JORF n°0219 du 20 septembre 2025

Décision n°2025-1163/1167 QPC du 19 septembre 2025

(ASSOCIATION UN CŒUR, UNE VOIX ET AUTRE)

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 2 juillet 2025 par le Conseil d'Etat (décision n° 502716 du 24 juin 2025), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée pour l'association Un cœur, une voix par la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2025-1163 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 188 et 189 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.
Il a également été saisi le même jour par la Cour de cassation (deuxième chambre civile, arrêt n° 837 du 26 juin 2025), dans les mêmes conditions, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée pour M. Raphaël R. par la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2025-1167 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de ces mêmes dispositions.
Au vu des textes suivants :

- la Constitution ;
- l'accord sur la Nouvelle-Calédonie, signé à Nouméa le 5 mai 1998 ;
- la loi constitutionnelle n° 2007-237 du 23 février 2007 modifiant l'article 77 de la Constitution ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 99-410 DC du 15 mars 1999 ;
- la loi organique n° 2015-987 du 5 août 2015 relative à la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté ;
- le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Au vu des pièces suivantes :

- les observations présentées pour les deux requérants par la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, enregistrées le 16 juillet 2025 ;
- les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ;
- les secondes observations présentées pour les deux requérants, par la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, enregistrées le 29 juillet 2025 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;

M. Philippe Bas ayant estimé devoir s'abstenir de siéger ;
Après avoir entendu Me Olivier Matuchansky, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour les requérants, et M. Thibault Cayssials, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 10 septembre 2025 ;
Au vu des notes en délibéré présentées pour les requérants par la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, enregistrées le 11 septembre 2025 ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
Le Conseil constitutionnel s'est fondé sur ce qui suit :

  1. Il y a lieu de joindre les deux questions prioritaires de constitutionnalité pour y statuer par une seule décision.

  2. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi, pour celle des dispositions dont la rédaction n'a pas été précisée, de l'article 189 de la loi organique du 19 mars 1999 mentionnée ci-dessus dans sa rédaction résultant de la loi organique du 5 août 2015 mentionnée ci-dessus.

  3. L'article 188 de la loi organique du 19 mars 1999 prévoit :

  4. « I. - Le congrès et les assemblées de province sont élus par un corps électoral composé des électeurs satisfaisant à l'une des conditions suivantes :
    « a) Remplir les conditions pour être inscrits sur les listes électorales de la Nouvelle-Calédonie établies en vue de la consultation du 8 novembre 1998 ;
    « b) Etre inscrits sur le tableau annexe et domiciliés depuis dix ans en Nouvelle-Calédonie à la date de l'élection au congrès et aux assemblées de province ;
    « c) Avoir atteint l'âge de la majorité après le 31 octobre 1998 et soit justifier de dix ans de domicile en Nouvelle-Calédonie en 1998, soit avoir eu un de leurs parents remplissant les conditions pour être électeur au scrutin du 8 novembre 1998, soit avoir un de leurs parents inscrit au tableau annexe et justifier d'une durée de domicile de dix ans en Nouvelle-Calédonie à la date de l'élection.
    « II. - Les périodes passées en dehors de la Nouvelle-Calédonie pour accomplir le service national, pour suivre des études ou une formation ou pour des raisons familiales, professionnelles ou médicales ne sont pas, pour les personnes qui y étaient antérieurement domiciliées, interruptives du délai pris en considération pour apprécier la condition de domicile ».

  5. L'article 189 de la même loi, dans sa rédaction résultant de la loi organique du 5 août 2015, prévoit :

  6. « I. - Les électeurs remplissant les conditions fixées à l'article 188 sont inscrits sur la liste électorale spéciale à l'élection du congrès et des assemblées de province. Cette liste est dressée à partir de la liste électorale en vigueur et du tableau annexe des électeurs non admis à participer au scrutin.
    « II. - Une commission administrative spéciale est chargée dans chaque bureau de vote de l'établissement de la liste électorale spéciale et du tableau annexe des électeurs non admis à participer au scrutin. Elle est composée :
    « 1° D'un magistrat de l'ordre judiciaire désigné par le premier président de la Cour de cassation, président ;
    « 2° Du délégué de l'administration désigné par le haut-commissaire ;
    « 3° Du maire de la commune ou de son représentant ;
    « 4° De deux électeurs de la commune, désignés par le haut-commissaire, après avis du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;
    « 5° D'une personnalité qualifiée indépendante, sans voix délibérative, dont le profil, le rôle et les modalités de désignation sont fixés par décret, pris après avis du gouvernement et du congrès de la Nouvelle-Calédonie.
    « En cas de partage des voix au sein de la commission administrative, celle du président est prépondérante.
    « Le président de la commission peut consulter un ou plusieurs représentants de la coutume désignés selon les usages reconnus, ayant leur domicile dans la commune et jouissant de leurs droits électoraux.
    « Le président de la commission est habilité à procéder ou à faire procéder, par tout officier ou agent de police judiciaire, à toutes investigations utiles.
    « III. - La commission inscrit sur la liste électorale spéciale, à leur demande, les électeurs remplissant les conditions exigées par l'article 188. Ces personnes produisent tous les éléments de nature à prouver qu'elles remplissent ces conditions.
    « Elle procède en outre à l'inscription d'office sur la liste électorale spéciale des personnes âgées de dix-huit ans à la date de clôture des listes électorales et remplissant les mêmes conditions. Elle reçoit à cette fin les informations mentionnées à l'article L. 17-1 du code électoral.
    « L'électeur qui fait l'objet d'une radiation ou d'un refus d'inscription ou dont l'inscription est contestée est averti sans frais et peut présenter ses observations.
    « IV. - La liste électorale spéciale et le tableau annexe sont permanents.
    « Ils font l'objet d'une révision annuelle.
    « L'élection se fait sur la liste révisée pendant toute l'année qui suit la clôture de la liste.
    « Lors de la révision de la liste électorale spéciale précédant la tenue d'élections au congrès et aux assemblées de province organisées à leur terme normal au mois de mai, les dispositions de l'article L. 11-1 du code électoral sont applicables aux personnes qui remplissent la condition d'âge entre la clôture définitive de la liste électorale spéciale et la date du scrutin.
    « Au cas où les élections au congrès et aux assemblées de province sont organisées postérieurement au mois de mai, sont inscrites d'office sur la liste électorale de leur domicile réel les personnes qui remplissent la condition d'âge entre la dernière clôture définitive des listes et la date du scrutin, sous réserve qu'elles répondent aux autres conditions prescrites par la loi.
    « Quand il a été fait application des dispositions de l'alinéa précédent, la liste électorale complétée en conséquence entre en vigueur à la date de l'élection.
    « Peuvent être inscrites sur la liste électorale spéciale en dehors des périodes de révision, outre les personnes mentionnées à l'article L. 30 du code électoral, celles qui remplissent en cours d'année les conditions prévues aux b et c du I de l'article 188. Les demandes d'inscription déposées en application du présent alinéa sont, accompagnées des justifications nécessaires, déposées à la mairie ; elles sont transmises à la commission prévue au II qui statue, sauf recours au tribunal de première instance.
    « Les rectifications à la liste électorale spéciale prévues au présent article sont effectuées sans délai, nonobstant la clôture de la période de révision par la commission prévue au II. Elles pourront être contestées devant le tribunal de première instance qui statue conformément aux dispositions de l'article L. 25 du code électoral.
    « V. - La liste électorale spéciale et le tableau annexe sont mis à jour au plus tard le 30 avril de chaque année et, en cas de dissolution ou d'élection partielles, au plus tard dix jours avant la date du scrutin.
    « VI. - Les dispositions du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code électoral, à l'exception des articles L. 11 à L. 16, des deuxième à dernier alinéas de l'article L. 17, et des articles L. 17-1, L. 23, L. 37 et L. 40 sont applicables pour l'établissement de la liste électorale spéciale prévue au I.
    « Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de lire :
    « 1° “Haut-commissaire” au lieu de : “préfet” ;
    « 2° “Chef de subdivision administrative” au lieu de : “sous-préfet” ;
    « 3° “Tribunal de première instance” au lieu de : “tribunal d'instance”.
    « VII. - L'Institut territorial de la statistique et des études économiques tient un fichier général des électeurs inscrits sur les listes électorales de la Nouvelle-Calédonie pour l'élection du Président de la République, des députés à l'Assemblée nationale, des conseils municipaux et du Parlement européen et pour les référendums ; ce fichier comporte également les électeurs inscrits sur la liste électorale spéciale à l'élection du congrès et des assemblées de province.
    « Pour l'exercice de ces attributions, l'Institut territorial de la statistique et des études économiques agit pour le compte de l'Etat et est placé sous l'autorité du haut-commissaire de la République.
    « Une convention entre l'Etat et la Nouvelle-Calédonie fixe les modalités d'application du présent article, dans les conditions prévues par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ».

  7. Les requérants reprochent à ces dispositions de subordonner la participation de certains électeurs au corps électoral appelé à élire les membres du congrès et des assemblées de province à la condition qu'ils aient été inscrits en 1998 au « tableau annexe » auxquelles elles se réfèrent. Selon eux, par un tel gel de ce corps électoral, elles en excluraient des électeurs pour des motifs étrangers à leur âge, la jouissance de leurs droits civiques, leur capacité ou leur dignité, en méconnaissance des principes d'égalité devant le suffrage et d'universalité du suffrage. Ils font valoir à cet égard que la dérogation à ces exigences constitutionnelles résultant du dernier alinéa de l'article 77 de la Constitution serait devenue caduque en raison de l'achèvement du processus initié par l'accord de Nouméa.

  8. Par ailleurs, les requérants soutiennent que ces dispositions priveraient de leur droit de vote des personnes pourtant assujetties à des impositions instituées par le congrès ou les assemblées de province de Nouvelle-Calédonie. Il en résulterait une méconnaissance du « droit de représentation » qu'ils demandent au Conseil constitutionnel de reconnaître sur le fondement de l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

  9. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le b du paragraphe I de l'article 188 de la loi organique du 19 mars 1999.

- Sur la recevabilité :

  1. Selon les dispositions combinées du troisième alinéa de l'article 23-2 et du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu'il a déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une de ses décisions, sauf changement des circonstances.
  2. Dans sa décision du 15 mars 1999 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné les dispositions contestées de l'article 188 de la loi organique du 19 mars 1999 et les a déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision.
  3. Toutefois, depuis cette déclaration de conformité, la loi constitutionnelle du 23 février 2007 mentionnée ci-dessus a complété l'article 77 de la Constitution par un alinéa portant sur la définition du corps électoral restreint appelé à élire les membres des assemblées délibérantes de la Nouvelle-Calédonie et des provinces.
  4. En outre, en raison des évolutions démographiques de la Nouvelle-Calédonie, la proportion des électeurs remplissant les conditions pour être inscrits sur les listes électorales qui sont privés de droit de vote pour l'élection au congrès et aux assemblées de province s'est significativement accrue.
  5. Il en résulte un changement des circonstances de droit et de fait justifiant le réexamen de ces dispositions.

- Sur les normes de référence :

  1. Aux termes du Préambule de la Constitution de 1958 : « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946. / En vertu de ces principes et de celui de la libre détermination des peuples, la République offre aux territoires d'outre-mer qui manifestent la volonté d'y adhérer des institutions nouvelles fondées sur l'idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité et conçues en vue de leur évolution démocratique ». La mise en œuvre des principes de libre détermination des peuples et de libre manifestation de leur volonté, spécifiquement prévus par ces dispositions pour les territoires d'outre-mer, doit permettre, dans le cadre de la Constitution, aux populations intéressées, consultées par les autorités compétentes de la République, de manifester leur volonté.
  2. Selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret ». L'article 6 de la Déclaration de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ».
  3. Toutefois, rien ne s'oppose, sous réserve des prescriptions des articles 7, 16 et 89 de la Constitution, à ce que le pouvoir constituant introduise dans le texte de la Constitution des dispositions nouvelles qui, dans les cas qu'elles visent, dérogent à des règles ou principes de valeur constitutionnelle.
  4. Tel est le cas du premier alinéa de l'article 77 de la Constitution, dont il résulte que le contrôle du Conseil constitutionnel sur la loi organique prise en application de ces dispositions doit s'exercer non seulement au regard de la Constitution, mais également au regard des orientations définies par l'accord sur la Nouvelle-Calédonie signé à Nouméa le 5 mai 1998, lequel déroge à un certain nombre de règles ou principes de valeur constitutionnelle.
  5. Tel est également le cas des dispositions du dernier alinéa de l'article 77 de la Constitution, issues de la loi constitutionnelle du 23 février 2007, qui prévoient que, pour la définition du corps électoral appelé à élire les membres des assemblées délibérantes de la Nouvelle-Calédonie et des provinces, le tableau auquel se réfèrent l'accord de Nouméa et les articles 188 et 189 de la loi organique du 19 mars 1999 est le tableau dressé à l'occasion du scrutin par lequel les populations de la Nouvelle-Calédonie se sont prononcées sur les dispositions de cet accord et comprenant les personnes non admises à y participer.

- Sur la constitutionnalité des dispositions contestées :

  1. L'accord de Nouméa, qui constitue une « solution négociée, de nature consensuelle », arrêtée par ses signataires, a pour objet de définir « l'organisation politique de la Nouvelle-Calédonie et les modalités de son émancipation ». Il stipule que « Sa mise en œuvre suppose une loi constitutionnelle » et que « Le corps électoral pour les élections aux assemblées locales propres à la Nouvelle-Calédonie sera restreint aux personnes établies depuis une certaine durée ». Le point 5 de cet accord prévoit que cette organisation politique, mise en place pour vingt années, est suivie d'un cycle de trois consultations des populations intéressées sur l'accession à la pleine souveraineté, dont l'organisation est provoquée par un vote des membres du congrès.
  2. Dans cette perspective, son point 2.2.1 fixe non seulement la composition du corps électoral pour les consultations relatives à l'organisation politique de la Nouvelle-Calédonie mais également celle du corps électoral appelé à élire les membres des assemblées de province et du congrès. Selon ces stipulations, le corps électoral appelé à élire les membres des assemblées des provinces et du congrès est réservé aux électeurs qui remplissaient les conditions pour voter au scrutin de 1998, à ceux qui, inscrits au tableau annexe, remplissent une condition de domicile de dix ans à la date de l'élection, ainsi qu'aux électeurs atteignant l'âge de la majorité pour la première fois après 1998 et qui, soit justifient de dix ans de domicile en 1998, soit ont eu un parent remplissant les conditions pour être électeur au scrutin de la fin de 1998, soit, ayant eu un parent inscrit sur un tableau annexe, justifient d'une durée de domicile de dix ans en Nouvelle-Calédonie à la date de l'élection.
  3. L'article 188 de la loi organique du 19 mars 1999 définit, en reprenant les stipulations de l'accord, la composition du corps électoral pour ces élections et fixe ainsi les conditions que doivent satisfaire les électeurs pour pouvoir y participer.
  4. Selon les dispositions contestées, font partie de ce corps électoral restreint les électeurs inscrits au tableau annexe mentionné au paragraphe I de l'article 189 et domiciliés depuis dix ans en Nouvelle-Calédonie à la date de l'élection au congrès et aux assemblées de province.
  5. En application du dernier alinéa de l'article 77 de la Constitution, par lequel le pouvoir constituant a entendu préciser la portée de ces dispositions et qui fixe l'une des dispositions transitoires du Titre XIII de la Constitution afférentes au processus d'émancipation prévu par l'accord de Nouméa, la condition qu'elles prévoient est remplie par les seules personnes ayant établi leur domicile en Nouvelle-Calédonie avant le 8 novembre 1998 et pouvant justifier d'une résidence d'une durée de dix ans en 2008 au plus tard.
  6. Si les dispositions contestées aboutissent à figer, dans ce cadre transitoire, la composition du corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province, sans prendre en compte les évolutions démographiques de la Nouvelle-Calédonie, le gel du corps électoral qui en résulte procède d'une dérogation aux principes d'égalité et d'universalité du suffrage introduite dans le texte de la Constitution par le pouvoir constituant lui-même et à l'application de laquelle il n'a pas fixé de terme.
  7. Dès lors, sans préjudice des modifications qui pourront être apportées aux dispositions transitoires définissant ce corps électoral, dans le cadre du processus d'élaboration de la nouvelle organisation politique prévue au point 5 de l'accord de Nouméa, pour tenir compte des évolutions de la situation démographique de la Nouvelle-Calédonie et atténuer ainsi l'ampleur qu'auront prises avec l'écoulement du temps les dérogations aux principes d'universalité et d'égalité du suffrage, les griefs tirés de la méconnaissance de ces exigences constitutionnelles ne peuvent qu'être écartés.
  8. Il résulte de ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel décide :

Article 1

Le b du paragraphe I de l'article 188 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie est conforme à la Constitution.

Article 2

Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 septembre 2025, où siégeaient : M. Richard FERRAND, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mme Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, François SÉNERS et Mme Laurence VICHNIEVSKY.
Rendu public le 19 septembre 2025.