JORF n°251 du 28 octobre 2000

Décret n° 2000-1056 du 25 octobre 2000

Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre et du ministre des affaires étrangères,

Vu les articles 52 à 55 de la Constitution ;

Vu le décret no 53-192 du 14 mars 1953 modifié relatif à la ratification et à la publication des engagements internationaux souscrits par la France,

Décrète :

Art. 1er. - La convention de codéveloppement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, signée à Paris le 25 mai 2000, sera publiée au Journal officiel de la République française.

Art. 2. - Le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

CONVENTION DE CODEVELOPPEMENT

ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE

ET LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE DU SENEGAL

Préambule

Le Gouvernement de la République française,

Le Gouvernement de la République du Sénégal, ci-après « les Parties »,

Rappelant leur déclaration conjointe sur le codéveloppement lié à la maîtrise des flux migratoires du 5 mars 1999, dans laquelle ils ont souligné la volonté des deux pays d'élaborer une politique commune de codéveloppement et annoncé la mise en place d'un comité mixte franco-sénégalais sur le codéveloppement et les migrations ainsi que l'élaboration d'une convention de codéveloppement ;

Rappelant les accords de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, signés à Paris le 29 mars 1974, et désireux, dans ce cadre, de fixer les orientations du partenariat dans le domaine du codéveloppement lié à la maîtrise des flux migratoires,

sont convenus des dispositions suivantes :

Article 1er

Objet

Les Parties décident de renforcer leur démarche partenariale en signant une convention de codéveloppement qui définit en commun les politiques spécifiques de développement, liées aux flux migratoires, visant à :

Favoriser la mobilisation des migrants installés en France pour le développement de leur pays d'origine ;

Organiser la mobilité des personnes, notamment pour répondre aux besoins de formation du Sénégal, dans le cadre des programmes de codéveloppement.

Article 2

Mise en oeuvre

a) Partenariats

Pour sa mise en oeuvre, la politique de codéveloppement s'appuie sur des partenaires privilégiés : les associations de migrants actives au Sénégal ; les grandes entreprises et les PME-PMI intervenant au Sénégal ; les collectivités territoriales impliquées dans la coopération décentralisée. Ces acteurs sont mobilisés, en France, dans le cadre de comités régionaux de codéveloppement.

b) Moyens

Les Parties cherchent à mobiliser les mécanismes d'aide au développement et de coopération existants.

Cette Convention est mise en oeuvre dans le cadre de Programmes de codéveloppement.

Ces programmes sont élaborés en partenariat entre les deux pays et adoptés par le Comité mixte franco-sénégalais pour le codéveloppement et les migrations. Celui-ci est chargé d'en assurer le suivi et l'évalutation.

Ces programmes sont pluriannuels.

Chaque année, le Comité mixte franco-sénégalais pour le codéveloppement et les migrations examine et adopte, si nécessaire, de nouveaux programmes, conformément aux orientations fixées par la présente Convention.

Article 3

Champ d'application

Sont éligibles à des programmes de codéveloppement des actions dans les domaines suivants, dès lors qu'elles s'appuient sur les migrants :

a) Appui au développement local et régional

Dans les régions de forte émigration, notamment dans la région du fleuve Sénégal, l'appui vise à développer un tissu productif, seul capable à terme de générer les richesses et les emplois capables de stabiliser les populations et de pérenniser le développement. Il vise également à renforcer les infrastructures, les capacités des organismes de développement local et la décentralisation.

L'action des migrants pour l'amélioration des équipements dans leurs villages ou communes sera soutenue, en concertation avec les autorités communales.

Des associations, organisations paysannes et bureaux d'études, appuient la réalisation d'initiatives locales. Des actions de formation, des rencontres consacrées aux échanges d'expériences, la mise en réseau des organismes contribueront à ce renforcement.

b) Aide aux projets individuels des migrants

Les migrants porteurs d'un projet de création au Sénégal, d'une petite activité économique dans le domaine commercial, agricole ou artisanal ou ayant un projet de retour dans un emploi sont aidés par le Programme de développement local migration (PDLM) ou dans le cadre des contrats de réinsertion dans le pays d'origine (CRPO).

Les instruments d'aide existants seront plus systématiquement mobilisés au profit de ces migrants, en particulier ceux ayant un projet de retour dans un emploi.

L'accès aux micro-crédits sera facilité par le renforcement des caisses de crédit et d'épargne autogérées.

c) Appui au développement du système productif

Les migrants ayant acquis certaines compétences techniques ou un esprit d'entreprise en France seront soutenus dans leurs projets de création d'entreprise par des formations, par l'accompagnement de leur initiative et par l'instauration d'un environnement favorable à leur installation (pépinières d'entreprises, accès à des dispositifs de crédit). Sera également favorisé le recrutement de migrants qui souhaitent rentrer au Sénégal et y trouver une activité.

L'appui à la création de PME/PMI passe également par le compagnonnage avec les entreprises françaises et par l'amélioration des instruments de crédits destinés aux PME/PMI.

d) Formation professionnelle

et échange de stagiaires professionnels

Un accord d'échange de stagiaires professionnels sera signé.

L'envoi de diplômés et de travailleurs sénégalais comme stagiaires professionnels en France peut renforcer les compétences et favoriser la modernisation des entreprises sénégalaises, tout comme la création d'entreprises ou le développement de la sous-traitance.

Des stages en entreprises au Sénégal seront facilités pour des Français ou des migrants ayant effectué des études ou travaillant en France.

e) Amélioration des instruments financiers

mobilisant l'épargne des migrants

La mobilisation de l'épargne des immigrés en France au service du développement de leur région et en faveur de projets productifs sera encouragée et facilitée.

Les autorités sénégalaises veilleront à la sécurisation et à la rapidité de mise à disposition de l'épargne des immigrés sénégalais amenée à transiter par les réseaux publics de collecte.

f) Communication, sensibilisation

et développement des échanges

En France, ces actions visent à renforcer les liens des immigrés, notamment des jeunes issus de l'immigration, avec leur pays d'origine. Elles doivent également contribuer à promouvoir un nouveau regard sur l'immigration.

Au Sénégal, il s'agit de donner une vision plus réaliste de ce qu'est l'émigration vers la France.

Article 4

La maîtrise commune des flux migratoires

La politique de codéveloppement liée aux flux migratoires s'articule, dans le domaine de la concertation entre les deux Parties pour la maîtrise des flux migratoires, sur les axes suivants :

L'implication des autorités françaises et sénégalaises dans la mise en oeuvre concrète des actions menées dans le cadre de la Convention de codéveloppement : mesures réglementaires ou administratives de nature à faciliter la réinstallation de migrants (mesures douanières, fiscales et autres), suivi des actions, cofinancement des opérations dans le cadre des crédits budgétaires disponibles, mobilisation des capacités de formation... ;

La possibilité pour les bénéficiaires des programmes de codéveloppement d'obtenir un visa leur permettant la circulation entre leur pays d'origine et la France, dans le cadre des lois et règlements en vigueur sur le territoire de chacune des Parties ;

Le renforcement de la coopération entre les services concernés dans les deux pays pour la prévention de l'émigration illégale, l'action contre l'immigration irrégulière et l'organisation de la mobilité contrôlée ;

La mise en oeuvre conjointe du dispositif des contrats de réinsertion dans le pays d'origine (CRPO).

La présente Convention entre en vigueur à la date de sa signature. Elle est conclue pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction pour une durée identique. Dans les trois mois qui précèdent la fin de chacune de ses périodes d'application, chaque Partie peut notifier à l'autre Partie qu'elle dénonce la présente Convention. Cettte dénonciation prend effet trois mois après réception de sa notification. Cette dénonciation ne remet pas en cause les droits et obligations des Parties au titre des projets et des programmes déjà engagés, sauf si les Parties en conviennent par accord mutuel.

En foi de quoi, les représentants des deux Parties, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention et y ont apposé leur sceau.

Fait à Paris, le 25 mai 2000, en deux exemplaires en langue française, chacun faisant également foi.

(1) La présente convention est entrée en vigueur le 25 mai 2000.

Application des articles 52 à 55 de la Constitution.

Fait à Paris, le 25 octobre 2000.

Jacques Chirac

Par le Président de la République :

Le Premier ministre,

Lionel Jospin

Le ministre des affaires étrangères,

Hubert Védrine

Pour le Gouvernement

de la République française :

Charles Josselin,

Ministre délégué

à la Coopération

et à la Francophonie

Pour le Gouvernement

de la République du Sénégal ;

Cheikh Tidiane Gadio,

Ministre

des Affaires Etrangères

et des Sénégalais de l'Extérieur