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Conditions dégradantes dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Marseille
L'article 9 de la loi du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) permet à cette autorité, lorsqu'elle constate une violation grave des droits fondamentaux des personnes privées de liberté, de communiquer sans délai aux autorités compétentes ses observations, de leur impartir un délai pour y répondre et, à l'issue de ce délai, de constater s'il a été mis fin à la violation signalée. S'il l'estime nécessaire, le CGLPL rend immédiatement public le contenu de ses observations et des réponses reçues.
Les présentes recommandations ont été adressées au garde des sceaux, ministre de la justice. Un délai de quatre semaines lui a été imparti pour faire connaître ses observations.
La Contrôleure générale a visité l'établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) de Marseille - La Valentine avec une équipe de cinq contrôleurs du 7 au 11 juillet 2025.
Il s'agissait de la cinquième visite de cet établissement par le CGLPL. La précédente, en septembre 2022, n'avait pas donné lieu à des constats aussi alarmants, même si y était souligné l'impact sur la prise en charge des adolescents de la dégradation du partenariat entre l'administration pénitentiaire (AP) et la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et du fort taux d'absentéisme du personnel de ces deux institutions - supérieur à ceux observés dans les autres établissements pénitentiaires de la région.
Si les deux administrations tendent à faire remonter la dégradation complète du fonctionnement de l'établissement à la fin du mois de mars 2025 - lorsque l'absentéisme des surveillants de l'EPM a requis la mobilisation de l'équipe régionale d'intervention et de sécurité (ERIS) pour la prise en charge des détenus - elles sont toutes deux concernées par des dysfonctionnements divers, certains affectant les deux services, d'autres étant au contraire propres à l'un ou l'autre.
L'établissement fonctionne selon un système de régimes différenciés (1) et dispose de 59 places, exclusivement pour des garçons âgés de 13 à 18 ans, réparties dans sept bâtiments de 4 à 10 places chacun. Une cellule de protection d'urgence (CProU) est aménagée dans l'unité 1 et un bâtiment distinct abrite quatre cellules disciplinaires.
Le 7 juillet 2025, 53 adolescents étaient détenus à l'EPM. En 2024, 255 adolescents ont été accueillis dans l'EPM, dont 173 nouveaux entrants adressés majoritairement par le tribunal judiciaire de Marseille, avec une moyenne de 42 jeunes présents et une durée moyenne d'incarcération de 65 jours (2).
- Des conditions matérielles de prise en charge qui portent atteinte à la dignité des adolescents
Disposées autour d'une agora, les unités de vie sont bâties sur deux niveaux. Une cour de promenade, de 72 à 108 m2 selon les unités, en occupe le centre et jouxte des locaux communs. L'ensemble est exigu. Les fenêtres des cellules, réparties au rez-de-chaussée et au premier étage, donnent sur l'agora. Elles sont toutes barreaudées et grillagées. Lors de la visite, les jeunes passaient leur temps à regarder et crier par la fenêtre.
Les cellules ont un équipement sommaire, entièrement intégré au bâti : le lit, la table, les étagères sont fixes, comme le téléviseur à l'écran difficile à regarder car « protégé » par un caisson en plexiglas assombri de multiples rayures. Seul un siège est mobile. Les murs des cellules sont partout couverts de graffiti, dont la couleur et la texture évoquent parfois de la matière fécale ou du sang. La salle d'eau privative, dépourvue de porte, comprend un lavabo dont le robinet est parfois hors d'usage ; les boutons-poussoirs du lavabo et de la douche sont en mauvais état ; la cuvette de WC sans lunette est au mieux crasseuse, au pire cassée ; l'état du miroir métallique le rend souvent inutilisable. La vétusté des sols en béton de certaines cellules ne permet plus leur nettoyage. De nombreuses cellules sont infestées de fourmis en dépit des traitements entrepris. Aucun projet de rénovation des cellules, même sous la forme d'une simple remise en peinture, n'est envisagé par l'entreprise titulaire de la gestion déléguée de l'établissement depuis avril 2025.
Chaque lit est censé être équipé d'un matelas, qui ne suit pas le jeune au gré de ses changements de cellule. Tous les matelas, constitués de deux blocs de mousse recouverts de plastique souple, sont en mauvais état, certains se réduisant à un unique morceau de mousse de couleur sombre sans aucune housse de protection.
Les dysfonctionnements ou insuffisances affectant l'équipement de la cellule - comme un WC inutilisable ou l'absence de draps - ne sont généralement pas pris en compte par les professionnels dans les unités, au motif que les jeunes les dégradent : sauf exception, les surveillants font preuve de négligence face à cette situation, tandis que les éducateurs, qui n'ont pas la clé de la cellule, ne s'approchent pas du lieu de vie des adolescents.
Il n'y a plus de distribution mensuelle de produits d'hygiène corporelle, alors qu'aucune brosse à dents n'est, par exemple, vendue en cantine.
Quelques postes de téléphone fixe en cellule dysfonctionnent. Surtout, leur utilisation est soumise aux mêmes tarifs prohibitifs que dans les établissements pénitentiaires pour adultes. Les adolescents dépensent, pour téléphoner, une grande partie de l'argent reçu de leurs proches ou au titre de l'indigence (3).
Malgré des températures élevées en été et alors qu'il est interdit de poser un rideau à la fenêtre, seuls les arrivants et les jeunes reconnus comme n'ayant pas suffisamment de ressources financières bénéficient d'un ventilateur gratuit. Le réseau ne distribue que de l'eau tiède, aussi pour permettre aux jeunes de boire de l'eau fraîche, une gourde est mise à disposition de chacun : pour la remplir, un surveillant est contraint de faire des allers-retours entre les cellules et une fontaine d'eau réfrigérée.
Au petit-déjeuner, une boisson chaude n'est pas toujours proposée et le pain est celui de la veille à midi, déjà consommé ou devenu dur : nombreux sont les jeunes qui n'ont qu'une brique de jus de fruit, de la confiture et du beurre en guise de premier repas. Les conditions de distribution des repas ne respectent pas les normes d'hygiène et les quantités servies sont insuffisantes ; nombre des jeunes entendus ont indiqué avoir constamment faim.
Il convient de prendre sans délai toute mesure utile pour remédier à l'indignité des conditions matérielles de prise en charge des mineurs détenus.
L'administration (pénitentiaire et PJJ) doit donner au personnel les moyens de répondre aux besoins des mineurs détenus.
- Des pratiques qui exposent les adolescents à un fort risque d'arbitraire
Tous les aspects de la prise en charge des enfants détenus pâtissent de graves carences : l'organisation des services est incomplète, la transmission d'information insuffisante et inefficace, les mesures prises ne sont ni tracées ni contrôlées. Il en résulte des atteintes aux droits des mineurs.
Les jeunes sont rarement reçus par l'encadrement de l'administration pénitentiaire ou de la protection judiciaire de la jeunesse. Des demandes écrites ne reçoivent pas de réponse, alors qu'une récente note de service rappelle l'importance de la traçabilité du traitement des requêtes des détenus et détaille la procédure applicable à ce titre (4). A l'inverse, certaines demandes sont formulées oralement et « traitées » depuis l'agora. Outre qu'elle encourage la présence des jeunes aux fenêtres, cette pratique, qui fait obstacle à toute confidentialité, est porteuse d'un fort risque d'arbitraire et, par voie de conséquence, de violences.
Malgré des recommandations en ce sens émises par le CGLPL à l'issue de ses précédentes visites de l'EPM, les mesures de contrainte et de sécurité - fouille à corps, usage de la force et menottage - mises en œuvre à l'encontre des adolescents ne sont pas correctement tracées, ou le sont, s'agissant des fouilles à corps, depuis le mois d'avril 2025 seulement. Dans ces conditions, aucun contrôle effectif du respect des normes applicables en la matière ne peut s'exercer, la réalité des pratiques ne pouvant être corroborée par les données extraites.
Si aucun jeune n'a été fouillé à corps à l'issue des parloirs pendant la semaine de la visite, des témoignages concordants dénoncent des pratiques de fouille perçues comme attentatoire à l'intimité imputées à un officier particulièrement zélé. Les jeunes qui se mettent à courir sur l'herbe pelée de l'agora sans autorisation sont parfois interceptés de force par le personnel pénitentiaire et des blessures peuvent en résulter tant pour les jeunes que pour les surveillants. En application de « consignes particulières » (cf. infra), des jeunes sont potentiellement menottés à la vue de tous ceux qui sont aux fenêtres (5). Ils le sont tous systématiquement pour se rendre à l'hôpital, au mépris de l'article 803 du code de procédure pénale, pendant le transport et pendant les soins, qui s'effectuent en présence du personnel pénitentiaire.
L'application combinée des régimes différenciés et de mesures censées répondre à l'exigence d'individualisation de la prise en charge peut aussi entraîner de nombreuses atteintes aux droits des mineurs et aboutir à l'isolement de fait de certains jeunes, parfois pour de longues durées.
Dans l'unité (U1) qui a vocation à accueillir les jeunes dont le comportement justifie un suivi renforcé, l'emploi du temps est peu fourni et ne comprend pas ou peu de moments collectifs à l'exception des promenades et des temps de scolarité quand le jeune a la capacité de s'intégrer à un cours. Rien ne permet de contrôler la mise en œuvre du suivi renforcé supposé s'appliquer - le programme d'un jeune sur une journée n'est pas tracé, par exemple - et la durée d'affectation dans cette unité (6), dans laquelle ne sont pas davantage déployés d'effectifs supplémentaires de surveillants et d'éducateurs. Dans ces conditions, seul l'enfermement et la dimension sécuritaire de la prise en charge des jeunes apparaissent effectivement « renforcés » et l'affectation dans cette unité peut en pratique être regardée comme équivalant à une mise à l'écart sans droit ni titre. De surcroît, les jeunes affectés dans cette unité sont particulièrement exposés à diverses mesures infra-disciplinaires - ce qui leur fait dire : « Ici c'est isolé de isolé » ou « Ils appellent ça renforcé, mais c'est une punition, c'est considéré comme ça par tout le monde ».
Ces mesures spécifiques sont également mobilisées à l'encontre des détenus affectés dans les autres unités, souvent sous couvert d'individualisation de la prise en charge. Il peut s'agir de « mesures de bon ordre » (MBO) d'une durée maximale de 24 heures, de « mesures conservatoires de cellule » d'une durée maximale de huit jours, de « mesures de séparation collective », de « consignes particulières », de « mesure de séparation individuelle », de « notes de gestion individuelle ». Ces mesures consistent majoritairement en une privation de temps collectifs, dont la promenade en groupe, et d'activités entendues très largement. Elles peuvent se cumuler en pratique et aboutir à des mises à l'écart assimilables à de l'isolement, pourtant formellement interdit au titre de la prise en charge d'un mineur détenu. La PJJ est en outre rarement associée à la décision de recourir à une telle mesure. Les contraintes additionnelles qu'elles impliquent ne sont pas formellement notifiées aux jeunes, qui ne sont donc pas en mesure de les contester.
Enfin, une pratique gravement attentatoire aux droits fondamentaux des mineurs détenus est susceptible d'être regardée comme constituant un traitement inhumain et dégradant au sens de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales. Elle est dénommée « mise en grille » et couramment appliquée au vu des témoignages recueillis et des constats opérés pendant la visite : il s'agit d'enfermer un adolescent, quel que soit son âge, dans un des trois locaux barreaudés, dépourvus d'assise, de point d'eau potable et de WC, situés dans le bâtiment disciplinaire désert, où aucune surveillance continue n'est assurée. Deux adolescents s'y trouvaient le 7 juillet après-midi, dont un depuis plusieurs heures et l'un d'eux avait uriné sur le sol. La durée de cette mesure varierait d'une demi-heure à cinq heures, avec prise d'un repas s'il n'est pas oublié.
La pratique de la « mise en grille » doit être immédiatement et définitivement proscrite.
Aucune mesure d'isolement ne pouvant être mise en œuvre contre un mineur détenu, il doit être mis fin à toute pratique consistant en un isolement de fait.
Le suivi éducatif des jeunes dont la situation ou le comportement le requièrent doit être effectivement renforcé. Le personnel doit disposer des moyens d'y pourvoir autrement que par des mesures assimilables à des sanctions disciplinaires déguisées.
- Des professionnels qui ne remplissent pas leur mission auprès des adolescents
L'administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse justifient les difficultés dans la conduite de leurs missions auprès des enfants détenus dans l'établissement par les vacances de postes, l'absentéisme des agents et un défaut de compétence.
Les conséquences du manque de surveillants et d'éducateurs sont aggravées par l'insuffisance d'encadrement intermédiaire dans les deux administrations, qui nuit autant au travail de surveillance qu'au travail éducatif. Effectivement, l'absentéisme est massif à ces différents niveaux, qu'il résulte de vacances de postes, d'arrêts de travail ou de la multiplication de postes aménagés pour motifs thérapeutiques. Les renforts mobilisés ces derniers mois par les deux administrations sont très insuffisants et ne peuvent remédier à la situation gravissime constatée par le CGLPL qui perdure depuis trop longtemps.
D'ailleurs la visite du CGLPL a été décidée après que des élus ont publiquement alerté les autorités, dès mars 2025, sur la situation très inquiétante de l'établissement dont les causes n'étaient pas encore vraiment identifiées par les équipes ; s'agissant de l'absentéisme du personnel, un groupe de travail conjoint venait de se réunir pour la première fois en juin 2025, soit près de trois mois après les alertes précitées. La vie quotidienne et la prise en charge des adolescents en sont très durement affectées.
Aucun surveillant n'est posté dans l'unité 6 et au quartier disciplinaire, aucun n'est chargé d'accompagner les mouvements vers l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire (USMP) et vers l'école. En cas d'absence sur un poste, un agent gère deux unités. Tout accompagnement d'un jeune hors d'une unité met en défaut la prise en charge des autres.
Les éducateurs se présentent dans l'unité avec retard et sans concertation avec les surveillants, arguant de tâches administratives, voire de télétravail. Le seul des deux éducateurs effectivement affectés au pôle d'accompagnement, de remobilisation et d'insertion (PARI) est absent pour maladie depuis la mi-juin 2025. La fidélisation des professionnels dans une unité, pourtant indispensable à l'efficacité de l'action éducative, est impossible. Parce qu'ils se rendent rarement dans les cellules, les éducateurs n'investissent pas la dimension éducative de l'accompagnement d'un jeune dans le soin apporté à sa personne et à son environnement direct, notamment en matière d'hygiène.
Les agents semblent avoir perdu la connaissance mutuelle de leurs missions et cultures professionnelles respectives, socle d'une collaboration efficace. La communication, difficile, n'est pas soutenue par des outils de transmission des informations, que ce soit entre professionnels ou dans le temps. La présence simultanée d'un surveillant et d'un éducateur dans une unité étant rare, les temps collectifs le sont aussi, à telle enseigne que, dans la majorité des unités, le repas ne peut être pris en commun chaque jour. Le maintien d'un minimum d'activité se fait au prix d'un « glissement des tâches » entre professionnels : des surveillants aux officiers, des éducateurs aux responsables d'unité éducative, des surveillants aux éducateurs et des éducateurs aux surveillants. Le binôme surveillant-éducateur, censé constituer le pivot de la prise en charge des enfants détenus et le pilier du fonctionnement des EPM, n'existe plus.
Le personnel de surveillance a quant à lui, de surcroît, réduit le temps de travail sur la journée du dimanche : les éducateurs ne peuvent pas voir les mineurs entre 13 heures et 16 heures, voire toute la journée selon les témoignages recueillis. Seul le temps de promenade et la distribution des repas sont maintenus ce jour-là.
La démobilisation des professionnels touchant toutes les dimensions de leur mission, elle complique, voire rend simplement impossible, l'évaluation de la participation des jeunes à des activités. Les difficultés d'acheminement des jeunes vers les locaux d'enseignement étant fréquentes, l'Education nationale ne saurait être tenue pour seule responsable d'un temps d'activité inférieur à 10 heures hebdomadaires pour 8 à 14 % des élèves, sport compris, et limité, pour certains, à 1 h 30 symbolique d'enseignement. Enfin, le fait que les enseignements ne soient dispensés que durant quarante semaines par an, au mauvais prétexte de vacances scolaires entraîne, durant les périodes restantes, un désœuvrement des jeunes, même les plus investis.
L'accès aux soins, à l'USMP ou lors d'extractions médicales, est également affecté par le manque de personnel pénitentiaire, avec des retards voire des oublis d'acheminement d'enfants détenus ayant rendez-vous à l'USMP et des reports multiples d'extractions médicales en suivi post-opératoire.
Chaque professionnel subit ces conditions de travail en même temps qu'il participe de leur détérioration. La conséquence immédiate est que les mineurs détenus dans cet établissement sont victimes d'une forme de « surenfermement », dont les conséquences sont d'autant plus dramatiques qu'il ne s'accompagne plus du travail éducatif censé être le pendant de leur privation de liberté.
Conclusion
Au terme de sa cinquième visite de l'EPM de Marseille - La Valentine, le CGLPL ne peut que dénoncer le caractère extrêmement alarmant de la situation des mineurs qui y sont incarcérés.
Outre l'insuffisance criante de réponses à leurs besoins matériels et psychiques, ils subissent un enfermement dont la portée éducative est compromise par l'incapacité des éducateurs et des surveillants à exercer leur mission conjointe, de même que toute action de réinsertion et de prévention de la récidive. Le manque d'effectif contraint des professionnels pourtant investis à travailler dans des conditions si dégradées qu'elles favorisent les manquements aux normes et principes censés encadrer leur action et créent un terrain favorable à des dérives de diverses natures - désinvestissement du personnel, multiplications des contraintes sécuritaires mises en œuvre en dehors de tout cadre normatif, décisions arbitraires, violences psychologiques et mesures constitutives de traitements inhumains et dégradants au sens de la convention européenne des droits de l'homme.
Cette situation est d'autant plus inadmissible qu'elle persiste malgré des alertes répétées et simultanées émanant non seulement d'organisations professionnelles mais également de plusieurs autorités impliquées dans le contrôle du respect, par l'Etat, de ses obligations en termes de respect des droits des personnes enfermées : dans une rare convergence de points de vue, les alertes de syndicats - de surveillants et d'éducateurs - émises au cours de l'année écoulée ont trouvé écho dans le témoignage d'élus ayant exercé au printemps dernier leur droit de visite dans l'établissement mais également dans des signalements effectués en interne au sein de l'autorité judiciaire. La Contrôleure générale a ainsi été informée, au cours de la visite de l'établissement, d'un signalement adressé au tribunal judiciaire de Marseille, l'alertant sur les conditions d'incarcération très dégradées, la suspension des activités scolaires et faisant état d'un risque de mise en danger pour défaut de surveillance pouvant à tout moment provoquer une fermeture de l'établissement.
Face au caractère gravissime de ces constats, seule la fermeture, au moins partielle, de l'établissement apparaît de nature à permettre son rétablissement, au prix d'une refondation intégrale de son fonctionnement.
En toute hypothèse, des mesures urgentes doivent être prises pour remédier, d'une part à l'indignité des conditions matérielles de prise en charge des mineurs détenus et, d'autre part, aux conséquences catastrophiques de la démobilisation et de l'absence du personnel pénitentiaire et éducatif.
En conséquence, le CGLPL en appelle instamment à la responsabilité de l'Etat, à qui il incombe de garantir - et plus encore s'agissant de très jeunes détenus - le respect de leur dignité, de leur intégrité physique et psychique et de leurs droits fondamentaux, ainsi que d'un certain espoir en l'avenir et au personnel des conditions normales d'exercice de sa mission.
(1) L'unité 0 a un régime ouvert dit Re-Pa-Re (respect, participation, responsabilisation), l'unité 1 un régime fermé dit renforcé ou contrôlé avec peu de temps de collectivité, les unités 2, 3, 4 un régime fermé avec des temps de collectivité, l'unité 5 héberge les arrivants en régime fermé et le régime en vigueur dans l'unité 6 est de fait un régime fermé.
(2) Source : Rapports d'activité du service éducatif en EPM (SE-EPM) et de l'AP pour l'année 2024.
(3) CGLPL, Avis du 3 décembre 2024 relatif à l'accès au téléphone dans les établissements pénitentiaires, Journal officiel de la République française (JORF), 19 février 2025 : « Les mineurs doivent bénéficier de la gratuité des appels téléphoniques et visiophoniques ».
(4) Note 2024 N° 85 du 24 septembre 2024
(5) CGLPL, Recommandations minimales pour le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes privées de liberté, JORF, 4 juin 2020 : « Dans l'enceinte d'un lieu de privation de liberté, ou dans un lieu clos et surveillé, le recours à des moyens de contrainte ne peut être destiné qu'à prévenir des actes de violence sur soi-même ou autrui. Ces dispositifs ne doivent être mis en œuvre qu'après avoir eu vainement recours aux techniques de désescalade et en l'absence de tout autre moyen susceptible de parvenir au résultat recherché ».
(6) En principe l'affectation est de 15 jours renouvelable, mais un jeune a pu par exemple y rester 206 jours.
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