- Objectifs de l'arrêté
La présente circulaire remplace la circulaire prise pour l'application de l'arrêté de janvier 1980 sur les tolérances applicables aux levés à grandes échelles devenu caduc. L'arrêté portant sur les classes de précision applicables aux catégories de travaux topographiques réalisés par l'Etat, les collectivités locales et leurs établissements publics ou exécutés pour leur compte intègre les évolutions technologiques intervenues au niveau de la saisie et du traitement des données depuis deux décennies, ceci afin de faciliter les relations entre les donneurs d'ordre et les entreprises prestataires exécutant les divers travaux topographiques.
Le nouveau texte ne spécifie en aucun cas les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre une certaine précision, mais simplement les outils statistiques à employer pour évaluer un levé donné. Ceci a été fait dans le but de responsabiliser séparément les donneurs d'ordre et les entreprises prestataires exécutantes :
- pour les donneurs d'ordre, il s'agit de les inciter à ne spécifier que ce dont ils ont besoin réellement en termes de précision, compte tenu de leurs contraintes économiques et des responsabilités légales qui sont les leurs, sans tenir compte des moyens à mettre en oeuvre pour atteindre cette spécification, moyens qui, par ailleurs, évoluent et ne sauraient en aucun cas être précisés sans faire perdre le bénéfice de ces évolutions ;
- pour les entreprises prestataires exécutantes, il s'agit de leur laisser une complète liberté de trouver le moyen le plus adapté pour une fourniture de données ;
- et pour les deux, ce texte crée une interface stipulant clairement sur quelles bases les contrôles de précision pourront être menés, contrôles d'exactitude faits par l'entreprise prestataire exécutante ou contrôles de recette faits par le donneur d'ordre ou à sa demande.
- Le critère statistique : la classe de précision
Le texte offre plusieurs possibilités.
2.1. Le gabarit d'erreurs
La possibilité la plus générale (art. 4 de l'arrêté) offerte est celle d'une définition sur mesure d'un gabarit d'erreurs, dont un exemple sera donné en annexe. On peut ainsi, entre autres possibilités et à titre d'exemple, changer les seuils adoptés du modèle standard décrit dans l'article 5 de l'arrêté.
2.2. Le taux de rejet
Le modèle standard utilise divers éléments de tolérance pour indiquer de façon simple ce qui est accepté ou rejeté dans une classe de précision donnée, et correspondrait pour un modèle gaussien à deux taux de rejet aux seuils de 1 % et 0,01 %. Dans ce cas la classe de précision repose sur trois critères à remplir simultanément, une erreur moyenne en position, le nombre d'objets dépassant le premier seuil de tolérance, et la non-conformité systématique d'objets dépassant le second seuil de tolérance.
2.3. Le modèle standard
Enfin, la notion de classe de précision [xx] cm implique l'emploi du modèle standard. Elle se substitue aux anciennes classes de précision de l'arrêté de 1980, alors en nombre limité. Désormais il est possible de créer autant de classes de précision que nécessaire, et l'appartenance à une classe donnée passe par le respect simultané des 3 critères déjà évoqués. Par ailleurs, ces critères reposent exclusivement sur la mesure de l'écart moyen en position Emoy pos déduit des écarts en position Epos des objets choisis pour le test, cet écart ayant un sens physique plus évident que des écarts sur des coordonnées. En explicitant ces termes :
Par exemple : Epos = E(xcontrôle - xobjet)² + (ycontrôle - yobjet)² pour un test portant uniquement sur deux coordonnées planimétriques d'un objet donné ;
Pour un test portant sur une coordonnée planimétrique Epos = .xcontrôle - xobjet. ;
Emoy pos = Epos1 + Epos2 + ... + Eposn pour n objets testés.
Epos1 + Epos2 + ... + Epos n
Emoy pos =
pour n objets testés.
n
Il convient de bien noter le caractère conventionnel des trois critères adoptés pour la définition du modèle standard et de ses deux seuils de tolérances. Ceux-ci ont été définis par analogie avec ce que fournirait un modèle d'erreurs strictement gaussiennes pour des seuils de tolérance à 1 % et à 0,01 %, pour des mesures de contrôle effectuées sur une proportion importante des données livrées. Bien évidemment il convenait aussi de disposer d'un outil de travail pour des contrôles d'objets géographiques portant sur des échantillons réduits, mais dont la valeur statistique est également réduite, et/ou portant sur des objets dont le modèle d'erreur n'est pas gaussien, ce qui représente les cas les plus courants. Le modèle standard proposé permet ainsi aux donneurs d'ordres et aux entreprises prestataires exécutantes de disposer d'un outil de travail commun et bien défini, indépendamment de son éventuelle valeur statistique, les tailles d'échantillon et plus généralement les modalités d'échantillonnage étant définies par voie contractuelle.
- Les modalités de contrôle
Tout contrôle implique l'emploi de mesures de contrôle fournissant a priori des résultats d'une précision au moins deux fois meilleure que celle des objets à tester. La précision des mesures de contrôle sera déduite des règles de l'art et des connaissances généralement admises par les professionnels (en faisant telles mesures avec tels appareils selon telles méthodes, on obtient telle précision). Une mesure de contrôle n'implique pas nécessairement l'emploi d'autres instruments : on peut souvent obtenir une meilleure précision avec les mêmes instruments et des méthodes opératoires différentes, par exemple des mesures de plus longues durées (cas du GPS) ou avec plus de réitérations (cas des mesures au théodolite), etc.
Dans tous les types de levés, le texte propose de traiter de façon séparée l'erreur interne du levé et l'erreur de mise en référence, mais permet également de ne considérer que l'erreur totale. Ceci permet de traiter tous les cas rencontrés, du levé très précis (par exemple, micro-géodésie pour l'auscultation d'ouvrages de génie civil) et pas forcément rattaché au réseau légal puisque le rattachement est bien moins précis que le levé, jusqu'au canevas de précision pluri-décimétrique pour levé des objets pour un SIG de précision métrique, où le rattachement au réseau légal peut être bien plus précis que le levé lui-même.
Pour le contrôle d'objets géographiques, le texte de l'arrêté ne traite pas les problèmes spécifiques aux différents interpolateurs utilisables pour décrire une courbe à partir de quelques points levés. Par exemple, un rond-point peut, dans un cas tout à fait minimaliste, être déterminé par trois points levés, le rond-point étant décrit comme un cercle parfait passant par ces trois points. Cette tactique est risquée (aucun contrôle), et il pourra être requis (dans les spécifications du « terrain nominal ») que dans un tel cas il y ait un minimum de 4 ou même de 10 points réellement levés : ce type de spécification doit rester du domaine du contrat entre le donneur d'ordre et l'entreprise prestataire exécutante, et l'arrêté n'a pas à introduire de contraintes en la matière. Par contre, il est clair que si le contrôle ne tient pas compte des points réellement levés, ce ne sont plus les qualités géométriques des points levés qui sont évaluées, mais également celles de l'interpolateur utilisé (par exemple : il y a bien des façons de faire passer une courbe par 6 points levés). Dans ce cas, on pourrait s'attendre à des conflits sans fin sur « quel est le meilleur outil d'interpolation », et autres problèmes de ce type, qui ne sont pas du domaine d'un règlement mais plutôt de celui de spécifications particulières, base de la relation entre le donneur d'ordre et l'entreprise prestataire exécutante. L'arrêté précise donc que les contrôles doivent être effectués à proximité immédiate des points réellement levés, parce qu'en ces points les différences entre les interpolateurs possibles ne créent pas de différence appréciable dans les résultats obtenus.
- Le rattachement
La classe de précision de rattachement demandée doit être déterminée par le donneur d'ordre en fonction de ses contraintes économiques et des risques encourus par un rattachement de classe de précision insuffisante.
Il nécessite au moins la mesure de deux références différentes, compte tenu du risque d'instabilité des repères, ce chiffre de deux étant un minimum : les entreprises prestataires exécutantes sont encouragées à en utiliser davantage lorsqu'elles en ont la possibilité. La discordance résultant de ces deux rattachements conditionne aussi la classe de précision du rattachement (voir exemples en annexe). L'erreur interne est par exemple évaluée au travers d'un calcul de l'ensemble des mesures sous forme de « réseau libre », sans introduire les éléments de rattachement au réseau d'appui. Ensuite, sur un ensemble de points servant au contrôle, les coordonnées ainsi obtenues « en réseau libre » sont comparées aux coordonnées de contrôle. Pour ce faire on appliquera aux coordonnées « en réseau libre » la translation et la rotation qui minimisent au mieux les écarts obtenus : le texte laisse la liberté complète aux intéressés pour employer la méthode la plus « favorable possible », mais la solution la plus habituelle consiste à calculer cette translation et cette rotation par moindres carrés. Par contre n'est pas laissée ouverte la possibilité d'appliquer une correction de facteur d'échelle aux coordonnées publiées, le donneur d'ordre n'ayant pas vocation à entrer dans ce genre de post-traitement lorsqu'il réceptionne un lot de coordonnées.
Le cas de l'emploi d'une station GPS permanente comme référence ne nécessite pas pour autant le recours de façon obligatoire (même si ce recours est vivement conseillé) à un autre élément de rattachement (autre station GPS, borne...) si cette station fait l'objet d'un contrôle régulier de la qualité des coordonnées fournies (cas du RGP, réseau GPS permanent, dont l'IGN contrôle les données en général chaque semaine).
Le géomètre est toujours encouragé à utiliser des méthodes offrant des contrôles internes et une certaine surabondance de mesures par rapport au minimum indispensable au calcul des coordonnées des objets, ceci afin de mettre en évidence d'éventuelles fautes. La redondance peut être mise à profit pour évaluer les ellipses d'erreurs des points levés lors de compensations par moindres carrés, et une étude soigneuse des ellipses d'erreurs permet aisément de repérer les zones les moins bien déterminées, par exemple pour y effectuer préférentiellement des contrôles de respect de la classe de précision spécifiée.
- Relations donneur d'ordre-
entreprise prestataire exécutante
5.1. Nombre de points contrôlés
L'interface en matière de précision entre le donneur d'ordre et l'entreprise prestataire exécutante est ainsi, pour des objets géographiques, définie uniquement par les résultats de contrôles ponctuels indépendants des mesures ayant servi à la détermination d'origine : il faut néanmoins effectuer ces sondages, toujours onéreux, avec une exhaustivité qui dépendra du niveau de risque assumé par le donneur d'ordre, les modalités de contrôle faisant partie des éléments du contrat. Ainsi, pour des bases de données ayant une importance capitale, il pourra être normal de contrôler tous les points levés, alors que pour des levés peu critiques un contrôle pourra porter sur un sous-ensemble réduit de ces points...
Le texte spécifie donc bien sur quelles bases les cahiers des charges sont établis, et l'entreprise prestataire exécutante est ainsi parfaitement informée des types de contrôles que le donneur d'ordre est fondé d'effectuer pour procéder à la recette technique du levé qu'il a commandé : il peut lui-même en effectuer sur la même base, à titre de contrôle qualité de sa production.
5.2. Précision interne, précision de rattachement,
précision totale
Le donneur d'ordre n'est pas obligé, pour des canevas, de rentrer dans le détail de spécifications de précision interne, et/ou de précision de rattachement. Il peut aussi utiliser les concepts de précision planimétrique et/ou altimétrique totale, qui sont la combinaison des deux précédentes et peuvent s'avérer suffisants dans de nombreux cas. Il faut bien noter qu'il existe un lien entre la précision interne, la précision de rattachement et la précision totale : si le modèle d'erreurs est à peu près Gaussien, la précision totale spécifiée est égale à la somme quadratique de la précision interne, de la précision de rattachement et de la précision du réseau de référence. La logique de travail veut que l'on évalue la précision totale [yy] de toutes les façons, car il s'agit du processus le plus simple et qui constitue la meilleure interface possible entre le donneur d'ordre et l'entreprise prestataire exécutante. Et si les spécifications le stipulent il est fait appel à une évaluation de la précision interne [xx]. On en déduit alors la précision de rattachement [zz] (qui inclut alors nécessairement celle du réseau d'appui et ne peut dont lui être inférieure), et [yy]² = [xx]² + [zz]². Du point de vue de l'entreprise prestataire exécutante, il est recommandé de commencer par une compensation en « réseau libre » qui permet une bonne autoévaluation de la qualité des mesures, et au besoin une aide à la recherche de fautes. On peut aussi en tirer une évaluation de l'erreur interne.
- Classes de précision (selon le nouvel arrêté) des anciennes
« catégories de levés » de l'arrêté du 21 janvier 1980
L'arrêté du 21 janvier 1980 étant largement basé sur des spécifications de moyens, il n'y a souvent aucune possibilité de donner un équivalent à certaines catégories qui y figurent. Il en est ainsi pour les canevas d'ensemble, les canevas polygonaux, les canevas altimétriques ou les travaux photogrammétriques. Par contre, il est possible de tenter un rapprochement pour les « levés de détail et vérification des plans », qui introduisent les catégories P1 à P7 en planimétrie et A1 à A6 en altimétrie. En première approximation, les classes de précision du nouvel arrêté correspondent à peu près aux coefficient « Q » mentionnés en V-B-1.2 et V-B-2.2 de l'arrêté de 1980, soit donc :
Cette correspondance ne peut pas être rigoureuse compte tenu des bases statistiques de l'arrêté du 21 janvier 1980 qui sont différentes de celles du présent arrêté. Par exemple, dans l'arrêté du 21 janvier 1980 il n'y a pas de prise en compte du nombre de coordonnées considérées. De même, les différents seuils de tolérances sont évalués sur des bases autres (un seul seuil de tolérance dans l'arrêté du 21 janvier 1980, au lieu de deux dans le nouvel arrêté).
7. La présente circulaire et son annexe seront publiées au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 16 septembre 2003.
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