II. ― Observations sur le solde structurel des administrations publiques
et les écarts à la programmation
- L'estimation de la composante structurelle du déficit public.
Le solde structurel a pour objectif de retracer le solde des administrations publiques indépendamment des effets liés au cycle économique et des mesures ponctuelles et temporaires. Ce solde structurel n'est pas directement observable.
L'estimation du solde structurel par le Gouvernement comporte plusieurs étapes (cf. annexe 2) :
― la première étape consiste à évaluer l'incidence des fluctuations de la conjoncture sur les déficits publics. La position de l'économie dans le cycle est estimée via l'écart de production, soit la différence entre le PIB effectif et le PIB potentiel (2) ;
― la seconde étape vise à isoler l'impact des mesures ponctuelles et temporaires en recettes ou en dépenses qui, du fait de leur caractère exceptionnel, ne contribuent pas au solde structurel. Sur l'année 2013, le Gouvernement a retenu comme seule mesure ponctuelle le coût pour la France des contentieux fiscaux communautaires qui s'est établi à 0,3 Md€.
Le Haut Conseil constate que la méthode de calcul du solde structurel présenté à l'article liminaire du projet de loi de règlement pour 2013 et la trajectoire de PIB potentiel correspondent à celles de la loi de programmation des finances publiques du 31 décembre 2012.
Dans son avis n° HCFP-2013-02 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement de 2012, le Haut Conseil avait estimé nécessaire d'établir de façon claire et précise le périmètre des mesures ponctuelles et temporaires susceptibles d'être exclues du calcul du solde structurel. Le Haut Conseil relève qu'à ce jour le Gouvernement n'a pas fait connaître sa définition des mesures ponctuelles et temporaires.
- Les écarts à la loi de programmation.
a) Le solde effectif en 2013 (― 4,3 %) est plus dégradé de 1,3 point de PIB que ne le prévoyait la loi de programmation des finances publiques du 31 décembre 2012 (― 3,0 %).
Solde effectif et solde structurel (% du PIB) :
les écarts par rapport à la loi de programmation
| |2012 | 2013 | | | |
|-------------------------------------------|-----|-------------------------------------|-----|-------------------------------------|------|
| |LPFP |Projet de loi
de règlement 2013|LPFP |Projet de loi
de règlement 2013|Ecart |
| Solde effectif (1) |― 4,5| ― 4,9 |― 3,0| ― 4,3 |― 1,3 |
| Solde conjoncturel (2) |― 0,8| ― 0,6 |― 1,2| ― 1,2 | 0,0 |
|Mesures ponctuelles et temporaires (*) (3)|― 0,1| ― 0,1 |― 0,2| 0,0 |+ 0,2|
| Solde structurel (*) (1)-(2)-(3) |― 3,6| ― 4,2 |― 1,6| ― 3,1 |― 1,5 |
| (*) En pourcentage du PIB potentiel. | | | | | |
Source : loi de programmation des finances publiques (LPFP) du 31 décembre 2012 et projet de loi de règlement pour 2013.
Le solde conjoncturel de 2013 est identique à celui de la loi de programmation.
Le coût des contentieux fiscaux communautaires, comptabilisés comme des mesures ponctuelles et temporaires, a été revu en forte baisse (0,3 Md€ contre 4,9 Md€ [3] dans la loi de programmation), ce qui contribue à améliorer le solde effectif 2013 de 0,2 point de PIB par rapport à la loi de programmation.
Le solde structurel, calculé comme la différence entre le solde effectif et le solde conjoncturel corrigé des mesures ponctuelles et temporaires, est dégradé de 1,5 point de PIB par rapport à celui prévu dans la loi de programmation.
b) S'agissant du solde structurel, l'écart de 1,5 point de PIB par rapport à la loi de programmation provient à hauteur de 0,6 point des révisions apportées aux résultats des exercices antérieurs et, pour 0,9 point, d'un ajustement structurel plus faible en 2013.
Décomposition du solde structurel et de l'ajustement structurel en 2013
(% du PIB potentiel) (*)
| |LPFP |RÉSULTAT ESTIMÉ
par le Gouvernement|ÉCART|
|---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------|-----|-----------------------------------------|-----|
| Solde structurel : |― 1,6| ― 3,1 |― 1,5|
| Révisions sur exercices antérieurs | ― | ― 0,6 |― 0,6|
| Ajustement structurel (variation du solde structurel entre 2012 et 2013) | 2,0 | 1,1 |― 0,9|
| Ajustement structurel (*) : | 2,0 | 1,1 |― 0,9|
| Prélèvements obligatoires | 1,7 | 1,0 |― 0,6|
| A législation constante | 0,1 | ― 0,4 |― 0,5|
| Mesures nouvelles | 1,6 | 1,4 |― 0,1|
| Dépenses | 0,3 | 0,0 |― 0,3|
| (*) L'effort structurel est la somme des mesures nouvelles en prélèvements obligatoires et de l'effort en dépenses.| | | |
(*) Les chiffres étant arrondis au dixième, il peut en résulter de légers écarts dans le résultat des opérations.
Source : loi de programmation des finances publiques du 31 décembre 2012 et projet de loi de règlement pour 2013.
L'écart entre le solde structurel 2012 prévu dans la loi de programmation (― 3,6 %) et celui estimé dans le projet de loi de règlement pour 2013 (― 4,2 %) s'élève à 0,6 point de PIB. Il est plus important que celui de 0,3 point constaté il y a un an par le Haut Conseil (4).
La progression des recettes a été moins dynamique que prévu en 2013, pesant pour 0,6 point de PIB sur le solde structurel :
L'évolution des prélèvements obligatoires à législation constante (hors mesures nouvelles) de 0,2 % s'est avérée très inférieure à celle du PIB en valeur (1,1 %). Or la loi de programmation avait retenu une croissance des prélèvements obligatoires égale à celle du PIB. Cet écart de croissance de près de 1 % contribue donc pour 0,5 point de PIB à la révision du solde structurel estimé pour 2013. En particulier, la progression des recettes fiscales de l'Etat a été plus faible qu'attendu, notamment pour l'impôt sur les sociétés et l'impôt sur le revenu.
Le rendement des mesures nouvelles a été inférieur à la programmation de 0,1 point de PIB. Le total des mesures nouvelles a néanmoins été particulièrement élevé en 2013, représentant 1,4 point de PIB.
L'effort structurel en dépenses publiques (5) a été plus faible de 0,3 point de PIB que dans la loi de programmation. Si l'augmentation des dépenses a été moins dynamique en valeur (2,2 % hors mesures ponctuelles et temporaires) que dans la loi de programmation (2,6 %) grâce notamment à la baisse des charges d'intérêt, sa croissance en volume a été plus élevée (1,4 % contre 0,8 %) en raison d'une inflation plus faible que prévu (6). La dépense en volume a ainsi augmenté au même rythme que le PIB potentiel, avec pour conséquence un effort structurel en dépenses proche de zéro.
Le Haut Conseil constate qu'il existe un écart de 1,5 point de PIB entre le solde structurel exécuté en 2013 et celui prévu en loi de programmation. Cet écart est supérieur à la limite de 0,5 point de PIB fixée par la loi organique du 17 décembre 2012 et doit être qualifié « d'important » au sens du II de l'article 23 de cette loi. Il déclenche le mécanisme de correction prévu au même article.
(2) C'est-à-dire le niveau de production que l'économie peut soutenir durablement sans tension sur les facteurs de production (capital et travail). (3) Dont 1,3 Md€ au titre du contentieux relatif à la taxe sur les communications électroniques qui a fait depuis l'objet d'un jugement favorable à l'Etat français par la Cour de justice de l'Union européenne. En conséquence, les 1,3 Md€ qui étaient comptabilisés à ce titre dans les mesures ponctuelles et temporaires en 2013 dans la loi de programmation ne figurent plus en exécution. (4) Dans son avis n° HCFP-2013-02 relatif au solde structurel des administrations publiques, présenté dans le projet de loi de règlement de 2012, le Haut Conseil avait constaté qu'une large part de l'écart de 0,3 point de PIB sur le solde structurel en 2012 provenait de révisions des comptes nationaux de 2011 et, dans une moindre mesure, de l'augmentation de certaines dépenses publiques, partiellement compensée par un surcroît de recettes fiscales. Cet écart est en outre majoré de 0,3 point par rapport à celui constaté il y a un an en raison des révisions intervenues depuis sur le déficit effectif de 2012 (à la hausse) et sa composante conjoncturelle (à la baisse). (5) L'effort structurel en dépenses est mesuré par l'écart entre la progression des dépenses et celle du PIB potentiel. (6) L'augmentation du prix du PIB (prix de la production nationale) a été révisée de 1,8 % dans la loi de programmation à 0,8 % en exécution. L'indice des prix à la consommation hors tabac a été révisé de 1,8 % dans la loi de programmation à 0,7 % en exécution.