JORF n°240 du 14 octobre 2005

II-3.2.6. Faible présence de contre-pouvoirs des acheteurs

Les plus gros acheteurs en volume de prestations de transit sont les services de détail de France Télécom, ce qui rend très peu probable la perspective d'une pression à la baisse sur les prix de ces offres par le principal acheteur de ce marché.
L'Autorité ne nie cependant pas la possibilité d'une concurrence par les prix via l'accès à des offres de transit alternatives, mais celle-ci est limitée à certaines zones, pour certains acheteurs et pour certaines prestations précises, générant des volumes de trafic importants.
En particulier, comme elle l'a déjà indiqué précédemment, les possibilités dont disposent les petits opérateurs de faire appel à d'autres fournisseurs sont relativement limitées, au regard, notamment, des volumes souvent faibles des trafics transitant entre réseaux de boucle locale alternatifs.
A cet égard, l'Autorité considère qu'en l'absence d'une obligation de fournir des prestations de transit imposée à France Télécom, cette dernière pourrait refuser de fournir ces prestations à certains opérateurs alternatifs, notamment les petits opérateurs de boucle locale. Cela obligerait ces acteurs à mettre en oeuvre des interconnexions directes en lieu et place de l'utilisation du transit fourni par France Télécom, engendrant par là même des surcoûts qui les pénaliseraient fortement. La nécessité économique d'établir de telles interconnexions directes pour l'acheminement de trafic pourrait également augmenter le niveau des barrières à l'entrée sur le marché de la boucle locale téléphonique et agir in fine comme une désincitation à l'entrée sur ce marché.

II-3.2.7. Intégration verticale de l'entreprise

Parmi tous les opérateurs présents sur le marché du transit, France Télécom possède la particularité d'être puissante non seulement sur les marchés de détail des communications et de l'accès, mais aussi sur le marché du départ d'appel. Elle est également puissante sur le marché de la terminaison d'appel sur son réseau, lequel est destinataire des plus gros volumes de trafic (cf. l'analyse de la puissance de France Télécom sur ce dernier marché).
Or un opérateur qui achète une prestation de transit doit également demander une prestation de départ d'appel ou de terminaison, afin d'être capable de joindre les utilisateurs finals.
Ainsi, au-delà des effets de levier pouvant survenir entre les marchés de gros et les marchés de détail situés en aval, les liens existant entre le marché du transit et ceux du départ d'appel et de la terminaison d'appel sont tels qu'ils permettent à France Télécom d'utiliser sa position de quasi-monopole sur ces derniers, par effet de levier, pour renforcer la puissance qu'elle détient sur le transit.
A titre d'illustration, les restrictions qu'impose encore France Télécom sur la collecte de trafic pour compte de tiers montrent les avantages qu'elle peut tirer de sa position incontournable sur le marché du départ d'appel malgré une régulation imposée sur ce marché : ainsi, France Télécom restreint la portée des offres de collecte pour compte de tiers des opérateurs alternatifs en leur refusant de collecter le trafic d'un opérateur tiers au commutateur d'abonné tiers s'ils ne collectent pas l'ensemble du trafic de cet opérateur dans la zone de transit correspondante. L'opérateur alternatif se voit donc contraint, s'il veut se substituer à France Télécom, d'investir sur l'ensemble des CA de la zone de transit.

II-3.2.8. Evolution prospective du marché

L'Autorité estime que, malgré un début de concurrence réel, le marché du transit intra territorial n'est pas encore effectivement concurrentiel. L'opérateur historique sera encore en mesure à l'horizon de la présente analyse de s'y comporter indépendamment de ses clients et de ses concurrents, grâce notamment à sa puissance sur les divers marchés situés en amont (détail et gros), et aux avantages structurels dont il jouit sur ce marché.
L'Autorité estime avoir tenu compte des principales évolutions en cours sur les marchés de la téléphonie fixe, notamment les évolutions technologiques liées à l'utilisation croissante des technologies de transport sur IP dans les réseaux commutés ainsi que de l'impact prévisible du développement sur les marchés de détail des offres de communications de voix sur IP, comme les nouveaux services de voix sur accès large bande.

L'Autorité estime cependant que ces évolutions ne devraient pas bouleverser les conclusions auxquelles elle parvient au cours de la période couverte par cette analyse de marché, eu égard, d'une part, du délai minimal dans lequel leurs effets, si elles devaient se confirmer, auraient un effet notable sur le marché et, d'autre part, à l'analyse des principaux critères présentés ci-dessus, qui ne saurait être remise en cause à l'horizon de la présente analyse.
Par ailleurs, le rapprochement autorisé par les autorités de concurrence entre deux acteurs majeurs de ce marché, Neuf Télécom et Cegetel, n'est pas en mesure, selon l'Autorité, de remettre en cause l'influence significative dont jouit France Télécom sur les trois prochaines années.
Ainsi, si cette opération fait effectivement apparaître un acteur possédant une part de marché importante, toutefois inférieure à 45 %, l'Autorité note que la part de marché de France Télécom restera toujours supérieure à 50 % (l'opérateur mobile SFR devenant simple actionnaire minoritaire du nouvel ensemble implique de prendre en compte dans le calcul des parts de marché les volumes de trafic à acheminer en transit pour cet opérateur). Par ailleurs, les sociétés concernées estiment que les synergies attendues ne se matérialiseront pleinement qu'en 2007 (48). Enfin, et en tout état de cause, l'Autorité estime qu'il n'est pas envisageable, au regard de l'ensemble des critères qualitatifs examinés ci-dessus, et notamment celui attribuant à France Télécom des économies d'échelle et de gammes sans commune mesure avec celles dont peuvent bénéficier ses concurrents, de considérer une situation de dominance conjointe de France Télécom et de l'entité que formeront Neuf Telecom et Cegetel, à l'horizon temporel de la présente analyse.
En tout état de cause, l'Autorité effectuera un suivi plus général de l'évolution des marchés et pourra être amenée à réexaminer ses conclusions, y compris quant à l'influence significative de France Télécom, en cas d'évolution substantielle des conditions concurrentielles.


Historique des versions

Version 1

II-3.2.6. Faible présence de contre-pouvoirs des acheteurs

Les plus gros acheteurs en volume de prestations de transit sont les services de détail de France Télécom, ce qui rend très peu probable la perspective d'une pression à la baisse sur les prix de ces offres par le principal acheteur de ce marché.

L'Autorité ne nie cependant pas la possibilité d'une concurrence par les prix via l'accès à des offres de transit alternatives, mais celle-ci est limitée à certaines zones, pour certains acheteurs et pour certaines prestations précises, générant des volumes de trafic importants.

En particulier, comme elle l'a déjà indiqué précédemment, les possibilités dont disposent les petits opérateurs de faire appel à d'autres fournisseurs sont relativement limitées, au regard, notamment, des volumes souvent faibles des trafics transitant entre réseaux de boucle locale alternatifs.

A cet égard, l'Autorité considère qu'en l'absence d'une obligation de fournir des prestations de transit imposée à France Télécom, cette dernière pourrait refuser de fournir ces prestations à certains opérateurs alternatifs, notamment les petits opérateurs de boucle locale. Cela obligerait ces acteurs à mettre en oeuvre des interconnexions directes en lieu et place de l'utilisation du transit fourni par France Télécom, engendrant par là même des surcoûts qui les pénaliseraient fortement. La nécessité économique d'établir de telles interconnexions directes pour l'acheminement de trafic pourrait également augmenter le niveau des barrières à l'entrée sur le marché de la boucle locale téléphonique et agir in fine comme une désincitation à l'entrée sur ce marché.

II-3.2.7. Intégration verticale de l'entreprise

Parmi tous les opérateurs présents sur le marché du transit, France Télécom possède la particularité d'être puissante non seulement sur les marchés de détail des communications et de l'accès, mais aussi sur le marché du départ d'appel. Elle est également puissante sur le marché de la terminaison d'appel sur son réseau, lequel est destinataire des plus gros volumes de trafic (cf. l'analyse de la puissance de France Télécom sur ce dernier marché).

Or un opérateur qui achète une prestation de transit doit également demander une prestation de départ d'appel ou de terminaison, afin d'être capable de joindre les utilisateurs finals.

Ainsi, au-delà des effets de levier pouvant survenir entre les marchés de gros et les marchés de détail situés en aval, les liens existant entre le marché du transit et ceux du départ d'appel et de la terminaison d'appel sont tels qu'ils permettent à France Télécom d'utiliser sa position de quasi-monopole sur ces derniers, par effet de levier, pour renforcer la puissance qu'elle détient sur le transit.

A titre d'illustration, les restrictions qu'impose encore France Télécom sur la collecte de trafic pour compte de tiers montrent les avantages qu'elle peut tirer de sa position incontournable sur le marché du départ d'appel malgré une régulation imposée sur ce marché : ainsi, France Télécom restreint la portée des offres de collecte pour compte de tiers des opérateurs alternatifs en leur refusant de collecter le trafic d'un opérateur tiers au commutateur d'abonné tiers s'ils ne collectent pas l'ensemble du trafic de cet opérateur dans la zone de transit correspondante. L'opérateur alternatif se voit donc contraint, s'il veut se substituer à France Télécom, d'investir sur l'ensemble des CA de la zone de transit.

II-3.2.8. Evolution prospective du marché

L'Autorité estime que, malgré un début de concurrence réel, le marché du transit intra territorial n'est pas encore effectivement concurrentiel. L'opérateur historique sera encore en mesure à l'horizon de la présente analyse de s'y comporter indépendamment de ses clients et de ses concurrents, grâce notamment à sa puissance sur les divers marchés situés en amont (détail et gros), et aux avantages structurels dont il jouit sur ce marché.

L'Autorité estime avoir tenu compte des principales évolutions en cours sur les marchés de la téléphonie fixe, notamment les évolutions technologiques liées à l'utilisation croissante des technologies de transport sur IP dans les réseaux commutés ainsi que de l'impact prévisible du développement sur les marchés de détail des offres de communications de voix sur IP, comme les nouveaux services de voix sur accès large bande.

L'Autorité estime cependant que ces évolutions ne devraient pas bouleverser les conclusions auxquelles elle parvient au cours de la période couverte par cette analyse de marché, eu égard, d'une part, du délai minimal dans lequel leurs effets, si elles devaient se confirmer, auraient un effet notable sur le marché et, d'autre part, à l'analyse des principaux critères présentés ci-dessus, qui ne saurait être remise en cause à l'horizon de la présente analyse.

Par ailleurs, le rapprochement autorisé par les autorités de concurrence entre deux acteurs majeurs de ce marché, Neuf Télécom et Cegetel, n'est pas en mesure, selon l'Autorité, de remettre en cause l'influence significative dont jouit France Télécom sur les trois prochaines années.

Ainsi, si cette opération fait effectivement apparaître un acteur possédant une part de marché importante, toutefois inférieure à 45 %, l'Autorité note que la part de marché de France Télécom restera toujours supérieure à 50 % (l'opérateur mobile SFR devenant simple actionnaire minoritaire du nouvel ensemble implique de prendre en compte dans le calcul des parts de marché les volumes de trafic à acheminer en transit pour cet opérateur). Par ailleurs, les sociétés concernées estiment que les synergies attendues ne se matérialiseront pleinement qu'en 2007 (48). Enfin, et en tout état de cause, l'Autorité estime qu'il n'est pas envisageable, au regard de l'ensemble des critères qualitatifs examinés ci-dessus, et notamment celui attribuant à France Télécom des économies d'échelle et de gammes sans commune mesure avec celles dont peuvent bénéficier ses concurrents, de considérer une situation de dominance conjointe de France Télécom et de l'entité que formeront Neuf Telecom et Cegetel, à l'horizon temporel de la présente analyse.

En tout état de cause, l'Autorité effectuera un suivi plus général de l'évolution des marchés et pourra être amenée à réexaminer ses conclusions, y compris quant à l'influence significative de France Télécom, en cas d'évolution substantielle des conditions concurrentielles.