JORF n°0187 du 12 août 2008

  1. Contexte du dossier tarifaire

Par une lettre du 2 janvier 2001, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avait saisi le Conseil de la concurrence d'une demande d'avis concernant les contrats commerciaux proposés par La Poste à ses clients grands comptes ». Le 10 avril 2001, le Conseil de la concurrence a rendu un avis (n° 2001-A-06) dans lequel il attirait l'attention de La Poste sur le caractère anticoncurrentiel des remises de couplage, dont l'assiette serait constituée par le chiffre d'affaires additionné de deux ou plusieurs prestations échangées sur des marchés distincts, ainsi que des remises de fidélité (dites remises de développement ») dont l'assiette serait constituée par la progression du chiffre d'affaires des bénéficiaires, concernant dans les deux cas des produits ou des services en concurrence et pouvant être constitutives d'un abus de position dominante.
Le 1er juillet 2002, estimant que La Poste n'avait pas pris en compte l'intégralité de ses préconisations, le Conseil de la concurrence s'est saisi d'office de la situation de ces contrats. Le 30 novembre 2004, il a rendu une décision (n° 2004-D-65) dans laquelle il constatait que, si La Poste avait modifié une partie de ses contrats commerciaux dès le 1er janvier 2002, le secteur de la vente par correspondance avait continué de bénéficier de remises de couplage et de remises de fidélité jusqu'au 1er janvier 2003. Il qualifiait ces pratiques d'abus de position dominante, prohibées par le droit national et européen de la concurrence. Toutefois, La Poste n'ayant pas souhaité contester les griefs qui lui avaient été notifiés, le conseil avait pris acte de ses engagements, jugés substantiels, satisfaisants, crédibles et vérifiables, pour l'avenir et, en contrepartie, décidé de lui accorder une réduction de 90 % de la sanction encourue.
Parmi les engagements pris par La Poste, figuraient notamment les points suivants :
― pour les produits sous monopole, ne pas pratiquer de remises qui traiteraient de façon discriminatoire des clients exerçant leur activité sur le même marché ;
― pour les produits ou services en concurrence et pour lesquels elle serait en position dominante, ne pas pratiquer de remises de couplage dont l'assiette serait constituée par le chiffre d'affaires additionné de deux ou plusieurs prestations appartenant à des marchés distincts (courrier de gestion, publipostage adressé, catalogues, publicité non adressée, colis), ainsi que de remises de fidélité (remises de développement) assises sur la progression du chiffre d'affaires des bénéficiaires ;
― adapter, dans les meilleurs délais et au plus tard dans un délai de douze mois, ses dispositifs commerciaux à chaque modification du périmètre de son secteur réservé, notamment pour éliminer tout risque de couplage tarifaire entre les activités en concurrence et celles du secteur réservé.
C'est dans ce double contexte, de la distinction des marchés et de la modification du périmètre du secteur réservé au 1er janvier 2006 (seuil à 50 grammes et 2,5 fois le tarif de base, contre 100 grammes et 3 fois le tarif de base auparavant), qu'intervient l'introduction du dossier faisant l'objet de la présente décision.
A partir du 1er janvier 2009, La Poste souhaite mettre en œuvre un nouveau dispositif contractuel. L'architecture générale des conventions courrier reste identique à celle qui est en vigueur, à ceci près que des remises progressives (application d'un taux progressif par tranche de chiffre d'affaires) se substituent aux remises moyennes (application d'un taux uniforme au chiffre d'affaires).
Dans son avis n° 2007-A-17 du 20 décembre 2007, le Conseil de la concurrence, saisi par le président de l'Autorité sur le fondement de l'article L. 5-8 du code des postes et des communications électroniques, a conclu que les modalités de ces nouveaux contrats ne présentaient pas les caractéristiques habituellement reconnues comme anticoncurrentielles.

  1. Présentation du dispositif et analyse

Le principe du contrat commercial est de créer un lien entre le montant de la consommation d'un client, correspondant au chiffre d'affaires réalisé par La Poste avec ce client, sur un certain marché, et le niveau de la remise accordée.
La grille de la convention courrier de gestion secteur réservé applicable par La Poste à partir du 1er janvier 2009 est la suivante :

| CHIFFRE D'AFFAIRES ANNUEL PAR CLIENT| TAUX DE REMISE| |-------------------------------------|---------------| | < 0,8 M€ et 10 M€ | 3,0 % | | < 10 M€ et 20 M€ | 3,5 % | | < 20 M€ et 30 M€ | 5,5 % | | < 30 M€ et 40 M€ | 6,0 % | | < 40 M€ et 55 M€ | 6,5 % | | < 55 M€ et 100 M€ | 7,5 % | | < 100 M€ et 150 M€ | 9,0 % | | < 150 M€ et 175 M€ | 10,0 % | | > 175 M€ | 12,0 % |

Les conditions applicables par La Poste à la convention courrier de gestion secteur réservé sont les suivantes :
― un même chiffre d'affaires ne peut être retenu qu'une seule fois pour remplir les conditions d'accès et ne peut faire l'objet de remise que dans le cadre d'une seule convention ;
― le client est celui qui adresse un envoi postal à des destinataires avec qui il entretient ou souhaite entretenir des relations commerciales et ne peut, par conséquent, être un simple déposant ou un intervenant dans la réalisation des travaux de fabrication, de tri, d'ensachement pour le compte du véritable expéditeur ;
― le dispositif contractuel prend en compte le volume d'affaires des groupes sans exiger des différentes filiales qu'elles appartiennent à un même secteur d'activité.
La Poste justifie les remises commerciales par les fonctions de demande différentes existant sur le marché du courrier. Les remises quantitatives, croissantes en fonction des quantités déposées, seraient destinées à stimuler la demande importante émanant des plus grands clients. Dans son avis n° 2007-A-17 du 20 décembre 2007, le Conseil de la concurrence a, pour sa part, au regard des effets incitatifs des remises, conclu que les conventions courriers ne peuvent être regardées comme comportant par elles-mêmes un effet d'exclusion à l'égard des concurrents de La Poste. Il a jugé, en effet, que les clients auxquels les remises étaient destinées n'auraient pas intérêt à se détourner des routeurs pour la préparation de leur courrier, ni des distributeurs pour la remise de celui-ci aux destinataires.
A partir des informations comptables relatives à l'année 2008, La Poste estime que les clients ou groupes de clients utilisateurs de courrier de gestion, totalisant chacun plus de 0,8 M€ de chiffre d'affaires sur les flux de moins de 50 grammes, réalisent ensemble un chiffre d'affaires de [...] à l'intérieur du périmètre de la convention ([...]). La Poste évalue le montant des remises à [...], ce qui représente un taux de remise moyen de [...].
L'application des différents taux de remise assure à La Poste la couverture des coûts attribuables. Dans les comptes réglementaires de La Poste, les coûts attribuables désignent l'ensemble des coûts qui peuvent être alloués aux produits postaux par un lien de causalité. Une faible part des coûts de La Poste n'étant pas attribuable aux produits, les coûts attribuables se rapprochent donc du concept de coûts complets,
Décide :


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1. Contexte du dossier tarifaire

Par une lettre du 2 janvier 2001, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avait saisi le Conseil de la concurrence d'une demande d'avis concernant les contrats commerciaux proposés par La Poste à ses clients grands comptes ». Le 10 avril 2001, le Conseil de la concurrence a rendu un avis (n° 2001-A-06) dans lequel il attirait l'attention de La Poste sur le caractère anticoncurrentiel des remises de couplage, dont l'assiette serait constituée par le chiffre d'affaires additionné de deux ou plusieurs prestations échangées sur des marchés distincts, ainsi que des remises de fidélité (dites remises de développement ») dont l'assiette serait constituée par la progression du chiffre d'affaires des bénéficiaires, concernant dans les deux cas des produits ou des services en concurrence et pouvant être constitutives d'un abus de position dominante.

Le 1er juillet 2002, estimant que La Poste n'avait pas pris en compte l'intégralité de ses préconisations, le Conseil de la concurrence s'est saisi d'office de la situation de ces contrats. Le 30 novembre 2004, il a rendu une décision (n° 2004-D-65) dans laquelle il constatait que, si La Poste avait modifié une partie de ses contrats commerciaux dès le 1er janvier 2002, le secteur de la vente par correspondance avait continué de bénéficier de remises de couplage et de remises de fidélité jusqu'au 1er janvier 2003. Il qualifiait ces pratiques d'abus de position dominante, prohibées par le droit national et européen de la concurrence. Toutefois, La Poste n'ayant pas souhaité contester les griefs qui lui avaient été notifiés, le conseil avait pris acte de ses engagements, jugés substantiels, satisfaisants, crédibles et vérifiables, pour l'avenir et, en contrepartie, décidé de lui accorder une réduction de 90 % de la sanction encourue.

Parmi les engagements pris par La Poste, figuraient notamment les points suivants :

― pour les produits sous monopole, ne pas pratiquer de remises qui traiteraient de façon discriminatoire des clients exerçant leur activité sur le même marché ;

― pour les produits ou services en concurrence et pour lesquels elle serait en position dominante, ne pas pratiquer de remises de couplage dont l'assiette serait constituée par le chiffre d'affaires additionné de deux ou plusieurs prestations appartenant à des marchés distincts (courrier de gestion, publipostage adressé, catalogues, publicité non adressée, colis), ainsi que de remises de fidélité (remises de développement) assises sur la progression du chiffre d'affaires des bénéficiaires ;

― adapter, dans les meilleurs délais et au plus tard dans un délai de douze mois, ses dispositifs commerciaux à chaque modification du périmètre de son secteur réservé, notamment pour éliminer tout risque de couplage tarifaire entre les activités en concurrence et celles du secteur réservé.

C'est dans ce double contexte, de la distinction des marchés et de la modification du périmètre du secteur réservé au 1er janvier 2006 (seuil à 50 grammes et 2,5 fois le tarif de base, contre 100 grammes et 3 fois le tarif de base auparavant), qu'intervient l'introduction du dossier faisant l'objet de la présente décision.

A partir du 1er janvier 2009, La Poste souhaite mettre en œuvre un nouveau dispositif contractuel. L'architecture générale des conventions courrier reste identique à celle qui est en vigueur, à ceci près que des remises progressives (application d'un taux progressif par tranche de chiffre d'affaires) se substituent aux remises moyennes (application d'un taux uniforme au chiffre d'affaires).

Dans son avis n° 2007-A-17 du 20 décembre 2007, le Conseil de la concurrence, saisi par le président de l'Autorité sur le fondement de l'article L. 5-8 du code des postes et des communications électroniques, a conclu que les modalités de ces nouveaux contrats ne présentaient pas les caractéristiques habituellement reconnues comme anticoncurrentielles.

2. Présentation du dispositif et analyse

Le principe du contrat commercial est de créer un lien entre le montant de la consommation d'un client, correspondant au chiffre d'affaires réalisé par La Poste avec ce client, sur un certain marché, et le niveau de la remise accordée.

La grille de la convention courrier de gestion secteur réservé applicable par La Poste à partir du 1er janvier 2009 est la suivante :

CHIFFRE D'AFFAIRES ANNUEL PAR CLIENT

TAUX DE REMISE

< 0,8 M€ et 10 M€

3,0 %

< 10 M€ et 20 M€

3,5 %

< 20 M€ et 30 M€

5,5 %

< 30 M€ et 40 M€

6,0 %

< 40 M€ et 55 M€

6,5 %

< 55 M€ et 100 M€

7,5 %

< 100 M€ et 150 M€

9,0 %

< 150 M€ et 175 M€

10,0 %

> 175 M€

12,0 %

Les conditions applicables par La Poste à la convention courrier de gestion secteur réservé sont les suivantes :

― un même chiffre d'affaires ne peut être retenu qu'une seule fois pour remplir les conditions d'accès et ne peut faire l'objet de remise que dans le cadre d'une seule convention ;

― le client est celui qui adresse un envoi postal à des destinataires avec qui il entretient ou souhaite entretenir des relations commerciales et ne peut, par conséquent, être un simple déposant ou un intervenant dans la réalisation des travaux de fabrication, de tri, d'ensachement pour le compte du véritable expéditeur ;

― le dispositif contractuel prend en compte le volume d'affaires des groupes sans exiger des différentes filiales qu'elles appartiennent à un même secteur d'activité.

La Poste justifie les remises commerciales par les fonctions de demande différentes existant sur le marché du courrier. Les remises quantitatives, croissantes en fonction des quantités déposées, seraient destinées à stimuler la demande importante émanant des plus grands clients. Dans son avis n° 2007-A-17 du 20 décembre 2007, le Conseil de la concurrence a, pour sa part, au regard des effets incitatifs des remises, conclu que les conventions courriers ne peuvent être regardées comme comportant par elles-mêmes un effet d'exclusion à l'égard des concurrents de La Poste. Il a jugé, en effet, que les clients auxquels les remises étaient destinées n'auraient pas intérêt à se détourner des routeurs pour la préparation de leur courrier, ni des distributeurs pour la remise de celui-ci aux destinataires.

A partir des informations comptables relatives à l'année 2008, La Poste estime que les clients ou groupes de clients utilisateurs de courrier de gestion, totalisant chacun plus de 0,8 M€ de chiffre d'affaires sur les flux de moins de 50 grammes, réalisent ensemble un chiffre d'affaires de [...] à l'intérieur du périmètre de la convention ([...]). La Poste évalue le montant des remises à [...], ce qui représente un taux de remise moyen de [...].

L'application des différents taux de remise assure à La Poste la couverture des coûts attribuables. Dans les comptes réglementaires de La Poste, les coûts attribuables désignent l'ensemble des coûts qui peuvent être alloués aux produits postaux par un lien de causalité. Une faible part des coûts de La Poste n'étant pas attribuable aux produits, les coûts attribuables se rapprochent donc du concept de coûts complets,

Décide :