6.1. Les objectifs du contrôle tarifaire
6.1.1. Finalités et modalités de l'encadrement - sous forme de plafond -
du tarif de la prestation de terminaison d'appel vocal mobile
Ainsi que l'Autorité l'a rappelé, la prestation de terminaison d'appel vocal mobile a un caractère de facilité essentielle, dont le tarif n'est soumis à aucune pression concurrentielle suffisante pour empêcher, en l'absence de régulation, l'opérateur mobile de le fixer à un niveau très élevé. Dès lors, les conditions d'accès à cette prestation doivent être transparentes, objectives, non discriminatoires et permettre aux compétiteurs d'exercer une concurrence effective sur les marchés avals, à travers un processus d'encadrement des niveaux de charge de terminaison d'appel au regard des structures et des niveaux de coûts pertinents, processus qui vise à les orienter à terme vers des références de coûts pertinentes. Le Conseil de la concurrence a d'ailleurs rappelé dans son avis 07-A-01 que « s'agissant des remèdes propres au droit de la concurrence, le conseil a déjà souligné (avis n° 05-A-10 du 11 mai 2005) que le caractère de facilité essentielle de la terminaison d'appel sur les réseaux tiers, pour les opérateurs qui doivent faire aboutir les appels de leurs abonnés, permet d'imposer aux opérateurs de terminer les appels à des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires. En ce qui concerne le prix auquel cette prestation doit être fournie, le droit de la concurrence exige qu'il soit orienté vers les coûts supportés par l'opérateur en monopole lorsque celui-ci utilise la même prestation pour faire des offres sur un marché aval sur lequel il est en concurrence avec les opérateurs qui veulent terminer les appels. »
L'encadrement tarifaire des niveaux des terminaisons d'appel que l'Autorité spécifie pour les opérateurs consiste à fixer des plafonds que les tarifs de ces prestations ne doivent pas dépasser. L'Autorité insiste donc sur le fait qu'elle fixe des plafonds tarifaires, qui doivent s'entendre comme des limites supérieures laissant la liberté aux opérateurs de mettre leurs tarifs, sous ces plafonds, au niveau qu'ils jugent pertinent. En particulier, il est de la seule responsabilité de l'opérateur de vérifier que ses structures tarifaires sont cohérentes entre les marchés de gros et les marchés de détail et qu'elles ne l'exposent pas au risque de se voir sanctionner au titre du droit commun de la concurrence pour abus sur un marché de détail connexe au marché de gros sur lequel il détient une position dominante.
La majorité des coûts des opérateurs est formée de coûts joints, c'est-à-dire communs à différentes prestations dont celle de terminaison d'appel vocale. Ces coûts sont principalement des coûts de réseau ; le réseau de l'opérateur étant unique et servant à produire de multiples produits. Le concept de coûts pris en compte par l'Autorité pour spécifier les modalités de contrôle tarifaire dépend dès lors directement des choix d'allocation quelle arrête pour allouer ces masses de coûts joints à l'ensemble des prestations qui les induisent, en particulier à la terminaison d'appel vocal. Par exemple, les coûts joints de boucle locale radio sont partagés entre les différentes prestations (voix entrante et sortante, SMS et MMS entrants et sortants, autres données entrantes et sortantes) au prorata de l'usage de la ressource radio. L'Autorité tient à souligner que l'imposition de plafonds tarifaires vise simplement à encadrer la part maximum des coûts joints qu'un opérateur peut recouvrer à travers la tarification de la terminaison d'appel voix - prestation commercialisée en monopole - ; le reste des coûts devant être recouvré sur l'ensemble des autres prestations (de détail notamment) qu'il offre et pour lequel l'opérateur est libre de sa politique tarifaire. Il n'y a donc pas de risque de non-recouvrement des coûts.
Ainsi que l'Autorité l'a indiqué plus haut, les niveaux des tarifs des terminaisons d'appel de l'ensemble des opérateurs sont soumis à un processus de plafonnement graduel de ces niveaux au regard des structures et des références de coûts pertinentes. Les références de coûts retenues aujourd'hui pour tous les opérateurs mobiles identifiés comme puissants sur leurs marchés respectifs de terminaison d'appel, qu'ils soient soumis à une obligation d'orientation vers les coûts ou à une obligation de pratiquer des tarifs non excessifs, sont celles d'un opérateur efficace et non les propres coûts de l'opérateur. Ces références correspondent aux coûts alloués aux appels vocaux entrants, tels que spécifiés dans des décisions n° 2007-0128 et n° 2007-0129 (décisions identiques en matière de prestations de terminaison d'appel vocale).
Pour rappel, la comptabilisation réglementaire des coûts se base sur l'ensemble des coûts de la comptabilité générale et analytique de l'opérateur et alloue l'intégralité des coûts aux différentes prestations selon les principes de causalité, de non-discrimination et d'auditabilité (principes rappelés au chapitre 5).
Les références de coûts d'un opérateur efficace considérées comme pertinentes par l'Autorité (et donc opposables aux opérateurs mobiles) sont aujourd'hui produites sur la base de coûts historiques, c'est-à-dire qu'ils résultent des charges, telles qu'elles sont inscrites dans la comptabilité de l'opérateur et, le cas échéant, après certains retraitements (comme le remplacement des frais financiers par la rémunération du capital). En particulier, les actifs figurent avec leur valeur historique selon les règles comptables en vigueur.
La formation des références de coûts d'un opérateur efficace, qui comme indiqué plus haut sont celles considérées comme pertinentes par l'Autorité, repose sur une notion d'efficacité basée notamment sur des hypothèses de déploiement efficace d'un réseau (par exemple en termes de choix technologiques) ainsi que de niveaux de coûts de déploiement et d'utilisation du réseau efficaces. La notion d'efficacité est également associée à des caractéristiques de l'opérateur en termes de demande moyenne par clients et de part de marché détenue. Ainsi, si l'Autorité est susceptible d'apprécier, de manière préalable à la fixation des plafonds relatifs aux tarifs de terminaison d'appel, les références de coûts constatés et donc supportés par un opérateur, l'Autorité se réserve la possibilité de ne pas prendre en compte certains coûts supportés par l'opérateur, qui, bien que dans le périmètre des coûts pertinents, ne correspondraient pas à l'activité d'un opérateur efficace. Elle tient ainsi à ne pas autoriser un opérateur à recouvrer, sur la prestation de terminaison d'appel, des surcoûts dus, en tout ou partie, à des inefficacités (par ex. une absence d'effets d'échelle) de son ressort.
A ce jour, et sans que cela ne préjuge de l'évolution future du périmètre des coûts pertinents pour la prestation de terminaison d'appel, l'Autorité considère que les coûts pertinents correspondent à ceux d'un appel entrant moyen, c'est-à-dire à la moyenne pondérée (par les volumes d'appels) des coûts des communications entrantes intra-territoriales, internationales ou inter-territoires abouties ou non abouties, tels que définis dans les décisions n° 2007-0128 et n° 2007-0129.
La notion de coût retenue est une notion de coûts complets, la méthode d'allocation retenue étant une règle de « Fully Distributed Costs » (FDC). Les coûts pertinents incluent donc :
- les coûts de réseau alloués à l'usage à la prestation de terminaison d'appel vocal. Plus particulièrement, ils incluent les coûts de licence 2G et/ou 3G (pour la partie utilisée par la prestation de terminaison d'appel vocale) ou les coûts de messagerie vocale (pour la part utilisée lors du dépôt d'un message, conformément au principe de causalité et dans la mesure où la prestation de terminaison d'appel couvre entre autres les appels entrants aboutissant sur messagerie) ;
- les coûts commerciaux spécifiques à savoir ceux qui sont directement induits par la prestation de terminaison d'appel vocal mobile (par exemple les coûts d'édition et d'envoi de factures d'interconnexion) ;
- les coûts communs, qui par nature correspondent à une activité utile à l'ensemble des produits (gros et détail compris) et qui ne peuvent être alloués, à l'aide d'une clé d'allocation d'usage, à une ou des prestations spécifiques. Les coûts communs sont par exemple formés des coûts de siège. Le choix de l'Autorité est de les faire allouer à l'ensemble des prestations au prorata des autres coûts, c'est-à-dire sous la forme d'une majoration proportionnelle aux coûts de réseau et aux coûts commerciaux du service considéré : le principe d'allocation est appelé « clé EPMU » (Equi-Proportionate Mark-Up).
L'Autorité considère donc en particulier que les coûts suivants sont hors du périmètre des coûts pertinents :
- les coûts commerciaux de détail (même sous la forme d'une éventuelle externalité de réseau) ;
- les coûts de consultation de messagerie vocale ;
- les coûts associés au besoin en fond de roulement.
En ce qui concerne l'absence de prise en compte des coûts commerciaux de détail (et notamment sous la forme d'une éventuelle externalité de réseau), cette question a fait l'objet d'une argumentation détaillée dans les décisions n° 2004-937, n° 2004-938 et n° 2004-939 du précédent cycle d'analyse de marché. L'Autorité renvoie à ces décisions pour le détail des raisons, avancées alors, justifiant l'exclusion de ces charges et confirme son raisonnement motivé par :
- le respect du principe de neutralité vis-à-vis des opérateurs fixes ;
- la faible justification d'une telle externalité dans un marché mature ;
- la complexité de la mesure d'une telle externalité et son niveau a priori très faible ;
- les risques de distorsion concurrentielle qui résulteraient de sa prise en compte.
Au sujet de l'exclusion des coûts de consultations de messagerie vocale, l'Autorité a noté que la France se distingue en Europe par le fait que cette consultation est gratuite pour l'appelé. Certains opérateurs mobiles affirment donc qu'il faudrait recouvrer les coûts de consultation sur la prestation de terminaison d'appel, donc in fine, sur l'appelant. L'Autorité ne souscrit pas à cette vision, car elle considère que l'utilité de la messagerie vocale est partagée entre l'appelant, qui peut laisser un message, et l'appelé qui peut consulter ce message. D'ailleurs, l'Autorité note que si l'appelé ne trouvait pas d'utilité propre dans le fait d'avoir une messagerie vocale, il pourrait la désactiver. Le fait que l'opérateur propose ce service gratuitement à son client n'induit donc nullement qu'il est légitime de recouvrer les coûts de ce service « gratuit » sur l'appelant. De plus, l'Autorité souligne que l'opérateur de l'appelé bénéficie pleinement de l'image positive associée à cette gratuité (illustrée par la promotion de cette fonctionnalité dans les offres commerciales) et à ce titre, elle ne peut pas considérer que c'est à l'opérateur de l'appelant, qui ne bénéficie pas de cet avantage d'image de marque, de payer pour cette prestation. Enfin, il est utile de rappeler que cette prestation de consultation de la messagerie vocale existe sur le marché fixe et est également proposée de manière gratuite par les opérateurs fixes (ou incluse dans le prix de détail de l'accès), sans que pour autant elle n'ait jamais été incluse dans le périmètre des coûts pertinents de terminaison d'appel fixe. Ainsi, il serait parfaitement incohérent de faire payer aux clients des opérateurs fixes la consultation des messages qu'ils déposent sur les messageries de leurs correspondants mobiles, alors que la réciproque ne serait pas vérifiée.
En ce qui concerne l'absence de prise en compte du besoin en fonds de roulement (BFR), l'Autorité rappelle que deux des trois opérateurs mobiles métropolitains déclarent ne pas être capables de le mesurer. SFR, seul opérateur à demander sa prise en compte, a manqué de précision dans son évaluation, comme cela a été souligné par l'auditeur qui a émis une observation jugeant que « les hypothèses retenues afin de répartir les coûts de rémunération du BFR par activité pourraient être affinées, certains coûts étant susceptibles d'être affectés de manière plus précise sur les activités et/ou sur les différents éléments de réseau » (décision n° 2006-1087 en date du 24 octobre 2006). De plus, si le calcul du BFR est pertinent d'un point de vue financier, l'Autorité émet de sérieux doutes quant à sa pertinence économique.
En effet, sa prise en compte présente la particularité suivante, plus les rémunérations associées aux terminaisons d'appel sont élevées, et donc plus les profits sont élevés, plus les coûts associés au BFR sont importants, ces coûts étant directement reliés aux délais de paiement des charges de terminaison d'appel, et à la rémunération du capital pendant ce délai. Le niveau du tarif de terminaison d'appel semble donc avoir de manière surprenante un effet démultiplicateur sur le coût relatif au BFR, qui serait susceptible d'être pris en compte dans le coût pertinent pour la terminaison d'appel. De plus, l'Autorité note que les délais de paiement sont sous le contrôle de l'opérateur qui les négocie dans ses conventions d'interconnexion. Enfin, l'Autorité doute de la pertinence de considérer le BFR pour une activité prise séparément, la vente de terminaison d'appel, sans tenir compte de l'activité d'achat de terminaison d'appel pour laquelle l'opérateur paie également avec un certain délai ses charges d'interconnexion. A cela devrait être ajouté le BFR négatif créé par l'activité de déploiement du réseau.
Par ailleurs, la pertinence économique du BFR dérive du fait qu'une entreprise doit immobiliser des biens intermédiaires (matières premières, produits intermédiaires,...) qui sont directement nécessaires pour la production du bien commercialisé. Le décalage temporel entre le paiement de ses intrants et l'encaissement du produit de la vente du bien commercialisé génère un besoin en fonds de roulement. Au cas d'espèce, la production d'une minute supplémentaire de terminaison d'appel mobile ne nécessite aucun achat d'intrant. La pertinence économique de la prise en compte d'un BFR n'est donc pas établie.
En conclusion, l'Autorité considère que le BFR ne doit pas être pris en compte dans le périmètre des coûts alloués à la prestation de terminaison d'appel.
Comme indiqué au chapitre 5, l'Autorité rappelle que si la méthode retenue à ce jour est une approche en coûts complets, elle considère qu'il pourrait être nécessaire de revisiter à terme ce concept afin d'adopter une méthodologie cohérente utilisée dans la mise en oeuvre de la régulation des terminaisons d'appel, qu'il s'agisse de terminaison d'appel fixe ou de terminaison d'appel mobile.
Prise en compte des contributions à la consultation publique lancée le 24 juillet 2007.
Principales remarques des acteurs :
SFR conteste l'analyse de l'Autorité visant à exclure du périmètre des coûts pertinents les coûts commerciaux de détail, les coûts de consultation de messagerie vocale et les coûts associés au besoin en fond de roulement.
S'agissant des coûts commerciaux, SFR estime qu'aucune raison objective ne s'oppose à la prise en compte des externalités de réseau dans le périmètre des coûts pertinents. D'une part, SFR conteste le principe de neutralité vis-à-vis des opérateurs fixes au vu des différences structurelles entre le marché fixe et le marché mobile. D'autre part, SFR estime que l'argument de maturité du marché est non recevable : en effet, les externalités sont associées non seulement au recrutement des clients dits marginaux mais aussi au maintien de ces clients sur les réseaux et doivent donc être prises en compte dans un marché mature. SFR considère également que la prise en compte des externalités est justifiée dans le contexte actuel afin de participer à l'essor commercial de l'UMTS via la subvention des terminaux. De plus, contrairement à l'ARCEP, SFR juge possible de mesurer correctement les externalités et estime la surcharge à la minute à environ 0,8 cEUR, estimation réalisée sur la base d'un sondage, contrairement à l'évaluation en première approche de l'Autorité lors du précédent cycle d'analyse de 0,13 cEUR. Enfin, au sujet des risques de distorsion concurrentielle et le problème ici visé de la subvention par les opérateurs fixes des coûts d'acquisition d'un client mobile qui résilie une ligne fixe, SFR souligne que le facteur principal est l'augmentation du prix de l'abonnement de France Télécom.
Au sujet de l'exclusion des coûts de consultations de messagerie vocale, SFR juge inappropriée l'analogie de l'Autorité entre le marché fixe et le marché mobile. De plus, SFR considère que, selon le principe de causalité, l'appelant devrait supporter les coûts de consultation de messagerie qu'il génère en déposant un message.
Sur la question du besoin en fonds de roulement, SFR estime que les arguments avancés par l'Autorité sont contraires aux principes de séparation comptable. Il convient au contraire d'imputer les coûts du besoin en fonds de roulement au trafic entrant.
Réponse de l'Autorité :
S'agissant des remarques de SFR relatives à la prise en compte des coûts commerciaux, des coûts de messagerie vocale et des coûts associés au BFR dans le périmètre des coûts pertinents de terminaison d'appel, l'Autorité considère qu'aucun élément nouveau ne justifie de modifier son analyse. Toutefois, elle indique que, dans le cadre d'un travail d'harmonisation européenne, le périmètre des coûts pertinents retenu par l'Autorité pour la terminaison d'appel pourrait être amené à évoluer en cohérence avec les futurs principes fixés au niveau européen.
6.1.2. Deux obligations de contrôle tarifaire possibles relatives
à l'encadrement des niveaux de terminaison d'appel
La directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil (directive « accès ») prévoit qu'« un contrôle des prix peut se révéler nécessaire lorsque l'analyse d'un marché donné met en évidence un manque d'efficacité de la concurrence. Les autorités réglementaires nationales peuvent intervenir de manière relativement limitée, par exemple en imposant une obligation concernant la fixation de prix raisonnables pour la sélection de l'opérateur, comme le prévoit la directive 97/33/CE, ou de manière beaucoup plus contraignante, en obligeant, par exemple, les opérateurs à orienter les prix en fonction des coûts afin qu'ils soient entièrement justifiés lorsque la concurrence n'est pas suffisamment vive pour éviter la tarification excessive. »
L'article L. 38-I (4°) du CPCE prévoit que l'Autorité peut imposer « de ne pas pratiquer de tarifs excessifs ou d'éviction sur le marché en cause et pratiquer des tarifs reflétant les coûts correspondants. »
Ainsi, l'Autorité note que la totalité des pays de l'Union européenne qui ont notifié leur analyse du marché 16 (soit 26 pays) ont imposé une obligation de contrôle tarifaire à leurs opérateurs.
En France, l'Autorité envisage de maintenir les deux types d'obligations de contrôle tarifaire qui sont aujourd'hui imposées aux opérateurs : obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts associés ou obligation de pratiquer des tarifs non excessifs suivant les cas. Ces deux obligations permettent d'atteindre l'objectif de plafonner les tarifs suivant des modalités et des coûts de mise en oeuvre différentes qui permettent de prendre en compte les disparités entre opérateurs.
L'obligation de pratiquer des tarifs reflétant les coûts :
Cette obligation d'orientation des tarifs vers les coûts permet d'éviter que les opérateurs profitent d'une situation monopolistique pour en tirer une rente. La mise en oeuvre de cette obligation est associée à l'imposition de l'obligation de comptabilisation des coûts, qui, après spécification des règles, permet à l'Autorité de développer un référentiel de coûts robuste d'un opérateur et en se dotant d'un outil de modélisation complémentaire d'apprécier l'efficacité des opérateurs.
Ainsi, cette obligation est prévue dans la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil (directive « accès », art. 13) : « Les autorités réglementaires nationales peuvent, conformément aux dispositions de l'article 8, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l'orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d'interconnexion et/ou d'accès, lorsqu'une analyse du marché indique que l'opérateur concerné pourrait, en l'absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. Les autorités réglementaires nationales tiennent compte des investissements réalisés par l'opérateur et lui permettent une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu des risques encourus. »
La majorité des régulateurs de l'Union européenne adoptent cette obligation d'orientation vers les coûts dans le cadre de la régulation du marché de la terminaison d'appel vocal mobile.
L'obligation de pratiquer des tarifs non excessifs :
L'Autorité trouve également justifié de limiter les obligations imposées à certains opérateurs en matière de contrôle des prix à celle de « ne pas pratiquer de tarifs excessifs ».
L'Autorité avait déjà imposé l'obligation de ne pas pratiquer de tarifs excessifs lors de ses précédentes analyses (28), en accord avec la Commission européenne (29).
L'appréciation de la non-excessivité suit une approche similaire tant pour la terminaison d'appel vocal mobile que pour la terminaison d'appel fixe.
Il est à noter qu'il ne s'agit pas d'une approche dérivant uniquement des caractéristiques propres de l'opérateur mais qui se fonde aussi sur les risques potentiels de distorsion concurrentielle découlant des différences entre les tarifs des terminaisons d'appel vocal des différents opérateurs. Dès lors, l'Autorité apprécie le caractère non excessif des tarifs de terminaison d'appel vocal mobile, entre autres au regard de leurs valeurs absolues, notamment en rapprochant ces valeurs des références de coûts considérées par l'Autorité comme pertinentes pour la fourniture des prestations de gros de terminaison d'appel (cf. 6.1.1), qu'un opérateur dit efficace est amené à supporter. Comme rappelé dans la section précédente, à terme, les prix des charges de terminaison d'appel doivent converger vers les coûts d'un opérateur efficace, et ce indépendamment du type d'obligations de contrôle tarifaire à laquelle l'opérateur est soumis. Ainsi, les écarts de niveaux admis dans ce présent projet de décision n'ont de légitimité que dans leur caractère transitoire et ne sauraient donc se pérenniser. De surcroît, ils doivent être appréciés en référence aux niveaux tarifaires des opérateurs concurrents. Ainsi, le caractère excessif s'apprécie également au regard des écarts de tarifs de gros qui peuvent ainsi exister entre les différents opérateurs, en particulier entre ceux soumis à une obligation d'orientation vers les coûts et ceux soumis à une obligation de non-excessivité de leurs tarifs de terminaison d'appel vocal mobile. A ce titre, l'Autorité avait estimé dans une décision (30) de règlement de différend entre Neuf Télécom et France Télécom relative à la fixation d'un prix de terminaison d'appel non excessif que l'application de la notion de prix non excessifs pouvait se traduire par la nécessité de « limiter l'écart entre le tarif de la terminaison d'appel de Neuf Télécom et celui de France Télécom et donc de fixer le tarif de la prestation de terminaison d'appel de Neuf Télécom en référence à la structure de tarification de France Télécom » de façon à limiter les éventuelles distorsions concurrentielles pouvant exister sur les marchés de détail sous-jacents.
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