- La somme des preuves imposées par la jurisprudence et la fréquence des demandes d'expertise posent en outre le problème du soupçon qui pèse trop souvent sur les personnes transidentitaires, et qui est ressenti par elles comme une forme de déni d'identité. Car, comme en témoignent les personnes transidentitaires elles-mêmes, s'affirmer homme ou femme n'est pas une question de choix ni de volonté et ne relève pas d'une décision arbitraire, conjoncturelle ou fantasmatique : cette affirmation est au contraire toujours liée à une conviction profonde qui est souvent ressentie dès l'enfance, et qui relève, non pas d'une identification passagère, mais bien de l'identité même du sujet, de ce qu'il est. Le soupçon préalable que la procédure actuelle semble faire planer sur cette conviction intime et profonde ajoute donc une cause de souffrance psychique aux préjugés dont sont souvent victimes les personnes concernées, la transidentité étant encore trop communément rapportée à un fantasme, une maladie mentale, voire à une perversion. A l'instar de la Cour européenne des droits de l'homme, la CNCDH estime ainsi que le droit, en refusant de consacrer l'apparence sociale d'une personne transidentitaire pendant de nombreuses années, place la personne « dans une situation anormale lui inspirant des sentiments de vulnérabilité, d'humiliation et d'anxiété (11) ».
(11) Arrêt Goodwin contre Royaume-Uni. http://hudoc.echr.coe.int/sites/fra/Pages/search.aspx#{"fulltext":["transsexualisme"],"itemid":["001-65153"]}.
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