JORF n°0176 du 31 juillet 2013

  1. La seconde condition médicale concerne la preuve de l'irréversibilité de l'apparence physique. Cette condition contraint les personnes concernées à suivre des traitements médicaux aux conséquences très lourdes, qui impliquent une obligation de stérilisation. Cette obligation ne passe pas forcément par des opérations chirurgicales de réassignation sexuelles, mais peut être obtenue par des traitements hormonaux, dont la Haute Autorité de santé indique que, pris sur le long terme, ils sont susceptibles d'entraîner des modifications irréversibles du métabolisme. Or, il apparaît que la réaction aux traitements hormonaux diffère selon les patients, avec des effets (dont la stérilité) qui sont obtenus à plus ou moins long terme. Autrement dit, la procédure judiciaire dépend de l'avancée, aléatoire, de la procédure médicale, ce qui contribue à créer des situations de fortes inégalités entre les personnes concernées. Par ailleurs, l'irréversibilité de l'apparence physique est difficile à prouver, et justifie très fréquemment, aux yeux des juges, une demande d'expertise médicale et ce, en dépit de ce que recommandait la circulaire du 14 mai 2010, qui invitait les magistrats à « ne solliciter d'expertises que si les éléments fournis révèlent un doute sérieux sur la réalité du transsexualisme du demandeur ». Car l'expertise, outre le coût qu'elle entraîne pour le requérant, contribue à allonger la durée de la procédure de manière inacceptable. Par ailleurs, quand les traitements hormonaux ne suffisent pas à prouver l'irréversibilité de l'apparence physique, les personnes demandant à changer la mention du sexe sur leur état civil sont bien souvent contraintes, en dernier recours, à accepter des opérations chirurgicales (pénectomie ou mastectomie notamment). Les conditions médicales imposées par le droit posent donc problème, dans la mesure où certaines personnes ne souhaitant pas avoir recours à ces traitements et à ces opérations en acceptent néanmoins la contrainte dans l'espoir de voir aboutir la procédure judiciaire dans laquelle elles sont engagées. Par conséquent, la CNCDH demande que soit mis fin à toute demande de réassignation sexuelle, que celle-ci passe par un traitement hormonal entraînant la stérilité ou qu'elle signifie le recours à des opérations chirurgicales.
  2. Une telle intervention législative irait dans le sens des recommandations formulées en 2009 par le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Thomas Hammarberg, dans le document thématique déjà cité, Droits de l'homme et identité de genre. Le commissaire invitait les Etats membres à « instaurer des procédures rapides et transparentes de changement de nom et de sexe sur les extraits d'acte de naissance, cartes d'identité, passeports, diplômes et autres documents officiels », et il appelait à « cesser de subordonner la reconnaissance de l'identité de genre d'une personne à une obligation légale de stérilisation et de soumission à d'autres traitements médicaux ». La résolution 1728 votée le 29 avril 2010 par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe va dans le même sens, puisqu'elle appelle les Etats membres à ne pas faire dépendre la remise de « documents officiels reflétant l'identité de genre choisie » d'une « obligation préalable de subir une stérilisation ou d'autres procédures médicales comme une opération de conversion sexuelle ou une thérapie hormonale (14). »

(14) Article 16.11.2. La résolution, consacrée aux discriminations « sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre », est publiée sur le site du Conseil de l'Europe : http://assembly.coe.int/mainf.asp?Link=/documents/adoptedtext/ ta10/fres1728.htm.


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Version 1

23. La seconde condition médicale concerne la preuve de l'irréversibilité de l'apparence physique. Cette condition contraint les personnes concernées à suivre des traitements médicaux aux conséquences très lourdes, qui impliquent une obligation de stérilisation. Cette obligation ne passe pas forcément par des opérations chirurgicales de réassignation sexuelles, mais peut être obtenue par des traitements hormonaux, dont la Haute Autorité de santé indique que, pris sur le long terme, ils sont susceptibles d'entraîner des modifications irréversibles du métabolisme. Or, il apparaît que la réaction aux traitements hormonaux diffère selon les patients, avec des effets (dont la stérilité) qui sont obtenus à plus ou moins long terme. Autrement dit, la procédure judiciaire dépend de l'avancée, aléatoire, de la procédure médicale, ce qui contribue à créer des situations de fortes inégalités entre les personnes concernées. Par ailleurs, l'irréversibilité de l'apparence physique est difficile à prouver, et justifie très fréquemment, aux yeux des juges, une demande d'expertise médicale et ce, en dépit de ce que recommandait la circulaire du 14 mai 2010, qui invitait les magistrats à « ne solliciter d'expertises que si les éléments fournis révèlent un doute sérieux sur la réalité du transsexualisme du demandeur ». Car l'expertise, outre le coût qu'elle entraîne pour le requérant, contribue à allonger la durée de la procédure de manière inacceptable. Par ailleurs, quand les traitements hormonaux ne suffisent pas à prouver l'irréversibilité de l'apparence physique, les personnes demandant à changer la mention du sexe sur leur état civil sont bien souvent contraintes, en dernier recours, à accepter des opérations chirurgicales (pénectomie ou mastectomie notamment). Les conditions médicales imposées par le droit posent donc problème, dans la mesure où certaines personnes ne souhaitant pas avoir recours à ces traitements et à ces opérations en acceptent néanmoins la contrainte dans l'espoir de voir aboutir la procédure judiciaire dans laquelle elles sont engagées. Par conséquent, la CNCDH demande que soit mis fin à toute demande de réassignation sexuelle, que celle-ci passe par un traitement hormonal entraînant la stérilité ou qu'elle signifie le recours à des opérations chirurgicales.

24. Une telle intervention législative irait dans le sens des recommandations formulées en 2009 par le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Thomas Hammarberg, dans le document thématique déjà cité, Droits de l'homme et identité de genre. Le commissaire invitait les Etats membres à « instaurer des procédures rapides et transparentes de changement de nom et de sexe sur les extraits d'acte de naissance, cartes d'identité, passeports, diplômes et autres documents officiels », et il appelait à « cesser de subordonner la reconnaissance de l'identité de genre d'une personne à une obligation légale de stérilisation et de soumission à d'autres traitements médicaux ». La résolution 1728 votée le 29 avril 2010 par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe va dans le même sens, puisqu'elle appelle les Etats membres à ne pas faire dépendre la remise de « documents officiels reflétant l'identité de genre choisie » d'une « obligation préalable de subir une stérilisation ou d'autres procédures médicales comme une opération de conversion sexuelle ou une thérapie hormonale (14). »

(14) Article 16.11.2. La résolution, consacrée aux discriminations « sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre », est publiée sur le site du Conseil de l'Europe : http://assembly.coe.int/mainf.asp?Link=/documents/adoptedtext/ ta10/fres1728.htm.