Participaient à la séance : Philippe DE LADOUCETTE, président, Olivier CHALLAN BELVAL, Hélène GASSIN, Jean-Pierre SOTURA et Michel THIOLLIÈRE, commissaires.
En application de l'article L. 134-2, 4° du code de l'énergie, la CRE dispose du pouvoir de préciser la méthodologie d'établissement des tarifs d'utilisation des réseaux de transport de gaz et des évolutions tarifaires.
Les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de l'énergie encadrent les compétences tarifaires de la CRE. L'article L. 452-2 dudit code prévoit que la CRE fixe les méthodologies utilisées pour établir les tarifs d'utilisation des réseaux de gaz naturel. Par ailleurs, l'article L. 452-3 dispose que « la Commission de régulation de l'énergie délibère sur les évolution tarifaires […] avec, le cas échéant, les modifications de niveau et de structure des tarif qu'elle estime justifiées au vu notamment de l'analyse de la comptabilité des opérateurs et de l'évolution prévisible des charges de fonctionnement et d'investissement. Ces délibérations […] peuvent prévoir […] des mesures incitatives appropriées à court ou long terme pour encourager les opérateurs à améliorer leurs performances […]. La Commission de régulation de l'énergie transmet aux ministres chargés de l'énergie et de l'économie ses délibérations motivées relatives aux évolutions en niveau et en structure des tarifs d'utilisation des réseaux de transport […] de gaz naturel […], ainsi que les règles tarifaire et leur date d'entrée en vigueur. Ces délibérations sont publiées au Journal officiel de la République Française ».
Les tarifs actuels d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel de GRTgaz et de TIGF, dits « tarifs ATRT5 », sont entrés en vigueur le 1er avril 2013 (1) pour une période d'environ quatre ans et font l'objet d'une mise à jour automatique au 1er avril de chaque année.
Ils prévoient un cadre de régulation incitative pour le projet Val de Saône (doublement de l'artère de Bourgogne), alors que le projet Gascogne-Midi, identifié lors de l'étude coût-bénéfice sur les investissements nécessaires à la création d'une place de marché unique en France, menée par la CRE au second semestre 2013, n'est pas mentionné dans le tarif ATRT5.
La présente délibération a pour objet de préciser le mécanisme de régulation incitative qui s'appliquera aux projets Val de Saône et Gascogne-Midi, et en particulier les paramètres du mécanisme d'incitation à la maîtrise des coûts. Les gestionnaires de réseaux de transport (GRT) pourront ainsi prendre, sur ce fondement, leur décision finale d'investissement dans les meilleurs délais.
La CRE a consulté les acteurs de marché du 18 juillet au 29 août 2014, afin de recueillir leurs positions sur le mécanisme de régulation incitative qui s'appliquera aux projets Val de Saône et Gascogne-Midi (2).
Le Conseil supérieur de l'énergie a rendu son avis le 23 octobre 2014.
I. - Contexte
- Travaux antérieurs
Dans sa délibération du 7 mai 2014 (3), la CRE a décidé la création d'une place de marché unique (PEG) en France à l'horizon 2018 sur la base du schéma d'investissements associant les projets Val de Saône de GRTgaz et Gascogne-Midi sur les réseaux de GRTgaz et de TIGF.
Comme indiqué dans cette délibération, la CRE a mandaté un cabinet externe, la société Schwartz and Co, pour la réalisation d'un audit sur les coûts, les délais et les choix techniques des projets Val de Saône et Gascogne-Midi. L'auditeur a rendu ses conclusions qui ont été prises en compte dans la présente délibération. La synthèse non confidentielle de l'audit réalisée par le cabinet Schwartz est publiée en même temps que la présente délibération.
- Consultation publique de la CRE
La CRE a mené une consultation publique du 18 juillet au 29 août 2014 portant notamment sur le mécanisme de régulation incitative qui s'appliquera aux projets Val de Saône et Gascogne-Midi.
37 contributions, dont 8 confidentielles, ont été reçues dont :
10 provenant d'industriels, dont 2 associations d'industriels (UNIDEN, UIC) et 6 réponses identiques à celle de l'UNIDEN ;
15 provenant d'expéditeurs (13) ou d'associations d'expéditeurs (AFIEG, EFET) ;
9 provenant de gestionnaires d'infrastructures, dont Enagas ;
1 provenant du régulateur espagnol (CNMC) ;
2 provenant d'associations (AFG, Uprigaz).
Les réponses non confidentielles seront publiées sur le site de la CRE en même temps que la présente délibération.
II. - Synthèse des réponses à la consultation publique de la CRE
Les questions relatives aux investissements portaient sur :
- l'extension du mécanisme de régulation incitative des investissements au projet Gascogne-Midi de TIGF et de GRTgaz ;
- l'introduction d'une incitation sur les délais de mise en service des projets Val de Saône et Gascogne-Midi, dans l'optique de la création d'un PEG unique en France dès 2018.
- Rappel des projets
a) Val de Saône.
Le projet Val de Saône, sur le réseau de GRTgaz, a fait l'objet d'un débat public du 18 septembre au 18 décembre 2013. GRTgaz a déposé le dossier de demande d'autorisation de construire et d'exploiter le 7 juillet 2014. A l'issue des études de base qui se sont achevées au premier trimestre 2014, GRTgaz a transmis à la CRE une estimation du budget et du calendrier du projet. GRTgaz prévoit un budget total de 744 M€ et une mise en service fin 2019.
Ce budget apparaît en hausse par rapport au budget figurant dans la délibération de la CRE du 19 décembre 2013 (4), fondé sur l'étude de préfaisabilité établie en 2012, qui était de 605 M€.
GRTgaz a informé la CRE des contraintes administratives pesant sur le respect des délais. En raison notamment de modifications réglementaires du délai d'instruction de l'autorisation ministérielle de construire et d'exploiter, GRTgaz considère que les travaux de pose ne pourront très vraisemblablement pas commencer avant l'été 2018, ce qui impliquerait une mise en service fin 2019.
b) Gascogne-Midi.
Ce projet, composé d'investissements sur les réseaux des deux GRT, a été identifié au cours de l'étude coût-bénéfice sur la création d'un PEG unique en France confiée par la CRE à la société Pöyry (5) au second semestre 2013. Il se compose :
- sur le réseau de TIGF, du renforcement de 60 km de canalisations entre Lussagnet et Barran (artère de Gascogne) et de l'adaptation de la station de compression de Barbaira ;
- sur le réseau de GRTgaz, de l'adaptation des deux stations d'interconnexion de Cruzy et Saint-Martin de Crau.
Le budget prévisionnel est de 152 M€ pour TIGF et 21 M€ pour GRTgaz.
TIGF, dans sa réponse à la consultation publique, privilégie l'option de réaliser l'artère de Gascogne avec une conduite en DN 900, au lieu du DN 800 prévu initialement. Selon TIGF, le dimensionnement en DN 900 permettrait d'améliorer la congestion Est-Ouest et à plus long terme de participer à l'augmentation des capacités d'entrée en zone Sud. Ce choix technique génèrerait un surcoût de l'ordre de 13 M€ par rapport au budget prévisionnel du projet chez TIGF, portant le coût du projet à 165 M€.
TIGF et GRTgaz prévoient que le projet Gascogne-Midi sera mis en service fin 2018.
- Extension au projet Gascogne-Midi de la régulation incitative applicable au projet Val de Saône
a) Proposition soumise à consultation publique :
L'étude Pöyry a préconisé de retenir le projet Gascogne-Midi dans le cadre de la création d'une place de marché unique en France. L'identification de ce projet étant postérieure à l'entrée en vigueur du tarif ATRT5, la CRE a proposé de faire évoluer le tarif ATRT5 afin d'étendre à ce projet le mécanisme de régulation incitative qu'il définit (prime de 300 points de base, mécanisme incitatif).
b) Synthèse des réponses :
La quasi-totalité des contributeurs à la consultation publique est favorable à l'application du mécanisme de régulation incitative et notamment de la prime de 300 pdb au projet Gascogne-Midi de TIGF, dès lors que ce projet est nécessaire à la création d'une place de marché unique.
Un acteur considère que le niveau de cette prime devrait être fonction de la complexité technique du projet et qu'il devrait donc être inférieur à celui accordé pour le projet Val de Saône.
Enfin, TIGF rappelle que le montant présenté par la CRE ne couvre pas les aléas d'un projet à ce niveau de maturité. TIGF demande que son budget cible soit calé 10 % au-delà de son budget prévisionnel.
- Introduction d'une incitation sur les délais de mise en service des projets Val de Saône et Gascogne-Midi
a) Proposition soumise à consultation publique :
Le calendrier présenté par GRTgaz prévoit une mise en service du projet Val de Saône fin 2019. GRTgaz a indiqué qu'il s'agissait d'un calendrier raisonnable prenant en compte les délais réglementaires des procédures administratives et les risques climatiques standards. TIGF prévoit, lui, une mise en service en 2018, selon un calendrier qu'il qualifie d'optimiste, n'ayant pas considéré des conditions de réalisation similaires à celles de GRTgaz.
Dans sa consultation publique, la CRE a proposé d'inciter financièrement GRTgaz et TIGF à mettre en service ces investissements en 2018, l'incitation pouvant prendre la forme d'une prime, définie a priori. Elle a proposé un niveau de prime entre 15 à 30 M€, à partager entre les deux opérateurs au prorata des budgets cibles d'investissements.
b) Synthèse des réponses à la consultation publique :
L'attribution d'une prime spécifique :
L'ensemble des contributeurs partage l'analyse de la CRE, quant au bénéfice significatif des projets Val de Saône et Gascogne-Midi pour le marché français. Toutefois, ils sont partagés sur l'opportunité d'introduire une prime spécifique au respect du calendrier de mise en service des projets.
Les consommateurs industriels soulignent la nécessité de mettre en service dès que possible ces investissements, afin de sauvegarder la compétitivité des consommateurs industriels, et notamment gazo-intensifs, situés dans le sud de la France. En conséquence, ils sont favorables à l'introduction d'une prime spécifique dont l'objectif serait de permettre une mise en service en 2018.
Une partie des expéditeurs partagent ce point de vue et considèrent que tout doit être fait pour que la place de marché unique soit créée en 2018.
Parmi les acteurs défavorables à l'attribution d'une prime, un acteur considère que la prime de fluidification de 300 pdb pendant dix ans constitue déjà une incitation satisfaisante pour permettre la mise en service des projets en 2018. Un autre considère que l'incitation devrait être uniquement un malus si les projets sont mis en service après la date prévue. Enfin, un contributeur considère que l'attribution d'une prime sur les délais risque de conduire l'opérateur à dépasser le budget pour la prime.
Plusieurs acteurs souhaitent l'application d'un mécanisme symétrique prévoyant non seulement un bonus en cas d'avance sur la mise en service des projets en 2018, mais également un malus en cas de retard par rapport à la date prévue de 2019.
Deux acteurs estiment que l'évolution de certaines dispositions législatives pourrait influer positivement sur le calendrier prévisionnel de GRTgaz :
- la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt devrait permettre à GRTgaz d'anticiper le défrichement ;
- le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, actuellement en première lecture à l'Assemblée nationale, vise notamment à réduire les délais d'obtention des autorisations nécessaires pour la construction et l'exploitation des canalisations.
Enfin, TIGF souhaite que le déclenchement de la prime sur les délais soit individualisé afin de ne pas être pénalisé, si GRTgaz ne parvient pas à mettre en service ses investissements dans les délais impartis.
Le montant de la prime
Les consommateurs industriels sont favorables aux estimations présentées par la CRE pour les bénéfices apportés au marché et le montant envisagé de prime.
Les expéditeurs sont partagés quant à l'évaluation de la prime.
Plusieurs expéditeurs considèrent que le bénéfice apporté par un gain d'un an pour la création de la place de marché unique sera moindre, dans la mesure où les capacités à la liaison Nord Sud pour 2018 ont été vendues au prix de 1,8 €/MWh. En conséquence, ils estiment que les gains seraient plutôt de l'ordre de 100 M€ au lieu des 300 M€ indiqués par la CRE.
Un expéditeur indique qu'il est nécessaire de maîtriser les hausses du tarif de transport et donc de limiter le montant de la prime attribuée.
III. - Analyse de la CRE
- Extension au projet Gascogne-Midi de la régulation incitative applicable au projet Val de Saône
Dans la mesure où le projet Gascogne-Midi a été identifié lors de l'étude Pöyry réalisée à l'été 2013, le tarif ATRT5 ne le liste pas parmi les projets pouvant bénéficier la prime de fluidification de 300 pdb.
La CRE note qu'une large majorité d'acteurs est favorable à sa proposition d'étendre le mécanisme de régulation incitative au projet Gascogne-Midi.
Conformément à sa proposition dans sa note de consultation publique, la CRE retient l'application du mécanisme de régulation incitative défini dans le tarif ATRT5 (6) pour le projet Gascogne-Midi, sur les investissements réalisés par TIGF et GRTgaz, qui prévoit notamment que :
- dans la limite de 110 % du budget cible, le GRT est rémunéré pour son investissement au coût moyen pondéré du capital auquel s'ajoute la prime de 300 pdb pendant dix ans ;
- si les dépenses d'investissements sont supérieures à 110 % du budget cible, le GRT ne bénéficie plus de la prime de 300 pdb pour la part excédant ce seuil ;
- la part du coût du projet supérieure à 130 % du budget cible est rémunérée au taux des immobilisations en cours ;
- si les dépenses d'investissements sont inférieures à 90 % du budget cible, le GRT reçoit un bonus correspondant à l'application de la prime de 300 pdb pendant dix ans sur l'écart entre le budget réalisé et 90 % du budget cible.
Par ailleurs, un paramètre d'indexation est pris en compte pour la part du budget d'investissement dépendant du coût de l'acier afin de tenir compte des évolutions du prix de l'acier qui s'imposent aux GRT. Ainsi, le budget cible sera réévalué par la CRE en tenant compte, pour les coûts d'achat des fournitures en acier, de la valeur de l'indice HRC (Hot Rolled Coil) constatée lors de la signature des contrats d'achat.
Le budget cible pourra être réévalué par la CRE, sur demande argumentée de l'opérateur, pour prendre en compte les surcoûts liés aux procédures administratives, dans la mesure où ces surcoûts ont des conséquences significatives sur le projet et sont indépendants de la gestion d'un opérateur efficace.
En ce qui concerne les subventions que les opérateurs pourraient être amenés à recevoir sur ces projets, la CRE retient les principes décrits dans la délibération du 22 décembre 2011, relative aux modalités de raccordement du terminal de Dunkerque LNG (7). Les charges de capital normatives sont limitées pour la part subventionnée des actifs inscrite dans la base d'actifs régulés (BAR), à la rémunération de 3 % pendant dix ans. La rémunération des immobilisations en cours ne s'applique pas à la part des investissements financée par des subventions perçues.
- Définition des paramètres de la régulation incitative des projets Val de Saône et Gascogne-Midi
La CRE a mandaté le cabinet Schwartz and Co pour analyser la nature et le montant des investissements prévus par les deux GRT pour réaliser les projets Val de Saône et Gascogne-Midi ainsi que les délais de mise en service prévus par les GRT.
Pour réaliser cet audit, le cabinet s'est fondé sur l'analyse des principaux projets réalisés récemment par les GRT, dont l'artère des Hauts de France sur le réseau de GRTgaz et l'artère de Guyenne sur le réseau de TIGF. Il a également effectué une comparaison des coûts unitaires d'investissements des deux GRT français avec ceux des GRT allemands (8).
L'auditeur a rendu, en juillet 2014, ses recommandations sur les choix techniques, les coûts et les délais des projets Val de Saône et Gascogne-Midi. Après prise en compte des remarques des GRT, les conclusions sont les suivantes :
Le projet Val de Saône sur le réseau de GRTgaz
- dimensionnement du projet : l'auditeur estime, sur la base des schémas de flux de GRTgaz, que la solution proposée par GRTgaz est pertinente ;
- coûts du projet : GRTgaz a effectué un travail très poussé d'estimation. Le budget est notamment pénalisé par le fractionnement en 5 lots destinés à sécuriser les délais de réalisation mais avec une pose sur deux années, un terrain a priori difficile, des coûts de fourniture importants et des montants d'ingénierie et de supervision très importants, qui font qu'au final le montant total est élevé comparé à des projets similaires. L'auditeur considère que GRTgaz a pris des marges de précaution trop importantes pour établir son budget ;
- délais de réalisation : selon GRTgaz, la probabilité est faible que la pose de la canalisation soit terminée en 2018. De son côté, l'auditeur considère qu'une fin des travaux en 2018 est atteignable et que GRTgaz dispose de certains moyens pour accélérer le calendrier. En revanche, pour la station de compression et d'interconnexion d'Etrez, l'auditeur considère que les travaux ne pourront vraisemblablement être achevés que fin 2019. Il valide les conclusions de GRTgaz selon lesquelles cela entraînera une réduction de 50 GWh/j des flux maximum Nord-Sud pendant l'année 2019.
Le projet Gascogne-Midi sur le réseau de TIGF
- dimensionnement du projet : l'auditeur considère que le projet présenté par TIGF est suffisant pour permettre la création du PEG unique France ;
- coûts du projet : l'auditeur valide le budget présenté par TIGF ;
- délais de réalisation : TIGF présente un planning ambitieux mais réaliste, tenant compte de son expérience récente sur les délais d'obtention des autorisations administratives.
Ces conclusions amènent le cabinet d'audit à recommander :
- un budget de 650 M€ pour le projet Val de Saône ;
- un budget de 152 M€ pour le projet Gascogne-Midi sur le réseau de TIGF ;
- un budget de 21 M€ pour le projet Gascogne-Midi sur le réseau de GRTgaz.
Conclusions de la CRE
Après avoir auditionné le cabinet Schwartz et les GRT, la CRE retient les budgets cibles suivants sur lesquels s'appliquera le mécanisme de régulation incitative défini dans le cadre du tarif ATRT5 :
- pour le projet Val de Saône, sur le réseau de GRTgaz, le budget cible est fixé à 650 M€ ;
- pour le projet Gascogne-Midi, sur le réseau de GRTgaz, le budget cible est fixé à 21 M€ ;
- pour le projet Gascogne-Midi, sur le réseau de TIGF, le budget cible est fixé 152 M€.
En ce qui concerne le dimensionnement du projet de TIGF, les éléments fournis ne permettent pas de conclure à la nécessité de poser du DN900 pour créer une place de marché unique en France.
- Introduction d'une incitation sur les délais de mise en service des projets Val de Saône et Gascogne-Midi
L'attribution d'une prime spécifique
La CRE maintient son analyse concernant la nécessité de faire tous les efforts possibles pour que la place de marché unique du gaz en France soit créée en 2018. Elle considère que les délais de mise en service des projets dépendent pour une large part de l'action des GRT.
En ce qui concerne le projet Gascogne-Midi, la CRE constate que le calendrier présenté par TIGF est plus optimiste que celui présenté par GRTgaz pour le projet Val de Saône. Le projet est moins complexe que Val de Saône mais a démarré plus tard. Une mise en service fin 2018 nécessitera, comme pour Val de Saône, la mobilisation de TIGF et de tous les acteurs concernés et pourra induire des surcoûts.
La partie GRTgaz du projet Gascogne-Midi, quant à elle, devrait être en service avant l'hiver 2018 sans difficulté.
La CRE retient la demande de certains acteurs d'introduire un malus en cas de retard significatif dans la mise en service des investissements. Ainsi, une pénalité sera appliquée si la mise en service intervient après le début de l'hiver 2019-2020.
Le niveau de prime retenu :
En ce qui concerne le montant de la prime, la CRE note que le résultat des enchères de capacités Nord-Sud pour la période 2017-2018 s'est établi à 1,8 €/MWh, alors que, dans sa consultation publique, elle a retenu une hypothèse de spread de 4 €/MWh, soit la valeur moyenne sur les années 2013-2014.
La CRE retient finalement une valeur de 3 €/MWh, qui conduit à un gain pour le marché français du gaz d'environ 200 M€ si les projets sont mis en service un an plus tôt. Ce chiffre n'inclut pas l'ensemble des avantages, notamment qualitatifs, que porte la mise en service des ouvrages précités. La CRE retient une prime pour les GRT égale à 10 % de l'estimation du gain pour le marché. La prime proposée est donc de 20 M€ à partager entre les deux GRT au prorata de leur budget d'investissements, soit respectivement 16 M€ et 4 M€ pour GRTgaz et TIGF.
Le montant du malus applicable en cas de retard est égal au montant de la prime.
Le cas de la station d'Etrez :
La CRE retient le calendrier présenté par GRTgaz et validé par l'auditeur, pour la mise en service de la station d'Etrez, soit avant le début de l'hiver 2019-2020. Elle juge nécessaire que l'éventuelle période de fonctionnement en mode dégradé (cas où toutes les installations prévues sont en service sauf la station d'Etrez) soit la plus courte possible.
En conséquence, elle introduit un malus supplémentaire pour tout retard de mise en service de la station d'Etrez, au-delà de novembre 2019.
IV. - Décision de la CRE
- Extension du mécanisme de régulation incitative au projet Gascogne-Midi
Le mécanisme de régulation incitative défini dans le tarif ATRT5 s'applique au projet Gascogne-Midi.
Conformément au tarif en vigueur, le projet Val de Saône sur le réseau de GRTgaz bénéficie déjà du mécanisme de régulation incitative.
Ce mécanisme s'applique avec les budgets cibles fixés dans la présente délibération.
- Définition des budgets cibles des projets
Pour le projet de Val de Saône, sur le réseau de GRTgaz, le budget cible de la régulation incitative est fixé à 650 M€.
Pour le projet de Gascogne-Midi, le budget cible de la régulation incitative est fixé à 152 M€ sur le réseau de TIGF et à 21 M€ sur le réseau de GRTgaz. Le choix de réaliser le projet en DN800 ou en DN900 revient à TIGF.
Dans le cas où ces projets bénéficieraient d'une subvention européenne, le traitement tarifaire défini dans le cadre du raccordement du terminal de Dunkerque LNG (9) sera appliqué.
Enfin, conformément au mécanisme incitatif décrit dans le tarif ATRT5, l'indice HRC (Hot Rolled Coil) retenu pour l'indexation d'une partie du budget est fixé dans la présente délibération et s'élève à 200 (10). L'indexation portera sur la part correspondant aux achats de fourniture en acier qui s'établit à :
75 M€ pour le projet Val de Saône ;
13 M€ pour le projet Gascogne Midi de TIGF.
En ce qui concerne le projet Gascogne-Midi de GRTgaz, dans la mesure où les investissements portent en grande partie sur des modifications des stations de compression de Cruzy et Saint-Martin-de-Crau, la CRE ne retient pas d'indexation sur ce projet.
- Introduction d'une incitation à la mise en service des projets Val de Saône et Gascogne-Midi en 2018
Un bonus spécifique lié à la mise en service des investissements avant l'hiver 2018/2019 s'applique au projet Val de Saône de GRTgaz et au projet Gascogne-Midi de TIGF et GRTgaz.
GRTgaz (resp. TIGF) pourra recevoir une prime allant jusqu'à 16 M€ (resp. 4M€) pour une mise en service effective avant le 1er novembre 2018.
Un malus s'appliquera en cas de dépassement des délais prévus. GRTgaz (resp. TIGF) devra verser une pénalité allant jusqu'à 16 M€ (resp. 4 M€) pour une mise en service effective après le 1er novembre 2019.
Le bonus/malus attribué aux GRT sera déterminé en fonction de la date de mise en service effective des investissements (11) et sera notamment conditionné à l'existence des capacités de transport additionnelles :
- si les projets entrent en service avant le 1er novembre 2018, les GRT recevront l'intégralité du bonus fixé dans la présente délibération ;
- si les projets entrent en service entre le 1er novembre 2018 et le 31 janvier 2019, chaque mois de retard fera perdre 1/4 du bonus jusqu'à atteindre zéro après le 1er février 2019 ;
- entre le 1er février et le 31 octobre 2019, les GRT ne recevront ni bonus ni malus ;
- si les projets entrent en service après le 1er novembre 2019, les GRT devront verser un malus qui augmentera d'1/4 pour chaque mois de retard jusqu'à atteindre le plafond à partir du 1er février 2020.
En ce qui concerne le sous-projet relatif à Etrez, la CRE décide d'appliquer un malus spécifique lié à sa mise en service après le 1er novembre 2019, plafonné à 3 M€.
(En millions d'euros)
| |GRTgaz
Projets Val de Saône hors Etrez (12) et Gascogne-Midi|GRTGAZ Etrez (12)|TIGF
Projet Gascogne-Midi| |
|---------------------------------------------------------------|--------------------------------------------------------------------|-----------------|---------------------------------|-----|
| Bonus | Avant le 1er novembre 2018 | 16,0 | | 4,0 |
| Avant le 1er décembre 2018 | 12,0 | | 3,0 | |
| Avant le 1er janvier 2019 | 8,0 | | 2,0 | |
| Avant le 1er février 2019 | 4,0 | | 1,0 | |
| Malus | Après le 1er novembre 2019 | - 4,0 | - 1,0 |-1,0|
| Après le 1er décembre 2019 | - 8,0 | -1,5 | - 2,0 | |
| Après le 1er janvier 2020 | - 12,0 | - 2,0 | - 3,0 | |
| Après le 1er février 2020 | - 16,0 | - 3,0 | - 4,0 | |
|(12) Pour l'interconnexion et la station de compression d'Etrez| | | | |
La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française.
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