JORF n°0143 du 23 juin 2010

Avis du

Le contrat de régulation économique d'Aéroports de Paris pour la période 2006-2010 s'était donné pour ambition de doter la région parisienne de plates-formes aéroportuaires performantes en termes de capacité, d'infrastructures, de qualité de service et de coûts.
Au terme de ce premier contrat, le retard qu'avaient pris les plates-formes parisiennes par rapport aux autres grands aéroports européens a bien été comblé tant en ce qui concerne la capacité que les infrastructures ; les installations aéroportuaires répondent aujourd'hui de manière satisfaisante, et pour plusieurs années encore, aux besoins des compagnies aériennes et des passagers.
En revanche, des efforts importants doivent encore être consacrés à la poursuite de la rénovation des aérogares, à la qualité de service, et au dialogue avec les utilisateurs, même si des progrès notables ont d'ores et déjà été constatés. Quant aux redevances supportées par les utilisateurs, contenir leur évolution à un niveau acceptable et comparable aux autres grands aéroports européens reste une exigence qui doit être inlassablement poursuivie. Les efforts doivent en premier lieu être portés par Aéroports de Paris ; mais les autres acteurs concernés, et particulièrement l'Etat dans son rôle de régulateur et les compagnies aériennes, doivent y contribuer pour que le transport aérien joue son rôle majeur dans le développement économique de notre pays et de la région parisienne.
C'est sur ces axes de progrès que, très justement, le projet présenté par Aéroports de Paris met l'accent et développe une approche client vertueuse. Ses propositions nécessitent cependant des commentaires et ajustements.
Les turbulences qu'a connues le transport aérien en fin de période du premier contrat de régulation économique, ont conduit Aéroports de Paris à s'écarter très sagement et de manière unilatérale des plafonds tarifaires rendus possibles par le mécanisme d'ajustement du contrat précédent. C'est une situation dont il faudra tenir compte en précisant les conditions dans lesquelles le contrat de régulation économique devrait être révisé en cours de période.
Dans son avis, la Commission s'est attachée à préciser ces points d'amélioration, en répondant aux questions que le Ministre lui a posées dans sa lettre de saisine. C'est l'objet des développements ci-après et des propositions que la Commission a retenues.
I. - L'évolution du trafic

  1. En dépit de l'évolution récente du contexte économique, tous les acteurs prévoient une reprise du trafic à court et moyen terme. Compte tenu de la nature même de la crise, aucun effet « rattrapage » n'est toutefois attendu et la reprise devrait être modérée en particulier sur les premières années de la période du contrat de régulation économique.
    De manière générale, les prévisions de trafic sont un exercice délicat, qui plus est lorsqu'il concerne un horizon temporel de cinq ans. En effet, dans le secteur du transport aérien, particulièrement sensible aux aléas de toute nature, la probabilité pour qu'un accident de parcours se produise sur une telle période n'est pas négligeable et, si tel était le cas, la période est trop courte pour que son impact soit atténué. La période actuelle renforce ces incertitudes.
    C'est pourquoi il paraît particulièrement important dès l'origine de prévoir à la fois des mécanismes d'ajustement et de révision du contrat de régulation économique.
  2. Il ressort des analyses des différents acteurs des appréciations globalement convergentes sur le rythme de croissance de l'activité sur les plates-formes parisiennes, en ligne avec celui présenté par Aéroports de Paris dans son dossier de consultation des usagers. Les transporteurs aériens soulignent toutefois leur difficulté à établir des prévisions de trafic dans le contexte actuel incertain du secteur aérien, et compte tenu des aléas conjoncturels tels que les conséquences récentes de l'éruption du volcan islandais Eyjafjöll.
    Aéroports de Paris et les services compétents de la Direction générale de l'aviation civile présentent des prévisions de croissance moyenne respectives de 3,2 % et 3,4 % pour le nombre de passagers et de 1,8 % et 2,2 % par an pour le nombre de mouvements sur la période 2010-2015.
  3. Compte tenu de la convergence entre ces deux prévisions, la Commission estime que le contrat de régulation peut retenir le scénario présenté par Aéroports de Paris sur la période du contrat, avec une croissance annuelle limitée en début de contrat et plus soutenue par la suite, scénario sur lequel a été construit le dossier public de consultation.
  4. La Commission considère que les écarts qui seront immanquablement constatés entre le scénario retenu et la réalité devraient être pris en compte de manière souple et réactive, sans pour autant conduire à des ajustements trop volatils, d'une année à l'autre, sur les tarifs des redevances.
    C'est pourquoi le contrat de régulation devrait prévoir des mécanismes d'intéressement des partenaires, compagnies aériennes et aéroport, selon les écarts à la hausse et à la baisse du trafic. Afin notamment de permettre une meilleure lisibilité de leurs effets, les ajustements des tarifs des redevances pourraient tenir compte uniquement du trafic passager.
    La Commission considère légitime que soit répercutée sur les compagnies aériennes une part des effets financiers de ces écarts : il paraît juste de leur faire bénéficier d'une croissance volontariste du trafic et, en cas de croissance moins soutenue, de les faire participer aux efforts d'adaptation de l'aéroport.
    Il apparaît également légitime à la Commission qu'une part des écarts de recettes aéronautiques, à la hausse comme à la baisse, soit affectée à Aéroports de Paris, dans la mesure où les écarts de trafic ont potentiellement des répercussions sur ses charges.
    Afin d'en encadrer la portée, le mécanisme d'ajustement des tarifs des redevances devrait être plafonné dans ses effets à la hausse comme à la baisse. Cependant Aéroports de Paris devrait, en cas de forte hausse du trafic permettant d'atteindre le plafond d'évolution à la baisse des redevances, utiliser l'excédent de recettes résultant de ce plafonnement pour prendre en charge des investissements nouveaux ou anticiper des investissements prévus sans répercussion additionnelle sur les plafonds des tarifs des redevances.
    Compte tenu de l'incertitude forte entourant les prévisions actuelles de trafic, il convient également de prévoir un mécanisme de révision du contrat en cas de dépassement trop important de ses hypothèses.
    Dans ces conditions, la Commission propose que :
    ― la clause d'ajustement des tarifs des redevances porte à hauteur de cent pour cent sur les évolutions du trafic de passagers ;
    ― dans une fourchette de l'ordre de +/― 0,5 % de trafic, l'évolution prévue des tarifs reste inchangée ;
    ― en cas de dépassement des bornes de la fourchette, soit à la hausse (entre + 0,5 % et + 1,5 %), soit à la baisse (entre ― 0,5 % et ― 1,5 %), les effets sur les recettes aéronautiques, soient compensés à hauteur de 50 % de l'écart de recettes au bénéfice des compagnies aériennes en cas de hausse ou au bénéfice d'Aéroports de Paris en cas de baisse, avec un plafonnement de +/― 0,5 % sur le plafond tarifaire de chaque période ;
    ― en cas de hausse qui dépasserait 1,5 %, Aéroports de Paris affecte tout ou partie de l'excédent de recettes éventuel résultant du plafonnement des effets de la clause d'ajustement sur les tarifs à la prise en charge d'investissements nouveaux ou l'anticipation de la programmation d'investissements prévus, sans répercussion additionnelle sur le plafond d'évolution des tarifs des redevances ;
    ― si le trafic devait s'écarter deux ou trois années de suite trop fortement du scénario de base, par exemple de 6 % cumulés sur 2 ans ou de 8 % cumulés sur 3 ans, cela constituerait un motif de révision du contrat, pour prendre en compte le changement notable de ses conditions économiques.
    II. - Les enjeux pour Aéroports de Paris
    a) Les investissements
  5. Après la période 2006-2010 du premier contrat de régulation économique axée sur le développement des capacités de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle, le programme d'investissements du second contrat de régulation économique d'Aéroports de Paris 2011-2015 est principalement orienté vers des opérations visant l'amélioration de la qualité des services offerts et l'optimisation des installations existantes.
    La Commission considère que ces orientations, ainsi que l'excédent prévisionnel de capacité de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle au regard des prévisions de trafic aujourd'hui retenues ne remettent pas en question la poursuite de la réalisation du satellite S4, au vu de l'état d'avancement des travaux. La Commission observe notamment qu'Aéroports de Paris prévoit d'utiliser cette surcapacité afin de rénover des terminaux qui le nécessitent, afin d'améliorer la qualité de service perçue par le client final.
    La Commission note avec satisfaction qu'Aéroports de Paris a intégré les exigences du développement durable dans son programme d'investissements, à travers notamment l'existence d'une enveloppe dédiée. Celle-ci comporte un programme d'investissements structurants, tels que l'atteinte progressive de la performance BBC (Bâtiments à Basse Consommation) sur les nouvelles installations et l'optimisation de la performance énergétique des installations réhabilitées, et des investissements spécifiques, tels que des travaux de géothermie à Paris-Orly, visant notamment à augmenter significativement la part des énergies renouvelables dans les consommations.
  6. Sur un total de 1 757 M€ 2010, Aéroports de Paris prévoit 555 M€ 2010 d'investissements de capacité et 339 M€ 2010 d'investissements de restructuration pour le CRE2 contre respectivement 1 276 M€ et 206 M€ pour le CRE1. Le programme d'investissements est composé d'opérations qui permettront une meilleure adéquation des capacités des plates-formes parisiennes à l'évolution de la structure du trafic et auront une influence significative sur la qualité de service offerte aux passagers et aux compagnies :
    ― ouverture du satellite S4 de Paris-Charles de Gaulle et rénovation des terminaux les plus anciens ;
    ― jonction entre les terminaux 2A et 2C ;
    ― passage du 2 F en régime intégralement Schengen
    ― reconfiguration des halls 3 et 4 de l'aéroport de Paris-Orly ;
    ― développement de l'inspection filtrage unique (IFU) entre les terminaux 2E et 2 F de Paris-Charles de Gaulle ;
    ― poursuite de l'équipement en fourniture du 400 Hz du satellite S4 et des postes de stationnement au contact de Paris-Charles de Gaulle non encore dotés de ce service, ainsi que l'achèvement de son déploiement à Paris-Orly ;
    ― réaménagement du seuil 08 du doublet de pistes sud de Paris-Charles de Gaulle ;
    ― ...
    La Commission n'a pas d'observations à formuler sur ce programme ; elle encourage cependant Aéroports de Paris à poursuivre les efforts engagés visant à intensifier l'équipement en 400Hz des postes de stationnement et à accroître les capacités de dégivrage des avions dans le meilleur respect des normes environnementales. Ces efforts devraient permettre de fluidifier l'exploitation aéroportuaire notamment lors des épisodes hivernaux.
    La Commission note favorablement la volonté d'Aéroports de Paris de consacrer des ressources importantes pour l'entretien des bâtiments et plus généralement du patrimoine de l'aéroport.
  7. Ce programme d'investissements est composé de nombreuses opérations de rénovation visant à rétablir un niveau d'exigence élevé en matière d'équipements et de qualité de service. Celles-ci devront être menées en collaboration avec les compagnies aériennes, au travers par exemple des comités opérationnels qu'Aéroports de Paris prévoit de réunir au niveau de chaque terminal.
    Une enveloppe budgétaire de 132 M€ est plus spécifiquement dédiée à la qualité de service. Elle est composée de nombreuses opérations qui s'articulent notamment autour de programmes transversaux et d'initiatives locales qui permettront de répondre aux préoccupations des clients. Dans cette perspective, la Commission encourage Aéroports de Paris à associer ses usagers à la mise en œuvre de ces opérations, à travers par exemple les réunions des comités opérationnels précités.
  8. La Commission observe que l'entreprise est incitée à respecter le calendrier des principales opérations : des retards engendreraient en effet pour elle des surcoûts d'investissement et de moindres recettes commerciales.
    La Commission considère toutefois qu'il est nécessaire de prévoir des pénalités spécifiques pour des retards dans la mise en service des investissements de fort enjeu. La Commission estime donc qu'une clause d'ajustement des tarifs en fonction du respect du calendrier en matière d'investissements devrait être prévue.
    Elle considère en revanche que toute augmentation des coûts du programme d'investissements devrait être en totalité prise en charge par Aéroports de Paris.
    Enfin, une clause d'ajustement des tarifs en fonction de l'atteinte des objectifs de tout ou partie des dépenses d'investissements, hors les principaux investissements de capacité, devrait être prévue. Cette clause devrait être effective dès la période tarifaire 2013 et n'agir qu'à la baisse sur les tarifs.
  9. Enfin, compte tenu des incertitudes entourant l'évolution du trafic pendant la durée 2011-2015 du contrat de régulation économique, la Commission estime raisonnable d'y intégrer une clause de revoyure prévoyant les conditions de la réalisation ou du report des aires au large de CDG 2.
    b) Les charges et la productivité
  10. La position de monopole de l'aéroport sur les activités du périmètre régulé implique que le régulateur économique accorde une attention particulière aux efforts de productivité que l'exploitant aéroportuaire est à même de réaliser.
    Dans le cas d'Aéroports de Paris, il s'agit notamment de s'assurer que l'exploitant prévoit d'améliorer la productivité de son activité sur la période du contrat de régulation économique, à un niveau qu'il devrait consentir s'il était en situation de libre concurrence.
  11. La Commission considère que les efforts prévus par Aéroports de Paris en matière de productivité pendant la période du contrat de régulation sont sensibles et raisonnablement calibrés. La Commission encourage toutefois Aéroports de Paris à intensifier également ses efforts dans le domaine de la maîtrise des charges opérationnelles courantes du périmètre régulé, qui devraient se traduire par une décélération sensible de leurs hausses lors du troisième contrat.
    c) La qualité de service
  12. L'amélioration de la qualité de service rendue aux utilisateurs des plates-formes aéroportuaires parisiennes doit constituer l'axe central de l'action d'Aéroports de Paris sur la période 2011-2015. La Commission a apprécié que le management de l'entreprise place bien cette problématique au cœur de ses préoccupations, à travers notamment la mise en place au sein de l'entreprise d'une « Université du Service » qui lui serait dédiée.
    La Commission est consciente que l'atteinte d'un niveau de qualité sensiblement plus élevé qu'il ne l'est aujourd'hui prendra plusieurs années, notamment en raison des rénovations nécessaires de certaines installations terminales. Les investissements réalisés sur la période 2011-2015 contribueront à cet effort, mais la Commission estime que l'entreprise doit également développer une véritable « attitude de service » tournée vers les besoins des clients et leur satisfaction.
  13. La Commission considère que la mise en place par Aéroports de Paris d'indicateurs de qualité de service partagés par l'ensemble des acteurs est essentielle dans cette démarche qualité. Le fait d'y adjoindre, pour certains d'entre eux, des incitations financières spécifiques ne peut qu'encourager l'entreprise dans la poursuite de cette priorité.
    A cet égard, la Commission constate que la liste des indicateurs proposés par Aéroports de Paris comme devant être soumis à objectifs et incitations financières fait l'objet d'un certain consensus. Elle n'estime pas souhaitable de multiplier significativement leur nombre, afin de maintenir une bonne lisibilité de la régulation économique. Elle estime également qu'un bon équilibre est atteint entre les indicateurs de perception de la qualité de service par le passager et ceux relatifs à la disponibilité des équipements qui concernent plus directement les compagnies aériennes.
    La Commission estime toutefois qu'il pourrait être pertinent d'ajouter à cette liste un indicateur assorti d'incitation financière portant sur la disponibilité des tapis de livraison bagages. Elle estime également que le raccourcissement du délai de préavis de travaux de trois mois à un mois ne devrait être envisagé que dans la mesure où les objectifs cibles des indicateurs concernés prendraient en compte cette modification de la méthode de mesure.
    La Commission souligne également l'importance du choix des indicateurs de suivi non assortis d'incitations financières ; elle attire en particulier l'attention sur les indicateurs mesurant le temps d'attente aux postes d'inspection-filtrage et de contrôle aux frontières qui doivent servir de véritables leviers à une fluidification du circuit passager.
    S'agissant des indicateurs qui seraient soumis à objectif et assortis d'incitation financière, la Commission appelle plus généralement l'attention sur la difficulté et l'importance de définir des niveaux de référence pertinents et, s'agissant plus particulièrement des indicateurs de satisfaction, de la nécessité d'une mesure par un organisme indépendant.
    Concernant les objectifs cibles proposés par Aéroports de Paris, la Commission considère que les niveaux des objectifs 2014/2015 des indicateurs de satisfaction sur les salles d'embarquement et sur l'orientation en correspondance devraient être rehaussés très significativement, en cohérence notamment avec la stratégie de hub de l'aéroport Paris-Charles de Gaulle.
    Compte tenu des enjeux tant pour Aéroports de Paris que pour les compagnies aériennes, la Commission invite le régulateur à procéder à un audit sur le dispositif de suivi de la qualité de service et de ses indicateurs.
    III. - Les enjeux pour les compagnies aériennes et pour les utilisateurs
    a) Les recettes extra-aéronautiques
    La Commission a pris connaissance des hypothèses retenues par Aéroports de Paris, sur la période 2011-2015, pour améliorer la performance économique et financière de ses plates-formes.
    En ce qui concerne les recettes commerciales, la Commission a pris acte de la modification du périmètre régulé à compter du 1er janvier 2011 par arrêté du 17 décembre 2009, et a bien noté que les propositions d'Aéroports de Paris s'inscrivent dès lors dans ce nouveau cadre.
    A cet égard, et afin de bien mesurer les effets de la récente sortie des activités commerciales du périmètre régulé par arrêté du 17 décembre 2009, notamment ceux comptables, la Commission invite Aéroports de Paris et les ministres en charge de l'aviation civile et de l'économie à échanger, sur toute la période du second contrat, des éléments permettant d'apprécier la rentabilité de ces activités.
    b) Les tarifs des redevances aéronautiques
  14. Si l'ambition de faire dans les prochaines années des plates-formes franciliennes des aéroports de référence au niveau européen est avant tout une exigence qui s'impose à l'entreprise et à l'Etat, la Commission estime légitime que les compagnies aériennes contribuent également à l'effort commun pour que cet objectif soit atteint rapidement.
    Cette contribution devrait être notamment financière, via une augmentation adaptée des tarifs des redevances aéroportuaires.
  15. Les redevances aéroportuaires représentent aujourd'hui une part non négligeable des coûts des compagnies aériennes. Elles rémunèrent des installations et des services fondamentaux dans leurs stratégies de développement.
  16. La Commission considère que le plafond des redevances d'une année donnée devrait être calculé par application d'un taux d'évolution au plafond de l'année précédente, plutôt que d'être recalé à partir des tarifs effectivement fixés sous ce plafond. En effet, conformément à l'esprit de la réglementation en matière de consultation des usagers, qui reste organisée sur une base annuelle, les décisions en matière de redevances visant une période tarifaire donnée ne devraient pas préempter les décisions qui interviendront pour les périodes tarifaires suivantes.
  17. Au-delà du niveau global des tarifs aéroportuaires, la question de la structure de tarification constitue un enjeu au moins aussi important pour les clients des aéroports. En effet, en fonction de la structure de flotte des compagnies et de leurs conditions d'exploitation, l'évolution des charges aéroportuaires qu'elles supporteront peut être très sensiblement différente de celle des tarifs dans leur ensemble.
    La Commission observe à cet égard que de nombreuses modifications de la structure tarifaire ont été mises en œuvre ces dernières années, s'agissant notamment des poids respectifs des redevances assises sur le nombre de passagers et celles assises sur le nombre de mouvements d'avions. La Commission considère qu'une plus grande stabilité de la structure tarifaire dans les deux prochaines années contribuerait à améliorer la lisibilité des tarifs vis-à-vis des usagers des plates-formes franciliennes. A cet égard, le mode de facturation de la prestation d'enregistrement et de traitement des bagages mériterait également d'être clarifié et simplifié.
    La Commission estime enfin qu'il convient d'encourager Aéroports de Paris à développer une politique tarifaire incitative visant à l'amélioration de l'utilisation des infrastructures.
    IV. - Les enjeux économiques et la rentabilité du capital
    La commission prend acte de l'arrêté du 17 décembre 2009 qui institue pour Aéroports de Paris une caisse aménagée proche d'une double caisse, même si ce n'est pas l'approche qu'elle avait retenue pour le premier contrat de régulation économique.
    Cette caisse aménagée modifie notablement l'approche qui doit être retenue pour les équilibres globaux de la Société anonyme Aéroports de Paris, notamment en termes d'objectif de rentabilité sur le périmètre régulé. Compte tenu des propositions de modération de l'évolution des tarifs, particulièrement en début de période, et du fait que le RCE du périmètre régulé resterait nettement inférieur au CMPC en moyenne sur la période 2011-2015, la problématique d'adéquation entre le RCE et le CMPC peut être reportée au-delà du second contrat de régulation économique dans les termes évoqués ci-dessous au 3.
  18. La Commission considère que l'un des fondements de la régulation économique doit consister à rechercher une juste adéquation entre le retour sur les capitaux engagés par Aéroports de Paris (RCE) et le coût moyen pondéré de ces capitaux (CMPC).
    Cette adéquation est cohérente avec l'article R. 224-3-1 du code de l'aviation civile, qui stipule que l'exploitant d'aéroport reçoit une juste rémunération des capitaux investis appréciée au regard du CMPC.
    Dès lors, la Commission estime que les deux questions fondamentales sont les suivantes :
    ― quel est le niveau de CMPC à retenir par le régulateur pour les activités d'Aéroports de Paris entrant dans le champ du nouveau périmètre régulé modifié par arrêté du 17 décembre 2009 ?
    ― à quelle échéance temporelle convient-il d'examiner l'adéquation entre le RCE et le CMPC ? En particulier, convient-il que cette adéquation puisse dans le cas d'Aéroports de Paris se réaliser hors de la période du contrat de régulation économique 2011-2015 ?
  19. Sur la base des évaluations divergentes du CMPC des différents acteurs, la Commission a choisi de retenir une évaluation prenant en compte les éléments suivants :
    ― l'évaluation des différents paramètres non seulement sur la base de leurs valeurs instantanées, mais également, compte tenu du caractère pluriannuel de la régulation économique, sur celle de leurs évolutions historiques et prospectives ;
    ― pour chacun de ces paramètres, la comparaison des valeurs considérées avec celles des aéroports de taille comparable à Aéroports de Paris ;
    ― la structure financière d'Aéroports de Paris, notamment le ratio d'endettement ;
    ― l'évolution de certains paramètres financiers, compte tenu de l'évolution du contexte international général économique et financier ;
    ― la construction même du contrat de régulation économique qui atténue les risques financiers potentiels ;
    ― le fait que le nouveau périmètre de régulation modifié par l'arrêté du 17 décembre 2009 présente un risque potentiellement moins élevé que celui du périmètre de régulation jusqu'alors en vigueur, notamment parce que les activités commerciales sont dépendantes des volumes de ventes des commerces, et sont donc exposées à la fois au risque trafic et au risque de consommation. Il est difficile d'évaluer rigoureusement ce différentiel de risque, du fait de l'absence de stricts comparables, mais il existe.
    Dans ces conditions, la Commission recommande de retenir, pour les besoins de la régulation économique, un CMPC sur le périmètre régulé situé dans une fourchette allant de 6,2 % à 6,8 % en valeur nominale et après impôt.
  20. La seconde question concerne l'horizon temporel sur lequel doit s'apprécier la juste rémunération des capitaux investis sur le périmètre régulé.
    L'appréciation de la Commission sur cette question a particulièrement pris en compte les éléments suivants spécifiques à Aéroports de Paris :
    ― Aéroports de Paris doit encore améliorer sa maîtrise des charges opérationnelles courantes du périmètre régulé et sa productivité ;
    ― l'entreprise connaît actuellement un bas de cycle en matière d'investissements, qui se traduit par un volume de dépenses en capital relativement moins élevé pendant la période du contrat de régulation économique 2011-2015 ;
    ― le périmètre de régulation d'Aéroports de Paris a été modifié par arrêté du 17 décembre 2009, abaissant mécaniquement très sensiblement le retour sur les capitaux engagés de ce périmètre.
    La Commission a constaté que, dans son dossier public, Aéroports de Paris indique ne pas pouvoir atteindre l'objectif d'une égalité entre le RCE et le CMPC sur le nouveau périmètre régulé modifié par arrêté du 17 décembre 2009 pendant cette période, ce qui recueille son plein accord. Elle estime que la question de l'adéquation entre le RCE et le CMPC devrait faire l'objet d'une attention particulière lors des discussions et consultations qui prépareront les contrats de régulation économique d'Aéroports de Paris portant sur les périodes postérieures à 2015, et d'une expertise approfondie préalable à celles-ci.
    Dans ces conditions, la Commission recommande que la régulation économique prenne en compte l'objectif d'un RCE prévisionnel compris entre 5 % et 5,5 % à l'horizon de 2015, tout en étant de l'ordre de 4 % en moyenne sur la période 2011-2015, en cohérence avec les propositions d'Aéroports de Paris.
  21. En conséquence, la Commission est globalement en accord avec les propositions d'Aéroports de Paris d'augmentation du plafond d'évolution des tarifs des redevances.
    V. - Les relations entre Aéroports de Paris et ses usagers
    La Commission confirme les analyses et les conclusions auxquelles elle avait abouti lors de son avis relatif au premier contrat de régulation économique, à savoir :
  22. La position de monopole confirmée sur les activités du périmètre régulé implique un devoir de dialogue et de transparence d'Aéroports de Paris vis-à-vis des utilisateurs des plates-formes parisiennes.
    Cette transparence doit s'appliquer en premier lieu à l'organisation et l'exploitation des plates-formes, ainsi qu'à la fixation et au suivi des indicateurs de qualité de service : elle passe par une concertation régulière et véritable au sein des commissions aéroportuaires ad hoc, ainsi qu'au sein de comités opérationnels réunis au niveau de chaque terminal.
    Elle concerne également le programme et le calendrier des investissements.
    Elle nécessite enfin que les éléments financiers déterminants de l'entreprise soient présentés, sans réticence et dans le meilleur esprit d'ouverture, aux partenaires concernés par les services publics aéroportuaires, sauf obstacle juridique.
    Cette transparence est la condition nécessaire de relations responsables entre les principaux acteurs des plates-formes : elle évite les procès d'intention et un sentiment de subordination encore trop souvent répandus ; elle permet la compréhension et la recherche de la voie la plus adaptée entre des intérêts qui peuvent être contraires.
    La Commission constate que sur ces différents points l'amélioration des relations entre Aéroports de Paris et ses partenaires a été bien réelle et encourage Aéroports de Paris à poursuivre les efforts déjà consentis, voire à les intensifier.
  23. Aménageur, constructeur, gestionnaire, Aéroports de Paris est également vis-à-vis de ses différentes catégories de clients (compagnies, passagers, entreprises et services publics implantés) un prestataire de services, dont l'attitude première se doit d'être à l'écoute des besoins exprimés et de chercher à les satisfaire.
    Cette « attitude de service » n'est pas naturelle dans une situation en grande partie non concurrentielle ; elle nécessite une prise de conscience de l'ensemble du management et des acteurs de terrain d'autant plus difficile qu'elle ne s'impose pas par un positionnement à conserver sur le marché.
    Cette prise de conscience est désormais initiée au plus haut niveau d'Aéroports de Paris. Pour la période du contrat de régulation économique 2011-2015 un programme ambitieux a pour objectif qu'elle irrigue tous les échelons et imprègne les comportements, à la fois de ceux qui sont en position de décision et de ceux qui rendent le service. La Commission encourage Aéroports de Paris à tout mettre en œuvre pour que ce programme porte ses fruits.
    L'ambition de tous les acteurs était de faire du système aéroportuaire parisien un outil performant au service du développement économique de la région parisienne et de la France. Des progrès importants ont été accomplis au cours du premier contrat de régulation économique et ont permis d'élever les plates-formes parisiennes à un niveau comparable à celui des autres grandes plates-formes européennes, voire supérieur en termes de capacités. Il reste encore des progrès à accomplir, notamment en termes de qualité des installations, de qualité de service et de dialogue entre tous les partenaires du système de transport aérien en région parisienne.
    La Commission s'est efforcée d'inscrire ses propositions d'amélioration du projet d'Aéroports de Paris dans cet objectif, en s'assurant qu'elles conduisent à un contrat de régulation équilibré où chacun apporte sa contribution.