- Par ailleurs, l'article 10 du même projet de loi énonce de manière ambiguë que « ne peuvent être écartés, au seul motif de leur origine, les documents, pièces ou informations que l'administration utilise et qui sont régulièrement portés à sa connaissance dans les conditions prévues aux articles L. 82 C, L. 101, L. 114 et L. 114 A ou, en application des dispositions relatives à l'assistance administrative, par les autorités compétentes des Etats étrangers ».
La CNCDH recommande que ce texte soit strictement précisé et délimité ; elle rappelle que les principes de licéité et de loyauté de l'obtention des preuves sont applicables et opposables aux autorités publiques et qu'ils constituent une condition essentielle de l'Etat de droit. - La CNCDH critique enfin l'ajout d'une disposition isolée dans le projet de loi sur la délinquance économique et financière selon laquelle en cas de recours contre une saisie d'un bien d'une personne non mise en cause dans une procédure pénale, il ne serait plus possible à l'avocat concerné d'accéder à l'entier dossier pénal mais seulement aux pièces se rapportant à ladite saisie contestée. La CNCDH regrette cette disposition qui marque un recul non justifié des droits de la défense et une nouvelle manifestation de défiance du législateur français à l'égard de l'avocat.
Nécessité et individualisation des peines : - Alors que le code pénal prévoit des peines d'emprisonnement relativement longues, les juridictions hésitent à les prononcer, notamment à l'encontre des élus (29) ; ceux qui sont effectivement condamnés voient généralement leur peine aménagée. Néanmoins, à l'instar de ce qu'elle recommande concernant les autres personnes condamnées, la CNCDH encourage la mise en place de peines alternatives à l'emprisonnement réellement dissuasives. L'article 19 du projet de loi relatif à la transparence de la vie financière déposé par le Gouvernement prévoyait, la possibilité de sanctionner d'inéligibilité définitive certains comportements. La Commission des lois de l'Assemblée nationale a modifié cet article pour limiter cette inéligibilité à dix ans. La CNCDH est opposée par principe aux peines perpétuelles qui ne sont admissibles que si elles peuvent faire l'objet d'un relèvement. En effet, une justice pénale humaniste doit également avoir pour finalité l'amendement et la réinsertion du condamné, ce qui est contraire à l'idée même d'une peine perpétuelle. Néanmoins, compte tenu des délais de la justice et du temps de l'action politique, il convient de se demander si la peine de dix ans d'inéligibilité est effectivement suffisante. Des condamnations pour des périodes brèves peuvent en effet être relativement indolores pour l'élu dès lors qu'il conserve ses attaches et réseaux politiques et peut donc conserver pendant ce temps son influence de facto et se représenter une fois sa période d'inéligibilité terminée.
La CNCDH recommande que les peines d'inéligibilité ne soient pas perpétuelles mais allongées à des périodes significatives vingt ans, vingt-cinq ans ou trente ans).
(29) Ainsi, le GAFI note : « Dans l'échelle des sanctions applicables aux délits, la sanction pénale prévue pour le délit de blanchiment s'inscrit dans la moyenne supérieure (cinq ans) et est équivalente à d'autres infractions financières comparables (recel, abus de bien social, escroquerie, fraude fiscale simple, non-justification des ressources). Par contre, après analyse des peines d'emprisonnement prononcées, les évaluateurs ne sont pas convaincus du caractère efficace et dissuasif des peines pour blanchiment de capitaux prononcées par les tribunaux français à l'encontre des personnes morales, et dans une moindre mesure, des personnes physiques ». ― Groupe d'action financier « Rapport d'évaluation mutuelle. ― Synthèse du rapport. ― Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme », France, 25 février 2011. A titre d'illustration, selon les statistiques du ministère de la justice, 245 personnes ont été condamnées en 2011 ; le durée moyenne de la procédure était de 54 mois ; ces condamnations ont abouti à une condamnation pour une peine de prison ferme pour 40 personnes ; 19 ont été condamnées à un sursis partiel, et 123 à un sursis complet, ministère de la justice : les condamnations année 2011.
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