Dans ses observations, la société Paris Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de constater que la société ERDF n'a pas respecté la procédure de traitement des demandes de raccordement en omettant de transmettre une proposition technique et financière dans le délai de trois mois auquel elle s'était engagée, soit au plus tard le 30 novembre 2010.
La société Paris Energie expose qu'un tel retard est d'autant moins justifiable, que son projet ayant fait l'objet d'une étude de faisabilité en 2009, l'article 8.2.1 de la procédure de traitement des demandes de raccordement prévoit dans un tel cas que le délai de transmission d'une proposition technique et financière peut être ramené à un mois.
La société Paris Energie demande ainsi la réintégration de son projet dans la file d'attente de raccordement à la date à laquelle il a été enregistré, soit le 30 août 2010.
La société Paris Energie estime que la société ERDF a méconnu la procédure de traitement de sa demande de raccordement.
Selon la société Paris Energie, le non-respect dudit délai de trois mois par ERDF constitue une pratique manifestement discriminatoire.
Dès lors, la société Paris Energie sollicite du comité de règlement des différends et des sanctions de :
« ― constater que la société ERDF a manqué à son obligation d'information et de traitement transparent et non discriminatoire de la demande de raccordement déposée par la société Paris Energie ;
« ― constater que la société ERDF a manqué à ses obligations découlant de la procédure de traitement des demandes de raccordement en retenant abusivement la proposition de raccordement due à la société Paris Energie ;
En conséquence :
« ― enjoindre la société Electricité Réseau Distribution France de traiter le projet d'installation de production photovoltaïque de la société Paris Energie comme étant entré et resté dans la file d'attente de raccordement depuis le 31 août 2010 ;
« ― enjoindre la société Electricité Réseau Distribution France de transmettre à la société Paris Energie la proposition technique et financière nécessaire au raccordement du projet ».
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Vu la décision en date du 29 avril 2011, par laquelle le comité de règlement des différends et des sanctions a suspendu son instruction jusqu'à l'intervention de la décision du Conseil d'Etat sur les requêtes tendant à l'annulation du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010.
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Vu la lettre du directeur général du 29 août 2012, par laquelle il est demandé à la société ERDF de présenter ses observations.
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Vu les observations en défense, enregistrées le 27 septembre 2012, présentées dans l'intérêt de la société ERDF, société anonyme à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 444 608 442, dont le siège social est situé tour Winthertur, 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris-La Défense, représentée par son représentant légal, Mme Michèle Bellon, présidente du directoire, et ayant pour avocats Mes Michel Guénaire et Sylvain Bergès, cabinet Gide Loyrette Nouel AARPI, 22, cours Albert-Ier, 75008 Paris.
La société ERDF estime que le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas compétent pour statuer sur les demandes qui lui ont été soumises.
En effet, selon la société ERDF, le comité de règlement des différends et des sanctions dispose d'une compétence d'attribution dans le champ de laquelle la demande de Paris Energie ne saurait entrer. Cette demande ne concerne pas l'accès aux réseaux mais le bénéfice d'un contrat d'achat devant être conclu avec EDF.
Selon ERDF, le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas compétent pour écarter les dispositions du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010.
La société ERDF considère qu'elle a respecté son obligation d'information, de traitement transparent et de non-discrimination des demandes.
La société ERDF soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas habilité à constater que la société ERDF aurait méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement.
En tout état de cause, selon la société ERDF, le délai de délivrance d'une proposition technique et financière n'est pas opposable à la société ERDF, pour les raisons suivantes :
― le législateur n'a pas fixé de délai pour la délivrance d'une PTF pour les installations de puissance supérieure à 3 kilovoltampères ;
― la Commission de régulation de l'énergie n'était pas compétente pour imposer un délai pour la délivrance d'une PTF pour les installations de puissance supérieure à 3 kilovoltampères ;
― l'engagement de la société ERDF à respecter le délai précité est sans fondement juridique dès lors qu'il a été déterminé par une délibération illégale ;
― en tout état de cause, une jurisprudence établie confirme qu'un délai n'est impératif que lorsque la sanction de son non-respect a été prévue.
Enfin, ERDF affirme qu'elle a été confrontée à une situation exceptionnelle qui explique les difficultés rencontrées par elle dans la gestion des demandes de raccordement.
Dès lors, la société ERDF demande au comité de règlement des différends et des sanctions de :
« A titre principal :
« ― déclarer irrecevable la demande de Paris Energie.
« A titre subsidiaire :
« ― constater qu'ERDF a respecté son obligation d'information et de traitement transparent et non-discriminatoire des demandes de raccordement ;
« ― se déclarer incompétent pour constater qu'ERDF a méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement ;
« ― constater que le délai de délivrance de la PTF n'est pas opposable à ERDF ;
« ― constater qu'ERDF a été confrontée à une situation exceptionnelle qui explique les difficultés rencontrées par elle dans la gestion des demandes de raccordement.
« En tout état de cause :
« ― rejeter l'ensemble des conclusions de Paris Energie. »
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Vu les observations en réponse, enregistrées le 17 octobre 2012, présentées dans l'intérêt de la société Paris Energie.
La société Paris Energie considère, s'agissant du moyen tiré de l'incompétence du comité de règlement des différends et des sanctions soulevé par la société ERDF, qu'elle a été privée de son accès au réseau dès lors que la société ERDF ne lui a pas communiqué de proposition de raccordement dans le délai qui lui était imparti.
La société Paris Energie estime, concernant le moyen tiré de l'illégalité de la délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 11 juin 2009 soulevée par la société ERDF, que cette dernière ne justifie nullement de la saisine d'une juridiction compétente en annulation, qu'en outre la société ERDF remet en cause le principe de confiance légitime qui la lie aux autres acteurs du marché, que la société ERDF est à l'origine de la proposition de procédure de traitement, qu'enfin le délai de trois mois figurait déjà aux termes de la procédure de traitement des demandes de raccordement des installations de production d'électricité aux réseaux publics de distribution en vigueur en 2008, soit bien avant la délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 11 juin 2009.
Enfin, la société Paris Energie conteste l'existence d'un cas de force majeure, tel qu'allégué par la société ERDF.
En conséquence, la société Paris Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de :
« ― constater que la société ERDF a manqué à son obligation d'information et de traitement transparent et non discriminatoire de la demande de raccordement déposée par la société Paris Energie ;
« ― constater que la société ERDF a manqué à ses obligations découlant de la procédure de traitement des demandes de raccordement en retenant abusivement la proposition de raccordement due à la société Paris Energie et en s'abstenant de la délivrer dans le délai de trois mois à compter de la date de qualification complète de la demande.
« En conséquence :
« ― compte tenu de l'inexécution fautive par la société Electricité Réseau Distribution France dans le traitement de la demande de raccordement de la société Paris Energie et du retard que cette inexécution fautive a comme conséquence sur le traitement de sa demande et plus généralement de la réalisation de son projet, dire que le délai de raccordement du projet sera prorogé de la durée de la présente procédure ;
« ― enjoindre la société Electricité Réseau Distribution France de traiter le projet d'installation de production photovoltaïque de la société Paris Energie comme étant entré et resté dans la file d'attente de raccordement depuis le 31 août 2010 ;
« ― enjoindre la société Electricité Réseau Distribution France de transmettre à la société Paris Energie la proposition technique et financière sur la base de sa demande datée du 31 nécessaire au raccordement du projet.
« Et plus généralement, débouter la société ERDF de toutes ses demandes, fins et conclusions. »
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Vu les pièces du dossier ;
Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;
Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;
Vu la décision du 20 février 2009 relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 23 mars 2011 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 167-38-11 ;
Vu la décision n° 344972 et autres du 16 novembre 2011 du Conseil d'Etat, société Ciel et Terre et autres ;
Vu la décision du 14 février 2013 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie relative à la désignation d'un nouveau rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 167-38-11 ;
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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique, qui s'est tenue le 13 mai 2013, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de Mme Monique LIEBERT-CHAMPAGNE, président, M. Roland PEYLET et M. Christian PERS, membres, en présence de :
M. Olivier BEATRIX, directeur juridique et représentant le directeur général, empêché ;
Mme Maud BRASSART, rapporteur, et M. Thibaut DELAROCQUE, rapporteur adjoint ;
Le représentant de la société Paris Energie, assisté de Me Cécile CESSAC ;
Les représentants de la société ERDF, assistés de Me Michel GUENAIRE ;
Après avoir entendu :
― le rapport de Mme Maud BRASSART, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
― les observations de Me Cécile CESSAC pour la société Paris Energie ; la société Paris Energie persiste dans ses moyens et conclusions ;
― les observations de Me Michel GUENAIRE pour la société ERDF ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions ;
Aucun report de séance n'ayant été sollicité ;
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.
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Sur la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions :
Aux termes des dispositions de l'article L. 134-19 du code de l'énergie :
« Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend :
« 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ;
« (...)
« Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement.
« La saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties ».
Il ressort des pièces du dossier que, le 17 juillet 2010, la société Paris Energie a adressé une demande à la société ERDF pour le raccordement de son installation de production d'électricité.
La société Paris Energie demande notamment au comité de règlement des différends et des sanctions d'enjoindre à la société ERDF la transmission de l'offre de raccordement sous forme de proposition technique et financière auquel elle a droit au titre de sa demande de raccordement qualifiée de complète le 31 août 2010.
Ainsi, contrairement à ce que soutient la société ERDF, la demande de la société Paris Energie portant sur la transmission d'une proposition technique et financière pour le raccordement de son installation de production, il existe donc bien un différend lié à l'accès au réseau entre, d'une part, la société Paris Energie et, d'autre part, la société ERDF, qui relève de la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions.
Sur l'application des dispositions du décret du 9 décembre 2010 :
La société Paris Energie demande notamment au comité de règlement des différends et des sanctions d'enjoindre à la société ERDF de traiter le projet d'installation de production photovoltaïque de la société Paris Energie comme étant entré et resté dans la file d'attente depuis le 31 août 2010 et d'enjoindre à la société Electricité Réseau Distribution France de transmettre à la société Paris Energie la proposition technique et financière sur la base de sa demande datée du 31 août 2010 nécessaire au raccordement du projet.
L'article 1er du décret du 9 décembre 2010 dispose que l'« obligation de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par les installations mentionnées au 3° de l'article 2 du décret du 6 décembre 2000 susvisé est suspendue pour une durée de trois mois courant à compter de l'entrée en vigueur du présent décret. Aucune nouvelle demande ne peut être déposée durant la période de suspension ».
L'article 3 du décret du 9 décembre 2010 prévoit que les « dispositions de l'article 1er ne s'appliquent pas aux installations de production d'électricité issue de l'énergie radiative du soleil dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ».
Les dispositions de l'article 5 dudit décret précisent enfin qu'« à l'issue de la période de suspension mentionnée à l'article 1er, les demandes suspendues devront faire l'objet d'une nouvelle demande complète de raccordement au réseau pour bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat ».
La légalité dudit décret du 9 décembre 2010 n'a pas été remise en cause par la décision du 16 novembre 2011 du Conseil d'Etat, Ciel et Terre et autres.
Les dispositions du décret du 9 décembre 2010 susvisé font obligation au producteur qui n'a pu renvoyer avant le 2 décembre 2010 au gestionnaire de réseau une proposition technique et financière signée de renouveler sa demande de raccordement à l'expiration du délai de trois mois pendant lequel toutes les demandes de contrat d'obligation d'achat sont suspendues.
En l'espèce, la société Paris Energie n'a pas été en mesure de renvoyer une proposition technique et financière signée avant le 2 décembre 2010.
Cependant, la circonstance que le délai de trois mois suivant la qualification de la demande ait été dépassé par la société ERDF ne permet pas de considérer que la société Paris Energie était titulaire, à l'expiration du délai de trois mois suivant la qualification de la demande, d'une proposition technique et financière implicite susceptible d'être acceptée et renvoyée avant le 2 décembre 2010.
Il résulte de ce qui précède que le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas en droit d'enjoindre à la société ERDF de délivrer, à ce jour, à la société Paris Energie une proposition technique et financière aux conditions prévalant avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010.
Sur le respect par la société ERDF de sa procédure de traitement des demandes de raccordement, de ses obligations d'information et de traitement transparent et non discriminatoire de ces demandes :
La société Paris Energie demande au comité de règlement des différends et des sanctions de constater que la société ERDF a manqué à ses obligations découlant de la procédure de traitement des demandes de raccordement.
Il ressort des pièces produites par les parties que la société ERDF n'a pas respecté le délai de trois mois pour l'instruction de la demande de raccordement de la société Paris Energie, délai qu'il n'appartient pas au comité de règlement des différends et des sanctions d'écarter en l'absence d'illégalité manifeste.
Enfin, aucun élément produit par la société Paris Energie ne permet d'établir que la société ERDF aurait manqué à ses autres obligations.
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Décide :
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