JORF n°0033 du 8 février 2017

Participaient à la séance : Philippe de LADOUCETTE, président, Hélène GASSIN et Jean-Pierre SOTURA, commissaires.
La présente délibération est prise sur le fondement de l'article L.134-2, 4° du code de l'énergie ainsi que sur le règlement (UE) n° 984/2013 de la Commission du 14 octobre 2013 relatif à l'établissement d'un code de réseau sur les mécanismes d'attribution des capacités (« code CAM ») (1).
Elle a pour objet de préciser l'évolution des règles de commercialisation, par GRTgaz et TIGF, de certains produits de capacité. Cette évolution concerne, d'une part, la création d'un point d'interconnexion virtuel (PIV) entre la France et la Belgique et, d'autre part, l'introduction d'une offre de substitution des capacités groupées par des capacités non groupées.

SOMMAIRE

  1. Contexte
    1.1. Point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique
    1.2. Offre de substitution
    1.3. Consultation publique

  2. Mise en œuvre d'un point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique
    2.1. Mise en place du PIV et modalités opérationnelles
    2.2. Articulation entre le netting rebond et l'UBI

  3. Mise en œuvre du service de substitution de capacité
    3.1. Principe du service
    3.2. Cadre d'application

  4. Décision de la CRE

  5. Contexte
    1.1. Point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique

La réalisation de la canalisation « Artère de Flandres », entrée en service en novembre 2015, permet l'acheminement physique de gaz non odorisé de la France vers la Belgique. Ainsi, depuis le 1er novembre 2015, des capacités fermes sont commercialisées entre la France et la Belgique dans les deux sens, au point d'interconnexion réseau (PIR) Taisnières H dont les flux physiques ne peuvent aller que de la Belgique vers la France, et au PIR Alveringem dont les flux physiques ne peuvent aller que de la France vers la Belgique. Des capacités rebours sont également commercialisées à chacun de ces deux PIR.
Le schéma ci-dessous représente la situation à l'interface France - Belgique depuis le 1er novembre 2015 :

Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page

Le paragraphe 9 de l'article 19 du code CAM précise que « lorsque plusieurs points d'interconnexion relient les deux mêmes systèmes entrée-sortie adjacents, les gestionnaires de réseaux de transport adjacents concernés proposent les capacités disponibles aux points d'interconnexion sur un seul point d'interconnexion virtuel ».
Le code CAM définit le point d'interconnexion virtuel (PIV) comme « deux points d'interconnexion ou plus qui relient entre eux deux systèmes entrée-sortie adjacents donnés afin qu'ils ne fournissent, ainsi intégrés, qu'un seul service de capacités ».
Ce type de point d'interconnexion, qui doit être mis en place au plus tard au 1er novembre 2018, ne peut être établi que si deux conditions sont remplies :

- les capacités techniques totales aux PIV « sont supérieures ou égales à la somme des capacités techniques à chacun des points d'interconnexion contribuant aux points d'interconnexion virtuels » ;
- les PIV doivent contribuer « à une utilisation économique et efficace du système ».

Dans sa délibération tarifaire du 19 mars 2015 (2), la CRE a demandé à GRTgaz « de se rapprocher de Fluxys pour préparer la création d'un PIR virtuel en gaz H entre la France et la Belgique ». Dans la première consultation publique portant sur l'ATRT6 (3), la CRE a interrogé les parties prenantes sur leur intérêt pour la mise en place de ce PIV. La majorité des acteurs considère que cette évolution simplifierait le système et y est favorable.
Au cours de l'année 2016, GRTgaz et Fluxys ont travaillé conjointement à la mise en œuvre de ce PIV, leur permettant de proposer sa création à compter du 1er octobre 2017. Les règles envisagées ont été présentées conjointement par GRTgaz et Fluxys le 15 novembre 2016 dans le cadre de la Concertation gaz, en groupe de travail « Allocation de capacités ».

1.2. Offre de substitution

Le code de réseau CAM impose aux gestionnaires de réseaux de transport (GRT) de maximiser la capacité groupée proposée aux points d'interconnexions. Or certaines frontières présentent des niveaux de capacités souscrites asymétriques et certains expéditeurs détiennent de la capacité non groupée d'un côté de la frontière et pas de l'autre. Dans certains cas, les capacités techniques sont différentes de part et d'autre de la frontière.
Cette situation s'explique par :

- des comportements stratégiques de certains expéditeurs qui ont pu résilier une partie de leurs contrats de capacité (notamment en Allemagne ou en Espagne) ;
- une mauvaise anticipation du code réseau CAM par certains expéditeurs qui ont continué à souscrire de la capacité non groupée.

Par ailleurs, à la suite de ces désengagements, certains GRT adjacents ont procédé à des réallocations de capacité vers d'autres points de leurs réseaux, notamment en Allemagne.
Pour cette raison, et en application du code CAM qui prévoit la maximisation de la capacité groupée proposée, les expéditeurs concernés ne peuvent souscrire que de la capacité groupée, ce qui ne résout pas leur problème d'asymétrie.
Il existe également des cas d'asymétrie de souscription avec des capacités techniques identiques de part et d'autre d'une interconnexion, par exemple à l'interconnexion avec l'Espagne. Dans de tels cas, la capacité non groupée résiduelle est proposée à la vente par le GRT, ce qui permet aux expéditeurs ayant des profils asymétriques d'acquérir la capacité nécessaire pour rééquilibrer leur portefeuille.
L'article 21§3 du code CAM, tel que modifié par un amendement adopté en comitologie le 13 octobre 2016 et qui devrait s'appliquer à compter du 1er avril 2017 (4), prévoit que les GRT doivent offrir un service de conversion des capacités groupées en capacités non groupées à partir du 1er janvier 2018. Ainsi, les expéditeurs ayant une asymétrie de souscription pourront bénéficier d'un service gratuit de conversion de capacité groupée en capacité non groupée, et ce sur les pas de temps annuels, trimestriels et mensuels.
Le code CAM précise que le service de conversion ne doit pas avoir pour conséquence l'application de frais supplémentaires aux utilisateurs du réseau pour des capacités qu'ils détiennent déjà, au-delà d'une éventuelle prime d'enchère.
Un modèle de conversion devrait être proposé par l'ENTSOG (5) au plus tard le 1er octobre 2017.

1.3. Consultation publique

La CRE a procédé à une consultation publique du 14 décembre 2016 au 13 janvier 2017 afin de présenter les analyses préliminaires de la CRE sur ces deux sujets et de recueillir l'avis des acteurs de marché.
10 contributions ont été adressées à la CRE :

- 7 proviennent d'expéditeurs ;
- 2 proviennent d'associations d'expéditeurs ;
- 1 provient d'un gestionnaire d'infrastructures.

Les réponses non confidentielles sont publiées sur le site internet de la CRE (6).

  1. Mise en œuvre d'un point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique
    2.1. Mise en place du PIV et modalités opérationnelles
    2.1.1. Proposition de GRTgaz

GRTgaz propose la mise en place du PIV France Belgique à compter du 1er octobre 2017.
Actuellement, les capacités sont commercialisées par GRTgaz séparément sur deux points, Taisnières H et Alveringem. GRTgaz propose de maintenir les niveaux de capacité actuellement commercialisés aux PIR Taisnières H et Alveringem. Concernant le rebours à Alveringem, GRTgaz s'interroge sur la pertinence du maintien d'un niveau de capacité rebours faible (4 GWh/j). Il considère que si le marché exprime un intérêt pour ce produit, sa commercialisation pourrait être maintenue.
Les capacités commercialisées au PIV France-Belgique seraient de types ferme et rebours. Comme c'est le cas pour les PIR Taisnières H et Alveringem, elles seraient commercialisées sur la plateforme PRISMA (7), selon le calendrier du code de réseau CAM. Les capacités rebours ne seraient commercialisées que si toutes les capacités fermes disponibles dans le même sens ont été allouées ou si un premium est apparu dans l'enchère du produit ferme. En effet, si des capacités rebours étaient commercialisées avant que toutes les capacités fermes ne soient vendues, ces capacités ne seraient que très peu interrompues et auraient la même valeur que les capacités fermes pour un tarif inférieur de moitié.
Pour préparer la création du PIV, afin de s'assurer qu'à compter du 1er octobre 2017, il n'y ait pas de capacités rebours souscrites au PIV avant que toutes les capacités fermes ne soient vendues, GRTgaz propose de commercialiser, lors des enchères de mars 2017 portant sur les produits annuels pour les années à compter de l'année gazière 2017-2018 :

- le rebours à Alveringem seulement si toute la capacité ferme à Taisnières H est allouée ou si un premium a eu lieu lors de l'enchère du produit ferme ;
- le rebours à Taisnières H seulement si toute la capacité ferme à Alveringem est allouée ou si un premium a eu lieu lors de l'enchère du produit ferme.

En outre, GRTgaz propose de maintenir le même fonctionnement pour les enchères trimestrielles d'août 2017 portant sur les produits trimestriels à compter de Q4 2017, et pour les enchères mensuelles portant sur le mois d'octobre 2017.
Les tarifs en vigueur à la mise en place du PIV ne seraient pas modifiés. Les contrats existants des expéditeurs ayant réservé de la capacité à Taisnières H et à Alveringem seraient exécutés dans des conditions identiques. De son côté, Fluxys consultera le marché en mars concernant les options retenues en Belgique.

2.1.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

La majorité des acteurs ayant répondu à la consultation publique est favorable à la mise en œuvre du PIV France Belgique au 1er octobre 2017 dans les conditions proposées par GRTgaz. Ces acteurs considèrent qu'une telle évolution est de nature à simplifier le système gazier français et à accorder plus de flexibilité aux expéditeurs.
Concernant le maintien de la commercialisation des 4 GWh/j de capacité rebours dans le sens Belgique vers France, une majorité d'acteurs y est également favorable. Ils considèrent que bien que son volume soit faible, son maintien n'engendre pas de coûts supplémentaires et peut être utile dans certaines configurations de flux. Certains acteurs estiment qu'il est peu probable que ce produit trouve d'acquéreur à court terme.

2.1.3. Analyse de la CRE

La CRE estime que la mise en place d'un point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique est une mesure conforme au code de réseau CAM, qui répond à la demande du marché et qui permet de simplifier l'offre tout en assurant la continuité des contrats existants.
Concernant le maintien de la commercialisation du rebours dans le sens Belgique vers France, la CRE considère que bien que toute la capacité ferme ne soit pas souscrite à Taisnières, ce maintien peut être utile dans certaines situations.
La CRE est donc favorable à la mise en œuvre du PIV France Belgique selon les modalités proposées par GRTgaz, tout en maintenant l'intégralité des capacités actuelles.
Ainsi, les volumes de capacité qui seront commercialisés au PIV sont synthétisés ci-dessous :

|CAPACITÉ (GWH/J)|BELGIQUE VERS FRANCE|FRANCE VERS BELGIQUE| |----------------|--------------------|--------------------| | Ferme | 640 | 270 - DKB (8) | | Rebours | 4 | 200 |

Par ailleurs, les tarifs en vigueur à la mise en place du PIV ne seront pas modifiés (9). Ils sont rappelés dans le tableau ci-dessous :

| €/MWH/J/AN |BELGIQUE VERS FRANCE|FRANCE VERS BELGIQUE| | |-------------------|--------------------|--------------------|-----| |PIV France Belgique| Ferme | 102,30 |40,32| | Rebours | 50,40 | 20,46 | |

2.2. Articulation entre le netting rebond et l'UBI

Actuellement, lorsque toutes les capacités fermes disponibles ont été souscrites, l'offre de capacité Use-it-and-Buy-It (UBI [10]) est ouverte pour l'acquisition de capacités intra-journalières. Cette offre permet aux expéditeurs d'acquérir de la capacité quotidienne supplémentaire dans le sens d'acheminement principal en cours de journée gazière, en mettant à leur disposition les capacités souscrites mais non utilisées par leurs propriétaires. A chaque cycle de nomination, GRTgaz détermine la capacité UBI disponible sur un point donné en calculant la différence entre la somme des capacités détenues et la somme des nominations des expéditeurs sur le même point. Pour obtenir de la capacité UBI, un expéditeur nomine au-delà de ses capacités.
En outre, le dispositif de « netting » mis en place par GRTgaz permet, en cas de travaux, à un expéditeur qui nomine dans le sens rebours de libérer une quantité identique de capacité dans le sens principal. Le netting n'apporte pas de changement aux flux physiques sur le réseau mais permet aux expéditeurs de nominer davantage dans le sens principal. Ce mécanisme permet par exemple, en période de travaux, aux expéditeurs engagés par des contrats de livraison à la bride de respecter leurs engagements, notamment de Take-or-Pay.
Enfin, en cas de travaux, le « rebond » est une tolérance qui permet à un expéditeur de nominer gratuitement dans le sens rebours le volume de capacité ferme qui est interrompu dans le sens principal, et ce, même si ce dernier ne possède pas de capacités rebours. Ce mécanisme présente les mêmes avantages que le netting.

2.2.1. Proposition de GRTgaz

A court terme, GRTgaz indique ne pas être en mesure de maintenir l'UBI et le netting rebond dans les deux sens sans développements informatiques. Il serait nécessaire de choisir entre le maintien de l'UBI dans les deux sens, ou le maintien du netting rebond et de l'UBI dans le sens Belgique vers France.
GRTgaz propose de maintenir le netting rebond et l'UBI dans le sens Belgique vers France, cette solution étant celle qui, selon lui, présente le plus d'intérêt pour le marché.

2.2.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

Les acteurs ayant répondu à la consultation publique sont partagés sur le choix à faire concernant le maintien de l'UBI dans les deux sens ou le maintien de l'UBI dans le seul sens Belgique vers France et, en cas de travaux, du netting rebond.
Certains acteurs sont favorables à la proposition de GRTgaz. Ils considèrent qu'étant donné que le flux majoritaire est actuellement le flux Belgique vers France, l'UBI dans le sens France vers Belgique n'apportera pas de bénéfices au marché français. D'autres acteurs favorisent le maintien de l'UBI dans les deux sens. Certains d'entre eux rappellent que contrairement au netting rebond, l'UBI est accessible à tous les expéditeurs.
Un acteur souhaite que les capacités souscrites du terminal de Dunkerque vers la Belgique, mais non utilisées, soient mises à disposition des expéditeurs via l'UBI afin de pouvoir faire transiter du gaz du PEG nord vers la Belgique.
Enfin, tous les acteurs sont favorables à ce que l'UBI et le netting rebond puissent être maintenus. Certains acteurs émettent des réserves sur les coûts associés à de tels développements.

2.2.3. Analyse de la CRE

Le maintien de tous les mécanismes actuels étant impossible à court terme et étant donné que les conditions de marché actuelles conduisent à un flux dominant de la Belgique vers la France, la CRE considère que l'UBI dans le sens France vers Belgique ne serait que très peu utilisé à court terme. En effet, l'UBI n'est disponible que lorsque toute la capacité ferme est souscrite, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ainsi, dans un premier temps, seuls le netting rebond et l'UBI dans le sens Belgique vers France seront maintenus.
Cependant, la CRE souhaite que l'ensemble des mécanismes existants soient maintenus sur le long terme. Ainsi, elle demande à GRTgaz d'étudier et de présenter dans le cadre de la Concertation Gaz, au cours de l'année 2017, les possibilités concernant la commercialisation de l'UBI dans le sens France vers Belgique ainsi que les coûts qui y sont associés. GRTgaz étudiera notamment la possibilité d'intégrer à l'UBI France vers Belgique les capacités souscrites et non utilisées du terminal de Dunkerque vers la Belgique.

  1. Mise en œuvre du service de substitution de capacité
    3.1. Principe du service
    3.1.1. Proposition des GRT

De manière anticipée par rapport aux prescriptions de l'article 21§3 du code CAM tel que modifié, dès les prochaines enchères annuelles de mars 2017, en cas d'excédent de capacité du côté France par rapport à l'autre côté de l'interconnexion, GRTgaz et TIGF proposent de mettre en œuvre un service de conversion : dans le cadre de ce service, les expéditeurs qui disposent de capacité d'interconnexion non groupée du côté français et ne pouvant pas souscrire un niveau équivalent de capacité non groupée de l'autre côté de ce même point, participeraient aux enchères PRISMA pour la vente de capacités groupées à ce point, et auraient ensuite recours au service de conversion dans le cadre duquel la capacité non groupée en portefeuille sur la même période se substituerait à la capacité nouvellement acquise et constituerait une capacité en tout point identique à celle-ci. Le client conserverait ses droits et obligations sur la capacité réservée antérieurement. Les droits et obligations de l'expéditeur sont alors éteints sur la partie française de la capacité groupée nouvellement acquise, qui ne serait donc pas facturée. Seul le premium d'enchères serait dû.
Les GRT proposent d'appliquer cette mesure à l'ensemble des points CAM, notamment les PIR Taisnières H, Obergailbach et Pirineos où des asymétries de souscription existent. Concernant Pirineos, la problématique d'asymétrie est aujourd'hui réglée par la possibilité de souscrire des capacités non groupées du côté espagnol. La mesure s'appliquerait pour les capacités groupées achetées pour une durée d'au moins un mois lors des enchères PRISMA. Le volume de capacité faisant l'objet du mécanisme de conversion doit être inférieur ou égal au volume de capacité non groupée déjà souscrit au moment de la demande de substitution.

3.1.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

La totalité des acteurs ayant répondu à la consultation publique est favorable à la mise en place du mécanisme de substitution de capacité. Les acteurs considèrent que ce mécanisme est de nature à résoudre les problèmes d'asymétrie de souscription et souhaitent sa mise en œuvre au plus tôt.
Alors que ce mécanisme est limité aux produits d'un terme supérieur ou égal au mensuel, certains acteurs souhaitent qu'il s'applique également pour les produits journaliers et intra-journaliers.
Un acteur souhaite avoir la confirmation que tous les expéditeurs pourront accéder à ce service, y compris ceux agissant comme agents disposant d'un droit d'utilisation des capacités d'un expéditeur tiers.

3.1.3. Analyse de la CRE

La CRE considère que la proposition des GRT est conforme à l'article 21, tel qu'amendé, du code de réseau CAM et qu'elle répond à un besoin du marché.
La CRE est opposée à l'extension de ce mécanisme aux produits journaliers et intra-journaliers. Elle rappelle que ce mécanisme de substitution est un service proposé par les GRT pour que les expéditeurs aient l'opportunité de rééquilibrer leurs portefeuilles, dans les cas où des capacités non groupées ne sont pas suffisantes à un point d'interconnexion, mais ne doit en aucun cas être un mécanisme d'optimisation de court terme. La CRE rappelle également que le code CAM prévoit l'application de ce mécanisme uniquement pour les produits annuels, trimestriels et mensuels.
Concernant la demande d'un acteur de pouvoir bénéficier de ce service en cas de cession de droits d'usage, la CRE rappelle que la demande de substitution ne peut être faite que sur une capacité non groupée en portefeuille. Ainsi, un acteur détenant le droit d'usage d'une capacité sans l'avoir en portefeuille ne pourra pas bénéficier de ce mécanisme. Si un expéditeur B détenant la capacité d'un expéditeur A en droit d'usage souhaite bénéficier du mécanisme de substitution, il doit annuler la cession de droit d'usage en cours afin que l'expéditeur A puisse effectuer une demande de substitution puis acheter les droits d'usage sur la capacité nouvellement groupée.
La CRE est favorable à la mise en œuvre de ce mécanisme aux points d'interconnexion sur lesquels le code de réseau CAM s'applique, et ce, dès mars 2017.

3.2. Cadre d'application
3.2.1. Proposition des GRT

Les GRT estiment que l'application de ce mécanisme de conversion en cas de congestion, c'est-à-dire lorsque la demande est supérieure à l'offre, pourrait créer une distorsion de marché. En effet, l'enchère serait biaisée par l'intérêt du détenteur de capacité non groupée qui souhaite la substituer, puisque cette capacité non groupée constitue pour lui un coût échoué. L'acteur serait dès lors prêt à acheter la nouvelle capacité à un prix plus élevé que le reste du marché, ce qui gonflerait artificiellement le prix d'adjudication de l'enchère. Pour cette raison, GRTgaz et TIGF souhaitent que le mécanisme de conversion ne soit pas applicable en cas de congestion.
Néanmoins, TIGF propose d'allouer le reliquat de capacité groupée à l'issue du dernier tour d'enchères à l'expéditeur souhaitant substituer sa capacité non groupée, au prix d'adjudication de l'enchère.
Pour bénéficier du mécanisme de conversion, GRTgaz propose que l'expéditeur dispose d'un délai de cinq jours ouvrés après l'enchère pour effectuer sa demande de substitution auprès du GRT concerné. TIGF propose que l'expéditeur souhaitant avoir recours à ce mécanisme se manifeste auprès du GRT en amont de l'enchère.

3.2.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

La majorité des acteurs ayant répondu à la consultation publique ne partage pas l'analyse des GRT et de la CRE et considère que le mécanisme doit s'appliquer y compris en cas de congestion.
Ils souhaitent en effet que la possibilité de résoudre les problèmes d'asymétrie existe également lorsque la demande est supérieure à l'offre lors des enchères, soit lorsque cette offre aurait le plus de valeur.
Certains acteurs soulignent qu'un détenteur de capacité non-groupée ne peut être discriminé vis-à-vis d'acquéreurs de court terme.
Concernant le délai de cinq jours proposé par GRTgaz pour l'activation de ce mécanisme de substitution, un acteur suggère que ce délai soit relevé à au moins dix jours, afin de sécuriser la communication et l'activation de ce service pour les fournisseurs.
A l'exception de GRTgaz, et dans le cas où le mécanisme de substitution n'est pas appliqué en cas de congestion, tous les acteurs souhaitent que la proposition de TIGF concernant l'allocation du reliquat d'enchères s'applique, y compris pour GRTgaz.

3.2.3. Analyse de la CRE

La CRE note que le code de réseau CAM n'impose pas expressément l'application de ce mécanisme dans les cas de congestion à l'interconnexion.
Toutefois, la CRE considère, compte tenu des réponses à la consultation publique et du fait que la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (CREG) envisage de maintenir ce système en cas de premiums, que les GRT doivent fournir ce service y compris lorsque la demande est supérieure à l'offre pendant l'enchère, et ce, dès mars 2017. Les expéditeurs seront tenus de payer le premium de l'enchère.
Concernant le délai dont dispose un expéditeur pour informer le GRT qu'il souhaite bénéficier de ce mécanisme, la CRE considère qu'un délai de 5 jours est suffisant. La CRE souhaite que le délai de cinq jours ouvrés à compter de la fin des enchères s'applique également pour TIGF.

  1. Décision de la CRE

La CRE approuve la proposition de GRTgaz (11) au titre de la mise en place du PIV France Belgique, sous réserve des modifications suivantes :

- Le maintien de l'intégralité des capacités actuellement commercialisées à la mise en place du PIV :la phrase : « Les 4 GWh/j de capacité rebours commercialisées dans le sens Belgique France seront proposés au marché si ce dernier exprime un fort intérêt pour ce produit. » est remplacée par : « Les 4 GWh/j de capacité rebours commercialisées dans le sens Belgique France seront proposés au marché dans les mêmes conditions. »
- L'engagement de GRTgaz à étudier et à présenter en Concertation Gaz au cours de l'année 2017 les possibilités concernant la commercialisation de l'UBI dans le sens France vers Belgique, éventuellement en y intégrant les capacités non souscrites du terminal de Dunkerque vers la Belgique.

La CRE approuve la proposition de GRTgaz (12) au titre du mécanisme de substitution de capacités, sous réserve de la modification suivante :

- l'application du mécanisme y compris en cas de congestions :la phrase : « La mesure ne s'applique que si le point est non congestionné (ie demande inférieure à l'offre : pas de premium), ceci afin de ne pas fausser le résultat des enchères (en effet si la demande venait à être supérieure à l'offre du fait d'une demande de substitution, le prix de la capacité serait artificiellement plus élevé, puisque cette capacité serait remise à disposition du marché à l'enchère suivante). » est remplacée par : « La mesure s'applique y compris en cas de demande supérieure à l'offre. En cas d'application du mécanisme pour une enchère se clôturant avec un premium, le premium d'enchère est facturé à l'expéditeur concerné. »

La CRE approuve la proposition de TIGF (13) au titre du mécanisme de substitution de capacités, sous réserve des modifications suivantes :

- la possibilité pour un expéditeur d'effectuer une demande de substitution jusqu'à cinq jours ouvrés après l'enchère :la phrase : « la demande de substitution de l'expéditeur doit être faite en amont de l'enchère du produit groupé concerné » est remplacée par : « la demande de substitution de l'expéditeur doit être faite jusqu'à cinq jours ouvrés après l'enchère du produit groupé concerné »;
- l'application du mécanisme y compris en cas de congestions : la phrase : « Le mécanisme de substitution ne s'applique que si le point est non congestionné, donc quand la demande au premier tour d'enchère est inférieure à l'offre et aucun premium d'enchères n'est généré. » est remplacée par : « La mesure s'applique y compris en cas de demande supérieure à l'offre. En cas d'application du mécanisme pour une enchère se clôturant avec un premium, le premium d'enchère est facturé à l'expéditeur concerné. »
- la partie intitulée « Allocation du reliquat » est supprimée.

La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française.


Historique des versions

Version 1

Participaient à la séance : Philippe de LADOUCETTE, président, Hélène GASSIN et Jean-Pierre SOTURA, commissaires.

La présente délibération est prise sur le fondement de l'article L.134-2, 4° du code de l'énergie ainsi que sur le règlement (UE) n° 984/2013 de la Commission du 14 octobre 2013 relatif à l'établissement d'un code de réseau sur les mécanismes d'attribution des capacités (« code CAM ») (1).

Elle a pour objet de préciser l'évolution des règles de commercialisation, par GRTgaz et TIGF, de certains produits de capacité. Cette évolution concerne, d'une part, la création d'un point d'interconnexion virtuel (PIV) entre la France et la Belgique et, d'autre part, l'introduction d'une offre de substitution des capacités groupées par des capacités non groupées.

SOMMAIRE

1. Contexte

1.1. Point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique

1.2. Offre de substitution

1.3. Consultation publique

2. Mise en œuvre d'un point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique

2.1. Mise en place du PIV et modalités opérationnelles

2.2. Articulation entre le netting rebond et l'UBI

3. Mise en œuvre du service de substitution de capacité

3.1. Principe du service

3.2. Cadre d'application

4. Décision de la CRE

1. Contexte

1.1. Point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique

La réalisation de la canalisation « Artère de Flandres », entrée en service en novembre 2015, permet l'acheminement physique de gaz non odorisé de la France vers la Belgique. Ainsi, depuis le 1er novembre 2015, des capacités fermes sont commercialisées entre la France et la Belgique dans les deux sens, au point d'interconnexion réseau (PIR) Taisnières H dont les flux physiques ne peuvent aller que de la Belgique vers la France, et au PIR Alveringem dont les flux physiques ne peuvent aller que de la France vers la Belgique. Des capacités rebours sont également commercialisées à chacun de ces deux PIR.

Le schéma ci-dessous représente la situation à l'interface France - Belgique depuis le 1er novembre 2015 :

Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page

Le paragraphe 9 de l'article 19 du code CAM précise que « lorsque plusieurs points d'interconnexion relient les deux mêmes systèmes entrée-sortie adjacents, les gestionnaires de réseaux de transport adjacents concernés proposent les capacités disponibles aux points d'interconnexion sur un seul point d'interconnexion virtuel ».

Le code CAM définit le point d'interconnexion virtuel (PIV) comme « deux points d'interconnexion ou plus qui relient entre eux deux systèmes entrée-sortie adjacents donnés afin qu'ils ne fournissent, ainsi intégrés, qu'un seul service de capacités ».

Ce type de point d'interconnexion, qui doit être mis en place au plus tard au 1er novembre 2018, ne peut être établi que si deux conditions sont remplies :

- les capacités techniques totales aux PIV « sont supérieures ou égales à la somme des capacités techniques à chacun des points d'interconnexion contribuant aux points d'interconnexion virtuels » ;

- les PIV doivent contribuer « à une utilisation économique et efficace du système ».

Dans sa délibération tarifaire du 19 mars 2015 (2), la CRE a demandé à GRTgaz « de se rapprocher de Fluxys pour préparer la création d'un PIR virtuel en gaz H entre la France et la Belgique ». Dans la première consultation publique portant sur l'ATRT6 (3), la CRE a interrogé les parties prenantes sur leur intérêt pour la mise en place de ce PIV. La majorité des acteurs considère que cette évolution simplifierait le système et y est favorable.

Au cours de l'année 2016, GRTgaz et Fluxys ont travaillé conjointement à la mise en œuvre de ce PIV, leur permettant de proposer sa création à compter du 1er octobre 2017. Les règles envisagées ont été présentées conjointement par GRTgaz et Fluxys le 15 novembre 2016 dans le cadre de la Concertation gaz, en groupe de travail « Allocation de capacités ».

1.2. Offre de substitution

Le code de réseau CAM impose aux gestionnaires de réseaux de transport (GRT) de maximiser la capacité groupée proposée aux points d'interconnexions. Or certaines frontières présentent des niveaux de capacités souscrites asymétriques et certains expéditeurs détiennent de la capacité non groupée d'un côté de la frontière et pas de l'autre. Dans certains cas, les capacités techniques sont différentes de part et d'autre de la frontière.

Cette situation s'explique par :

- des comportements stratégiques de certains expéditeurs qui ont pu résilier une partie de leurs contrats de capacité (notamment en Allemagne ou en Espagne) ;

- une mauvaise anticipation du code réseau CAM par certains expéditeurs qui ont continué à souscrire de la capacité non groupée.

Par ailleurs, à la suite de ces désengagements, certains GRT adjacents ont procédé à des réallocations de capacité vers d'autres points de leurs réseaux, notamment en Allemagne.

Pour cette raison, et en application du code CAM qui prévoit la maximisation de la capacité groupée proposée, les expéditeurs concernés ne peuvent souscrire que de la capacité groupée, ce qui ne résout pas leur problème d'asymétrie.

Il existe également des cas d'asymétrie de souscription avec des capacités techniques identiques de part et d'autre d'une interconnexion, par exemple à l'interconnexion avec l'Espagne. Dans de tels cas, la capacité non groupée résiduelle est proposée à la vente par le GRT, ce qui permet aux expéditeurs ayant des profils asymétriques d'acquérir la capacité nécessaire pour rééquilibrer leur portefeuille.

L'article 21§3 du code CAM, tel que modifié par un amendement adopté en comitologie le 13 octobre 2016 et qui devrait s'appliquer à compter du 1er avril 2017 (4), prévoit que les GRT doivent offrir un service de conversion des capacités groupées en capacités non groupées à partir du 1er janvier 2018. Ainsi, les expéditeurs ayant une asymétrie de souscription pourront bénéficier d'un service gratuit de conversion de capacité groupée en capacité non groupée, et ce sur les pas de temps annuels, trimestriels et mensuels.

Le code CAM précise que le service de conversion ne doit pas avoir pour conséquence l'application de frais supplémentaires aux utilisateurs du réseau pour des capacités qu'ils détiennent déjà, au-delà d'une éventuelle prime d'enchère.

Un modèle de conversion devrait être proposé par l'ENTSOG (5) au plus tard le 1er octobre 2017.

1.3. Consultation publique

La CRE a procédé à une consultation publique du 14 décembre 2016 au 13 janvier 2017 afin de présenter les analyses préliminaires de la CRE sur ces deux sujets et de recueillir l'avis des acteurs de marché.

10 contributions ont été adressées à la CRE :

- 7 proviennent d'expéditeurs ;

- 2 proviennent d'associations d'expéditeurs ;

- 1 provient d'un gestionnaire d'infrastructures.

Les réponses non confidentielles sont publiées sur le site internet de la CRE (6).

2. Mise en œuvre d'un point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique

2.1. Mise en place du PIV et modalités opérationnelles

2.1.1. Proposition de GRTgaz

GRTgaz propose la mise en place du PIV France Belgique à compter du 1er octobre 2017.

Actuellement, les capacités sont commercialisées par GRTgaz séparément sur deux points, Taisnières H et Alveringem. GRTgaz propose de maintenir les niveaux de capacité actuellement commercialisés aux PIR Taisnières H et Alveringem. Concernant le rebours à Alveringem, GRTgaz s'interroge sur la pertinence du maintien d'un niveau de capacité rebours faible (4 GWh/j). Il considère que si le marché exprime un intérêt pour ce produit, sa commercialisation pourrait être maintenue.

Les capacités commercialisées au PIV France-Belgique seraient de types ferme et rebours. Comme c'est le cas pour les PIR Taisnières H et Alveringem, elles seraient commercialisées sur la plateforme PRISMA (7), selon le calendrier du code de réseau CAM. Les capacités rebours ne seraient commercialisées que si toutes les capacités fermes disponibles dans le même sens ont été allouées ou si un premium est apparu dans l'enchère du produit ferme. En effet, si des capacités rebours étaient commercialisées avant que toutes les capacités fermes ne soient vendues, ces capacités ne seraient que très peu interrompues et auraient la même valeur que les capacités fermes pour un tarif inférieur de moitié.

Pour préparer la création du PIV, afin de s'assurer qu'à compter du 1er octobre 2017, il n'y ait pas de capacités rebours souscrites au PIV avant que toutes les capacités fermes ne soient vendues, GRTgaz propose de commercialiser, lors des enchères de mars 2017 portant sur les produits annuels pour les années à compter de l'année gazière 2017-2018 :

- le rebours à Alveringem seulement si toute la capacité ferme à Taisnières H est allouée ou si un premium a eu lieu lors de l'enchère du produit ferme ;

- le rebours à Taisnières H seulement si toute la capacité ferme à Alveringem est allouée ou si un premium a eu lieu lors de l'enchère du produit ferme.

En outre, GRTgaz propose de maintenir le même fonctionnement pour les enchères trimestrielles d'août 2017 portant sur les produits trimestriels à compter de Q4 2017, et pour les enchères mensuelles portant sur le mois d'octobre 2017.

Les tarifs en vigueur à la mise en place du PIV ne seraient pas modifiés. Les contrats existants des expéditeurs ayant réservé de la capacité à Taisnières H et à Alveringem seraient exécutés dans des conditions identiques. De son côté, Fluxys consultera le marché en mars concernant les options retenues en Belgique.

2.1.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

La majorité des acteurs ayant répondu à la consultation publique est favorable à la mise en œuvre du PIV France Belgique au 1er octobre 2017 dans les conditions proposées par GRTgaz. Ces acteurs considèrent qu'une telle évolution est de nature à simplifier le système gazier français et à accorder plus de flexibilité aux expéditeurs.

Concernant le maintien de la commercialisation des 4 GWh/j de capacité rebours dans le sens Belgique vers France, une majorité d'acteurs y est également favorable. Ils considèrent que bien que son volume soit faible, son maintien n'engendre pas de coûts supplémentaires et peut être utile dans certaines configurations de flux. Certains acteurs estiment qu'il est peu probable que ce produit trouve d'acquéreur à court terme.

2.1.3. Analyse de la CRE

La CRE estime que la mise en place d'un point d'interconnexion virtuel entre la France et la Belgique est une mesure conforme au code de réseau CAM, qui répond à la demande du marché et qui permet de simplifier l'offre tout en assurant la continuité des contrats existants.

Concernant le maintien de la commercialisation du rebours dans le sens Belgique vers France, la CRE considère que bien que toute la capacité ferme ne soit pas souscrite à Taisnières, ce maintien peut être utile dans certaines situations.

La CRE est donc favorable à la mise en œuvre du PIV France Belgique selon les modalités proposées par GRTgaz, tout en maintenant l'intégralité des capacités actuelles.

Ainsi, les volumes de capacité qui seront commercialisés au PIV sont synthétisés ci-dessous :

CAPACITÉ (GWH/J)

BELGIQUE VERS FRANCE

FRANCE VERS BELGIQUE

Ferme

640

270 - DKB (8)

Rebours

4

200

Par ailleurs, les tarifs en vigueur à la mise en place du PIV ne seront pas modifiés (9). Ils sont rappelés dans le tableau ci-dessous :

€/MWH/J/AN

BELGIQUE VERS FRANCE

FRANCE VERS BELGIQUE

PIV France Belgique

Ferme

102,30

40,32

Rebours

50,40

20,46

2.2. Articulation entre le netting rebond et l'UBI

Actuellement, lorsque toutes les capacités fermes disponibles ont été souscrites, l'offre de capacité Use-it-and-Buy-It (UBI [10]) est ouverte pour l'acquisition de capacités intra-journalières. Cette offre permet aux expéditeurs d'acquérir de la capacité quotidienne supplémentaire dans le sens d'acheminement principal en cours de journée gazière, en mettant à leur disposition les capacités souscrites mais non utilisées par leurs propriétaires. A chaque cycle de nomination, GRTgaz détermine la capacité UBI disponible sur un point donné en calculant la différence entre la somme des capacités détenues et la somme des nominations des expéditeurs sur le même point. Pour obtenir de la capacité UBI, un expéditeur nomine au-delà de ses capacités.

En outre, le dispositif de « netting » mis en place par GRTgaz permet, en cas de travaux, à un expéditeur qui nomine dans le sens rebours de libérer une quantité identique de capacité dans le sens principal. Le netting n'apporte pas de changement aux flux physiques sur le réseau mais permet aux expéditeurs de nominer davantage dans le sens principal. Ce mécanisme permet par exemple, en période de travaux, aux expéditeurs engagés par des contrats de livraison à la bride de respecter leurs engagements, notamment de Take-or-Pay.

Enfin, en cas de travaux, le « rebond » est une tolérance qui permet à un expéditeur de nominer gratuitement dans le sens rebours le volume de capacité ferme qui est interrompu dans le sens principal, et ce, même si ce dernier ne possède pas de capacités rebours. Ce mécanisme présente les mêmes avantages que le netting.

2.2.1. Proposition de GRTgaz

A court terme, GRTgaz indique ne pas être en mesure de maintenir l'UBI et le netting rebond dans les deux sens sans développements informatiques. Il serait nécessaire de choisir entre le maintien de l'UBI dans les deux sens, ou le maintien du netting rebond et de l'UBI dans le sens Belgique vers France.

GRTgaz propose de maintenir le netting rebond et l'UBI dans le sens Belgique vers France, cette solution étant celle qui, selon lui, présente le plus d'intérêt pour le marché.

2.2.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

Les acteurs ayant répondu à la consultation publique sont partagés sur le choix à faire concernant le maintien de l'UBI dans les deux sens ou le maintien de l'UBI dans le seul sens Belgique vers France et, en cas de travaux, du netting rebond.

Certains acteurs sont favorables à la proposition de GRTgaz. Ils considèrent qu'étant donné que le flux majoritaire est actuellement le flux Belgique vers France, l'UBI dans le sens France vers Belgique n'apportera pas de bénéfices au marché français. D'autres acteurs favorisent le maintien de l'UBI dans les deux sens. Certains d'entre eux rappellent que contrairement au netting rebond, l'UBI est accessible à tous les expéditeurs.

Un acteur souhaite que les capacités souscrites du terminal de Dunkerque vers la Belgique, mais non utilisées, soient mises à disposition des expéditeurs via l'UBI afin de pouvoir faire transiter du gaz du PEG nord vers la Belgique.

Enfin, tous les acteurs sont favorables à ce que l'UBI et le netting rebond puissent être maintenus. Certains acteurs émettent des réserves sur les coûts associés à de tels développements.

2.2.3. Analyse de la CRE

Le maintien de tous les mécanismes actuels étant impossible à court terme et étant donné que les conditions de marché actuelles conduisent à un flux dominant de la Belgique vers la France, la CRE considère que l'UBI dans le sens France vers Belgique ne serait que très peu utilisé à court terme. En effet, l'UBI n'est disponible que lorsque toute la capacité ferme est souscrite, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ainsi, dans un premier temps, seuls le netting rebond et l'UBI dans le sens Belgique vers France seront maintenus.

Cependant, la CRE souhaite que l'ensemble des mécanismes existants soient maintenus sur le long terme. Ainsi, elle demande à GRTgaz d'étudier et de présenter dans le cadre de la Concertation Gaz, au cours de l'année 2017, les possibilités concernant la commercialisation de l'UBI dans le sens France vers Belgique ainsi que les coûts qui y sont associés. GRTgaz étudiera notamment la possibilité d'intégrer à l'UBI France vers Belgique les capacités souscrites et non utilisées du terminal de Dunkerque vers la Belgique.

3. Mise en œuvre du service de substitution de capacité

3.1. Principe du service

3.1.1. Proposition des GRT

De manière anticipée par rapport aux prescriptions de l'article 21§3 du code CAM tel que modifié, dès les prochaines enchères annuelles de mars 2017, en cas d'excédent de capacité du côté France par rapport à l'autre côté de l'interconnexion, GRTgaz et TIGF proposent de mettre en œuvre un service de conversion : dans le cadre de ce service, les expéditeurs qui disposent de capacité d'interconnexion non groupée du côté français et ne pouvant pas souscrire un niveau équivalent de capacité non groupée de l'autre côté de ce même point, participeraient aux enchères PRISMA pour la vente de capacités groupées à ce point, et auraient ensuite recours au service de conversion dans le cadre duquel la capacité non groupée en portefeuille sur la même période se substituerait à la capacité nouvellement acquise et constituerait une capacité en tout point identique à celle-ci. Le client conserverait ses droits et obligations sur la capacité réservée antérieurement. Les droits et obligations de l'expéditeur sont alors éteints sur la partie française de la capacité groupée nouvellement acquise, qui ne serait donc pas facturée. Seul le premium d'enchères serait dû.

Les GRT proposent d'appliquer cette mesure à l'ensemble des points CAM, notamment les PIR Taisnières H, Obergailbach et Pirineos où des asymétries de souscription existent. Concernant Pirineos, la problématique d'asymétrie est aujourd'hui réglée par la possibilité de souscrire des capacités non groupées du côté espagnol. La mesure s'appliquerait pour les capacités groupées achetées pour une durée d'au moins un mois lors des enchères PRISMA. Le volume de capacité faisant l'objet du mécanisme de conversion doit être inférieur ou égal au volume de capacité non groupée déjà souscrit au moment de la demande de substitution.

3.1.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

La totalité des acteurs ayant répondu à la consultation publique est favorable à la mise en place du mécanisme de substitution de capacité. Les acteurs considèrent que ce mécanisme est de nature à résoudre les problèmes d'asymétrie de souscription et souhaitent sa mise en œuvre au plus tôt.

Alors que ce mécanisme est limité aux produits d'un terme supérieur ou égal au mensuel, certains acteurs souhaitent qu'il s'applique également pour les produits journaliers et intra-journaliers.

Un acteur souhaite avoir la confirmation que tous les expéditeurs pourront accéder à ce service, y compris ceux agissant comme agents disposant d'un droit d'utilisation des capacités d'un expéditeur tiers.

3.1.3. Analyse de la CRE

La CRE considère que la proposition des GRT est conforme à l'article 21, tel qu'amendé, du code de réseau CAM et qu'elle répond à un besoin du marché.

La CRE est opposée à l'extension de ce mécanisme aux produits journaliers et intra-journaliers. Elle rappelle que ce mécanisme de substitution est un service proposé par les GRT pour que les expéditeurs aient l'opportunité de rééquilibrer leurs portefeuilles, dans les cas où des capacités non groupées ne sont pas suffisantes à un point d'interconnexion, mais ne doit en aucun cas être un mécanisme d'optimisation de court terme. La CRE rappelle également que le code CAM prévoit l'application de ce mécanisme uniquement pour les produits annuels, trimestriels et mensuels.

Concernant la demande d'un acteur de pouvoir bénéficier de ce service en cas de cession de droits d'usage, la CRE rappelle que la demande de substitution ne peut être faite que sur une capacité non groupée en portefeuille. Ainsi, un acteur détenant le droit d'usage d'une capacité sans l'avoir en portefeuille ne pourra pas bénéficier de ce mécanisme. Si un expéditeur B détenant la capacité d'un expéditeur A en droit d'usage souhaite bénéficier du mécanisme de substitution, il doit annuler la cession de droit d'usage en cours afin que l'expéditeur A puisse effectuer une demande de substitution puis acheter les droits d'usage sur la capacité nouvellement groupée.

La CRE est favorable à la mise en œuvre de ce mécanisme aux points d'interconnexion sur lesquels le code de réseau CAM s'applique, et ce, dès mars 2017.

3.2. Cadre d'application

3.2.1. Proposition des GRT

Les GRT estiment que l'application de ce mécanisme de conversion en cas de congestion, c'est-à-dire lorsque la demande est supérieure à l'offre, pourrait créer une distorsion de marché. En effet, l'enchère serait biaisée par l'intérêt du détenteur de capacité non groupée qui souhaite la substituer, puisque cette capacité non groupée constitue pour lui un coût échoué. L'acteur serait dès lors prêt à acheter la nouvelle capacité à un prix plus élevé que le reste du marché, ce qui gonflerait artificiellement le prix d'adjudication de l'enchère. Pour cette raison, GRTgaz et TIGF souhaitent que le mécanisme de conversion ne soit pas applicable en cas de congestion.

Néanmoins, TIGF propose d'allouer le reliquat de capacité groupée à l'issue du dernier tour d'enchères à l'expéditeur souhaitant substituer sa capacité non groupée, au prix d'adjudication de l'enchère.

Pour bénéficier du mécanisme de conversion, GRTgaz propose que l'expéditeur dispose d'un délai de cinq jours ouvrés après l'enchère pour effectuer sa demande de substitution auprès du GRT concerné. TIGF propose que l'expéditeur souhaitant avoir recours à ce mécanisme se manifeste auprès du GRT en amont de l'enchère.

3.2.2. Synthèse des réponses à la consultation publique

La majorité des acteurs ayant répondu à la consultation publique ne partage pas l'analyse des GRT et de la CRE et considère que le mécanisme doit s'appliquer y compris en cas de congestion.

Ils souhaitent en effet que la possibilité de résoudre les problèmes d'asymétrie existe également lorsque la demande est supérieure à l'offre lors des enchères, soit lorsque cette offre aurait le plus de valeur.

Certains acteurs soulignent qu'un détenteur de capacité non-groupée ne peut être discriminé vis-à-vis d'acquéreurs de court terme.

Concernant le délai de cinq jours proposé par GRTgaz pour l'activation de ce mécanisme de substitution, un acteur suggère que ce délai soit relevé à au moins dix jours, afin de sécuriser la communication et l'activation de ce service pour les fournisseurs.

A l'exception de GRTgaz, et dans le cas où le mécanisme de substitution n'est pas appliqué en cas de congestion, tous les acteurs souhaitent que la proposition de TIGF concernant l'allocation du reliquat d'enchères s'applique, y compris pour GRTgaz.

3.2.3. Analyse de la CRE

La CRE note que le code de réseau CAM n'impose pas expressément l'application de ce mécanisme dans les cas de congestion à l'interconnexion.

Toutefois, la CRE considère, compte tenu des réponses à la consultation publique et du fait que la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (CREG) envisage de maintenir ce système en cas de premiums, que les GRT doivent fournir ce service y compris lorsque la demande est supérieure à l'offre pendant l'enchère, et ce, dès mars 2017. Les expéditeurs seront tenus de payer le premium de l'enchère.

Concernant le délai dont dispose un expéditeur pour informer le GRT qu'il souhaite bénéficier de ce mécanisme, la CRE considère qu'un délai de 5 jours est suffisant. La CRE souhaite que le délai de cinq jours ouvrés à compter de la fin des enchères s'applique également pour TIGF.

4. Décision de la CRE

La CRE approuve la proposition de GRTgaz (11) au titre de la mise en place du PIV France Belgique, sous réserve des modifications suivantes :

- Le maintien de l'intégralité des capacités actuellement commercialisées à la mise en place du PIV :la phrase : « Les 4 GWh/j de capacité rebours commercialisées dans le sens Belgique France seront proposés au marché si ce dernier exprime un fort intérêt pour ce produit. » est remplacée par : « Les 4 GWh/j de capacité rebours commercialisées dans le sens Belgique France seront proposés au marché dans les mêmes conditions. »

- L'engagement de GRTgaz à étudier et à présenter en Concertation Gaz au cours de l'année 2017 les possibilités concernant la commercialisation de l'UBI dans le sens France vers Belgique, éventuellement en y intégrant les capacités non souscrites du terminal de Dunkerque vers la Belgique.

La CRE approuve la proposition de GRTgaz (12) au titre du mécanisme de substitution de capacités, sous réserve de la modification suivante :

- l'application du mécanisme y compris en cas de congestions :la phrase : « La mesure ne s'applique que si le point est non congestionné (ie demande inférieure à l'offre : pas de premium), ceci afin de ne pas fausser le résultat des enchères (en effet si la demande venait à être supérieure à l'offre du fait d'une demande de substitution, le prix de la capacité serait artificiellement plus élevé, puisque cette capacité serait remise à disposition du marché à l'enchère suivante). » est remplacée par : « La mesure s'applique y compris en cas de demande supérieure à l'offre. En cas d'application du mécanisme pour une enchère se clôturant avec un premium, le premium d'enchère est facturé à l'expéditeur concerné. »

La CRE approuve la proposition de TIGF (13) au titre du mécanisme de substitution de capacités, sous réserve des modifications suivantes :

- la possibilité pour un expéditeur d'effectuer une demande de substitution jusqu'à cinq jours ouvrés après l'enchère :la phrase : « la demande de substitution de l'expéditeur doit être faite en amont de l'enchère du produit groupé concerné » est remplacée par : « la demande de substitution de l'expéditeur doit être faite jusqu'à cinq jours ouvrés après l'enchère du produit groupé concerné »;

- l'application du mécanisme y compris en cas de congestions : la phrase : « Le mécanisme de substitution ne s'applique que si le point est non congestionné, donc quand la demande au premier tour d'enchère est inférieure à l'offre et aucun premium d'enchères n'est généré. » est remplacée par : « La mesure s'applique y compris en cas de demande supérieure à l'offre. En cas d'application du mécanisme pour une enchère se clôturant avec un premium, le premium d'enchère est facturé à l'expéditeur concerné. »

- la partie intitulée « Allocation du reliquat » est supprimée.

La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française.