Il n'a pas de valeur légale et peut contenir des erreurs.
Inélicabilité d’un candidat pour non‑respect du financement électoral
(AN, JURA [3E CIRC.])
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 26 février 2025 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 13 janvier 2025), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Hervé PRAT, candidat aux élections qui se sont déroulées les 30 juin et 7 juillet 2024, dans la 3e circonscription du département du Jura, en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2025-6543 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées par M. PRAT, enregistrées le 15 mars 2025 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
Le Conseil constitutionnel s'est fondé sur ce qui suit :
- Il ressort de l'article L. 52-4 du code électoral qu'il appartient au mandataire financier désigné par le candidat de régler les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation, payées directement par le candidat ou à son profit, font l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal. Si le règlement direct de menues dépenses par le candidat peut être admis, ce n'est qu'à la double condition que leur montant, tel qu'apprécié à la lumière de ces dispositions, c'est-à-dire prenant en compte non seulement les dépenses intervenues après la désignation du mandataire financier mais aussi celles réglées avant cette désignation et qui n'auraient pas fait l'objet d'un remboursement par le mandataire, soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées par l'article L. 52-11 du même code.
- Le compte de campagne de M. PRAT a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 13 janvier 2025 au motif que le candidat a réglé directement, après la désignation du mandataire financier, un total de 6 765 euros de dépenses, soit 42,6 % du montant des dépenses du compte et 10,2 % du plafond légal des dépenses, en méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral.
- Ces circonstances sont établies. Par suite, c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne.
- Selon l'article LO 136-1 du code électoral, en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit.
- D'une part, si M. PRAT fait valoir que les paiements directs ainsi retenus par la commission incluraient à tort une somme de 1 543,93 euros correspondant à des dépenses de campagne qu'il aurait été contraint d'engager dès le 17 juin, soit la veille de l'ouverture du compte de dépôt, il ne fait état ni ne justifie toutefois d'aucune difficulté qui aurait fait obstacle au respect des dispositions des articles L. 52-4 et L. 52-6 du code électoral.
- D'autre part, à supposer même que soient retranchées du montant des dépenses réglées directement la somme de 2 426 euros, dont le candidat allègue qu'elle aurait été la conséquence de l'existence d'un plafond de virements imposé par la banque, le montant des dépenses irrégulières s'élèverait à 4 340 euros, représentant 27,3 % du total des dépenses du compte et 6,6 % du plafond des dépenses dans la circonscription. Il ne saurait dès lors, en tout état de cause, être qualifié de faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et de négligeable au regard du plafond de dépenses.
- Compte tenu du montant des dépenses irrégulièrement engagées et du caractère substantiel de la règle ainsi méconnue, il y a lieu de prononcer, en application de l'article LO 136-1 du code électoral, l'inéligibilité de M. PRAT à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la présente décision.
Le Conseil constitutionnel décide :
1 version