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Problèmes d'installation électrique après rénovation
M. G. est propriétaire d'un studio situé au (…). A sa demande, en mars 2023, une entreprise y a réalisé des travaux de rénovation, prévoyant notamment et initialement le déplacement du compteur à l'intérieur du studio.
Le 21 mars 2023, cette entreprise a contacté le gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité (GRD) Strasbourg Electricité Réseaux (SER) pour signaler un dégât des eaux dans l'immeuble. Le GRD a alors mis provisoirement hors tension la colonne montante du bâtiment, sans intervenir sur les ouvrages électriques de M. G.
A la fin du mois de mars 2023, le disjoncteur a été déplacé à l'intérieur du studio. Cette opération a été réalisée par un intervenant se présentant comme étant un agent de la société SER, agissant dans le cadre de ses fonctions. Le compteur a été laissé en dehors du studio, dans les parties communes de l'immeuble. Constatant des irrégularités dans l'installation de son disjoncteur, M. G. a demandé à son fournisseur de vérifier son installation de branchement.
Le 26 avril 2023, un agent de la société SER s'étant rendu sur place et a constaté que le branchement individuel n'était pas conforme et que le scellé qui avait été utilisé n'était plus homologué par le GRD. Cet agent a apposé de nouveaux scellés sur le disjoncteur.
Le 27 avril 2023, la base de données du GRD a été mise à jour pour tenir compte du déplacement du disjoncteur. Le 28 avril 2023, un autre agent du GRD a confirmé l'intervention de la société SER sur l'installation électrique de M. G. à la suite d'un dégât des eaux.
Les 4 et 5 juillet 2023, M. G. a demandé à la société SER la communication du rapport d'intervention ayant établi les circonstances des travaux sur son disjoncteur.
Le 13 juillet 2023, la société Électricité de Strasbourg, maison-mère du GRD, a indiqué à M. G. que la société SER n'avait jamais été contactée pour un déplacement d'ouvrage et qu'elle n'était intervenue qu'à la suite de la demande de vérification de l'installation de branchement du mois d'avril 2023.
Le 29 mai 2024, la société SER a indiqué à M. G. qu'elle s'engageait à intervenir pour vérifier la conformité du branchement dès que les travaux de l'appartement seraient terminés.
Le 29 juin 2024, M. G. a saisi le Médiateur national de l'énergie (MNE).
Le 15 juillet 2024, une lettre de la société SER a indiqué à M. G. que le déplacement du disjoncteur aurait été réalisé par l'un de ses agents qui, contacté à titre personnel par l'entreprise de travaux intervenant dans le studio sur commande de M. G., était intervenu en dehors de ses heures de travail et en l'absence de tout ordre de son employeur.
Le 7 août 2024, M. G. a fait constater par un commissaire de justice, notamment, la mise en place de simples fils électriques, au lieu d'un câble, sur sa dérivation individuelle, le diamètre des gaines et leur discontinuité ainsi que la hauteur du positionnement du nouveau disjoncteur dans son studio.
Le 12 septembre 2024, M. G. a demandé à son fournisseur le changement de son disjoncteur. Au cours d'une réunion ayant eu lieu le 23 septembre 2024, le GRD a indiqué à M. G. qu'il ne pouvait changer le disjoncteur sans remplacer, au préalable, la dérivation individuelle et l'a invité à déposer une demande de raccordement.
Le 26 septembre 2024, la société SER, ayant appris dans le cadre de la procédure devant le MNE que les travaux de mise en conformité de l'installation intérieure avaient été réalisés, a invité M. G. à se rapprocher d'elle pour prévoir une intervention dans un délai de 8 jours, et lui a indiqué qu'elle prendrait à sa charge les frais liés à son intervention sur les ouvrages du réseau public.
Le 3 octobre 2024, la société SER a adressé à M. G. une proposition de raccordement, en l'invitant à la signer en vue d'une intervention le 7 octobre 2024, ce que ce dernier n'a pas fait.
Le 15 octobre 2024, M. G. a mis en demeure la société de SER d'intervenir sous 8 jours dans son studio et de lui transmettre le rapport de constat d'anomalie relatif à son installation.
Le 22 octobre 2024, la société SER a indiqué qu'il n'existait aucun pré-rapport qu'elle pourrait lui communiquer que l'état de la gaine n'entraînait pas de mise en danger des personnes ou des biens et qu'elle était disposée à intervenir pour réaliser les travaux de raccordement.
Le 19 novembre 2024, le MNE a recommandé que le GRD produise une analyse des ouvrages de branchement de M. G., lui communique un rapport détaillé de l'intervention qui a eu lieu chez lui et réalise des travaux sur l'installation dépendant du réseau public de distribution.
Le 27 novembre 2024, la société SER a indiqué au MNE qu'elle répondait favorablement à l'ensemble de ses demandes, en attendant que M. G. convienne d'une date d'intervention des travaux.
Le 13 décembre 2024, le CoRDiS a enregistré la demande de règlement de différend de M. G., assortie d'une demande de mesures conservatoires.
Le 17 décembre 2024, la société SER a communiqué à M. G. un rapport technique de diagnostic de son installation de branchement, daté du 9 décembre 2024.
Par une décision du 18 décembre 2024, le président du CoRDiS a rejeté la demande de mesures conservatoires au motif qu'elle était entachée d'une irrecevabilité manifeste.
Le 2 janvier 2025, la société SER a indiqué à M. G. qu'elle constatait l'opposition de ce dernier à l'intervention des équipes du GRD qu'elle avait proposée de fixer au 7 janvier 2025.
Vu la procédure suivante :
Par 5 dépôts constitutifs de sa saisine, 23 courriers électroniques et 7 mémoires, enregistrés sous le numéro 21-38-24, les 5, 10, 13, 18, 19, 20, 30 et 31 décembre 2024, 3 et 23 janvier, 3, 4, 10, 13, 14, 18, 19, 20, 24, 27, 28 février et 3, 4, 6, 7, 10, 12, 17, 18 et 26 mars 2025, M. G. demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures, de :
- reconnaître la responsabilité de la société SER et ses manquements contractuels ;
- d'enjoindre à la société SER de lui transmettre le rapport d'anomalie détaillé, l'historique d'intervention et le registre d'enregistrement de leur base de données ;
- d'enjoindre à la société SER de remettre en conformité immédiate et intégrale l'installation concernée, aux frais du GRD ;
- de sanctionner la société SER pour ses manquements et son attitude dilatoire ;
- d'évaluer son préjudice et la perte de revenus locatifs ;
- d'enjoindre à la société SER de lui verser une indemnité d'un montant de 910 000 € au titre de son préjudice ;
- de confirmer la nécessité de l'expertise judiciaire prévue le 15 avril 2025 que la société SER devra prendre en charge financièrement ;
- d'envisager une transmission au parquet compétent, compte tenu des potentielles infractions pénales (falsifications, mise en danger d'autrui et entrave à la justice).
M. G. soutient que :
- la société SER a commis des manquements graves et répétés résultant de l'intervention illégale d'un de ses agents, sans mandat et contre rémunération, conduisant à l'installation non conforme du disjoncteur, ce qui met en danger la sécurité électrique de l'installation. La société SER a également falsifié des documents internes pour masquer cette intervention ;
- la société SER a cherché à minimiser ses responsabilités alors même que le MNE lui a rappelé son obligation légale d'assurer l'entretien et la maintenance du réseau public conformément aux dispositions de l'article L. 322-8 du code de l'énergie ;
- la société SER a toujours refusé de transmettre un rapport précis décrivant l'ensemble des anomalies constatées, se contentant de confirmer - après expertise judiciaire et les aveux de l'entrepreneur - une non-conformité limitée à la gaine ;
- la société SER a transmis, le 17 décembre 2024, un rapport non-signé, vague et juridiquement non-engageant dans lequel elle justifie l'utilisation de la gaine et des fils électriques en s'appuyant sur une norme datant de la construction initiale devenue obsolète, alors même que le MNE recommandait que le GRD fournisse des explications sur l'utilisation de fils électriques au lieu de câbles, en violation des normes actuelles, sur la section insuffisante de la gaine et l'absence de continuité de celle-ci et sur la hauteur non-conforme du disjoncteur. Cette carence l'a contraint à engager une procédure en référé expertise devant le tribunal judiciaire de Strasbourg ;
- la société SER s'est livrée à des pratiques déloyales et a commis un abus de position dominante ;
- la société SER doit être condamnée, au titre du principe de réparation intégrale de son préjudice, à lui verser une somme de 910 000 € couvrant les frais qu'il a engagés, le préjudice moral et psychologique, la fraude, l'entrave à la justice et les falsifications opérées par le GRD ainsi que la mise en danger prolongée et les risques encourus.
Par deux mémoires en défense et deux mémoires récapitulatifs, enregistrés les 20 janvier, 3 et 13 février et 27 mars 2025, la société SER, représentée par ses représentants légaux et ayant pour avocat Me Lépée, Cabinet AARPI ADALTYS, demande au comité de règlement des différends et des sanctions de rejeter l'ensemble des demandes de M. G.
La société SER fait valoir que :
- les demandes de M. G. en paiement de dommages et intérêts et en production de pièces sont irrecevables en ce qu'elles ne relèvent pas de la compétence du CoRDiS ;
- si elle a proposé à M. G. d'intervenir pour effectuer les travaux de raccordement à sa charge et lui a adressé une proposition à cette fin en acceptant les recommandations du MNE, elle s'est heurtée au refus de M. G.
Par une décision du 11 mars 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 mars 2025 à 12 heures.
Par des courriers en date du 18 mars 2025, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait le 31 mars 2025 à 15 heures.
Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement de différends et des sanctions, composé de M. Tuot, président, Mme Ducloz, Mme Salomon et M. Simonel, membres, qui s'est tenue le 31 mars 2025, en présence de :
- M. Rodriguez, directeur adjoint des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché ;
- M. Fournier de Saint Jean, rapporteur ;
- M. G., assisté de Me Pialat ;
- Me Lépée, représentant la société Strasbourg Electricité Réseaux.
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fournier de Saint Jean, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de M. G. et de Me Pialat, M. G. persiste dans ses moyens et conclusions ;
- les observations de Me Lépée pour la société Strasbourg Electricité Réseaux, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions,
le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, le rapporteur, le public et les agents des services se sont retirés.
Vu les autres pièces du dossier :
Vu :
- le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
- la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
- la décision du 18 décembre 2024 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie sur la demande de mesures conservatoires de M. G. à l'encontre de la société Strasbourg Electricité Réseaux relative aux conditions de raccordement d'une installation de consommation d'électricité au réseau public de distribution d'électricité ;
- la décision du 27 janvier 2025 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 21-38-24.
Sur la compétence du CoRDiS :
- Il résulte des dispositions de l'article L. 134-19 du code de l'énergie que : « Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : / 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ; […] Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 111-97, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement. / La saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties ». Aux termes de l'article L. 134-20 du même code : « La décision du comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend dans lesquelles l'accès aux réseaux, ouvrages et installations mentionnés à l'article L. 134-19 ou leur utilisation sont, le cas échéant, assurés ».
- Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 121-1 du code de l'énergie : « Matérialisant le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité, le service public de l'électricité est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique ». Aux termes du premier alinéa de l'article L. 322-9 du même code : « Chaque gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité veille, à tout instant, à l'équilibre des flux d'électricité, à l'efficacité, à la sécurité et à la sûreté du réseau qu'il exploite, compte tenu des contraintes techniques pesant sur ce dernier ». Aux termes de l'article R. 323-33 du même code : « Les ouvrages des réseaux publics d'électricité et ceux des lignes directes ainsi que toutes les installations qui en dépendent sont exploités dans des conditions garantissant leur bon fonctionnement, leurs performances et leur sécurité ». Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au gestionnaire d'un réseau de distribution d'électricité, au titre de son obligation de sécurité et de sûreté, d'identifier et d'évaluer précisément les risques que peuvent présenter toutes les installations dont il a la charge et de mettre en œuvre, dans les délais requis, tous les moyens nécessaires pour écarter ces risques, en assurant ainsi la protection des personnes et des biens.
- En l'espèce, la demande de règlement de différend dont est saisi le comité porte, notamment, sur la remise en conformité d'installations électriques qui relèvent du réseau public de distribution d'électricité géré par la société SER. Ce différend porte, dans cette mesure, sur l'utilisation de ce réseau public, au sens des dispositions de l'article L. 134-19 du code de l'énergie précédemment mentionnées. Le CoRDiS est, par suite, compétent pour connaître de la demande seulement en ce qu'elle a pour objet qu'il soit enjoint à la société SER de remettre, à ses frais, en conformité immédiate et intégrale l'installation concernée.
- En revanche, les demandes de M. G. en paiement de dommages et intérêts, tendant à voir prononcer une sanction pécuniaire à l'encontre du GRD, en communication d'un rapport d'anomalie détaillant l'historique d'intervention, lequel, selon les déclarations de M. G. lors de la séance, est destiné à éclairer l'expert judiciaire dont il a demandé, en référé, la désignation, et en transmission de la procédure au procureur de la République sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale, qui ne relèvent pas de la compétence d'attribution du comité telle qu'elle est définie à l'article L. 134-19 du code de l'énergie, doivent être déclarées irrecevables.
Sur la demande de remise en conformité de l'installation - Dans le dernier état de ses écritures, M. G. demande au CoRDiS d'enjoindre à la société SER de mettre en conformité son installation électrique, aux frais du GRD.
- Il résulte de l'instruction que, si M. G. a demandé la remise en conformité de son installation aux frais du GRD, M. G. n'a toutefois jamais donné suite aux propositions de la société SER d'effectuer, à ses frais, ces travaux.
- Au cours de la séance publique du comité, la société SER s'est, à nouveau, engagée à réaliser, à ses frais, les travaux nécessaires et a précisé qu'elle y procèderait dans un délai de dix jours à compter d'une date à fixer par le CoRDiS. Toutefois, M. G. a rejeté cette proposition au motif que cette intervention pourrait faire obstacle à ce que les preuves de la non-conformité de son installation puissent être constatées par un expert dans le cadre d'une procédure judiciaire en cours. Il a confirmé à plusieurs reprises ce refus en réponse aux interrogations du comité.
- M. G. s'opposant à la solution permettant de régler, en faisant droit à ses conclusions recevables, le différend dont il a saisi le CoRDiS, relatif à la mise en conformité de son installation électrique, la demande à cette fin qu'il a formée ne peut qu'être rejetée.
Décide :
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