La commission,
Vu l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique et le décret n° 2014-949 du 20 août 2014 portant application de ladite ordonnance ;
Vu le code de l'énergie ;
Vu le décret n° 2005-761 du 7 juillet 2005 autorisant une ouverture minoritaire du capital de Electricité de France ;
Vu la lettre en date du 1er mars 2017 par laquelle le ministre chargé de l'économie a saisi la commission, en application de l'article 26-I (2°) de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014, en vue de la souscription partielle par l'Etat d'une augmentation de capital de la société EDF SA ;
Vu les avis de la Commission des participations et des transferts n° 2005-A.-12 du 17 novembre 2005 et n° 2005-A.-13 du 18 novembre 2005 relatifs à l'ouverture minoritaire du capital de Electricité de France, n° 2007-A.-6 du 30 novembre 2007 et n° 2007-A.-7 du 4 décembre 2007 relatifs à une cession sur le marché de titres de EDF, n° 2011-A.-1 du 8 avril 2011 relatif à une offre publique simplifiée alternative d'achat ou d'échange par EDF des actions de EDF Energies Nouvelles, n° 2015-A.C.-3 du 31 août 2015 relatif au transfert au secteur privé par EDF de sa filiale hongroise Budapesti Erőmű Zrt n° 2017-A.C.-1 du 19 janvier 2017 relatif au transfert au secteur privé par EDF de sa filiale hongroise EDF DÉMÁSZ Zrt ;
Vu les documents d'information publiés par EDF et en particulier :
- le communiqué de presse du 22 avril 2016 à propos du conseil d'administration du même jour ;
- le document de référence 2015 de EDF intégrant le rapport financier annuel déposé auprès de l'Autorité des marchés financiers le 29 avril 2016 ;
- les résolutions adoptées le 26 juillet 2016 par l'assemblée générale mixte des actionnaires ;
- le communiqué de presse du 13 février 2017 à propos du conseil d'administration du même jour ;
- le communiqué de presse du 14 février 2017 sur les résultats de l'exercice 2016 ainsi que le document de présentation intitulé « Résultats annuels 2016 » rendus publics le même jour sur le site internet de la société ;
- le rapport d'activité 2016 du groupe EDF rendu public le 14 février 2017 ;
- les « comptes consolidés au 31 décembre 2016 » rendus publics par EDF le 14 février 2017 ;
Vu le communiqué du 22 avril 2016 du ministre des finances et des comptes publics et du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique ;
Vu les communiqués de presse de l'Agence des participations de l'Etat du 30 septembre 2016 et du 13 février 2017 ;
Vu le document de présentation remis en séance par la société EDF à la commission le 27 février 2017 ;
Vu le rapport d'évaluation établi par Citi, banque conseil de l'Etat, transmis à la commission le 1er mars 2017 ;
Vu la note de l'Agence des participations de l'Etat transmise à la commission le 1er mars 2017 ;
Vu la délibération du conseil d'administration d'EDF du 3 mars 2017 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Après avoir entendu
Le 2 décembre 2016 :
- Conjointement :
- le ministre chargé de l'économie représenté par M. Martin VIAL, commissaire aux participations de l'Etat, Mme Lucie MUNIESA, MM. Thomas GOSSET, Cédric GARCIN et Vincent LE BIEZ ;
- Citi, banque conseil de l'Etat, représentée par MM. Cédric LEOTY, Managing Director, Stéphane BRIOUAL et Pierre CASTAING ;
- Le ministre chargé de l'économie représenté comme ci-dessus ;
Le 27 février 2017 conjointement :
- le ministre chargé de l'économie représenté par M. Vincent LE BIEZ, directeur adjoint de participations Energie ;
- la société EDF représentée par M. Xavier GIRRE, directeur exécutif groupe en charge des finances, Mme Nathalie PIVET, M. Stéphane TORTAJADA, M. Ignacio DOMINGO PUERTOLAS et Mme Emmanuelle SALLES ;
Le 2 mars 2017 :
- Conjointement :
- le ministre chargé de l'économie représenté par MM. Martin VIAL, commissaire aux participations de l'Etat, Alexis ZAJDENWEBER, Vincent LE BIEZ et Cédric GARCIN ;
- Citi, banque conseil de l'Etat, représentée par MM. Cédric LEOTY et Valery BARRIER, Managing Directors, Stéphane BRIOUAL et Pierre CASTAING ;
- Le ministre chargé de l'économie représenté comme ci-dessus ;
Le 6 mars 2017 :
- le ministre chargé de l'économie représenté par M. Vincent LE BIEZ, directeur adjoint Energie à l'Agence des participations de l'Etat,
Emet l'avis suivant :
I. - Par lettre du 1er mars 2017, le ministre chargé de l'économie a saisi la commission en vue de la souscription partielle par l'Etat d'une augmentation de capital de la société Electricité de France (EDF) dans les termes suivants :
« Dans sa délibération du 13 février 2017, le conseil d'administration d'EDF s'est engagé à réaliser une augmentation de capital de 4 milliards d'euros avec maintien du droit préférentiel de souscription (DPS) des actionnaires d'ici la fin du premier semestre 2017. Cette délibération indique l'intention de l'Etat de ne souscrire qu'à hauteur de 3 milliards d'euros.
L'Etat a confirmé cette intention publiquement le même jour, par communiqué de presse. L'Etat ne souscrivant qu'à 75 % de l'augmentation de capital, sa participation au capital d'EDF serait ramenée à environ 83,2 %, contre 85,63 % au 31 décembre 2016. Cette augmentation de capital devrait donc conduire l'Etat à se diluer d'environ 2,4 % par la cession d'une partie de ses DPS par tous moyens (cession par blocs dans le marché, cession au fil de l'eau ou transactions bilatérales avec des investisseurs identifiés). L'opération porterait au maximum sur la cession de 224 millions de DPS.
J'ai l'honneur de saisir votre commission, en application de l'article 26 de l'ordonnance du 20 août 2014, afin qu'elle puisse rendre un avis sur la valeur fondamentale d'EDF et par voie de conséquence, sur le produit de cession plancher résultant des prix de cession des DPS. »
L'ouverture minoritaire du capital d'EDF a été autorisée par le décret du 7 juillet 2005 susvisé. Après l'opération qui est l'objet du présent avis, la participation de l'Etat restera supérieure à 70 % conformément à l'art. L. 111-67 du code de l'énergie (antérieurement art. 24 de la loi du 9 août 2004).
Conformément à l'article 31-2 de l'ordonnance du 20 août 2014, un volume d'actions égal à un neuvième des actions nouvelles qui seraient émises en cas d'exercice des DPS cédés par l'Etat sera proposé aux salariés et anciens salariés d'EDF dans des conditions qui seront déterminées par arrêté.
II. - EDF a été constitué en 1946 sous forme d'établissement public à caractère industriel et commercial, à la suite de la nationalisation des secteurs du gaz et de l'électricité. La loi du 9 août 2004 susvisée l'a transformé en société anonyme et ses actions ont été introduites en bourse en novembre 2005.
Le groupe EDF est un énergéticien intégré, présent sur l'ensemble des métiers de l'électricité, régulés (transport via RTE et distribution via ENEDIS) ainsi que non régulés (production, commercialisation, négoce, services énergétiques). Il est l'acteur principal du marché français de l'électricité et il détient des positions fortes en Italie (via Edison) et au Royaume-Uni (via EDF Energy). Le groupe EDF participe à la fourniture d'énergie et de services à environ 37,6 millions de clients dans le monde, dont 27,8 millions en France.
Avec une puissance installée de 134,2 GW, EDF est un des plus importants producteurs d'électricité dans le monde et le premier dans l'Union européenne. En 2015, la production d'électricité de 619,3 TWh est pour 78 % d'origine nucléaire, pour 7 % hydraulique, pour 2 % d'autres énergies renouvelables, et pour 13 % thermique (et cogénération). Grâce à l'importance des parcs nucléaire et hydraulique, EDF dispose d'un outil de production dont l'exposition est limitée aux fluctuations des marchés des hydrocarbures et qui pour l'essentiel n'émet pas de CO2.
Le groupe EDF est également le premier opérateur de réseaux en Europe. Le réseau français de transport (très haute tension) a été filialisé en 2005 dans RTE qui est détenue à 100 % par EDF et dont une partie est affectée en actifs dédiés. L'activité de distribution, opérée dans le cadre de concessions consenties par la plupart des communes françaises (95 % des volumes distribués en France), a été filialisée en 2008 dans ERDF, devenu depuis ENEDIS, et qui reste détenu à 100 % par EDF.
Le groupe a employé dans le monde en 2016 un effectif moyen de 154 808 personnes, dont les deux-tiers sous statut IEG (branche professionnelle des industries électriques et gazières en France).
III. - Le groupe EDF, comme l'ensemble du secteur de l'électricité et du gaz, est désormais confronté à des défis multiples dont l'ampleur s'est accentuée en 2016.
Le premier de ces défis est constitué par la baisse du prix de gros de l'énergie en Europe, et notamment de l'électricité, dans le cadre d'une demande atone et d'une offre en surcapacité. Les prix day-ahead sur les principaux marchés de gros européens continentaux ont baissé jusqu'à 40 % en quatre ans. Ce mouvement a été particulièrement marqué début 2016 puis s'est inversé en fin d'année avec l'indisponibilité de réacteurs nucléaires en France.
La baisse des prix de gros a un impact important pour EDF en raison du deuxième défi auquel est confronté le groupe. Anciennement peu exposé aux prix de marché, EDF l'est désormais de façon majoritaire en raison de la fin en France des tarifs régulés de vente aux clients professionnels et aux collectivités territoriales. Le 31 décembre 2016 a vu en particulier la fin des tarifs réglementés de vente « jaunes et verts » qui concernaient les professionnels dont la puissance souscrite était supérieure à 36 kilovolt-ampères (kVA). En sens inverse, EDF a bénéficié en 2016 de la régularisation tarifaire réalisée en application de l'arrêt du Conseil d'Etat du 15 juin 2016.
La disponibilité des réacteurs nucléaires en France est un troisième défi. Le taux élevé d'indisponibilité en 2016 s'explique par les nécessités de maintenance rigoureuse des installations pour des impératifs de sécurité, entraînant souvent des arrêts plus longs que prévus, mais aussi au cours des derniers mois par les vérifications techniques approfondies exigées par l'Autorité de sûreté nucléaire sur les réacteurs à la suite de la découverte d'anomalies de fabrication.
Le quatrième défi est celui du montant élevé des investissements et de leur financement. Ils comprennent, d'une part, l'acquisition de nouvelles capacités (EPR de Flamanville, énergies nouvelles), la maintenance de celles existantes et le grand carénage en vue de la prolongation de vie des réacteurs nucléaires ainsi que, d'autre part, la couverture par des actifs dédiés des provisions de démantèlement des centrales nucléaires en fin de vie, couverture qui est un lourd enjeu financier. De plus, en tant qu'acteur essentiel de l'industrie nucléaire, EDF a été conduit dans les derniers mois à décider deux investissements majeurs : la prise de participation majoritaire dans Areva NP et la réalisation en Grande-Bretagne du projet Hinkley Point.
Tous ces éléments s'inscrivent dans une situation où la structure financière du groupe EDF est déjà caractérisée par le volume élevé de sa dette.
IV. - Le 22 avril 2016, le conseil d'administration d'EDF a arrêté en conséquence un plan d'action qui a été approuvé par son principal actionnaire, l'Etat.
Ce plan d'action comprend :
- une optimisation des investissements nets (hors Linky et hors nouveaux développements) de près de 2 milliards d'euros en 2018 par rapport à 2015. Ces investissements devraient ainsi atteindre 10,5 milliards en 2018 ;
- une réduction des charges opérationnelles d'au moins 1 milliard d'euros en 2019 par rapport à 2015 ;
- un plan de cessions d'actifs d'environ 10 milliards d'euros à l'horizon 2020.
EDF a déjà rendu publiques plusieurs opérations majeures en cours
- au titre des cessions :
- le 28 juillet 2016 l'entrée en négociations exclusives pour la mise en œuvre d'un partenariat de long terme avec la Caisse des dépôts et CNP Assurances pour le développement de RTE devant se traduire par une prise de participation de la Caisse des dépôts et de CNP Assurances à hauteur de 49,9 % du capital de RTE (dont la valeur des fonds propres est fixée à 8,45 milliards d'euros) ;
- en janvier 2017 EDF International a cédé sa filiale en Hongrie EDF DEMASZ Zrt (pour près de 400 millions d'euros) ;
- la cession des actifs en Pologne (EDF Polska) est en préparation ;
- au titre des investissements :
- le 29 septembre 2016 la signature à Londres avec le Gouvernement britannique et son partenaire CGN des contrats relatifs à Hinkley Point C (le coût total du projet est estimé à 18 milliards d'euros) ;
- le 16 novembre 2016 la signature des accords engageants pour l'acquisition du contrôle d'AREVA NP (la valeur des fonds propres de la société cédée est fixée à 2,5 milliards d'euros).
Le conseil d'administration dans sa même séance du 22 avril indiquait avoir étudié la nécessité de renforcer les fonds propres de l'entreprise et en conséquence exprimait l'intention :
- de proposer une option de versement des dividendes en actions au titre des exercices 2016 et 2017 ;
- de soumettre, d'ici à la clôture des comptes 2016 si les conditions de marché le permettent, un projet d'augmentation de capital sous forme d'opération de marché pour un montant d'environ 4 milliards d'euros.
Le même jour, l'Etat affirmait sa volonté d'accompagner EDF dans sa stratégie de développement. Dans cette perspective, EDF ayant l'intention de proposer à ses actionnaires de percevoir leurs dividendes en actions au titre des années 2016 et 2017, l'Etat a indiqué qu'il retiendrait cette option. L'Etat souscrira en outre à hauteur de 3 milliards d'euros à l'augmentation de capital d'un montant de l'ordre de 4 milliards préparée par l'entreprise, par appel au marché d'ici à la clôture des comptes 2016.
La perception en actions par l'Etat du dividende 2015 puis le 31 octobre 2016 de l'acompte sur dividende 2016 a entraîné une relution de son niveau de détention du capital.
Les résolutions nécessaires à la mise en œuvre de l'augmentation de capital projetée ont été adoptées par l'assemblée générale mixte des actionnaires d'EDF tenue le 26 juillet 2016.
Le 13 février 2017, le conseil d'administration d'EDF a décidé d'engager l'augmentation de capital, avec maintien du droit préférentiel de souscription des actionnaires. L'Etat a aussitôt confirmé son intention de participer à hauteur de 3 milliards d'euros à cette augmentation de capital d'un total de 4 milliards. Le 3 mars, le conseil d'administration a arrêté les modalités d'augmentation du capital et décidé son lancement.
V. - Le groupe EDF présente depuis 2016 son activité en six secteurs :
- le secteur « France - activités de production et de commercialisation » (42 % du chiffre d'affaires et 38 % de l'excédent brut d'exploitation EBITDA en 2016) comprend les activités de production d'électricité et de commercialisation ainsi que d'ingénierie et de conseil ;
- le secteur « France - activités régulées » (19 % du chiffre d'affaires et 31 % de l'EBITDA) comprend principalement les activités de distribution assurées par ENEDIS, par Electricité de Strasbourg ainsi que par EDF dans les territoires insulaires via sa direction des Systèmes énergétiques insulaires (SEI) ;
- le secteur « Royaume-Uni » (11 % du chiffre d'affaires et 10 % de l'EBITDA) est représenté par EDF Energy qui est devenu en 2009 le plus grand producteur d'électricité du pays depuis l'acquisition de British Energy (spécialisé dans l'électricité d'origine nucléaire) ;
- le secteur « Italie » (13 % du chiffre d'affaires et 4 % de l'EBITDA) est représenté par le groupe Edison dont EDF a pris le contrôle intégral en 2012. Edison a 1,2 million de clients en Italie (électricité et gaz) et y assure notamment près de 7 % de la production d'électricité ;
- le secteur « Autre international » (6 % du chiffre d'affaires et 4 % de l'EBITDA) rassemble l'activité dans d'autres pays notamment en Belgique (EDF Luminus), en Pologne, en Asie et au Brésil ;
- le secteur « Autres métiers » (9 % du chiffre d'affaires et 13 % de l'EBITDA) comprend en particulier Dalkia (dont l'activité en France a été intégralement reprise par EDF en 2014), EDF Energies Nouvelles et EDF Trading.
L'activité de transport d'électricité est exercée par RTE qui est traité comme une entreprise associée et donc mis en équivalence dans les comptes consolidés.
VI. - Le groupe EDF a annoncé le 14 février 2017 ses résultats et rendu publics ses comptes consolidés pour l'exercice 2016. Après le maintien de ses résultats au cours des années 2011 à 2014 (résultat opérationnel supérieur à 8 milliards d'euros et résultat net supérieur à 3 milliards), le groupe EDF avait dû procéder en 2015 à des corrections de valeur qui avaient pesé fortement sur ses comptes de l'année (résultat d'exploitation en chute de 44,6 %). L'année 2016 est caractérisée par un recul de l'activité et des résultats courants mais par une hausse des résultats nets par rapport à 2015.
Le chiffre d'affaires consolidé est en recul pour l'année 2016 à 71,2 milliards d'euros (- 5,1 % et - 3,2 % sur une base organique par rapport à l'année précédente). L‘exercice a été marqué par un recul de l'activité en France (hors distribution en hausse) et dans l'ensemble des secteurs étrangers, avec en particulier un très fort recul au Royaume-Uni en raison de la baisse des prix et des volumes vendus du fait de la forte concurrence. Les autres métiers progressent, notamment EDF Trading et Dalkia.
L'excédent brut d'exploitation (EBITDA) diminue à 16,4 milliards (- 6,7 % et - 4,8 % sur une base organique). Il a été affecté par des mouvements très divers selon les secteurs. Les plus affectés sont l'Italie (- 52,3 %, l'année 2015 ayant bénéficié de la révision du prix sur le contrat gaz libyen avec ENI), le Royaume-Uni (- 23,6 % en raison de la baisse des prix et de l'évolution du taux de change) et la production/commercialisation en France (- 11,2 % en raison de la baisse des prix et des volumes et de l'arrêt de centrales nucléaires). Les autres secteurs progressent : « autre international » (+ 16,7 % grâce aux augmentations de tarifs au Brésil et en Pologne et au redémarrage de centrales nucléaires en Belgique), « autres métiers » (+ 19,5 % grâce surtout à EDF Trading) et activités régulées en France (+ 8,1 % en raison d'un concours d'éléments favorables).
Le résultat d'exploitation (EBIT), d'un montant de 7,51 milliards, augmente de 75,6 % par rapport à 2015 où il avait été affecté par des corrections de valeur importantes non récurrentes, principalement en Italie et au Royaume-Uni.
Le résultat net, part du groupe, est en conséquence de 2,85 milliards, en hausse de 140,2 % par rapport à 2015. L'entreprise indique qu'en ne considérant que les éléments courants du résultat net, celui-ci est au contraire en baisse de 15,3 %.
Au titre de l'exercice 2015, EDF a versé un dividende de 1,28 euros par action, à nouveau en hausse par rapport aux années précédentes et en ligne avec sa politique de distribution d'un taux de 55 à 65 % du résultat net courant (ajusté de la rémunération des émissions hybrides). Au titre de l'exercice 2016, il sera proposé à l'assemblée générale des actionnaires une distribution de dividendes à hauteur de 60 % du résultat net courant comme en 2015.
En 2016, le cash-flow opérationnel avant investissements s'est élevé à 11,1 milliards (en baisse de 13 % par rapport à 2015).
Les capitaux propres du groupe sont de 41,4 milliards d'euros au 31 décembre 2016, en augmentation de 1,7 % par rapport au montant publié en 2015. La dette nette est stable à 37,4 milliards d'euros.
VII. - Lors de la publication le 14 février 2017 de ses résultats de l'exercice 2016, le groupe EDF a indiqué les objectifs financiers suivants pour l'année 2017 :
- EBITDA : 13,7 à 14,3 milliards d'euros ;
- ratio d'endettement financier/EBITDA : inférieur ou égal à 2,5 fois ;
- taux de distribution du résultat net courant : 55 % à 65 %.
Le groupe EDF a par ailleurs indiqué que l'exercice 2018 devrait bénéficier d'une évolution favorable tant de son activité (économies, niveau de production nucléaire, services) que des conditions de marché en France et au Royaume-Uni, ce qui le conduit à présenter les objectifs suivants pour 2018 :
- charges opérationnelles : - 0,7 milliard d'euros par rapport à 2015 ;
- EBITDA : supérieur ou égal à 15,2 milliards ;
- investissement net (hors Linky, nouveaux développements et cessions d'actifs) : environ 10,5 milliards ;
- cash-flow (hors Linky, nouveaux développements et cessions d'actifs) : positif ;
- ratio d'endettement financier net/EBITDA : inférieur ou égal à 2,5 fois ;
- taux de distribution du résultat net courant : 50 %.
Pour les années au-delà de 2018, le groupe indique les objectifs suivants :
- réduction des charges opérationnelles : au moins un milliard d'euros en 2019 par rapport à 2015 ;
- cessions d'actifs sur 2015-2020 : au moins 10 milliards ;
- taux de distribution du résultat net courant : 45 % à 50 %.
VIII. - Un rapport d'évaluation établi par Citi, banque conseil de l'Etat, a été remis à la commission. Cette étude a été établie sur la base des informations publiques concernant le groupe.
La banque conseil a eu recours à deux méthodes d'évaluation :
- la somme des parties : pour les activités non régulées en France, l'évaluation est conduite selon la méthode de l'actualisation des flux de trésorerie à partir d'un plan d'affaires modélisé par la banque à horizon 2100 avec une actualisation des flux au coût moyen pondéré du capital estimé à 6 %. Ce plan d'affaires n'intègre pas de remplacement des capacités du parc nucléaire existant au-delà de la date limite de leur exploitation technique. Pour les autres activités, la méthode des comparables boursiers a été utilisée. Pour chacune des divisions d'EDF, ont été appliqués aux agrégats correspondants les multiples valeur d'entreprise/EBITDA pour l'année 2017 des sociétés cotées comparables. Une caractéristique de l'évaluation du groupe EDF est l'importance des ajustements de passage de la valeur d'entreprise à la valeur des fonds propres en raison tant du volume de la dette financière nette que des provisions pour avantages du personnel, aval du cycle nucléaire et déconstruction des centrales nucléaires. La banque réévalue les provisions nucléaires selon le taux d'actualisation prévisionnel à fin 2018 communiqué par EDF ;
- les multiples boursiers : les multiples implicites à la capitalisation des sociétés comparables sont étudiés et appliqués aux agrégats correspondants d'EDF. Les multiples utilisés sont le rapport valeur d'entreprise/EBITDA et le PER (capitalisation boursière/résultat net), pour les années 2017 et 2018. La banque retient comme comparables quatre groupes européens cotés : Enel, Engie, RWE et Uniper.
La banque étudie par ailleurs l'évolution du cours de bourse sur les douze derniers mois ainsi que les recommandations d'un certain nombre d'analystes et leurs objectifs de cours.
Au total, la banque conseil propose des fourchettes d'évaluation au regard du résultat des différentes méthodes. Elle présente aussi une étude sur la sensibilité de l'évaluation aux principaux paramètres et notamment au prix de marché long terme de l'électricité.
IX. - Conformément à la loi, la commission a procédé à l'évaluation d'EDF en prenant en compte les éléments boursiers, la valeur des actifs, les bénéfices réalisés, l'existence des filiales et les perspectives d'avenir.
Après son introduction en bourse en novembre 2005 au prix de 33 € par action (et 32 € pour les particuliers), l'action EDF a connu peu après une phase de hausse la conduisant à un plus haut dépassant 85 € deux ans plus tard fin novembre 2007. Affecté par la baisse générale des marchés, le cours chutait progressivement jusqu'à moins de 30 € en mars 2009. Après une reprise au-dessus de 40 € au début de l'année 2010, il entamait une nouvelle phase de baisse jusqu'à 14 € fin 2012. Il se reprenait ensuite, approchant 30 € au printemps 2014.
Depuis lors le cours de bourse subit un affaissement régulier qui s'est accentué à partir de l'été 2015 avec la montée des incertitudes ressenties par les investisseurs sur le groupe. Depuis le début de l'année 2016, le cours évolue dans un intervalle compris entre 9 et 12 €, se situant le plus généralement depuis l'automne 2016 entre 9 et 10 €. En un an, l'action EDF a reculé de 8,7 %, alors que l'indice CAC 40 progressait de 12,4 % et que l'indice Euro Stoxx Utilities était globalement stable.
Le cours de l'action EDF a été affecté dans la période récente par une succession d'informations négatives qui ont souvent pesé fortement sur sa tenue, en particulier :
- la sortie de l'indice CAC 40 en décembre 2015 ;
- les baisses de notation successives en mai et en septembre 2016 par les agences de notation ;
- les annonces successives et rapprochées dans le temps en fin d'année 2016 (21 septembre, 3 novembre et 14 décembre) de révision à la baisse des objectifs de production nucléaire et d'EBITDA pour 2016 et de fixation d'objectifs pour 2017 inférieurs aux attentes du marché.
L'action EDF est suivie régulièrement par un nombre important d'analystes d'établissements financiers. Leurs recommandations sont partagées entre achat et conserver ou vente, avec un nombre croissant de recommandations conserver qui pourrait traduire une relative incertitude. Dans le même sens, les objectifs des analystes présentent des primes limitées par rapport aux cours de bourse.
La commission a analysé les défis, décrits ci-dessus au point III, auxquels le groupe EDF est confronté. Comme l'ensemble des entreprises de son secteur, il est en particulier affecté par la baisse des prix de gros de l'électricité qui se conjugue avec la fin des tarifs réglementés. Par ailleurs, EDF doit faire face à un lourd programme d'investissements et à un taux élevé d'indisponibilité de réacteurs nucléaires. Ces défis représentent des incertitudes considérables. L'évaluation du groupe s'avère très sensible aux hypothèses retenues sur chacun de ces enjeux. Du point de vue des techniques d'évaluation, l'annonce de perspectives décevantes pour le prochain exercice pénalise les évaluations analogiques (comparables boursiers) et le délai pour l'obtention de cash-flows positifs pèse sur les évaluations intrinsèques (DCF), tant en ce qui concerne leur niveau que leur degré d'incertitude.
Les atouts principaux du groupe restent sa position de grand énergéticien européen, ses parts de marché historiques, sa compétence reconnue d'opérateur majeur de l'énergie nucléaire, son activité régulée de distribution et son développement dans les énergies renouvelables. Les décisions prises pour renforcer sa situation financière, décrites ci-dessus au point IV, en particulier l'augmentation de capital, les cessions d'actifs et la perception par l'Etat du dividende en actions, doivent le conforter pour les années à venir caractérisées par des besoins de financement des investissements qui demeureront importants.
L'opération présentée à la commission consiste en une augmentation de capital assortie de cession de droits préférentiels de souscription par son principal actionnaire, l'Etat. Sa réalisation est fortement dépendante des conditions du marché, tant générales que spécifiques à la technique à laquelle il est recouru (cession de DPS). L'évaluation déterminée par le présent avis en tient compte conformément à l'article 27 I, troisième alinéa, de l'ordonnance du 20 août 2014.
La commission note de plus que l'augmentation de capital est un élément essentiel à la mise en œuvre de la stratégie présentée par EDF et soutenue par l'Etat, tant pour des motifs d'intérêt général qu'en fonction de ses intérêts patrimoniaux, dans le respect des règles s'imposant aux investissements de l'Etat.
X. - Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et au vu des informations qui lui ont été communiquées ainsi que des données les plus récentes du marché, la commission estime que la valeur d'EDF ne saurait être inférieure à 7,5 euros par action soit globalement à environ 15,82 milliards d'euros pour 2 109 136 683 actions composant le capital social avant augmentation de capital.
Adopté dans la séance du 6 mars 2017 où siégeaient MM. Bertrand SCHNEITER, président, Mme Dominique DEMANGEL, Mme Daniele LAJOUMARD, M. Philippe MARTIN, Mme Ines-Claire MERCEREAU et M. Yvon RAAK, membres de la commission.
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