux termes des dispositions du décret du 19 novembre 2009.
La société Soleol II expose qu'elle s'est bornée, le 8 juin 2010, à tirer les conséquences de la réglementation alors apparemment applicable, qui imposait l'obtention d'un permis de construire au 1er juin 2010.
Elle considère que jusqu'à la publication du décret du 19 novembre 2009, les panneaux photovoltaïques n'entraient pas dans les catégories de constructions soumises à permis de construire ou à déclaration préalable, en application du code de l'urbanisme.
La société Soleol II ajoute qu'elle ne pourrait alors que demander au comité de règlement des différends et des sanctions de tirer du caractère manifestement inadapté du délai imposé par la société ERDF aux producteurs les mêmes conséquences que celles qu'il a tirées, notamment dans la décision du 26 novembre 2010, relative au différend N3D.
Elle considère qu'en toute hypothèse, elle a objectivement complété son dossier le 8 juin 2010 en fournissant l'arrêté de permis de construire concernant son installation de production et en sollicitant de « rentrer à nouveau en file d'attente ».
Elle estime que l'argumentation de la société ERDF relative à l'opposabilité du décret du 9 décembre 2010 au projet accepté le 6 décembre 2010 est inopérante, dans la mesure où elle ne requiert la réintégration dans la file d'attente que de son seul premier projet.
La société Soleol II demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie :
― de constater l'illégalité du refus implicite opposée par la société ERDF à sa demande de réintégration de son premier projet sur le site du Pied de la Chèvre dans la file d'attente ;
― de prononcer la réintégration de son projet du Pied de la Chèvre dans la file d'attente :
― à titre principal, à la date de réception par la société ERDF de sa lettre du 8 juin 2010 ;
― à titre subsidiaire, au 18 août 2009 ;
― de rejeter les conclusions de la société ERDF tendant à l'application du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 au premier projet du Pied de la Chèvre.
Vu la mesure d'instruction du 3 août 2011 par laquelle le rapporteur, chargé de l'instruction du dossier, a invité la société Soleol II à communiquer une copie :
― des fiches de collecte pour les installations de production photovoltaïque de la première demande de raccordement ;
― de la demande de permis de construire déposée à la mairie de Ginasservis pour le projet Le Pied de la Chèvre ;
― de l'arrêté du préfet du Var accordant à la société Soleol II un permis de construire pour la construction d'un parc photovoltaïque ;
Vu la lettre, enregistrée le 10 août 2011, par laquelle la société Soleol II a communiqué :
― la demande d'études détaillées, avec proposition technique et financière mutualisée, en date du 17 août 2009 pour trois projets d'installation de production photovoltaïque accompagnée des fiches de collecte ;
― la demande de permis de construire en date du 18 novembre 2009 déposée à la mairie de Ginasservis pour son projet de centrale photovoltaïque ;
― l'arrêté du préfet du Var en date du 4 juin 2010 accordant à la société Soleol II un permis de construire pour la construction du parc photovoltaïque, de douze postes de transformation HTA/BT, d'un poste de livraison et d'un local de maintenance au lieudit Le Pied de la Chèvre à Ginasservis.
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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, qui s'est tenue le 16 septembre 2011, en présence de :
M. Pierre-François RACINE, président du comité de règlement des différends et des sanctions, Mme Dominique GUIRIMAND, Mme Sylvie MANDEL et M. Roland PEYLET, membres du comité de règlement des différends et des sanctions ;
M. Olivier BEATRIX, directeur juridique, représentant le directeur général empêché ;
M. Didier LAFFAILLE, rapporteur, et M. Mathieu CACCIALI, rapporteur adjoint ;
M. Aymeric CHOLLET représentant la société Soleol II, assisté de Me Paul LIGNIÈRES ;
Les représentants de la société ERDF, assistés de Me Romain GRANJON.
Après avoir entendu :
― le rapport de M. Didier LAFFAILLE, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
― les observations de Me Paul LIGNIÈRES et de M. Aymeric CHOLLET pour la société Soleol II ; la société Soleol II persiste dans ses moyens et conclusions ;
― les observations de Me Romain GRANJON et de M. David COUVIDAT pour la société ERDF ; la société ERDF ne soutient pas que l'entrée en file d'attente du projet de la société Soleol II, en août 2009, aurait été obtenue par vice du consentement, fraude ou dol ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions ;
Aucun report de séance n'ayant été sollicité ;
Le comité de règlement des différends et des sanctions s'étant retiré pour en délibérer le 16 septembre 2011, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.
Vu la lettre, enregistrée le 19 septembre 2011, par laquelle la société ERDF a communiqué une déclaration de la société Delta Solar en date du 12 août 2009, qui indique que le projet d'installation de production photovoltaïque « est non soumis à déclaration d'urbanisme ».
La société ERDF considère qu'il ne lui appartenait pas de vérifier cette allégation lors de la complétude du dossier de demande de proposition technique et financière. Elle soutient que, dès lors que cette déclaration était inexacte, elle avait l'obligation de retirer le dossier de la société Soleol II de la file d'attente de raccordement.
Vu la lettre, enregistrée le 20 septembre 2011, par laquelle la société Soleol II soutient que l'installation de production était exonérée de toute formalité au titre du droit de l'urbanisme avant la publication du décret du 19 novembre 2009.
Elle indique que c'est donc « en toute bonne foi » qu'elle a déclaré à la société ERDF que son « process de production » était exonéré de formalités d'urbanisme. Elle considère que la procédure concernant les bâtiments annexes de la centrale de production était à l'époque totalement indépendante de la procédure de traitement des demandes de raccordement.
La société Soleol II soutient que la société ERDF ne peut pas prétendre aujourd'hui que la société Soleol II n'aurait jamais rempli les conditions pour entrer en file d'attente, car ce n'est pas sur cette base que la société ERDF a retiré son projet de la file d'attente.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;
Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu le décret n° 2009-1414 du 19 novembre 2009 relatif aux procédures administratives applicables à certains ouvrages de production d'électricité ;
Vu la décision de la Commission de régulation de l'énergie du 7 avril 2004 sur la mise en place des référentiels techniques des gestionnaires de réseaux publics d'électricité ;
Vu la décision du 20 février 2009 relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 11 juin 2009 portant décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en œuvre ;
Vu la décision du 12 mai 2011 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la désignation d'un rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 194-38-11 ;
Vu la décision du 8 juillet 2011 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la prorogation du délai d'instruction de la demande de règlement de différend introduite par la société Soleol II.
Les parties ayant été régulièrement convoquées à une nouvelle séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, qui s'est tenue le 24 octobre 2011, en présence de :
M. Pierre-François RACINE, président du comité de règlement des différends et des sanctions, Mme Dominique GUIRIMAND, Mme Sylvie MANDEL et M. Roland PEYLET, membres du comité de règlement des différends et des sanctions ;
M. Olivier BEATRIX, directeur juridique et représentant le directeur général empêché ;
M. Didier LAFFAILLE, rapporteur, et M. Mathieu CACCIALI, rapporteur adjoint ;
Les représentants de la société Soleol II, assistés de Me Paul LIGNIÈRES ;
Les représentants de la société ERDF, assistés de Me Romain GRANJON ;
Après avoir entendu :
― le rapport de M. Didier LAFFAILLE, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
― les observations de Me Paul LIGNIÈRES et de M. Ronald KNOCHE pour la société Soleol II ; la société Soleol II indique que le délai d'instruction du permis de construire était de sept mois et non de neuf mois comme mentionné dans ses dernières écritures ; la société Soleol II persiste dans ses moyens et conclusions ;
― les observations de Me Romain GRANJON pour la société ERDF ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions ;
Aucun report de séance n'ayant été sollicité ;
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré le 24 octobre 2011, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.
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Les faits :
Il ressort des pièces du dossier que la société Soleol II développe un projet de centrale photovoltaïque au sol Le Pied de la Chèvre, pour une puissance totale de production installée de 10 420 kWc, sur le territoire de la commune de Ginasservis (Var). La société Electricité Réseau Distribution France (ERDF) est le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité sur le territoire de cette commune.
Le 17 août 2009, la société Soleol II a déposé auprès de la société ERDF trois demandes d'étude détaillée, avec proposition technique et financière mutualisée, pour ses projets d'installation de production photovoltaïque.
Le 24 août 2009, la société ERDF a accusé réception de la demande de proposition technique et financière pour le raccordement de trois projets photovoltaïques de la société Soleol II, pour une puissance de 3 320 kWc pour le site Le Pied de la Chèvre 1, de 3 780 kWc pour le site Le Pied de la Chèvre 2 et de 3 320 kWc pour le site Le Pied de la Chèvre 3. Elle a indiqué que la date d'entrée en file d'attente du projet était fixée au 18 août 2009 et qu'un devis lui serait proposé dans un délai de trois mois, soit au plus tard le 18 novembre 2009.
Le 18 novembre 2009, la société Soleol II a déposé à la mairie de Ginasservis une demande de permis de construire pour le projet de centrale photovoltaïque Le Pied de la Chèvre.
Le 6 janvier 2010, la société ERDF a communiqué à la société Soleol II une proposition technique et financière pour le raccordement mutualisé des trois projets de centrales photovoltaïques Le Pied de la Chèvre 1, Le Pied de la Chèvre 2 et Le Pied de la Chèvre 3 sur le réseau public de distribution par une liaison souterraine commune en HTA de 10 300 mètres, raccordée sur un nouveau départ du poste source Vinon, puis par trois antennes souterraines en HTA, respectivement de 400 mètres, 200 mètres et de 50 mètres, jusqu'aux postes de livraison. Cette proposition technique et financière a évalué le montant des travaux de raccordement à 737 604,14 € (HT) et prévu une durée de douze mois pour leur réalisation sur le réseau HTA et une durée de six mois pour leur réalisation dans le poste source HTB/HTA.
La société ERDF a également rappelé que la société Soleol II disposait d'un délai de trois mois pour donner son accord sur la proposition technique et financière et verser un acompte au titre de sa contribution aux travaux de raccordement d'un montant de 50 634,21 € (TTC).
Le 30 mars 2010, la société Soleol II a signé la proposition technique et financière transmise par la société ERDF et a versé l'acompte demandé.
Le 6 avril 2010, la société ERDF a accusé réception de l'accord de la société Soleol II sur la proposition technique et financière et du chèque d'acompte d'un montant de 50 634,21 €. Elle a, également, adressé à la société Soleol II les contrats d'accès au réseau public de distribution d'électricité (CARD) correspondant aux trois installations de production.
Le 20 mai 2010, la société ERDF a indiqué à la société Soleol II que, pour conserver sa place en file d'attente, il était nécessaire, en application du décret n° 2009-1414 du 19 novembre 2009, de la nouvelle procédure de traitement des demandes de raccordement et du moratoire de six mois imposé par le ministère de l'écologie et du développement durable, d'obtenir le permis de construire de ses projets de production photovoltaïque au plus tard le 1er juin 2010 et de fournir l'arrêté accordant le permis au plus tard le 15 juin suivant.
Le 4 juin 2010, le préfet du Var a accordé à la société Soleol II un permis de construire pour la construction d'un parc photovoltaïque, de douze postes de transformation HTA/BT, d'un poste de livraison et d'un local de maintenance au lieudit Le Pied de la Chèvre à Ginasservis.
Le 8 juin 2010, la société Soleol II a indiqué à la société ERDF que, faute pour elle de disposer d'un permis de construire délivré à une date antérieure au 1er juin 2010, ses projets de production photovoltaïque étaient sortis de la file d'attente à cette même date. La société Soleol II a communiqué à la société ERDF une nouvelle demande d'étude détaillée de raccordement avec proposition technique et financière pour son projet d'installation de production photovoltaïque et sollicité la restitution du montant de l'acompte versé.
Le 11 octobre 2010, la société ERDF a communiqué à la société Soleol II une nouvelle proposition technique et financière pour le raccordement d'un projet de centrale photovoltaïque Le Pied de la Chèvre, pour une puissance de production maximale injectée de 9 700 kW sur le réseau public de distribution par une liaison souterraine en HTA de 21,5 kilomètres, raccordée sur un nouveau départ du poste source Barjols. Cette proposition technique et financière a évalué le montant des travaux de raccordement à 1 715 348,95 € (HT) et prévu une durée de douze mois pour leur réalisation sur le réseau HTA et dans le poste source HTB/HTA.
La société ERDF a également rappelé que la société Soleol II disposait d'un délai de trois mois pour accepter la nouvelle proposition technique et financière et verser un acompte au titre de sa contribution aux travaux de raccordement d'un montant de 97 260,29 € (TTC).
Le 6 décembre 2010, la société Soleol II a transmis à la société ERDF cette nouvelle proposition technique et financière signée, à la date du 28 octobre 2010, et a versé l'acompte demandé.
Le 17 janvier 2011, la société ERDF a indiqué à la société Soleol II qu'ayant réceptionné la proposition technique et financière ainsi que le chèque d'acompte, postérieurement au 1er décembre 2010, au vu du cachet de la poste du 6 décembre 2010, elle considérait que son projet d'installation de production était concerné par les dispositions du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil.
Le 10 février 2011, la société Soleol II a demandé à la société ERDF de confirmer que son projet d'installation de production photovoltaïque entrait dans les cas de dérogation prévus à l'article 3 du décret du 9 décembre 2010 et était subordonné à la mise en service de l'installation dans un délai de dix-huit mois à compter de la date d'acceptation de la proposition technique et financière.
Le 10 mars 2011, la société ERDF a confirmé à la société Soleol II que son projet entrait dans le champ d'application de l'article 1er du décret du 9 décembre 2010.
Le 20 avril 2011, la société Soleol II a demandé à la société ERDF la réintégration de son projet dans la file d'attente à la date du 18 août 2009, sans que soient mis à sa charge ni les coûts de renforcement du réseau public de distribution ni les effacements qui pourraient résulter de ce que son projet avait été exclu de la file d'attente le 1er juin 2010.
Estimant que les conditions de raccordement au réseau public de distribution de son projet d'installation de production n'étaient pas satisfaisantes, la société Soleol II a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie d'une demande de règlement du différend qui l'oppose à la société ERDF.
Sur la réintégration du projet Le Pied de la Chèvre de la société Soleol II dans la file d'attente de raccordement des installations de production :
La société Soleol II demande au comité de règlement des différends et des sanctions de prononcer la réintégration de son projet Le Pied de la Chèvre dans la file d'attente, à titre principal, à la date de réception par la société ERDF de sa lettre du 8 juin 2010, à titre subsidiaire, au 18 août 2009.
Il ressort des pièces du dossier que la société Soleol II développe un projet de centrale photovoltaïque au sol Le Pied de la Chèvre. Ce projet était initialement constitué, avant qu'il ne soit exclu par la société ERDF de la file d'attente de raccordement, de trois installations de production pour une puissance de 3 320 kWc pour le site Le Pied de la Chèvre 1, de 3 780 kWc pour le site Le Pied de la Chèvre 2 et de 3 320 kWc pour le site Le Pied de la Chèvre 3.
Le décret n° 2009-1414 du 19 novembre 2009 a subordonné la réalisation des installations de production photovoltaïque au sol au respect de nouvelles prescriptions, en exigeant notamment une autorisation d'urbanisme.
En l'espèce, de telles prescriptions étaient applicables dès l'entrée en vigueur du décret, soit le 1er décembre 2009, aux projets de centrale photovoltaïque développés par la société Soleol II, celle-ci ne pouvant bénéficier des dispositions de l'article 9 de ce même décret qui maintiennent pour les projets en cours à cette date la réglementation antérieurement applicable aux projets d'installation photovoltaïques au sol.
Ainsi que le prévoit la délibération de la Commission de régulation de l'énergie en date du 11 juin 2009, publiée au Journal officiel du 3 juillet 2009, portant décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement aux réseaux publics de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en œuvre, il appartenait à la société ERDF d'adapter, comme elle l'a fait le 26 avril 2010, sa procédure de traitement des demandes de raccordement, afin de tenir compte de l'entrée en vigueur des règles auxquelles était désormais soumise la réalisation d'une installation de production photovoltaïque au sol.
Ce faisant, en prévoyant dans sa procédure que les nouvelles règles de traitement des demandes de raccordement et de gestion de la file d'attente s'appliqueraient non seulement aux demandes présentées postérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 19 novembre 2009 mais encore aux projets déjà entrés en file d'attente à cette même date, sous réserve pour ces derniers de mesures transitoires appropriées, la société ERDF n'a pas manqué à son obligation d'assurer dans des conditions transparentes et non discriminatoires le raccordement et l'accès au réseau public de distribution.
Toutefois, en fixant au 1er juin 2010, soit six mois après la date d'entrée en vigueur du décret du 19 novembre 2009, la date à laquelle les projets ne satisfaisant pas encore aux nouvelles prescriptions résultant du décret seraient exclus « de plein droit » de la file d'attente eu égard aux multiples démarches administratives conditionnant la délivrance d'un permis de construire, dont le demandeur n'a pas la complète maîtrise, la société ERDF a retenu un délai qui, en l'espèce, était inapproprié.
Au surplus, ce délai de six mois n'a été porté à la connaissance de la société Soleol II que le 20 mai 2010.
Enfin, la société ERDF ne soutient pas que le délai de moins de sept mois ayant séparé la demande de permis de construire, faite le 18 novembre 2009, et sa délivrance par arrêté préfectoral du 4 juin 2010, serait dû à des carences du pétitionnaire.
Dans ces conditions, la société ERDF n'aurait pas été en droit de se fonder sur le non-respect par la société Soleol II du délai de six mois si le permis de construire, délivré le 4 juin 2010, avait correspondu au projet d'installation de production qui a fait l'objet, le 17 août 2009, de trois demandes d'étude détaillée et d'une demande de proposition technique et financière mutualisée, délivrée le 6 janvier 2010.
Or, il ressort des pièces du dossier, que le projet pour lequel la société Soleol II a obtenu le permis de construire, le 4 juin 2010, est substantiellement différent du projet qui a donné lieu à la proposition technique et financière en ce que le permis de construire n'autorise qu'un seul poste de livraison au lieu de trois et que l'emplacement de ce seul poste de livraison ne correspond à aucun des emplacements précédemment prévus pour les trois postes de livraison.
Qui plus est, la société Soleol II dans sa lettre du 8 juin 2010 a constaté, elle-même, que son projet était sorti de la file d'attente, a demandé la remboursement de l'acompte qu'elle avait versé et a soumis à la société ERDF une nouvelle demande de proposition technique et financière conforme au permis de construire obtenu le 4 juin 2010.
Dans ces conditions, la société Soleol II n'est pas fondée à demander la réintégration dans la file d'attente d'un projet auquel elle a substitué un projet d'installation de production différent, seul correspondant au permis de construire obtenu.
Sur les conclusions relatives à l'application du décret du 9 décembre 2010 :
La société Soleol II demande au comité de règlement des différends et des sanctions de rejeter les conclusions de la société ERDF tendant à l'application du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 au premier projet du Pied de la Chèvre.
La solution de cette demande dépendant de l'appréciation de la légalité du décret du 9 décembre 2010, il y a lieu, dans ces circonstances, de surseoir à statuer jusqu'à l'intervention de la décision au fond du Conseil d'Etat, saisi d'un recours en annulation de ce décret.
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Décide :
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