Les faits :
Par une délibération en date du 5 juin 1989, la commune de Portiragnes (Hérault) a approuvé le programme de création et d'extension du plan d'aménagement d'ensemble au lieudit Le Moulin à Vent et arrêté la liste, le coût et les délais de réalisation des équipements publics.
Par une délibération du 26 février 2001, la commune de Portiragnes a approuvé le projet de convention fixant le montant de la participation financière de la société JMF IMMO pour la réalisation de la première tranche du projet de construction, dans le cadre du plan d'aménagement d'ensemble au lieudit Le Moulin à Vent, d'un lotissement à caractère locatif dénommé Les Bastides du Moulin. Cette convention a été signée le 28 février 2001 par la société JMF IMMO.
Par un arrêté municipal du 14 juin 2001, un permis de construire a été délivré à la société JMF IMMO pour la construction de vingt-quatre maisons d'habitation. Le 3 octobre 2001, Electricité de France a adressé à la société JMF IMMO une proposition technique et financière qui prévoyait notamment la réalisation d'un réseau de desserte intérieur qui serait raccordé au poste de distribution publique Picasso. Le 24 avril 2002, la proposition technique et financière a été acceptée par la société JMF IMMO.
Le 3 octobre 2001, un contrat d'alimentation en électricité a été conclu entre Electricité de France et la société JMF IMMO en vue de l'alimentation de l'ensemble immobilier.
Le 13 mars 2003, la commune de Portiragnes a établi un titre de recettes pour le recouvrement de la participation financière due par la société JMF IMMO pour la réalisation de la première tranche du programme. Ce titre ainsi que le commandement de payer ont fait l'objet de recours en annulation devant le tribunal administratif de Montpellier, de même que la convention du 28 février 2001 au motif qu'elle a été signée par le maire avant que la délibération du conseil municipal l'y autorisant ne soit rendue exécutoire par sa transmission à la sous-préfecture de Béziers.
Par lettre du 28 janvier 2004, le maire de la commune de Portiragnes a enjoint à Electricité de France, sur le fondement de l'article 23 du cahier des charges de la concession de distribution publique, de refuser le raccordement au réseau public d'électricité de la deuxième tranche du lotissement, soit sept villas sur les vingt-quatre construites. Les deux motifs mentionnés dans cette lettre étaient la non-conformité des matériaux de voirie et le défaut de paiement de la participation d'un montant de 116 496,36 EUR prévue dans le permis de construire délivré le 14 juin 2001 et due au titre du programme d'aménagement d'ensemble du Moulin à vent.
Par courrier en date du 29 janvier 2004, Electricité de France a informé la société JMF IMMO que, en application de la décision du maire, il ne pouvait pas procéder à la mise sous tension du réseau réalisé par la société.
Parallèlement au recours en annulation qu'elle a introduit contre la décision du maire en date du 28 janvier 2004 la société JMF IMMO a sollicité à trois reprises, sans succès, sa suspension devant le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier.
A la suite d'un quatrième recours, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu par ordonnance du 30 juin 2004 la décision du maire de la commune de Portiragnes du 28 janvier 2004, au motif que le moyen tiré de l'erreur de droit invoqué par la société JMF IMMO était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de cette décision. Cette ordonnance a été notifiée à Electricité de France le 6 juillet 2004.
Le 5 juillet 2004, la société JMF IMMO a demandé à Electricité de France de raccorder les sept villas et des dates ont été fixées pour procéder à la pose des compteurs dans les semaines qui suivent.
Toutefois, par lettre du 5 juillet 2004, le maire de la commune de Portiragnes a mis en demeure Electricité de France de refuser le raccordement au réseau de la deuxième tranche du lotissement Les Bastides du Moulin en application des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme. La lettre précise que cette mise en demeure « complète » celle du 28 janvier 2004.
Par courrier en date du 6 juillet 2004, Electricité de France a informé la société JMF IMMO qu'il était dans l'impossibilité de procéder au raccordement en raison de la nouvelle injonction du maire.
Le 25 juin 2004, la société JMF IMMO a saisi la Commission de régulation de l'énergie sur le fondement de l'article 38 de la loi du 10 février 2000 d'une demande de règlement de différend sur le raccordement des sept villas de la deuxième tranche du lotissement Les Bastides du Moulin.
Sur la compétence de la Commission de régulation de l'énergie :
Aux termes de l'article 38 de la loi du 10 février 2000 « en cas de différend entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité [...] lié à l'accès auxdits réseaux [...] ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats et protocoles visés [...] à l'article 23 de la présente loi [...], la Commission de régulation de l'énergie peut être saisie par l'une ou l'autre des parties. [...] ».
Il résulte des dispositions précitées que la Commission de régulation de l'énergie est compétente pour statuer sur toute demande de règlement d'un différend lié à l'accès au réseau public d'électricité, opposant un utilisateur à un gestionnaire du réseau.
Il ressort des pièces du dossier que la société JMF IMMO demeure propriétaire des parties communes du lotissement tant que celles-ci ne sont pas transférées à la commune. Il résulte de cette situation que cette société doit être regardée, en l'état du dossier soumis à la Commission, comme ayant la qualité d'utilisateur des réseaux publics d'électricité et de ce fait titulaire d'un droit d'accès auxdits réseaux.
C'est donc à tort qu'Electricité de France dénie à la société JMF IMMO la qualité d'utilisateur du réseau public de distribution d'électricité dans le cadre du présent différend.
Par ailleurs, Electricité de France soutient que le litige qui l'oppose à la société JMF IMMO ne concerne pas l'accès aux réseaux auquel pourrait prétendre ladite société, mais des questions relatives à la conformité du lotissement aux prescriptions du permis de construire.
Toutefois, la compétence de la Commission de régulation de l'énergie n'est pas limitée aux litiges concernant les seuls contrats visés expressément à l'article 38 de la loi du 10 février 2000, mais s'étend à l'ensemble des différends liés à l'accès aux réseaux.
Dès lors, la Commission de régulation de l'énergie est compétente pour régler les différends pouvant survenir entre un utilisateur d'un réseau public et son gestionnaire dans la réalisation du raccordement au réseau public d'électricité, dès lors que celle-ci constitue la condition physique de l'accès d'un utilisateur au réseau.
Il suit de là que la Commission de régulation de l'énergie est compétente pour se prononcer sur le différend qui oppose la société JMF IMMO à Electricité de France, qui porte sur le raccordement au réseau public de distribution d'électricité d'un ensemble de sept maisons d'habitation.
Sur la demande de raccordement :
La société JMF IMMO demande à la Commission de régulation de l'énergie d'enjoindre à Electricité de France de procéder au raccordement au réseau électrique de sept villas sur les vingt-quatre édifiées sur le territoire de la commune de Portiragnes.
Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, « les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 111-1, L. 421-1 ou L. 150-1 ne peuvent, nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d'affermage ou de régie intéressée, être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités ».
En application de cette disposition, le maire de la commune de Portiragnes a enjoint le 5 juillet 2004 à Electricité de France de ne pas raccorder au réseau public de distribution d'électricité la deuxième tranche du lotissement Les Bastides du Moulin. Cette décision a été prise à la suite de la suspension par le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'une précédente décision du 28 janvier 2004 ayant le même objet.
Dans une telle hypothèse, il appartient au gestionnaire du réseau de distribution de se conformer à la décision du maire prise dans le cadre de son pouvoir de police de l'urbanisme en vertu de dispositions législatives. Par suite, la Commission de régulation de l'énergie ne peut que constater qu'Electricité de France était fondé à refuser le raccordement sollicité au réseau public de distribution d'électricité.
En outre, la Commission de régulation de l'énergie, lorsqu'elle statue sur une demande de règlement de différend en application de l'article 38 de la loi du 10 février 2000, n'a pas compétence pour apprécier la légalité d'une décision destinée à assurer le respect des règles d'utilisation du sol. Il n'en irait autrement que si la décision était manifestement illégale, en raison notamment de l'incompétence de son auteur ou d'un motif insusceptible de se rattacher à l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme.
En l'espèce, si la société JMF IMMO soutient devant la Commission de régulation de l'énergie que la décision du maire de la commune de Portiragnes du 5 juillet 2004 est illégale, il ne ressort toutefois pas des pièces versées au dossier que cette décision soit entachée d'une illégalité manifeste.
Il résulte de ce qui précède que la Commission de régulation de l'énergie ne peut donc que rejeter les demandes de la société JMF IMMO, Décide :
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