JORF n°161 du 13 juillet 2001

Saisi pour avis, en application de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, après en avoir délibéré, formule l'avis suivant :

S'appuyant sur les principes constitutionnels qui régissent la liberté de la communication et conformément aux missions que lui a confiées la loi du 30 septembre 1986 modifiée en son article 1er, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a été guidé, pour formuler cet avis, par le souci constant de veiller à l'amélioration de la qualité et de la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu'à l'exercice de la libre concurrence, tout en gardant comme objectif prioritaire la garantie de la liberté de choix des téléspectateurs.

Le conseil prend acte des objectifs fixés par le législateur et tendant à encourager le développement d'un marché de la production dynamique et diversifié et à favoriser l'indépendance de la production audiovisuelle et cinématographique à l'égard des diffuseurs. Il est convaincu de la nécessité d'améliorer la circulation et l'exposition des oeuvres et de développer un second marché. Il constate que le projet de décret, qui concrétise les principes énoncés dans la loi, contient des avancées en ce sens.

I. - Observations liminaires

En préalable à l'examen des dispositions proposées, le conseil tient à formuler plusieurs observations liminaires.

  1. Il constate que l'étalement dans le temps de l'élaboration des projets de décrets relatifs aux obligations des différentes catégories de diffuseurs en matière de contribution à la production audiovisuelle et cinématographique constitue un obstacle à la lisibilité économique et juridique ainsi qu'à la mise en perspective du projet soumis pour avis, qui concerne les seuls éditeurs de services de télévision diffusés en clair par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Le conseil ne dispose pas ainsi de tous les éléments indispensables à une vision d'ensemble cohérente du dispositif mis en oeuvre en application du 3o de l'article 27 et de l'article 71 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée. De ce fait, il n'est pas en mesure d'en évaluer toute la portée alors que ce projet est appelé à constituer le premier élément d'un cadre plus global régissant les relations entre tous les producteurs et tous les éditeurs de services de télévision.

  2. Le conseil remarque le caractère très détaillé du projet de décret alors que l'alinéa premier de l'article 27 de la loi renvoie au décret la fixation des seuls « principes généraux définissant les obligations » concernant la contribution des éditeurs de services au développement de la production, et non la définition détaillée de ces obligations. Il estime en outre que la complexité, voire la sophistication, du projet de décret risque de provoquer, outre certains effets induits involontaires, le développement de pratiques de contournement des obligations. De plus, la mise en oeuvre et le contrôle de certaines des dispositions en seront rendus plus difficiles.

  3. Le conseil suggère qu'au-delà de l'adoption du projet de décret une réflexion soit engagée en vue de comparer les réglementations en vigueur ainsi que leurs effets dans les principaux pays européens et de simplifier le dispositif français.

  4. Il souhaiterait que le décret ménage davantage de place à des dispositifs assurant la souplesse et la rapidité d'adaptation nécessaires pour accompagner l'évolution du secteur. De ce point de vue, les conventions conclues avec les diffuseurs privés ainsi que les cahiers des missions et des charges ou les contrats d'objectifs et de moyens des diffuseurs publics lui semblent plus adaptés. Le conseil rappelle qu'il a déjà exprimé cette position dans son avis du 12 avril 1999 relatif au projet de loi modifiant la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée et concernant les obligations relatives à la contribution des éditeurs de services au développement de la production cinématographique et audiovisuelle.

  5. Le conseil observe que le pouvoir réglementaire ne laisse guère de champ à la conclusion d'accords interprofessionnels entre diffuseurs et producteurs, alors que des accords entre certains diffuseurs et certaines organisations professionnelles ont déjà pu être négociés. Sur certains points, le projet de décret pourrait définir des obligations générales en laissant la fixation des modalités détaillées aux négociations interprofessionnelles.

  6. Le conseil estime que les nouvelles obligations des éditeurs de services à l'égard de la production prévues dans le projet de décret ne sauraient produire pleinement tous leurs effets en matière de renforcement des capacités nationales de production qu'accompagnées d'une action résolue des acteurs concernés pour maîtriser la hausse importante de certains éléments des coûts de production des oeuvres, qui affectent la compétitivité d'une production nationale déjà handicapée par l'étroitesse du marché francophone.

  7. Plus généralement, le conseil considère que le montant des investissements des diffuseurs dans la production est également conditionné par deux facteurs déterminants ayant des répercussions sur leurs comptes d'exploitation. D'une part, le dégagement de nouvelles ressources pour remédier à l'insuffisance chronique des différents modes de financement des diffuseurs nationaux pourrait mécaniquement engendrer des investissements supplémentaires dans la production audiovisuelle et cinématographique. D'autre part, les marges de manoeuvre que ces diffuseurs nationaux pourraient dégager à l'égard d'autres charges d'exploitation, notamment les droits de diffusion de certains événements sportifs, contribueraient à améliorer le financement des programmes à montant global de produits inchangé.


Historique des versions

Version 1

Saisi pour avis, en application de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, après en avoir délibéré, formule l'avis suivant :

S'appuyant sur les principes constitutionnels qui régissent la liberté de la communication et conformément aux missions que lui a confiées la loi du 30 septembre 1986 modifiée en son article 1er, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a été guidé, pour formuler cet avis, par le souci constant de veiller à l'amélioration de la qualité et de la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu'à l'exercice de la libre concurrence, tout en gardant comme objectif prioritaire la garantie de la liberté de choix des téléspectateurs.

Le conseil prend acte des objectifs fixés par le législateur et tendant à encourager le développement d'un marché de la production dynamique et diversifié et à favoriser l'indépendance de la production audiovisuelle et cinématographique à l'égard des diffuseurs. Il est convaincu de la nécessité d'améliorer la circulation et l'exposition des oeuvres et de développer un second marché. Il constate que le projet de décret, qui concrétise les principes énoncés dans la loi, contient des avancées en ce sens.

I. - Observations liminaires

En préalable à l'examen des dispositions proposées, le conseil tient à formuler plusieurs observations liminaires.

1. Il constate que l'étalement dans le temps de l'élaboration des projets de décrets relatifs aux obligations des différentes catégories de diffuseurs en matière de contribution à la production audiovisuelle et cinématographique constitue un obstacle à la lisibilité économique et juridique ainsi qu'à la mise en perspective du projet soumis pour avis, qui concerne les seuls éditeurs de services de télévision diffusés en clair par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Le conseil ne dispose pas ainsi de tous les éléments indispensables à une vision d'ensemble cohérente du dispositif mis en oeuvre en application du 3o de l'article 27 et de l'article 71 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée. De ce fait, il n'est pas en mesure d'en évaluer toute la portée alors que ce projet est appelé à constituer le premier élément d'un cadre plus global régissant les relations entre tous les producteurs et tous les éditeurs de services de télévision.

2. Le conseil remarque le caractère très détaillé du projet de décret alors que l'alinéa premier de l'article 27 de la loi renvoie au décret la fixation des seuls « principes généraux définissant les obligations » concernant la contribution des éditeurs de services au développement de la production, et non la définition détaillée de ces obligations. Il estime en outre que la complexité, voire la sophistication, du projet de décret risque de provoquer, outre certains effets induits involontaires, le développement de pratiques de contournement des obligations. De plus, la mise en oeuvre et le contrôle de certaines des dispositions en seront rendus plus difficiles.

3. Le conseil suggère qu'au-delà de l'adoption du projet de décret une réflexion soit engagée en vue de comparer les réglementations en vigueur ainsi que leurs effets dans les principaux pays européens et de simplifier le dispositif français.

4. Il souhaiterait que le décret ménage davantage de place à des dispositifs assurant la souplesse et la rapidité d'adaptation nécessaires pour accompagner l'évolution du secteur. De ce point de vue, les conventions conclues avec les diffuseurs privés ainsi que les cahiers des missions et des charges ou les contrats d'objectifs et de moyens des diffuseurs publics lui semblent plus adaptés. Le conseil rappelle qu'il a déjà exprimé cette position dans son avis du 12 avril 1999 relatif au projet de loi modifiant la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée et concernant les obligations relatives à la contribution des éditeurs de services au développement de la production cinématographique et audiovisuelle.

5. Le conseil observe que le pouvoir réglementaire ne laisse guère de champ à la conclusion d'accords interprofessionnels entre diffuseurs et producteurs, alors que des accords entre certains diffuseurs et certaines organisations professionnelles ont déjà pu être négociés. Sur certains points, le projet de décret pourrait définir des obligations générales en laissant la fixation des modalités détaillées aux négociations interprofessionnelles.

6. Le conseil estime que les nouvelles obligations des éditeurs de services à l'égard de la production prévues dans le projet de décret ne sauraient produire pleinement tous leurs effets en matière de renforcement des capacités nationales de production qu'accompagnées d'une action résolue des acteurs concernés pour maîtriser la hausse importante de certains éléments des coûts de production des oeuvres, qui affectent la compétitivité d'une production nationale déjà handicapée par l'étroitesse du marché francophone.

7. Plus généralement, le conseil considère que le montant des investissements des diffuseurs dans la production est également conditionné par deux facteurs déterminants ayant des répercussions sur leurs comptes d'exploitation. D'une part, le dégagement de nouvelles ressources pour remédier à l'insuffisance chronique des différents modes de financement des diffuseurs nationaux pourrait mécaniquement engendrer des investissements supplémentaires dans la production audiovisuelle et cinématographique. D'autre part, les marges de manoeuvre que ces diffuseurs nationaux pourraient dégager à l'égard d'autres charges d'exploitation, notamment les droits de diffusion de certains événements sportifs, contribueraient à améliorer le financement des programmes à montant global de produits inchangé.