II. - Sur la modification du mode de scrutin
applicable dans certains départements
A. - Estimant que le mécanisme de la représentation proportionnelle, qui coexiste actuellement avec un mode de scrutin majoritaire, est mieux adapté pour désigner les membres d'une assemblée telle que le Sénat, le législateur a fait le choix d'étendre ce mécanisme à tous les départements dans lesquels il est possible de l'appliquer, et de ne maintenir l'élection des sénateurs au scrutin majoritaire que dans ceux qui n'en élisent pas suffisamment pour que la représentation proportionnelle puisse jouer.
C'est pourquoi l'article 10 de la loi déférée retient ce dernier mode de scrutin dans les départements qui élisent trois sénateurs ou plus, tandis que l'article 9 maintient le scrutin majoritaire dans ceux qui n'ont droit qu'à un ou deux sénateurs.
Selon les requérants, ces dispositions seraient contraires à la Constitution pour n'avoir pas tenu compte des mutations démographiques intervenues depuis les derniers recensements. Ils considèrent que cette modification ne pouvait intervenir sans que la répartition des sièges n'ait été revue. Le seuil de trois sénateurs adopté pour instaurer le scrutin proportionnel présenterait donc, à défaut, un caractère arbitraire.
B. - Cette argumentation ne peut être retenue.
Elle est, en effet, inopérante. Sans doute est-il souhaitable de reconsidérer la répartition des sénateurs entre les départements, pour tenir compte de l'évolution démographique. Le Gouvernement estimait que cette opération devait être effectuée selon la méthode retenue en 1958, et reprise en 1976 (un sénateur pour 150 000 habitants et un par tranche de 250 000 ou fraction de ce nombre), ce qui entraînait une augmentation des effectifs du Sénat, laquelle relève de la loi organique en vertu de l'article 25 de la Constitution. Deux projets de loi avaient été déposés à cette fin, toutefois ceux-ci n'ont pu aboutir. Mais s'il est exact que, en attendant, la répartition qui reste en vigueur n'est pas satisfaisante, les dispositions de la loi déférée sont sans incidence aucune sur cette situation. Elles n'ont ni pour objet, ni pour effet d'en aggraver les inconvénients.
En réalité, les requérants confondent deux questions qui sont juridiquement indépendantes l'une de l'autre : celle, qui est étrangère à l'objet du texte déféré, de la révision des effectifs de sénateurs dans chaque département, et celle, qui seule doit être envisagée, du mode de scrutin applicable en fonction d'un effectif déterminé. La loi se borne à abaisser de 5 à 3 le seuil à partir duquel la représentation proportionnelle s'appliquera. Ce faisant, elle n'affecte nullement la situation décrite plus haut. Elle retient un critère pertinent, qui consiste à appliquer ce mode de scrutin dans tous les départements dont l'effectif de sénateurs à élire le permet.
Aucun des moyens invoqués n'étant de nature à justifier la censure des dispositions contestées, le Gouvernement estime que le Conseil constitutionnel ne pourra que les déclarer conformes à la Constitution.
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