JORF n°0181 du 6 août 2013

Décision n°2013-555 du 23 juillet 2013

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel,

Vu le code de la propriété intellectuelle, notamment ses articles L. 122-2 et L. 216-1 ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, notamment ses articles 1er, 3-1, 17-1, 34 et 34-2 ;

Vu le décret n° 2006-1084 du 29 août 2006 pris pour l'application de l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 et relatif à la procédure de règlement des différends par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

Vu le règlement intérieur du Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

Vu la demande de règlement d'un différend, enregistrée le 5 décembre 2012, présentée par la société Playmédia, dont le siège social est 41, boulevard de Magenta, à Paris (75010) ;

Le différend porte sur le refus de contracter que lui oppose la société nationale de programme France Télévisions s'agissant des conditions dans lesquelles s'effectue la reprise, sur le site internet « playtv.fr » qu'elle exploite, des services de télévision « France 2 », « France 3 », « France 4 », « France 5 » et « France Ô » ;

La société Playmédia demande au conseil, d'une part, de constater que ce refus est contraire aux dispositions de l'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986, en tant qu'il est abusif, discriminatoire et non incompatible avec les missions de service public incombant à France Télévisions, et, d'autre part, d'enjoindre la société France Télévisions, sur le fondement des articles 3-1 et 17-1 de la même loi, de signer avec elle un contrat autorisant la diffusion sur son site internet « playtv.fr » des services publics de télévision précités ;

Elle soutient que, distributeur de services au sens de la loi du 30 septembre 1986, elle met à disposition du public une offre de services de communication audiovisuelle par un réseau n'utilisant pas de fréquence assignée par le conseil et qu'elle s'est déclarée à ce titre auprès de l'autorité de régulation sur le fondement de l'article 34 de cette loi ; qu'elle est, de ce fait, soumise aux dispositions de l'article 34-2 du même texte, qui lui font obligation de diffuser certains services publics de télévision, notamment ceux édités par la société France Télévisions ; que cette dernière refuse toutefois d'engager avec elle des relations contractuelles permettant la mise en œuvre de cette obligation, au motif qu'elle ne disposerait pas des droits de diffusion sur internet de certains de ses programmes alors, pourtant, qu'elle procède elle-même à la diffusion sur ce réseau de la totalité de sa programmation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2013, présenté pour la société France Télévisions dont le siège social est 7, esplanade Henri-de-France, à Paris (75015), par Me Pascal Kamina, tendant au rejet de la demande et, à titre reconventionnel, à ce qu'il soit enjoint à la société Playmédia de retirer immédiatement de son offre « playtv.fr » les services de télévision « France 2 », « France 3 », « France 4 », « France 5 » et « France Ô » ;

La société France Télévisions soutient qu'une procédure judiciaire en cours porte sur son refus de contracter avec la société requérante, sur la question de la contrefaçon de ses droits ainsi que sur l'applicabilité en l'espèce des règles entourant l'obligation de diffusion ; qu'en l'absence de toute relation contractuelle entre les sociétés Playmédia et France Télévisions, le conseil ne dispose pas, sur le fondement, de l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986, du pouvoir de prononcer l'injonction demandée par la société Playmédia ; qu'en outre, le conseil ne saurait, sur le même fondement, faire injonction à France Télévisions de violer les droits des tiers qui ont expressément refusé la reprise de leurs programmes sur les plates-formes du type de celle opérée par la société Playmédia alors que les droits d'auteur et droits voisins sont constitutionnellement protégés et que le respect de la propriété d'autrui est mentionné à l'article 1er de la même loi ; que les contrats qu'elle a passés avec des ayants droit étrangers limitent toute possibilité de reprise de leurs programmes sur internet aux seuls sites édités par la société nationale de programme ; qu'il en résulte que toute retransmission non autorisée de ces programmes sur les plates-formes internet non expressément autorisées sont constitutives de contrefaçon ; qu'aucune exception aux droits de propriété ne peut, à cet égard, être invoquée ; que, subsidiairement, les règles organisant l'obligation de diffusion ne sont pas applicables en l'espèce puisque leur mise en œuvre implique dans tous les cas la conclusion d'un contrat avec les éditeurs des chaînes concernées et demeure conditionnée, conformément aux principes de proportionnalité et d'intérêt général posés par la directive n° 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 et notamment son article 31, à l'existence d'un abonnement, ce dont ne justifie pas la société Playmédia s'agissant de son offre « playtv.fr » ; que, de plus, conformément au cahier des charges de la société France Télévisions annexé au décret n° 2009-796 du 23 juin 2009, le service doit être repris de manière intégrale et simultanée, ce que la société nationale de programme ne peut autoriser sur la plate-forme exploitée par la société Playmédia sous peine de contrefaçon et d'inexécution des contrats de licence portant sur les œuvres pour lesquelles ce mode de diffusion est exclu ; qu'enfin les règles de l'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986 ne s'appliquent pas si l'éditeur estime que l'offre est manifestement incompatible avec le respect de ses missions de service public, ce qui serait le cas d'une reprise de ses services avec occultation de certains programmes ; qu'en outre, la structure de l'offre proposée par la société Playmédia porte directement et manifestement atteinte aux missions de service public de la société nationale de programme dont elle détourne des recettes publicitaires ; que, par ailleurs, les conditions de présentation de l'offre « playtv.fr », et notamment la place laissée à la publicité et la forme prise par celle-ci, l'utilisation non autorisée des marques de la société France Télévisions et les liens profonds non autorisés vers ses services de rattrapage, qui constituent d'ailleurs une pratique illicite, sont autant d'atteintes à l'image du service public ; qu'enfin, l'article 69 de son cahier des charges interdit à la société France Télévisions de conclure des conventions qui ne sont pas utiles à l'accomplissement de ses missions ;

Vu les observations en réplique enregistrées le 17 janvier 2013, présentées pour la société Playmédia par Me Olivier Bernheim et tendant aux mêmes fins que sa demande par les mêmes moyens ; la société Playmédia demande en outre au conseil de rejeter la demande reconventionnelle présentée par la société France Télévisions ;

Elle fait également valoir que si l'utilisation des transmissions par voie hertzienne est soumise à une réglementation stricte, la transmission par voie électronique est quant à elle libre, le législateur ayant imposé que les chaînes du service public soient accessibles gratuitement sur les services de tous les distributeurs ; que cette obligation de diffusion, qui pèse sur les distributeurs, oblige également les éditeurs concernés à accepter cette diffusion ; que, par suite, et alors que l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit que la société France Télévisions doit tenir compte du développement des technologies numériques pour assurer l'accès de tous les publics à ses programmes, l'article 34-2 de ce texte s'impose à tous les distributeurs, nonobstant la notion d'abonnés qu'il mentionne, laquelle doit s'entendre comme visant l'usager, l'utilisateur ou l'abonné gratuit, indirect du distributeur lorsque celui-ci propose son offre sans abonnement ou boîte de raccordement ; que, par ailleurs, si la société France Télévisions prétend qu'elle ne dispose pas des droits autorisant la reprise sur internet de l'ensemble de ses programmes, elle l'autorise cependant à plusieurs distributeurs et procède elle-même à une telle reprise sur son site internet intitulé « pluzz.francetv.fr », en contradiction avec certains des contrats qu'elle a conclus ; que cette contradiction atteste de la compatibilité avec les droits de propriété intellectuelle de la reprise des services qu'elle édite sur le site « playtv.fr » au titre de l'article 34-2 de la loi ; que le régime de l'obligation de diffusion, gratuit pour l'usager comme pour l'éditeur, n'interdit pas que le distributeur, qui doit financer les coûts de reprise et de diffusion, perçoive une rémunération par un abonnement ou par la publicité dès lors qu'il n'est pas porté atteinte au flux transmis ; qu'en l'espèce, le lancement d'une séquence publicitaire préalable au flux de l'éditeur ne modifie par le contenu, ni même les écrans publicitaires et annonces de parrainage de la société France Télévisions ; qu'enfin, l'argument tiré du droit de la propriété intellectuelle n'est pas opérant dès lors, d'une part, que la loi du 30 septembre 1986 est une loi spéciale qui déroge aux règles d'ordre général, éventuellement contraires, issues du code de la propriété intellectuelle et que, d'autre part, la reprise intégrale, permanente et directe par un distributeur à l'intention des internautes, que ce soit par l'intermédiaire d'un boitier payant ou en accès gratuit, de programmes de l'audiovisuel public diffusés gratuitement n'est pas visée par l'article L. 216-1 de ce code mais constitue une hypothèse de consultation privée gratuite ;

Vu les nouvelles observations en défense présentées pour la société France Télévisions enregistrées le 24 janvier 2013 et tendant aux mêmes fins que les précédentes par les mêmes moyens ; la société France Télévisions demande en outre, à titre reconventionnel, que le conseil dise que la réglementation audiovisuelle et les principes fondamentaux du droit de la communication audiovisuelle, tels qu'ils sont notamment mentionnés à l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986, font de la conclusion d'un contrat un préalable à toute diffusion des services de télévision qu'elle édite ;

Vu la pièce complémentaire, enregistrée le 31 janvier 2013, présentée par la société France Télévisions ;

Vu la décision du directeur général du conseil du 11 décembre 2012 nommant M. Boidé en qualité de rapporteur et M. François-Xavier Bergot en qualité de rapporteur adjoint pour l'instruction du présent règlement de différend ;

Vu la décision du 18 décembre 2012 du conseil supérieur de l'audiovisuel arrêtant un calendrier prévisionnel de procédure ;

Vu la décision n° 2013-1 du 8 janvier 2013 du Conseil supérieur de l'audiovisuel portant extension du délai prévu à l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 ;

Vu la décision du 19 février 2013 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a estimé que les faits à l'origine du différend étaient susceptibles de restreindre l'offre de services de communications électroniques et a, en conséquence, décidé de saisir l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes sur le fondement des dispositions de l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 ;

Vu la décision du 19 février 2013 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a décidé d'adresser un questionnaire aux parties ;

Vu la décision du 19 février 2013 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a désigné, d'une part, les sociétés éditrices des services « La Chaîne Parlementaire-Assemblée nationale », « Public Sénat », « Arte » et « TV5 Monde » et, d'autre part, les sociétés Zattoo Europe Ltd, Orange, Bouygues Telecom, SFR et Canal+ Distribution, déclarées en qualité de distributeurs de services sur le fondement de l'article 34 de la loi du 30 septembre 1986, tiers intéressés à la procédure et a décidé en conséquence de les inviter à présenter leurs observations sur celle-ci en leur adressant un questionnaire ;

Vu l'avis n° 2013-0422 de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes du 26 mars 2013 ;

Vu les réponses aux questionnaires adressées au conseil par les sociétés France Télévisions et Playmédia et enregistrées le 20 mars 2013 ;

Vu les observations présentées par les sociétés des services « La Chaîne Parlementaire-Assemblée nationale », « Public Sénat », « Arte » et « TV5 Monde » et par les sociétés Orange, SFR et Canal+ Distribution, enregistrées les 11, 12, 21 mars et 4 avril 2013 ;

Vu les observations, enregistrées le 5 avril 2013, présentées par les sociétés Playmédia et France Télévisions en réponse aux observations des tiers intéressés à la procédure et faisant suite à leurs réponses respectives au questionnaire du conseil ;

Vu les observations, enregistrées le 12 avril 2013, présentées par les sociétés Playmédia et France Télévisions en réponse à leurs dernières écritures respectives ainsi qu'aux observations de la société SFR ;

Vu les pièces établissant que les parties ont été régulièrement convoquées à une séance d'examen du différend soumis au conseil fixée au 24 juin 2013 ;

Vu les écritures complémentaires, enregistrées le 5 et le 23 juillet 2013, présentées par la société Playmédia ;

Etant indiqué que, par courriels des 29 mai et 7 juin 2013, les sociétés Playmédia et France Télévisions ont indiqué qu'elles ne s'opposaient pas à ce que la séance soit publique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu le 24 juin 2013, lors la séance publique d'examen du différend :

― le rapport de M. Mathieu Boidé présentant les moyens et conclusions des parties ;

― les observations de Me Bernheim et de MM. Galloula et Cappart pour la société Playmédia ;

― les observations de Me Kamina, Mme Courbarien et M. Deloeuvre pour la société France Télévisions ;

Après en avoir délibéré le 23 juillet 2013 hors la présence des rapporteurs ;

1. Considérant que, le 2 novembre 2009, la société Playmédia s'est déclarée auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel en qualité de distributeur de services de télévision sur un réseau n'utilisant pas de fréquence assignée par lui, en application des dispositions de l'article 34 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; qu'elle s'est, par ailleurs, déclarée le 6 octobre 2010 auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en qualité d'opérateur de communications électroniques exploitant un réseau de communications électroniques ouvert au public ; qu'elle exploite sur internet un site intitulé « playtv.fr », par lequel elle propose aux internautes une offre leur permettant notamment d'accéder gratuitement et en libre accès à une diffusion en flux continu, en direct, de plusieurs dizaines de services de télévision, dont les services « France 2 », « France 3 », « France 4 », « France 5 » et « France Ô » édités par la société nationale de programme France Télévisions ; que la société Playmédia demande au conseil de constater que le refus de contracter que lui oppose la société France Télévisions relativement à cette offre méconnaît les dispositions de l'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986 et constitue une pratique discriminatoire à son égard et, par suite, d'enjoindre à la société France Télévisions de contracter avec elle en application de ces dispositions ;

Sur la recevabilité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 2-1 de la loi du 30 septembre 1986 : « Pour l'application de la présente loi, les mots : distributeur de services désignent toute personne qui établit avec des éditeurs de services des relations contractuelles en vue de constituer une offre de services de communication audiovisuelle mise à disposition auprès du public par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques. [...] » ; qu'aux termes de l'article 17-1 du même texte : « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut être saisi par un éditeur ou par un distributeur de services [...] de tout différend relatif à la distribution d'un service de radio ou de télévision [...] lorsque ce différend porte sur le caractère objectif, équitable et non discriminatoire des conditions de la mise à disposition du public de l'offre de programmes ou des relations contractuelles entre un éditeur et un distributeur de services. [...] » ; que le I de l'article 34 de cette loi dispose que : « Tout distributeur de services qui met à disposition du public, par un réseau n'utilisant pas des fréquences assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, une offre de services de communication audiovisuelle comportant des services de radio ou de télévision, dépose une déclaration préalable auprès du conseil. [...] » ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au conseil que la société Playmédia justifie de la qualité de distributeur de services au sens des dispositions de l'article 2-1 précité de la loi du 30 septembre 1986 ; qu'elle propose son offre « playtv.fr », qu'elle a déclarée au conseil en application de l'article 34 de cette même loi, sur un réseau n'utilisant pas de fréquences assignées par le conseil ; qu'elle met en cause la société France Télévisions, société nationale de programme éditrice de services de télévision visée à l'article 44 de la même loi, dont elle soutient que le refus de contracter relativement à la mise à disposition du public, sur internet, de son offre de programmes serait illégal et discriminatoire ; que, par suite, sa demande, qui répond aux conditions fixées par l'article 17-1 précité, est recevable ;

Sur le fond :

En ce qui concerne la demande de la société Playmédia :

4. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée : « Le Conseil supérieur de l'audiovisuel [...] veille à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services[...] » ; qu'aux termes de l'article 34-2 de la même loi : « I. Sur le territoire métropolitain, tout distributeur de services sur un réseau n'utilisant pas de fréquences terrestres assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel met gratuitement à disposition de ses abonnés les services des sociétés mentionnées au I de l'article 44 et la chaîne Arte, diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique ainsi que la chaîne TV 5, et le service de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique ayant pour objet de concourir à la connaissance de l'outre-mer, spécifiquement destiné au public métropolitain, édité par la société mentionnée au I de l'article 44, sauf si ces éditeurs estiment que l'offre de services est manifestement incompatible avec le respect de leurs missions de service public. [...] » ;

5. Considérant que les dispositions du I de l'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986, dans leur rédaction en vigueur issue de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, subordonnent l'obligation de mise à disposition des services de télévision à la condition déterminante d'un abonnement, qu'il soit ou non à titre onéreux ; que si la société Playmédia soutient que le refus de la société France Télévisions d'entrer en relations contractuelles avec elle afin d'organiser les conditions de la reprise, sur son site internet « playtv.fr », des services nationaux de télévision édités par la société nationale de programme serait contraire aux dispositions précitées du I de l'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986, ensemble celles des articles 3-1 et 17-1 de la même loi en tant que ce refus serait discriminatoire, il résulte de l'instruction que l'offre que la société Playmédia met à disposition du public sur le réseau ouvert d'internet est gratuite et libre d'accès, puisqu'elle ne nécessite pas, de la part de ses usagers, la souscription d'un quelconque engagement de nature contractuelle ; que cette offre ne peut donc être regardée comme bénéficiant à des abonnés au sens des dispositions du I de l'article 34-2 précité ; que, par suite, la société Playmédia n'est fondée à soutenir ni qu'elle serait tenue d'assurer la diffusion des programmes de la société France Télévisions ni, par voie de conséquence, que le refus de celle-ci de contracter avec elle sur le fondement des mêmes dispositions serait illégal ou discriminatoire à son égard ; que, d'ailleurs, le conseil relève que les autres distributeurs auxquels la société Playmédia compare sa situation proposent leurs offres de diffusion à des abonnés ;

6. Considérant que si, pour répondre à l'objection tirée du défaut d'abonnés au sens des dispositions précitées du I de l'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986, la société Playmédia fait valoir que la distribution des services qu'elle offre sur son site « playtv.fr » bénéficie à un nombre significatif d'utilisateurs finals, au sens de l'article 31 de la directive n° 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et des services de communications électroniques, cette argumentation n'est pas de nature à faire échec aux dispositions précitées de l'article 34-2 comme indiqué ci-dessus ; qu'elle ne peut, par ailleurs, utilement invoquer l'intérêt que représenterait son offre « playtv.fr » pour le public et le pluralisme des courants de pensée et d'opinion ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de la société Playmédia ne peut qu'être rejetée, ensemble sa demande accessoire d'injonction ;

8. Considérant qu'en vertu de l'article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 : « [...] La décision du conseil précise les conditions permettant d'assurer le respect des obligations et des principes mentionnés au premier alinéa. [...] » ; que le conseil considère qu'il importe que, avant la fin de l'année 2013, la société Playmédia mette fin à la reprise qu'elle propose des services édités par la société France Télévisions ; que le délai ainsi imparti, au regard des enjeux du différend, doit lui permettre d'assurer la mise en conformité de ses activités et de rendre également possible, le cas échéant, une modification des règles applicables susceptibles de conduire à un élargissement des conditions de reprise incluant, le cas échéant, une contribution compensatoire au bénéfice tiré de la diffusion de tels services télévisuels ;

En ce qui concerne les conclusions reconventionnelles de la société France Télévisions :

9. Considérant que, si la société France Télévisions demande au conseil qu'il soit enjoint à la société Playmédia de cesser la diffusion des services qu'elle édite, il ressort de ce qui précède qu'en application de la présente décision, la société Playmédia est tenue de mettre fin à ses activités dans le délai que cette décision a fixé ; que, dans ces conditions, il n'y pas lieu d'accueillir de telles conclusions ;

10. Considérant que, par ailleurs, les conclusions tendant à l'affirmation d'une règle de principe relative à l'obligation de rapports contractuels, présentées au même titre par la société France Télévisions, ne relèvent pas du règlement du présent litige ; qu'elles ne peuvent, dès lors, non plus être accueillies,

Décide :

Article 1

La demande de la société Playmédia est rejetée.

Article 2

Les conclusions reconventionnelles de la société France Télévisions sont rejetées

Article 3

La présente décision sera notifiée à la société Playmédia et à la société France Télévisions et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré le 23 juillet 2013 par M. Olivier Schrameck, président, Mme Christine Kelly, M. Emmanuel Gabla, Mme Francine Mariani-Ducray, M. Nicolas About, M. Patrice Gélinet, Mme Mémona Hintermann-Afféjee et Mme Sylvie Pierre-Brossolette.

Fait à Paris, le 23 juillet 2013.

Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel :

Le président,

O. Schrameck