- Contexte
Le projet d'arrêté s'inscrit dans le cadre de la politique européenne de soutien aux énergies alternatives. Celle-ci vise principalement à limiter les impacts environnementaux de la production d'électricité, à assurer la sécurité d'approvisionnement, par la diversification des sources et le recours aux énergies renouvelables, et à favoriser la compétitivité économique.
Avec 67,5 TWh produits en 2004, la France compte parmi les premiers producteurs d'électricité à partir de sources d'énergies renouvelables en Europe. L'hydroélectricité contribue à hauteur de 93 %. Parallèlement, les émissions de gaz à effet de serre imputables au parc de production d'électricité en France sont parmi les plus réduites en Europe. En subventionnant par un dispositif d'obligation d'achat le développement d'un parc de centrales hydrauliques de faible puissance, le projet d'arrêté vise à accroître la part d'électricité produite à partir de sources d'énergies renouvelables.
Cette politique est menée au bénéfice du consommateur, à la condition que le supplément de prix accordé à cette production par rapport au coût des techniques conventionnelles soit compensé par un gain collectif au moins équivalent, qui résulte des impacts environnementaux évités de la production d'électricité substituée. Pour maximiser ce gain, il convient de fixer le montant des subventions au niveau permettant d'assurer une rentabilité raisonnable des investissements.
- Analyse du gain pour la collectivité
L'énergie hydraulique compte parmi les énergies renouvelables les plus compétitives pour la production d'électricité, ce qui se traduit par un tarif d'obligation d'achat inférieur à celui de la plupart des autres filières. Elle offre, en outre, des possibilités d'anticipation compatibles avec la programmation des autres moyens de production et, pour certaines centrales, de modulation infrajournalière en fonction de la demande.
Toutefois, le tarif envisagé est supérieur aux coûts et externalités évités des filières conventionnelles en France continentale. Dès lors, l'intérêt économique pour la collectivité d'y développer les petites installations hydrauliques est très limité. Il est, en revanche, plus important en Corse, dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, où les coûts de production des autres moyens employés sont très supérieurs et les impacts environnementaux plus importants.
- Analyse de la rentabilité
Le tarif d'achat est comparé aux coûts de production de la filière, afin de vérifier que la rémunération accordée n'excède pas une rémunération normale des capitaux immobilisés, conformément à l'article 10 de la loi du 10 février 2000. En l'absence de précision sur le niveau de rémunération qu'il convient de retenir, la CRE a défini un seuil de rentabilité minimum à partir des rentabilités constatées pour les entreprises cotées du secteur considéré.
Pour les nouvelles centrales utilisant l'énergie hydraulique des lacs et des cours d'eau en France métropolitaine, le tarif envisagé est adapté aux installations produisant 3 500 h/an environ, en équivalent pleine puissance, ce qui devrait permettre d'équiper un nombre significatif de sites. En particulier, le relèvement du tarif pour les centrales de très faible puissance devrait permettre un développement de cette gamme d'installations, jusqu'ici peu rentable. En revanche, il est souhaitable d'introduire une dégressivité du tarif pour les installations ayant un productible élevé, la rentabilité atteignant alors des valeurs très supérieures au seuil minimal défini.
Pour les nouvelles centrales utilisant l'énergie hydraulique des lacs et des cours d'eau dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, le tarif est supérieur d'environ 30 EUR/MWh au tarif métropolitain. Cet écart, qui a pour but de compenser les surcoûts inhérents à ces zones, s'ajoute à plusieurs dispositifs fiscaux et aides de l'Etat également conçus pour prendre en compte les spécificités de ces zones. Ce cumul pourrait entraîner des rentabilités très supérieures au seuil minimal défini.
Pour les installations utilisant l'énergie houlomotrice, marémotrice ou hydrocinétique qui sont récentes, il n'est pas possible de se prononcer sur la rentabilité des projets en raison du manque d'informations fiables sur les coûts de production, les recettes attendues et leur évolution à court terme. Il apparaît donc prudent de prévoir une dégressivité tarifaire en fonction de la puissance installée cumulée.
Les installations ayant bénéficié d'une rénovation peuvent faire l'objet d'un nouveau contrat d'achat à un tarif identique à celui d'une installation nouvelle. Le seuil d'investissement minimum en rénovation permettant de bénéficier de cette disposition est, en général, plus de deux fois inférieur à l'investissement initial. Dès lors, la rentabilité des capitaux employés pour les installations rénovées peut atteindre un niveau trois fois supérieur au seuil minimal défini et la rentabilité des fonds propres un niveau quatre fois supérieur. Cette solution est d'autant moins justifiée que les prix de marchés actuels devraient permettre une exploitation rentable des centrales concernées sans subvention. Un tarif plus bas devrait donc être prévu pour les installations rénovées, dans un cadre juridique conforme aux règles communautaires. Sur un plan plus général, il serait préférable de substituer à cette obligation d'achat un dispositif permettant aux petits producteurs d'accéder efficacement au marché.
Enfin, compte tenu de la proportion des coûts d'investissement dans les coûts de production, l'indexation du tarif d'une année sur l'autre au cours du contrat devrait comporter une part fixe plus importante, de l'ordre de 60 à 70 %. De plus, les dates de référence prises en compte pour l'indexation sont incompatibles avec la date de publication de l'arrêté envisageable. Il convient, donc, de remplacer « 2006 » par « 2007 » dans l'article 4.
- Conséquences sur les charges de service public
Les nouvelles conditions d'achat devraient entraîner une augmentation des charges annuelles de service public de l'ordre 150 à 400 MEUR à l'horizon 2015, soit 0,3 à 1 EUR/MWh.
- Avis de la CRE
Pour ce qui concerne les tarifs applicables aux installations hydrauliques des lacs et des cours d'eau, la CRE émet :
- un avis favorable sur le tarif prévu pour les installations nouvelles en France métropolitaine, sous réserve d'introduire une dégressivité du tarif en fonction du productible et de mettre en place un tarif plus bas pour les installations rénovées, dans un cadre juridique conforme aux règles communautaires ;
- un avis favorable sur le tarif prévu pour les installations nouvelles dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte ; il pourrait néanmoins être réduit pour tenir compte des dispositifs fiscaux et des autres aides de l'Etat dont bénéficient les investisseurs dans ces zones.
Fait à Paris, le 10 janvier 2007.
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