JORF n°0178 du 3 août 2011

Décision n° 2011-016 du 8 juillet 2011

L'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ci-après « l'Autorité »),

Vu le code des transports, notamment son article L. 2134-2 ;

Vu le règlement intérieur du collège de l'Autorité ;

Vu la demande de règlement d'un différend, enregistrée le 19 avril 2011, présentée par la société Novatrans, société anonyme au capital social de 36 000 000 euros, dont le siège social est situé 15-17, allée de l'Europe, 92110 Clichy, inscrite au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 662 047 372, représentée par Mes Antoine Choffel et Laurent Deruy, du cabinet Gide Loyrette Nouel ;

Dans cette saisine, Novatrans demande à l'Autorité :

Au fond,

― de constater :

― que l'instruction du sillon n° 60438/39 demandé par la société Combiwest entre Vénissieux et Rennes s'est déroulée en violation des dispositions du chapitre 4 du Document de référence du réseau de l'horaire de service 2011 (ci-après « DRR ») et que ce sillon est donc irrégulier ;

― que Réseau ferré de France (ci-après « RFF ») a violé les règles d'impartialité et de non-discrimination qui pèsent sur lui dans le cadre du processus de répartition des capacités d'infrastructures ferroviaires en cherchant à favoriser la position de Combiwest au détriment de celle de Novatrans ;

― que Combiwest a violé les obligations de libre accès et de non-discrimination qui pèsent sur elle en sa qualité de gestionnaire du terminal de Rennes en refusant le 29 novembre 2010 d'y donner accès à Novatrans pour un motif inexact ;

― sur ces constats, d'enjoindre à RFF d'annuler le sillon n° 60438/39 et de rétablir le sillon initialement octroyé à Combiwest prévoyant un horaire d'arrivée à Rennes à 9 h 44 ;

A l'appui de sa demande de règlement de différend, Novatrans indique qu'à l'issue de la phase initiale d'attribution de sillons par RFF elle disposait d'un sillon sur la liaison Vénissieux―Rennes arrivant à 8 h 37 et Combiwest d'un sillon arrivant à 9 h 44.

Elle fait valoir que Combiwest a bénéficié de la part de RFF d'un traitement privilégié à l'occasion de sa demande de modification de son sillon. Les procédures prévues par le DRR n'auraient pas été suivies et Combiwest a obtenu un sillon arrivant à Rennes à 6 h 34.

Elle précise que Combiwest lui a opposé un motif inexact de refus d'accès au terminal de Rennes, avec la complicité de RFF. Elle indique également qu'un accès au terminal lui a finalement été octroyé par RFF sur les voies 12 et 13.

Novatrans indique qu'elle a subi un préjudice du fait du retard pris pour la commercialisation et le début d'exploitation de son train de transport combiné entre Vénissieux et Rennes causé par le refus d'accès au terminal de Rennes et de « l'avantage concurrentiel » dont Combiwest bénéficie grâce à l'amélioration de l'horaire d'arrivée à Rennes.

Vu les observations, enregistrées le 13 mai 2011, présentées par RFF, établissement public national à caractère industriel et commercial, immatriculé au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro B 412 280 737, dont le siège est 92, avenue de France, 75648 Paris Cedex 13, représenté par Mes Anne Cousin et Richard Milchior, de la SCP Granrut Avocats ;

RFF demande à l'Autorité de rejeter toutes les demandes de Novatrans.

Sur les conditions de modification du sillon de Combiwest :
RFF précise que Combiwest a indiqué à RFF dès le 30 juillet 2010 qu'elle n'était pas satisfaite de la proposition qui lui a été faite à la suite de sa demande de sillons.
RFF fait valoir que, avant la saisine de l'Autorité, Novatrans n'a pas formellement demandé à RFF une modification de son sillon alors qu'elle savait depuis le 5 novembre 2010 que Combiwest avait fait une demande de modification de sillon pour la liaison Vénissieux―Rennes et depuis quatre mois que son concurrent avait un sillon qu'elle estimait plus favorable. RFF précise qu'il « a répondu favorablement » à la demande de modification de Novatrans.
Selon RFF, « Novatrans ne peut donc prétendre saisir l'ARAF sans avoir au préalable épuisé les procédures de demandes auprès de RFF ni maintenant que RFF a satisfait à sa demande » et l'Autorité « n'est donc pas saisie d'un différend ».
De même, RFF fait valoir qu'il n'a pas étudié la demande de Novatrans en tenant compte de la demande de Combiwest mais qu'il a étudié les deux demandes séparément.
RFF précise qu'il n'est pas évident que Combiwest ait formé une « vraie réclamation », entre le 9 et 20 août 2010, période ouverte pour effectuer des réclamations, même si la forme de ces dernières n'est pas arrêtée. En effet, RFF n'était pas destinataire du courriel du 10 août 2010 adressé par Combiwest à Eurocargorail, même s'il l'a reçu en copie. De plus, ce courriel ne faisait pas état de demandes étayées. Ainsi, RFF n'y a pas répondu et ne l'a pas transmis à d'autres demandeurs.
RFF considère que, par ailleurs, il n'était pas tenu de transmettre le courriel aux autres demandeurs dès lors que selon lui l'obligation de communication de la réclamation prévue à l'article 4.4.2 du DRR « ne paraît justifiée que dans l'hypothèse où la demande de modification du sillon impacterait le ou les sillon(s) attribué(s) à un ou plusieurs autre (s) demandeur(s) », même si les termes de l'article sont « peu précis ». En l'espèce, la demande de Combiwest n'impacterait pas le sillon obtenu sur cette même liaison par Novatrans.
RFF souligne en outre qu'une transmission de toutes les demandes de tous les demandeurs contreviendrait aux dispositions de l'article 21 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 en tant que ce texte impose à RFF de respecter la confidentialité des informations à caractère commercial qui lui sont communiquées par les demandeurs de sillons.
Enfin, RFF indique que « suivre à la lettre l'article 4.4.2 du DRR serait d'une part très difficile d'un point de vue logistique pour RFF », étant donné que « RFF reçoit chaque jour un nombre considérable d'observations et réclamations », et « d'autre part dépourvu d'intérêt pour les demandeurs qui seraient noyés de courriers de réclamations ».
Concernant le préjudice de Novatrans issu de l'arrivée plus matinale du sillon de Combiwest, RFF indique que l'offre commerciale autour d'un sillon n'est pas valorisée par le fait d'arriver en gare avant son concurrent mais par le fait de disposer d'un horaire d'arrivée permettant aux transporteurs routiers de prendre le relais.
RFF précise en outre que la modification du sillon de Combiwest à 6 h 34 ne porte que sur dix semaines et que Novatrans n'a opéré en 2011 « qu'une dizaine de trains circulant presqu'à vide ».
Sur les conditions d'accès de Novatrans au terminal de Rennes :
RFF indique qu'il n'a pas privilégié Combiwest et que les échanges avec cette dernière ont respecté les termes de la convention d'occupation temporaire. Au contraire, il aurait essayé de dégager une solution acceptable pour tous et proposé une solution aux parties relative au traitement des trains et à l'accès pour Novatrans à d'autres voies.
Sur la demande d'annulation du sillon modifié de Combiwest :
RFF précise que Combiwest n'exploite plus ce sillon mais un nouveau sillon partant de Lyon-Guillotière arrivant à 8 h 30 en gare de Rennes. Par ailleurs, l'annulation du sillon contesté par Novatrans serait presque impossible compte tenu de la complexité de la construction d'un sillon, de même que le rétablissement d'un sillon identique à celui proposé en juillet à Combiwest.
RFF fait valoir que, en outre, cette annulation aurait un impact particulièrement disproportionné sur le marché du transport combiné et serait une sanction déraisonnable.
Vu les observations, enregistrées le 16 mai 2011, présentées par Combiwest, société par actions simplifiée, immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de Brest sous le numéro 517 458 733, dont le siège est à Kérisnel, 29250 Saint-Pol-de-Léon, représentée par Me Philippe Bazire, de la SELARL Bergot-Bazire-Boulouard ;
Combiwest demande à l'Autorité :
― à titre principal, de dire et juger irrecevables les demandes de Novatrans, d'ordonner le versement aux débats, sous astreinte, par Novatrans de la convention de gestion du site comportant les voies 12 et 13 à Rennes et la date de présentation de la première proposition de RFF en ce sens, du nombre de trains circulés entre le 15 janvier et le 30 avril 2011 avec nombre de caisses transportées, poids des marchandises transportées et prix facturés et du nombre de sillons dont dispose Novatrans ainsi que leurs horaires, toutes lignes confondues ;
― tout état de cause, de condamner Novatrans à verser à Combiwest la somme de 10 000 euros en remboursement des frais de procédure irrépétibles.
Combiwest indique que le sillon proposé en juillet par RFF aurait été inexploitable du fait des horaires d'arrivée et de départ à Rennes.
Combiwest fait valoir que « malgré des pertes considérables (report à nouveau d'un déficit de 28 919 278,91 euros suivant AG du 8 juin 201), Novatrans poursuit une activité en employant des prix prédateurs à l'égard de Combiwest notamment et en tentant d'interdire à cette dernière l'usage normal de son sillon ».
Combiwest précise que Novatrans dispose d'un sillon et de voies sur le terminal de Rennes. Elle n'a donc pas qualité pour agir pour demander la suppression.
Vu les réponses au questionnaire des rapporteurs, enregistrées le 23 mai 2011, présentées par Novatrans ;
Selon Novatrans, il n'existe que deux cadres dans lesquels un demandeur peut, après l'octroi définitif d'un sillon par RFF, en demander la modification :
― le premier se situe avant que l'horaire de service soit arrêté par RFF, prévu par les alinéas 8 et 9 de l'article 21 du décret n° 2003-194 qui disposent que dans un délai de dix jours ouvrables après communication d'une proposition définitive de sillons, les demandeurs peuvent présenter une réclamation que RFF communique à tous les demandeurs qui disposent alors d'un délai de dix jours pour produire des observations ;
― le second se situe après la publication de l'horaire de service, prévu par l'alinéa 5 de l'article 21 du décret n° 2003-194, qui dispose implicitement que RFF peut procéder sur demande à la modification de sillons dans le cadre des capacités résiduelles d'infrastructures ferroviaires. Cette possibilité serait ensuite décrite par le Manuel du demandeur de capacités d'infrastructures ferroviaires élaboré par RFF en deux temps : la demande d'une « orientation de tracé » puis d'une « fiche-sillon ».
Novatrans précise que le DRR a déjà restreint le champ de l'article 21 du décret n° 2003-194 en précisant à l'article 4.2.2 que l'obligation de communication des réclamations est limité aux demandeurs « ayant formulé des demandes de sillons pour la partie concernée du réseau ».
Novatrans indique également que la première proposition d'horaire de service est accessible à l'ensemble des demandeurs au mois de juillet via le flux « projet Houat ». Chaque demandeur peut donc consulter les projets de sillons alloué aux uns et aux autres, ce qui leur permet de présenter d'éventuelles réclamations. Il est donc « logique » selon elle que les demandes de réclamations qui suivent les propositions définitives de sillon fassent l'objet de la même publicité.
Selon Novatrans, elle n'avait pas de raison particulière de demander une modification de son sillon avant le mois de mars 2011 dès lors que :
― jusqu'au début d'année 2011, aucun sillon disposant d'un horaire d'arrivée à Rennes antérieur à celui de Novatrans n'apparaissait sur le logiciel Houat ;
― en début d'année 2011, Novatrans n'avait pas accès au terminal de Rennes ;
― la mise en œuvre opérationnelle de la gestion de la partie du terminal confiée en février 2011 n'a pu intervenir avant la fin du mois de mars en raison notamment du refus de Combiwest de permettre à son manutentionnaire d'utiliser ses grues pour servir le train de Novatrans.
Novatrans indique que des échanges ont eu lieu entre les 26 avril et 18 mai avec RFF concernant la demande d'orientation de tracé en date du 19 avril, aboutissant notamment à l'octroi pour Novatrans d'un sillon arrivant à 4 h 42 sur une période de quinze jours et à la proposition de RFF, déclinée par Novatrans, d'un trajet différent pour une autre période. Des études sont toujours en cours.
Novatrans indique qu'elle a commencé l'exploitation de la ligne Rennes-Vénissieux le 5 avril 2011 et fait passer douze trains dans chaque sens entre cette date et le 13 mai, correspondant à 32 UTI.
Vu les documents produits à la demande des rapporteurs, enregistrés le 27 mai 2011, présentés par Combiwest et Novatrans ;
Vu les documents produits à la demande des rapporteurs, enregistrés le 31 mai 2011, présentés par RFF ;
Vu les réponses au questionnaire, enregistrées le 31 mai 2011, présentées par RFF ;
RFF indique que la possibilité de demander la modification d'un sillon par son bénéficiaire n'est pas prévue par les textes réglementaires. Les conditions et les modalités de mise en œuvre de la procédure de modification de sillon sont donc définies par RFF et décrites au chapitre 4 du DRR et dans le Manuel du demandeur de capacité d'infrastructure.
RFF précise que avant la publication de l'horaire de service, les sillons n'étant pas en tant que tels attribués à leurs bénéficiaires, ils ne peuvent faire l'objet d'une modification. La proposition définitive de sillon peut quant à elle faire l'objet d'une amélioration.
Selon RFF, la première demande d'étude de modification de sillon de la part de Combiwest lui a été transmise par courriel le 7 septembre 2010.
Vu les réponses au questionnaire, enregistrées le 31 mai 2011, présentées par Combiwest ;
Vu les nouvelles observations, enregistrées le 9 juin 2011, présentées par Novatrans, portant modification de ses demandes ;
Novatrans « maintient sa demande visant à ce que l'Autorité constate les irrégularités relevées dans l'affaire » relatives à l'instruction de la modification du sillon de Combiwest en violation des dispositions du DRR, à la violation par RFF des règles d'impartialité et de non-discrimination dans le cadre du processus de répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire et par Combiwest des obligations de libre accès et de non-discrimination qui pèsent sur elle en sa qualité de gestionnaire du terminal de Rennes.
Novatrans « a décidé d'adapter sa demande » en retirant sa demande d'annulation du sillon numéro 60438/39 de Combiwest et de rétablissement du sillon initialement octroyé dès lors que RFF a indiqué que cette demande est irréalisable en pratique, qu'il a accepté d'instruire une demande de modification du sillon de Novatrans et que les voies 12 et 13 mises à sa disposition sur le terminal de Rennes ne constituent pas une solution satisfaisante.
Novatrans présente de nouvelles demandes à l'Autorité :
― enjoindre à RFF de poursuivre l'étude de la modification progressive des sillons de Combiwest et Novatrans sur la liaison Lyon―Rennes de manière conjointe et transparente vis-à-vis de ces deux opérateurs et notamment de les réunir et en tout cas de leur communiquer régulièrement les étapes de modification possibles pour l'un et pour l'autre ;
― enjoindre à RFF et à Combiwest de prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour la remise en état du portique de la voie n° 7 du terminal de Rennes et le rétablissement, dès que possible, de l'utilisation de cette voie pour le traitement d'un train de transport combiné ;
― dès que la voie n° 7 du terminal de Rennes sera redevenue opérationnelle, enjoindre à Combiwest de donner un accès à Novatrans à cette partie du terminal qui soit compatible avec l'horaire d'arrivée à Rennes de son sillon ;
― dans l'attente de la remise en état du portique de la voie n° 7, enjoindre, d'une part, à Combiwest de donner à Novatrans un accès gratuit à l'aire de manutention qui jouxte les voies 12 et 13 et qui fait partie de la Convention d'occupation de Combiwest et, d'autre part, à RFF, de renoncer à la perception de toute redevance au titre de l'occupation par Novatrans des voies 12 et 13 du terminal de Rennes.
Novatrans relève que dans des échanges internes à RFF des interventions politiques de la Région Bretagne en faveur de Combiwest ont été diffusées.
Novatrans fait valoir que la modification du sillon de Combiwest s'est faite en dehors de la capacité résiduelle du réseau, « au prix de la modification de sillons attribués à d'autres opérateurs et de la modification de multiples plages-travaux », en violation des règles applicables.
Vu les nouvelles observations en défense, enregistrées le 17 juin 2011, présentées par RFF ;
RFF indique que « Novatrans abandonne donc ses premières demandes et en formule de nouvelles sans rapport avec le préjudice ayant justifié la saisine (...) La situation actuelle paraît donc identique à celle constatée lors de la saisine. Cette double évolution, à la fois du préjudice allégué et des demandes, sans justification par l'évolution du litige et prenant appui de mauvaise foi sur les arguments en réponse de RFF, ne peut que démontrer le caractère artificiel de cette saisine ».
RFF souligne que son intérêt « n'est pas de favoriser un opérateur mais de veiller au bon développement du réseau » .
RFF indique que « la Région Bretagne a soutenu et soutient financièrement le développement du transport combiné sur la région » et que « Novatrans en a spécialement bénéficié » entre 2002 et 2005, avant que soit fermée la liaison Rennes-Vénissieux « compte tenu du mécontentement affiché des industriel et distributeurs locaux à l'égard du service fourni par Novatrans et la CNC ».
Il précise que « c'est à partir du moment où ce nouvel opérateur [Combiwest] a mis en œuvre son projet de transport sur la liaison Rennes-Vénissieux que Novatrans a formulé une demande de sillon concurrente à celle de Combiwest, sur un axe qu'elle avait abandonné quelques années plus tôt et dont elle s'était désintéressée depuis, après que la Région et les autres partenaires publics ont consacré les investissements nécessaires ».
Vu les nouvelles observations en défense, enregistrées le 18 juin 2011, présentées par Combiwest ;
Vu les nouvelles observations, enregistrées le 27 juin 2011, présentées par Novatrans, portant communication d'un procès-verbal d'huissier ;
Vu les nouvelles observations en défense, enregistrées le 28 juin 2011, présentées par Combiwest, portant commentaires sur le procès-verbal d'huissier communiqué par Novatrans ;
Vu la réponse aux questions des rapporteurs, enregistrées le 1er juillet 2011, présentées par Novatrans ;
Vu la réponse aux questions des rapporteurs, enregistrées le 8 juillet 2011, présentées par RFF ;
Vu le rapport d'instruction ;
Sur la publicité de l'audience, Novatrans ayant demandé que l'audience ne soit pas publique, Combiwest n'ayant rien indiqué et RFF ayant indiqué ne pas s'y opposer, le collège a délibéré que l'audience ne serait pas publique.
Après avoir été entendu lors de l'audience du 8 juillet 2011, par M. Pierre Cardo, président, et MM. Dominique Bureau, Henri Lamotte, Claude Martinand, Jean Puech et Daniel Tardy, membres du collège de l'Autorité :
― le rapport de Mme Catherine Isambart, rapporteur, présentant les demandes et moyens des parties ;
― les observations de MM. Tarek Hosni, Baptiste Lebon et Jean Lorin et Mes Franck Audran et Antoine Choffel, pour Novatrans ;
― les observations de M. Raymond Blouet et Maître Philippe Bazire, pour Combiwest ;
― les observations de MM. Jean-François Ducoing, Michel Dupuis, Yves Martin, et Jean-Louis Rohou et Me Anne Cousin, pour RFF ;
en présence de Mmes Béatrice Cospérec, Carole Lesiourd et Clémentine Maudoux et MM. Pierre Ravier, Gaston Thomas-Bourgneuf, Michel Vermeulen et François Wernert, pour l'Autorité.
Le collège en ayant délibéré le 8 juillet 2011, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint, du secrétaire général et des agents de l'Autorité (hors ceux désignés conformément au règlement intérieur pour assurer le secrétariat du délibéré), adopte, concernant la demande de règlement de différend, la décision sur les motifs de fait et de droit ci-après exposés :

  1. Sur la compétence de l'Autorité pour connaître des demandes de Novatrans :
    L'Autorité est compétente pour connaître des situations dans lesquelles une personne autorisée à demander des capacités d'infrastructure ferroviaire s'estime victime d'un traitement inéquitable, d'une discrimination ou de tout autre préjudice liés à l'accès au réseau ferroviaire.
    En l'espèce, la saisine porte sur l'accès au réseau ferroviaire, via, d'une part, l'accès aux sillons et, d'autre part, l'accès à une infrastructure de services, en l'occurrence un chantier de transport combiné. Novatrans et Combiwest sont des personnes autorisées à demander des capacités d'infrastructure ferroviaire, en application de l'article 19 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 modifié relatif à l'utilisation du réseau ferré national.
    L'Autorité est donc compétente pour connaître des demandes de Novatrans.
  2. Sur les demandes formées par Novatrans relatives aux sillons :
    L'Autorité prend acte du désistement de Novatrans, au cours de l'instruction, de ses demandes relatives à l'annulation du sillon modifié de Combiwest et au rétablissement du sillon initialement attribué à Combiwest.
    Les demandes de constat maintenues par Novatrans ne permettent pas à l'Autorité de régler le différend. Elles ne sont pas constitutives d'une précision ou d'une fixation d'une condition d'ordre technique ou financier d'accès au réseau et de ses conditions d'utilisation. Il n'y a donc pas lieu d'y faire droit.
    L'Autorité relève néanmoins que les dispositions de l'article 21 du décret 2003-194 du 17 mars 2003 faisant obligation à RFF de communiquer à l'ensemble des demandeurs de sillons les réclamations reçues à l'occasion de la finalisation de l'horaire de service, comme celles de l'article 4.4.2 du document de référence du réseau, sont contradictoires avec l'obligation pour RFF de respecter la confidentialité, sous l'angle commercial, des informations communiquées, prévue notamment par l'article 14.3 de la directive 2001/14/CE. Pour l'Autorité, cette dernière obligation s'impose. Mais au-delà, la contradiction actuelle doit être levée en modifiant la réglementation et le document de référence du réseau pour assurer la sécurité juridique de l'accès au réseau.
    Il convient également d'améliorer les procédures décrites au document de référence du réseau, en y introduisant plus de souplesse dans l'objectif d'une gestion optimisée du réseau ferré tout en veillant à leur caractère non discriminatoire.
    Concernant la demande formée le 9 juin 2011 sur la modification des sillons de Combiwest et Novatrans, actuellement en cours d'instruction, Novatrans ne démontre pas que RFF instruit de manière discriminatoire ces demandes de modification. En tout état de cause, l'Autorité estime contraire au principe de confidentialité la demande de communication systématique de l'état d'avancement de cette instruction aux deux parties. Il n'y a donc pas lieu d'y faire droit.
  3. Sur les demandes formées par Novatrans relatives au chantier de transport combiné de Rennes :
    Concernant la demande de constat relative au chantier de transport combiné de Rennes, maintenue par Novatrans, elle ne permet pas à l'Autorité de régler le différend et n'est pas constitutive d'une précision ou d'une fixation d'une condition d'ordre technique ou financier d'accès au réseau et de ses conditions d'utilisation.
    Concernant les demandes qu'elle a formées le 9 juin 2011, Novatrans n'avait pas soulevé de difficultés liées aux conditions d'accès aux voies 12 et 13 du chantier de transport combiné de Rennes lors de sa saisine d'avril 2011. Elle n'allègue ni ne démontre que ces conditions ont été modifiées depuis lors. Par ailleurs, concernant l'utilisation de la voie 7, lors de l'audience, Novatrans a fait état d'une autre solution possible consistant en la rénovation par la société Naviland Cargo de son portique.
    Il n'y a donc pas lieu de faire droit aux demandes de Novatrans relatives au chantier de transport combiné.
  4. Sur l'ensemble des demandes formées par Novatrans :
    L'Autorité relève que les demandes dont elle a été saisie par Novatrans n'ont pas été discutées utilement par Novatrans avec RFF ou Combiwest.
    En particulier, bien que consciente des difficultés inhérentes à la modification de sillons, notamment sur cet axe, Novatrans n'a demandé à RFF de modifier son sillon que le 29 mars 2011, soit moins de trois semaines avant de saisir l'Autorité.
    De même, Novatrans n'a pas demandé à Combiwest ou à RFF de modifier ses conditions d'accès au chantier de transport combiné de Rennes avant de saisir l'Autorité, organisme de contrôle.
    Dès lors et en tout état de cause, il n'apparaît pas raisonnable et proportionné que l'Autorité précise ou fixe des conditions d'accès alors que la société Novatrans n'a pas discuté des demandes qu'elle soumet à l'Autorité avec Combiwest et RFF.
  5. Sur les demandes incidentes formées par Combiwest :
    Concernant la demande de Combiwest d'ordonner la production de pièces par Novatrans, et conformément à l'article 16 du règlement intérieur de l'Autorité, il n'a pas été jugé utile de procéder à l'intégralité de cette mesure d'instruction.
    Concernant la demande de versement de la somme de 10 000 euros au titre des frais de procédure irrépétibles, l'Autorité n'est pas compétente pour ordonner le versement de sommes au titre des frais de procédure.
    Il n'y a donc pas lieu de faire droit aux demandes incidentes de Combiwest.
    Décide :

Article 1

Il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes formées par Novatrans.

Article 2

Il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes incidentes de Combiwest.

Article 3

Le surplus des demandes des parties est rejeté.

Article 4

Le secrétaire général de l'Autorité est chargé de notifier aux parties la présente décision, qui sera rendue publique, sous réserve des secrets protégés par la loi.
La présente décision a été adoptée à l'unanimité le 8 juillet 2011 sous la présidence de M. Pierre Cardo et en présence de MM. Dominique Bureau, Henri Lamotte, Claude Martinand, Jean Puech et Daniel Tardy, membres du collège de l'Autorité.

Fait le 8 juillet 2011.

Le président,

P. Cardo