JORF n°220 du 21 septembre 2004

I. - Le contexte de la présente décision
I-1. Sur l'arrêt du Conseil d'Etat

L'Autorité a proposé en date du 23 avril 2002, dans sa décision n° 2002-329, une modification de l'évaluation prévisionnelle du coût du service universel et des contributions des opérateurs pour l'année 2002. Par rapport à la décision initiale n° 2001-1145 du 30 novembre 2001, cette nouvelle décision avait pour objet de prendre en compte l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 6 décembre 2001 susvisé.
Par arrêté du 11 juillet 2002, le ministre délégué à l'industrie a constaté le coût net prévisionnel du service universel pour l'année 2002.
Par courrier en date du 26 juillet 2002, l'Autorité a notifié les montants des contributions aux opérateurs concernés en précisant les dates des deux échéances, respectivement fixées au 20 août 2002 et 20 septembre 2002.
En date du 18 juin 2003, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté précité en ce qu'il révèle une décision ayant fixé les règles applicables à la détermination du coût net du service universel des télécommunications et qu'il détermine le coût net prévisionnel du service universel pour l'année 2002.
Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat précisait que la ministre déléguée à l'industrie « pouvait dans les circonstances particulières de l'espèce, afin de garantir la pleine application du droit communautaire et la continuité du service universel des télécommunications, définir de nouvelles modalités d'évaluation du coût net du service universel tirant les conséquences des modifications rendues nécessaires par l'intervention de la Cour de justice des Communautés européennes et déterminer en conséquence le montant prévisionnel de ce coût au titre de l'année 2002 ainsi qu'il l'a fait par l'arrêté attaqué ». Cependant, il annulait l'arrêté litigieux, car les nouvelles modalités d'évaluation du coût net du service universel ainsi que le montant de ce coût n'avaient pas été publiés dans des « conditions de clarté et de délai suffisantes » pour permettre aux opérateurs de prévoir le montant des contributions qui leur seraient réclamées.
Afin de confirmer les contributions perçues ou encore à percevoir au titre du prévisionnel 2002 auprès des opérateurs et d'assurer la pérennité du fonds de service universel, il était nécessaire qu'un nouvel acte réglementaire soit pris.

I-2. Sur la nécessité d'un acte réglementaire

En vertu des dispositions du IV de l'article L. 35-3 du code des postes et des télécommunications, les modalités d'application de cet article, et notamment les méthodes d'évaluation, de compensation et du partage des coûts nets du service universel, doivent être précisées par un décret en Conseil d'Etat.
Certes, le Gouvernement a adopté un décret n° 2003-338 du 10 avril 2003 relatif au financement du service universel des télécommunications, afin de modifier le code des postes et télécommunications pour le mettre en conformité avec l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes précité. Mais ce décret, paru en avril 2003, ne valait que pour l'avenir et ne pouvait donc servir de fondement au calcul du coût prévisionnel du service universel pour 2002.
Il était donc nécessaire qu'un nouveau décret en Conseil d'Etat relatif aux modalités de calcul du coût des contributions prévisionnelles pour l'année 2002, doté d'un effet rétroactif, soit publié.
En date du 30 septembre 2003, l'Autorité a rendu un avis (n° 2003-1075) sur le projet de décret relatif au coût net prévisionnel du service universel des télécommunications pour l'année 2002.
Ce décret en Conseil d'Etat n° 2004-408 a été publié au Journal officiel du 14 mai 2004.

I-3. Sur le contenu du décret n° 2004-408

Les dispositions des articles R. 20-31, R. 20-33, R. 20-36 et R. 20-37-1 dans leur rédaction issue du décret du 10 avril 2003, sont rendues applicables au calcul du coût des contributions prévisionnelles pour l'année 2002.
Ces articles ont pour objet de préciser les avantages immatériels à prendre en compte lors du calcul des contributions au service universel et de modifier la composante prenant en compte les recettes de la Liste rouge.
Enfin, le Conseil d'Etat a ajouté un alinéa en vertu duquel les versements dus, le cas échéant, par les opérateurs seront effectués en une seule fois, à compter du 1er mai 2004.

II. - Procédure

En vertu de la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, qui modifie l'article L. 35-3 ainsi que le 4° de l'article L. 36-7 du code des postes et des communications électroniques, il incombe désormais à l'Autorité de déterminer le montant des contributions des opérateurs au fonds de service universel.
A cette fin, l'Autorité a publié préalablement à la présente décision, le 22 juin 2004, les règles envisagées qui sont employées pour la présente évaluation prévisionnelle du service universel de l'année 2002.
L'Autorité n'a pas reçu de remarques d'opérateurs.

III. - Evaluation du coût net prévisionnel
du service universel pour l'année 2002

III-1. Evaluation du coût net des obligations de péréquation tarifaire correspondant aux obligations de péréquation géographique
Le calcul du coût net prévisionnel 2002 de la péréquation géographique doit tenir compte de la prise en compte des coûts et recettes de la Liste rouge.
Avant prise en compte de ces avantages immatériels, le coût net prévisionnel des zones non rentables est égal pour l'année 2002 à :
196,5 millions d'euros au titre des zones non rentables, représentant 3 234 000 abonnés situés dans les zones de moins de 40 habitants au kilomètre carré ;
56 millions d'euros au titre des abonnés non rentables des zones rentables, représentant 2 848 000 abonnés.
En comparaison, le coût net prévisionnel 2002, tel qu'il avait été établi par la décision n° 2001-1145 susvisée, était de 206,58 millions d'euros pour les zones non rentables et de 64,70 millions d'euros pour les abonnés non rentables.

III-2. Evaluation du coût net des « tarifs sociaux »

Avant prise en compte des avantages immatériels, l'évaluation prévisionnelle du coût net de cette composante n'est pas modifiée par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée et est donc évaluée à 132,78 millions d'euros.

III-3. Evaluation du coût net des obligations
de desserte du territoire en publiphones

Avant prise en compte des avantages immatériels, l'évaluation prévisionnelle du coût net de cette composante n'est pas modifiée par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée et est donc évaluée à 24,05 millions d'euros.
III-4. Evaluation du coût net des obligations correspondant à la fourniture d'un service de renseignements et d'un annuaire d'abonnés sous forme imprimée et électronique
Par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée, et conformément au décret n° 2004-408 du 13 mai 2004 susvisé, les coûts et les recettes de la Liste rouge ne doivent plus faire partie de l'évaluation de la composante « Annuaires et services de renseignements ».
Dès lors, l'évaluation prévisionnelle de la composante « Annuaires et services de renseignements » est de 78 millions d'euros, une fois pris en compte le bénéfice net dû aux appels induits par les consultations des annuaires et des services de renseignements, mais sans prendre en compte les coûts et les recettes des services « Pages jaunes ».
L'Autorité considère que les services « Pages jaunes » sont des produits dérivés des annuaires de France Télécom. Ces produits utilisent les mêmes bases de données clients que les annuaires « Pages blanches » et participent à la mission d'information sur les numéros des utilisateurs qui est dévolue aux annuaires et aux services de renseignements.
Dès lors, l'équilibre économique des « Pages blanches » ne saurait s'analyser indépendamment de celles des « Pages jaunes » ; les coûts et les recettes des services « Pages jaunes », mais aussi les appels induits par la consultation de ces produits, doivent donc être intégrés à l'évaluation de la composante « Annuaires et services de renseignements ».
Concernant le nombre d'appels induits, l'Autorité considère qu'une consultation des produits « Pages jaunes » génère un appel. Le rapport annuel 2001 de Wanadoo indique que l'annuaire et les « Pages jaunes » imprimés sont consultés 142 millions de fois par mois, que le site pagesjaunes.fr fait l'objet de 10 millions de consultations par mois.
Après prise en compte des coûts, des recettes et des appels induits par les services « Pages jaunes », l'Autorité constate que la composante « Annuaires et services de renseignements » est bénéficiaire et, qu'à ce titre, aucune compensation n'est due.

III-5. Evaluation des avantages induits du fait
d'être opérateur de service universel

En vertu de l'article L. 35-3 du code et de l'article 1er du décret n° 2004-408 du 13 mai 2004 susvisé, l'Autorité doit évaluer le montant des avantages immatériels pour l'évaluation des contributions prévisionnelles pour l'année 2002.

L'image de marque

L'évaluation des avantages tirés de l'image de marque en 2002 a été effectuée à partir d'une méthodologie développée par l'Autorité, qui s'appuie sur les résultats du sondage mené par l'IFOP en 2001.
Utilisé pour différentes années, un même sondage permet d'obtenir des résultats différents puisque le chiffre d'affaires des clients résidentiels est un paramètre de l'évaluation, exogène au sondage.
Ainsi, le sondage réalisé en 2001 par l'IFOP, et qui a permis d'évaluer l'avantage lié à l'image de marque à 86,9 millions d'euros pour 2001, permet également d'évaluer l'avantage en question pour 2002, en ne modifiant que le chiffre d'affaires des clients résidentiels.
L'avantage lié à l'image de marque est alors fixé à 86,4 millions d'euros pour 2002.
L'Autorité souligne toutefois la difficulté de chiffrer de façon précise l'avantage lié à l'image de marque.

La couverture universelle dans la zone d'exploitation ubiquitaire

Cet avantage est pris en compte dans le modèle de calcul du coût de la péréquation géographique de par la modélisation en coûts évitables (cf. annexe I).
En conséquence, il n'y a pas lieu de prendre en compte à nouveau et isolément cet avantage.

L'évolution dans le temps de la « valeur »
de certains clients (effet lié au cycle de vie)

Un opérateur agissant dans des conditions de marché peut néanmoins souhaiter raccorder une zone ou un publiphone aujourd'hui non rentables, en prévision de l'évolution future de son coût et de ses recettes.
Les recettes des publiphones sont en baisse continue depuis 1998, du fait notamment du développement de la téléphonie mobile, et continueront vraisemblablement à diminuer. Un publiphone non rentable aujourd'hui le sera vraisemblablement encore davantage demain. Dès lors, l'avantage lié à l'évolution dans le temps de la « valeur » des publiphones non rentables est nul pour 2002.
En ce qui concerne les zones, l'Autorité a pris des hypothèses d'évolution de coûts et de recettes globales et unitaires de France Télécom, raisonnables sur la période 2002-2006 : stabilité des coûts de réseau local et des coûts de gestion des abonnés, stabilité du volume « extra-ZLE », baisse de 2 % par an de la recette unitaire « extra-ZLE », diminution de 5 % par an des coûts unitaires de réseau général, de la recette unitaire « intra-ZLE » et du volume « intra-ZLE ». L'évolution des volumes est la résultante d'une augmentation globale, tous opérateurs confondus, et de la perte de parts de marché de France Télécom, qui porte essentiellement sur le trafic local sur la période considérée.
Sous ces hypothèses, la classe de densité comprise entre 29 et 35 habitants/km², représentant 986 000 lignes, non rentable sur l'année 2002, devient rentable sur l'ensemble de la période 2002-2006.
Dès lors, il n'y a pas lieu de prendre en compte cette classe dans l'évaluation du coût prévisionnel 2002 du service universel. Plus exactement, le coût net de cette classe, soit 26,3 millions d'euros pour 2002, représente l'effet lié au cycle de vie pour 2002 et doit être déduit du coût 2002 des zones non rentables.
Le fait que l'effet lié au cycle de vie soit nul en 1998 et 1999, mais positif en 2002, s'explique essentiellement par l'évolution des recettes unitaires sur les périodes considérées. En 1998 et 1999, était anticipée une forte baisse des recettes du service téléphonique sur cinq ans, baisse qui a effectivement eu lieu. Cela explique pourquoi un abonné non rentable en 1998 et 1999 ne l'était pas davantage sur un horizon de cinq ans.
Ce « retournement de tendance » s'observe également dans les évaluations réalisées par l'AGCom, le régulateur italien : l'effet lié au cycle de vie était nul pour 1999 et positif (de 1,4 million d'euros) pour 2000.

L'accès aux données relatives à l'utilisation du téléphone

L'avantage retiré par France Télécom des données dont elle dispose ne peut être pris en compte que pour autant que ces données concernent les seuls abonnés non rentables ou correspondant aux zones non rentables. Cet avantage est donc probablement peu élevé.
L'Autorité n'est pas en mesure aujourd'hui d'estimer l'avantage dont bénéficie l'opérateur de service universel du fait qu'il possède des données relatives à l'utilisation du téléphone dans les zones non rentables.
C'est pourquoi elle évalue à 0 cet avantage pour 2002, sans que cela préjuge de ses évaluations ultérieures.

Bilan

Le tableau ci-dessous récapitule l'évaluation des différents avantages immatériels :

Le tableau ci-dessous résume l'effet de la prise en compte des avantages immatériels sur chacune des composantes :

III-6. Répartition des contributions entre les opérateurs

Par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée, un élément nouveau est à prendre en considération. En effet, la société Kertel a transmis à l'Autorité son souhait de ne plus fournir la prestation « tarifs sociaux » à de nouveaux ayants droit (ou à d'anciens ayants droit arrivant à échéance) à compter du 1er mai 2002. Par son avis n° 2002-308 susvisé, l'Autorité a pris acte de cette demande de Kertel.
Toutefois, la société Kertel continue d'assurer la prestation sociale pour les ayants droit qui l'ont choisie jusqu'à l'échéance de leur abonnement (d'une durée de douze mois). A ce titre, Kertel continue à fournir ce service pour l'ensemble de l'année 2002.
Le crédit de Kertel au titre du fonds de service universel pour 2002 est donc recalculé sur la base de ces nouveaux éléments.
Le crédit dont bénéficie France Télécom (et qui correspond au complémentaire du crédit attribué à Kertel par rapport à l'évaluation prévisionnelle du coût de la composante) est donc modifié en conséquence.
Les avantages immatériels dont bénéficie Kertel, parce qu'elle fournit ce service, ont été évalués à 0.

III-7. Conclusion

L'Autorité, par la présente décision, évalue, à titre prévisionnel pour l'année 2002, en prenant en compte les avantages immatériels, le coût total des obligations de service universel à 296,6 millions d'euros dont :
- 175,2 millions d'euros pour les obligations de péréquation tarifaire correspondant aux obligations de péréquation géographique ;
- 102,8 millions d'euros au titre des tarifs sociaux ;
- 18,6 millions d'euros pour la desserte du territoire en cabines téléphoniques installées sur le domaine public.
A titre de comparaison, l'évaluation du coût prévisionnel 2001 du service universel était de 416 milllions d'euros.

III-8. Modalités de versement prévisionnel 2002
au fonds de service universel

Les régularisations des contributions de service universel pour les années 1997, 1998 et 1999, ayant transité par le fonds de service universel, sont venues en diminution de la contribution prévisionnelle au titre de l'année 2002, qui a été notifiée aux opérateurs par l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 26 juillet 2002.
Le décret n° 2004-408 du 13 mai 2004 relatif aux modalités d'évaluation, de compensation et de partage du coût net prévisionnel du service universel des télécommunications pour l'année 2002 précise : « Par dérogation aux dispositions de l'article R. 20-39, les versements dus, le cas échéant, par les opérateurs seront effectués en une seule fois, à compter du 1er mai 2004. »
La situation des opérateurs qui se sont vu facturer des intérêts de retard en 2002 pour n'avoir pas respecté les dates de paiement du prévisionnel imposées en 2002 sera régularisée : les opérateurs qui ont versé des intérêts de retard seront remboursés par le fonds de service universel, géré par la Caisse des dépôts et consignations.
Après publication au Journal officiel de la présente décision, l'Autorité notifiera les contributions aux opérateurs en fixant une date d'échéance au plus tôt six semaines après la date de notification.

IV. - Publication de la présente décision et de ses annexes

L'annexe I à la présente décision qui décrit les règles employées pour l'application des articles L. 35-1, R. 20-33, R. 20-35, R. 20-36, R. 20-37-1 et R. 20-39 du code des postes et des communications électroniques est publique.
Puisqu'il s'agit d'évaluations prévisionnelles qui donneront lieu à rectification lors du calcul définitif, l'annexe II-2002 à la présente décision qui précise les contributions nettes prévisionnelles des opérateurs au fonds de service universel pour l'année 2002 ne sera pas publiée,
Décide :


Historique des versions

Version 1

I. - Le contexte de la présente décision

I-1. Sur l'arrêt du Conseil d'Etat

L'Autorité a proposé en date du 23 avril 2002, dans sa décision n° 2002-329, une modification de l'évaluation prévisionnelle du coût du service universel et des contributions des opérateurs pour l'année 2002. Par rapport à la décision initiale n° 2001-1145 du 30 novembre 2001, cette nouvelle décision avait pour objet de prendre en compte l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 6 décembre 2001 susvisé.

Par arrêté du 11 juillet 2002, le ministre délégué à l'industrie a constaté le coût net prévisionnel du service universel pour l'année 2002.

Par courrier en date du 26 juillet 2002, l'Autorité a notifié les montants des contributions aux opérateurs concernés en précisant les dates des deux échéances, respectivement fixées au 20 août 2002 et 20 septembre 2002.

En date du 18 juin 2003, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté précité en ce qu'il révèle une décision ayant fixé les règles applicables à la détermination du coût net du service universel des télécommunications et qu'il détermine le coût net prévisionnel du service universel pour l'année 2002.

Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat précisait que la ministre déléguée à l'industrie « pouvait dans les circonstances particulières de l'espèce, afin de garantir la pleine application du droit communautaire et la continuité du service universel des télécommunications, définir de nouvelles modalités d'évaluation du coût net du service universel tirant les conséquences des modifications rendues nécessaires par l'intervention de la Cour de justice des Communautés européennes et déterminer en conséquence le montant prévisionnel de ce coût au titre de l'année 2002 ainsi qu'il l'a fait par l'arrêté attaqué ». Cependant, il annulait l'arrêté litigieux, car les nouvelles modalités d'évaluation du coût net du service universel ainsi que le montant de ce coût n'avaient pas été publiés dans des « conditions de clarté et de délai suffisantes » pour permettre aux opérateurs de prévoir le montant des contributions qui leur seraient réclamées.

Afin de confirmer les contributions perçues ou encore à percevoir au titre du prévisionnel 2002 auprès des opérateurs et d'assurer la pérennité du fonds de service universel, il était nécessaire qu'un nouvel acte réglementaire soit pris.

I-2. Sur la nécessité d'un acte réglementaire

En vertu des dispositions du IV de l'article L. 35-3 du code des postes et des télécommunications, les modalités d'application de cet article, et notamment les méthodes d'évaluation, de compensation et du partage des coûts nets du service universel, doivent être précisées par un décret en Conseil d'Etat.

Certes, le Gouvernement a adopté un décret n° 2003-338 du 10 avril 2003 relatif au financement du service universel des télécommunications, afin de modifier le code des postes et télécommunications pour le mettre en conformité avec l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes précité. Mais ce décret, paru en avril 2003, ne valait que pour l'avenir et ne pouvait donc servir de fondement au calcul du coût prévisionnel du service universel pour 2002.

Il était donc nécessaire qu'un nouveau décret en Conseil d'Etat relatif aux modalités de calcul du coût des contributions prévisionnelles pour l'année 2002, doté d'un effet rétroactif, soit publié.

En date du 30 septembre 2003, l'Autorité a rendu un avis (n° 2003-1075) sur le projet de décret relatif au coût net prévisionnel du service universel des télécommunications pour l'année 2002.

Ce décret en Conseil d'Etat n° 2004-408 a été publié au Journal officiel du 14 mai 2004.

I-3. Sur le contenu du décret n° 2004-408

Les dispositions des articles R. 20-31, R. 20-33, R. 20-36 et R. 20-37-1 dans leur rédaction issue du décret du 10 avril 2003, sont rendues applicables au calcul du coût des contributions prévisionnelles pour l'année 2002.

Ces articles ont pour objet de préciser les avantages immatériels à prendre en compte lors du calcul des contributions au service universel et de modifier la composante prenant en compte les recettes de la Liste rouge.

Enfin, le Conseil d'Etat a ajouté un alinéa en vertu duquel les versements dus, le cas échéant, par les opérateurs seront effectués en une seule fois, à compter du 1er mai 2004.

II. - Procédure

En vertu de la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, qui modifie l'article L. 35-3 ainsi que le 4° de l'article L. 36-7 du code des postes et des communications électroniques, il incombe désormais à l'Autorité de déterminer le montant des contributions des opérateurs au fonds de service universel.

A cette fin, l'Autorité a publié préalablement à la présente décision, le 22 juin 2004, les règles envisagées qui sont employées pour la présente évaluation prévisionnelle du service universel de l'année 2002.

L'Autorité n'a pas reçu de remarques d'opérateurs.

III. - Evaluation du coût net prévisionnel

du service universel pour l'année 2002

III-1. Evaluation du coût net des obligations de péréquation tarifaire correspondant aux obligations de péréquation géographique

Le calcul du coût net prévisionnel 2002 de la péréquation géographique doit tenir compte de la prise en compte des coûts et recettes de la Liste rouge.

Avant prise en compte de ces avantages immatériels, le coût net prévisionnel des zones non rentables est égal pour l'année 2002 à :

196,5 millions d'euros au titre des zones non rentables, représentant 3 234 000 abonnés situés dans les zones de moins de 40 habitants au kilomètre carré ;

56 millions d'euros au titre des abonnés non rentables des zones rentables, représentant 2 848 000 abonnés.

En comparaison, le coût net prévisionnel 2002, tel qu'il avait été établi par la décision n° 2001-1145 susvisée, était de 206,58 millions d'euros pour les zones non rentables et de 64,70 millions d'euros pour les abonnés non rentables.

III-2. Evaluation du coût net des « tarifs sociaux »

Avant prise en compte des avantages immatériels, l'évaluation prévisionnelle du coût net de cette composante n'est pas modifiée par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée et est donc évaluée à 132,78 millions d'euros.

III-3. Evaluation du coût net des obligations

de desserte du territoire en publiphones

Avant prise en compte des avantages immatériels, l'évaluation prévisionnelle du coût net de cette composante n'est pas modifiée par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée et est donc évaluée à 24,05 millions d'euros.

III-4. Evaluation du coût net des obligations correspondant à la fourniture d'un service de renseignements et d'un annuaire d'abonnés sous forme imprimée et électronique

Par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée, et conformément au décret n° 2004-408 du 13 mai 2004 susvisé, les coûts et les recettes de la Liste rouge ne doivent plus faire partie de l'évaluation de la composante « Annuaires et services de renseignements ».

Dès lors, l'évaluation prévisionnelle de la composante « Annuaires et services de renseignements » est de 78 millions d'euros, une fois pris en compte le bénéfice net dû aux appels induits par les consultations des annuaires et des services de renseignements, mais sans prendre en compte les coûts et les recettes des services « Pages jaunes ».

L'Autorité considère que les services « Pages jaunes » sont des produits dérivés des annuaires de France Télécom. Ces produits utilisent les mêmes bases de données clients que les annuaires « Pages blanches » et participent à la mission d'information sur les numéros des utilisateurs qui est dévolue aux annuaires et aux services de renseignements.

Dès lors, l'équilibre économique des « Pages blanches » ne saurait s'analyser indépendamment de celles des « Pages jaunes » ; les coûts et les recettes des services « Pages jaunes », mais aussi les appels induits par la consultation de ces produits, doivent donc être intégrés à l'évaluation de la composante « Annuaires et services de renseignements ».

Concernant le nombre d'appels induits, l'Autorité considère qu'une consultation des produits « Pages jaunes » génère un appel. Le rapport annuel 2001 de Wanadoo indique que l'annuaire et les « Pages jaunes » imprimés sont consultés 142 millions de fois par mois, que le site pagesjaunes.fr fait l'objet de 10 millions de consultations par mois.

Après prise en compte des coûts, des recettes et des appels induits par les services « Pages jaunes », l'Autorité constate que la composante « Annuaires et services de renseignements » est bénéficiaire et, qu'à ce titre, aucune compensation n'est due.

III-5. Evaluation des avantages induits du fait

d'être opérateur de service universel

En vertu de l'article L. 35-3 du code et de l'article 1er du décret n° 2004-408 du 13 mai 2004 susvisé, l'Autorité doit évaluer le montant des avantages immatériels pour l'évaluation des contributions prévisionnelles pour l'année 2002.

L'image de marque

L'évaluation des avantages tirés de l'image de marque en 2002 a été effectuée à partir d'une méthodologie développée par l'Autorité, qui s'appuie sur les résultats du sondage mené par l'IFOP en 2001.

Utilisé pour différentes années, un même sondage permet d'obtenir des résultats différents puisque le chiffre d'affaires des clients résidentiels est un paramètre de l'évaluation, exogène au sondage.

Ainsi, le sondage réalisé en 2001 par l'IFOP, et qui a permis d'évaluer l'avantage lié à l'image de marque à 86,9 millions d'euros pour 2001, permet également d'évaluer l'avantage en question pour 2002, en ne modifiant que le chiffre d'affaires des clients résidentiels.

L'avantage lié à l'image de marque est alors fixé à 86,4 millions d'euros pour 2002.

L'Autorité souligne toutefois la difficulté de chiffrer de façon précise l'avantage lié à l'image de marque.

La couverture universelle dans la zone d'exploitation ubiquitaire

Cet avantage est pris en compte dans le modèle de calcul du coût de la péréquation géographique de par la modélisation en coûts évitables (cf. annexe I).

En conséquence, il n'y a pas lieu de prendre en compte à nouveau et isolément cet avantage.

L'évolution dans le temps de la « valeur »

de certains clients (effet lié au cycle de vie)

Un opérateur agissant dans des conditions de marché peut néanmoins souhaiter raccorder une zone ou un publiphone aujourd'hui non rentables, en prévision de l'évolution future de son coût et de ses recettes.

Les recettes des publiphones sont en baisse continue depuis 1998, du fait notamment du développement de la téléphonie mobile, et continueront vraisemblablement à diminuer. Un publiphone non rentable aujourd'hui le sera vraisemblablement encore davantage demain. Dès lors, l'avantage lié à l'évolution dans le temps de la « valeur » des publiphones non rentables est nul pour 2002.

En ce qui concerne les zones, l'Autorité a pris des hypothèses d'évolution de coûts et de recettes globales et unitaires de France Télécom, raisonnables sur la période 2002-2006 : stabilité des coûts de réseau local et des coûts de gestion des abonnés, stabilité du volume « extra-ZLE », baisse de 2 % par an de la recette unitaire « extra-ZLE », diminution de 5 % par an des coûts unitaires de réseau général, de la recette unitaire « intra-ZLE » et du volume « intra-ZLE ». L'évolution des volumes est la résultante d'une augmentation globale, tous opérateurs confondus, et de la perte de parts de marché de France Télécom, qui porte essentiellement sur le trafic local sur la période considérée.

Sous ces hypothèses, la classe de densité comprise entre 29 et 35 habitants/km², représentant 986 000 lignes, non rentable sur l'année 2002, devient rentable sur l'ensemble de la période 2002-2006.

Dès lors, il n'y a pas lieu de prendre en compte cette classe dans l'évaluation du coût prévisionnel 2002 du service universel. Plus exactement, le coût net de cette classe, soit 26,3 millions d'euros pour 2002, représente l'effet lié au cycle de vie pour 2002 et doit être déduit du coût 2002 des zones non rentables.

Le fait que l'effet lié au cycle de vie soit nul en 1998 et 1999, mais positif en 2002, s'explique essentiellement par l'évolution des recettes unitaires sur les périodes considérées. En 1998 et 1999, était anticipée une forte baisse des recettes du service téléphonique sur cinq ans, baisse qui a effectivement eu lieu. Cela explique pourquoi un abonné non rentable en 1998 et 1999 ne l'était pas davantage sur un horizon de cinq ans.

Ce « retournement de tendance » s'observe également dans les évaluations réalisées par l'AGCom, le régulateur italien : l'effet lié au cycle de vie était nul pour 1999 et positif (de 1,4 million d'euros) pour 2000.

L'accès aux données relatives à l'utilisation du téléphone

L'avantage retiré par France Télécom des données dont elle dispose ne peut être pris en compte que pour autant que ces données concernent les seuls abonnés non rentables ou correspondant aux zones non rentables. Cet avantage est donc probablement peu élevé.

L'Autorité n'est pas en mesure aujourd'hui d'estimer l'avantage dont bénéficie l'opérateur de service universel du fait qu'il possède des données relatives à l'utilisation du téléphone dans les zones non rentables.

C'est pourquoi elle évalue à 0 cet avantage pour 2002, sans que cela préjuge de ses évaluations ultérieures.

Bilan

Le tableau ci-dessous récapitule l'évaluation des différents avantages immatériels :

Le tableau ci-dessous résume l'effet de la prise en compte des avantages immatériels sur chacune des composantes :

III-6. Répartition des contributions entre les opérateurs

Par rapport à la décision n° 2001-1145 susvisée, un élément nouveau est à prendre en considération. En effet, la société Kertel a transmis à l'Autorité son souhait de ne plus fournir la prestation « tarifs sociaux » à de nouveaux ayants droit (ou à d'anciens ayants droit arrivant à échéance) à compter du 1er mai 2002. Par son avis n° 2002-308 susvisé, l'Autorité a pris acte de cette demande de Kertel.

Toutefois, la société Kertel continue d'assurer la prestation sociale pour les ayants droit qui l'ont choisie jusqu'à l'échéance de leur abonnement (d'une durée de douze mois). A ce titre, Kertel continue à fournir ce service pour l'ensemble de l'année 2002.

Le crédit de Kertel au titre du fonds de service universel pour 2002 est donc recalculé sur la base de ces nouveaux éléments.

Le crédit dont bénéficie France Télécom (et qui correspond au complémentaire du crédit attribué à Kertel par rapport à l'évaluation prévisionnelle du coût de la composante) est donc modifié en conséquence.

Les avantages immatériels dont bénéficie Kertel, parce qu'elle fournit ce service, ont été évalués à 0.

III-7. Conclusion

L'Autorité, par la présente décision, évalue, à titre prévisionnel pour l'année 2002, en prenant en compte les avantages immatériels, le coût total des obligations de service universel à 296,6 millions d'euros dont :

- 175,2 millions d'euros pour les obligations de péréquation tarifaire correspondant aux obligations de péréquation géographique ;

- 102,8 millions d'euros au titre des tarifs sociaux ;

- 18,6 millions d'euros pour la desserte du territoire en cabines téléphoniques installées sur le domaine public.

A titre de comparaison, l'évaluation du coût prévisionnel 2001 du service universel était de 416 milllions d'euros.

III-8. Modalités de versement prévisionnel 2002

au fonds de service universel

Les régularisations des contributions de service universel pour les années 1997, 1998 et 1999, ayant transité par le fonds de service universel, sont venues en diminution de la contribution prévisionnelle au titre de l'année 2002, qui a été notifiée aux opérateurs par l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 26 juillet 2002.

Le décret n° 2004-408 du 13 mai 2004 relatif aux modalités d'évaluation, de compensation et de partage du coût net prévisionnel du service universel des télécommunications pour l'année 2002 précise : « Par dérogation aux dispositions de l'article R. 20-39, les versements dus, le cas échéant, par les opérateurs seront effectués en une seule fois, à compter du 1er mai 2004. »

La situation des opérateurs qui se sont vu facturer des intérêts de retard en 2002 pour n'avoir pas respecté les dates de paiement du prévisionnel imposées en 2002 sera régularisée : les opérateurs qui ont versé des intérêts de retard seront remboursés par le fonds de service universel, géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Après publication au Journal officiel de la présente décision, l'Autorité notifiera les contributions aux opérateurs en fixant une date d'échéance au plus tôt six semaines après la date de notification.

IV. - Publication de la présente décision et de ses annexes

L'annexe I à la présente décision qui décrit les règles employées pour l'application des articles L. 35-1, R. 20-33, R. 20-35, R. 20-36, R. 20-37-1 et R. 20-39 du code des postes et des communications électroniques est publique.

Puisqu'il s'agit d'évaluations prévisionnelles qui donneront lieu à rectification lors du calcul définitif, l'annexe II-2002 à la présente décision qui précise les contributions nettes prévisionnelles des opérateurs au fonds de service universel pour l'année 2002 ne sera pas publiée,

Décide :