JORF n°9 du 11 janvier 2004

La commission en ayant délibéré le 23 octobre 2003, après que les parties, le rapporteur, les rapporteurs adjoints, le public et les agents de la Commission de régulation de l'énergie se sont retirés.

*
* *

Les faits :
Il ressort des pièces du dossier soumis à la Commission de régulation de l'énergie que la société CEGELEC Sud-Ouest a décidé de réaliser, sur le territoire de la commune de Montjoyer, une centrale éolienne de production d'électricité d'une puissance maximale de 20,25 MW. Ce projet avait été sélectionné, dans le cadre du programme EOLE 2005, à la suite de l'appel à propositions du 31 mai 1999.
Le 13 avril 2000, puis le 12 décembre 2000, la société CEGELEC (ayant entre-temps pris l'appellation ALSTOM Contracting) a demandé à RTE, gestionnaire du réseau public de transport de l'électricité, de proposer un devis pour le raccordement de sa future centrale au réseau public de transport.
La proposition technique et financière que RTE lui a adressée le 8 février 2001 prévoyait la réalisation d'un nouveau poste RAG en coupure sur le tronçon de la ligne 63 kV reliant Châteauneuf à Fugerolles. Le montant des travaux à réaliser s'élevait à 10 450 000 FRF 10 % (soit 1 593 092,20 EUR).
ALSTOM Contracting a signé cette proposition technique et financière et l'a retournée à RTE le 26 avril 2001, en versant 3,5 % du prix à titre d'acompte, soit 365 750 FRF (55 758,23 EUR).
Fin 2001, le promoteur éolien a décidé, pour bénéficier du régime de l'obligation d'achat établi par l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, de constituer deux sites de production au lieu d'un seul, qui seraient gérés par deux sociétés d'exploitation distinctes créées le 18 décembre 2001 : la Société du parc éolien de Montjoyer et la Société du parc éolien de Rochefort-en-Valdaine.
La centrale éolienne de Montjoyer, d'une capacité de production de 9,75 MW, et la centrale éolienne de Rochefort-en-Valdaine, d'une capacité de production de 10,5 MW, ont toutes deux obtenu les titres administratifs nécessaires, à savoir un arrêté d'autorisation d'exploiter, délivré le 15 février 2002, et un certificat ouvrant droit à l'obligation d'achat de l'énergie électrique produite, délivré le 25 mars 2002.
Par courrier du 2 août 2002, Electricité de France, en sa qualité d'acheteur soumis à l'obligation d'achat régie par les dispositions de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, a imposé la création d'un point de livraison au réseau public de distribution pour chaque centrale de production. Afin de se conformer à cette demande, les sociétés d'exploitation ont saisi le gestionnaire de réseau public de distribution d'une demande de raccordement.
Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, a donc établi, le 2 décembre 2002, une nouvelle proposition technique et financière pour chaque site, assortie de la mention « projet », qui a été transmise aux sociétés d'exploitation le 6 décembre 2002. Cette proposition prévoyait la création d'un poste-source commun aux deux installations de production, avec un transformateur 63/20 kV de 36 MVA, et la construction de deux tronçons de raccordement en HTA. Cette proposition technique et financière indiquait un prix de raccordement de 1 012 800,87 EUR pour la centrale de Montjoyer et de 7 800,87 EUR pour la centrale de Rochefort-en-Valdaine, soit un montant global de 1 020 601,74 EUR.
Le courrier qui accompagnait cette proposition indiquait que « certains points techniques sont à définir et à valider ensemble ». Ces précisions ont été données le 18 décembre 2002, au cours d'une réunion à laquelle a fait suite un courrier du 23 décembre 2002 des sociétés d'exploitation, indiquant qu'elles étaient disposées à signer les propositions techniques et financières complétées des remarques formulées dans le compte-rendu de la réunion.
Une nouvelle proposition technique et financière, datée du 13 janvier 2003 et comportant la mention « ne constitue aucunement un engagement d'EDF », a été adressée par Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, pour la centrale de Montjoyer. Le montant de cette nouvelle proposition était de 491.589,87 EUR et faisait explicitement référence au raccordement de l'installation de Rochefort-en-Valdaine dans les termes suivants : « afin de répartir le coût des travaux de construction du poste-source de Montjoyer sur les deux propositions techniques et financières, le montant de création du poste-source sera réparti suivant le nombre d'éoliennes sur chaque site. Ainsi, le coût de création du poste-source de Montjoyer dans la proposition technique et financière de Montjoyer sera de 483 889 EUR HT et dans la proposition technique et financière de Rochefort de 521 111 EUR HT (le total est ainsi de 483 889 + 521 111 = 1 005 000 EUR HT, coût total de création du poste-source). Le montant de cette proposition technique et financière de Montjoyer (491 689,87 EUR HT) est valable uniquement à condition que l'autre proposition (Rochefort-en-Valdaine) soit signée en même temps par le producteur ». Le montant total des travaux, raccordement des deux installations de production en 20 kV et création d'un poste-source, soit 1 020 601,74 EUR, restait donc analogue aux propositions d'Electricité de France du 2 décembre 2002.
Le 22 janvier 2003, par des courriers adressés à Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, les sociétés d'exploitation ont donné leur accord à cette proposition du 13 janvier 2003.
Le 14 février 2003, une nouvelle proposition technique et financière a été élaborée pour la centrale de Rochefort-en-Valdaine, pour un montant de 2 080 926,48 EUR, avec un coût supplémentaire de 1 551 000 EUR au titre des infrastructures du poste-source réalisées par RTE. Cette nouvelle proposition indiquait que son montant était valable à condition que la proposition technique et financière relative à la centrale de Montjoyer soit signée en même temps.
Au cours d'une réunion tenue le 13 mars 2003, les sociétés d'exploitation ont fait part de leur désaccord avec Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, sur le nouveau montant de 2 572 616,35 EUR pour le raccordement des deux installations de production.
Le 26 mars 2003, Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, a pris acte de ce désaccord et a indiqué à chaque société d'exploitation que : « toute interprétation contraire de la Commission de régulation de l'énergie [le] conduirait à revoir immédiatement [sa] proposition technique et financière ».
Le 31 mars 2003, la Société du parc éolien de Rochefort-en-Valdaine a indiqué à Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, que : « devant l'impossibilité de trouver un accord et compte tenu des délais, ensemble, nous nous sommes mis d'accord pour porter ce dossier devant la Commission de régulation de l'énergie. Si cette dernière se rendait à nos propres arguments, il a été convenu que le coût facturé aux deux sites serait adapté en conséquence ». Sous cette réserve, et afin de ne pas retarder la réalisation des raccordements, les sociétés ont signé et retourné à Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, les deux propositions techniques et financières.
Le 17 avril 2003, Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, a adressé aux sociétés d'exploitation des projets de convention de raccordement de leurs installations au réseau public de distribution HTA, dont le montant correspondait à la proposition du 14 février 2003, soit un montant global de 2 572 616,35 EUR. Ces conventions répartissaient la charge des travaux du poste-source et du raccordement entre les deux sociétés d'exploitation, soit un coût global de 1 237 985,87 EUR pour la centrale de Montjoyer et de 1 334 630,48 EUR pour la centrale de Rochefort-en-Valdaine.
Le 24 juin 2003, les deux sociétés d'exploitation ont signé ces conventions de raccordement en rappelant à Electricité de France que : « dans l'hypothèse où la Commission de régulation de l'énergie ferait droit à notre position sur le coût du raccordement de l'installation, la convention de raccordement serait modifiée conformément à sa décision ».
Sur la projection par Electricité de France, en séance publique, de diapositives non versées au dossier au cours de l'instruction :
Les diapositives présentées par Electricité de France en séance publique ne faisaient qu'illustrer les observations du représentant d'Electricité de France, sur la base des pièces et arguments échangés au cours de l'instruction, et n'apportaient aucun élément nouveau au débat.
En conséquence, le principe du contradictoire n'a pas été remis en cause.
Sur le bien-fondé de l'obligation faite par Electricité de France de raccorder directement les installations de production au réseau public de distribution :
Le projet des sociétés d'exploitation prévoyait le raccordement des installations de production au réseau public de transport d'électricité. C'est Electricité de France, en sa qualité d'acheteur soumis à l'obligation d'achat, qui, par lettre du 2 août 2002, a subordonné l'achat de l'énergie électrique produite par les sociétés d'exploitation au titre de l'obligation légale au raccordement direct au réseau public de distribution de chacune des installations de production d'électricité concernées.
Or, ni la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, notamment son article 10 (dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, comme d'ailleurs dans celle issue de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003), ni aucun des textes réglementaires, invoqués par Electricité de France n'ont pour objet ou pour effet de rendre obligatoire le raccordement direct d'une installation de production bénéficiant de l'obligation légale d'achat au réseau public de distribution, ni d'interdire son raccordement direct au réseau public de transport.
La circonstance invoquée par Electricité de France que les « modèles indicatifs de contrats d'achat d'électricité » approuvés par le ministre chargé de l'énergie prévoient une obligation de raccordement direct au réseau public de distribution est, par elle-même, sans influence sur les conditions, fixées par la loi et les textes réglementaires, dans lesquelles Electricité de France doit raccorder une installation de production.
Il résulte également du dossier que le raccordement direct des installations de production considérées au réseau public de distribution n'était pas une condition technique nécessaire à l'exercice effectif des droits des producteurs à faire jouer l'obligation d'achat.
La Commission de régulation de l'énergie relève d'ailleurs que la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement Rhône-Alpes (DRIRE) a considéré que les installations de production d'électricité satisfaisaient aux prescriptions réglementaires en accordant, le 25 mars 2002, des certificats ouvrant droit à l'obligation d'achat de l'énergie électrique produite par les installations de production d'électricité des sociétés d'exploitation de moins de 12 MW chacune raccordées au réseau public de transport.
Il ressort des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas contesté que, sans le courrier d'Electricité de France, pôle clients, du 2 août 2002, les sociétés d'exploitation auraient poursuivi leurs relations avec RTE, gestionnaire du réseau public de transport, et n'auraient pas contracté avec Electricité de France, en tant que gestionnaire du réseau public de distribution. C'est donc bien du seul fait d'Electricité de France, pôle clients, que cette solution a été mise en oeuvre.
Compte tenu du fait que la solution technique initiale de la société CEGELEC, de raccordement d'un poste privé au réseau public de transport, n'était pas incompatible avec l'exercice des droits relatifs à l'obligation d'achat, les sociétés d'exploitation requérantes auraient pu persévérer dans la réalisation de cette solution et faire valoir leur droit devant la Commission de régulation de l'énergie. Elles ne se sont cependant pas engagées dans cette voie.
Quoi qu'il en soit, et compte tenu du fait que le raccordement au réseau public de distribution ne s'imposait pas, le coût global du raccordement au réseau public de transport, égal à la somme des coûts résultant de la proposition technique et financière de RTE en date du 8 février 2001 et de la réalisation du poste privé, constitue le coût maximal pouvant être imputé, au cas présent, aux sociétés d'exploitation.
Sur l'établissement des propositions techniques et financières d'Electricité de France et leurs évolutions :
En application de l'article 8.3 du cahier des charges du RAG, approuvé par le décret du 23 décembre 1994, il appartient à Electricité de France, gestionnaire de réseaux publics, lorsqu'il est saisi d'une demande de raccordement au réseau public d'électricité, de produire une proposition technique et financière dans un délai de trois mois. Le fait pour Electricité de France, gestionnaire de réseaux publics, de ne pas produire une telle proposition technique et financière dans ce délai de trois mois pourrait être considéré comme un refus de raccordement.
Toutefois, dans le cas d'espèce, la Commission de régulation de l'énergie constate que, le 26 juin 2003, date à laquelle elle a été saisie, les sociétés requérantes avaient bien reçu une proposition technique et financière, que d'ailleurs elles ont approuvée, sous la seule réserve de l'appréciation par la Commission de régulation de l'énergie de son montant.
Contrairement à ce que soutient Electricité de France, RTE lui a transmis, dès le 21 novembre 2002, comme cela ressort notamment du message électronique échangé entre eux, une première estimation pour la création du nouveau poste-source de Montjoyer, avec une liste de coûts précisant les actifs à la charge d'Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, dans le cadre du protocole 114 qui le lie à RTE.
Avant la transmission aux sociétés d'exploitation des premières propositions techniques et financières du 2 décembre 2002 et du 13 janvier 2003, Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, avait donc connaissance des actifs physiques qui seraient mis à sa charge au titre du protocole 114.
Electricité de France a, dès lors, manqué à ses devoirs d'information et de transparence en négligeant d'informer les sociétés d'exploitation de l'existence de coûts supplémentaires, puisque, connaissant sa contribution au titre du protocole 114, il lui appartenait d'en informer officiellement les sociétés d'exploitation.
Toutefois, dans le cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que les sociétés d'exploitation ne pouvaient pas ignorer la nécessité de créer un poste-source. En effet, la société ALSTOM Contracting (à laquelle se sont substituées les sociétés d'exploitation) avait accepté, dès le 26 avril 2001, de prendre à sa charge la réalisation du raccordement, au réseau public de transport, de son poste privé. En conséquence, les sociétés d'exploitation ne peuvent sérieusement soutenir qu'elles n'auraient pas pu avoir connaissance en temps utile, du fait que les dépenses correspondantes du poste-source seraient à leur charge.
Il convient donc, pour la Commission de régulation de l'énergie, de rechercher, indépendamment du retard pris par Electricité de France pour produire une proposition technique et financière prenant en compte l'ensemble des dépenses qui devaient être facturées aux sociétés d'exploitation, quelle est la solution de moindre coût qui doit leur être imputée au titre du raccordement au réseau public de leurs installations de production.
Sur le prix de raccordement au réseau public de distribution qu'il convient de retenir :
La participation financière du producteur aux dépenses engagées par les gestionnaires de réseaux publics pour réaliser son raccordement au réseau public d'électricité doit, en application des principes mentionnés au quatrième alinéa de l'article 1er de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, être calculée sur la base d'un schéma de raccordement de moindre coût réalisable pour satisfaire sa demande, dans le respect de la réglementation technique applicable à ce type de raccordement. Si le raccordement d'une installation de production nécessite la création d'un poste-source, le gestionnaire du réseau public de distribution doit choisir une solution technique minimale correspondant au strict besoin de puissance exprimé par le producteur sur la base de la réglementation et des paliers techniques en vigueur.
La solution retenue par Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, comprenant la création d'un nouveau poste-source situé au plus près des installations de production, est d'un coût inférieur, d'une part, au montant du raccordement direct, en HTA, des deux installations de production au poste électrique existant le plus proche, d'autre part, à la solution initiale de la société CEGELEC de raccordement d'un poste privé au réseau public de transport.
En conséquence, la solution retenue par Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, pour le raccordement des deux installations de production apparaît, au vu des pièces produites par les parties, la solution de moindre coût qu'il convient d'imputer aux sociétés d'exploitation. Le montant de cette solution doit être réparti entre les sociétés d'exploitation au prorata de la puissance maximale installée de chaque installation de production.
Les prix spécifiés dans les conventions de raccordement conclues entre les sociétés d'exploitation et Electricité de France étant conformes à la solution de moindre coût, il n'y a pas lieu de les modifier.
Sur les frais engagés au titre de la présente procédure :
Les sociétés d'exploitation demandent à la Commission de régulation de l'énergie de condamner Electricité de France au remboursement des frais exposés par la présente procédure de règlement de différend. Or, si l'article 38 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 habilite la Commission de régulation de l'énergie à préciser les conditions d'ordre financier dans lesquelles l'accès aux réseaux doit être assuré, il ne lui donne pas en revanche, ni aucun autre texte, compétence pour condamner la partie perdante à rembourser les frais de procédure exposés par l'autre partie. Par suite, la demande des sociétés d'exploitation tendant à cette fin ne peut qu'être rejetée,
Décide :


Historique des versions

Version 1

La commission en ayant délibéré le 23 octobre 2003, après que les parties, le rapporteur, les rapporteurs adjoints, le public et les agents de la Commission de régulation de l'énergie se sont retirés.

*

* *

Les faits :

Il ressort des pièces du dossier soumis à la Commission de régulation de l'énergie que la société CEGELEC Sud-Ouest a décidé de réaliser, sur le territoire de la commune de Montjoyer, une centrale éolienne de production d'électricité d'une puissance maximale de 20,25 MW. Ce projet avait été sélectionné, dans le cadre du programme EOLE 2005, à la suite de l'appel à propositions du 31 mai 1999.

Le 13 avril 2000, puis le 12 décembre 2000, la société CEGELEC (ayant entre-temps pris l'appellation ALSTOM Contracting) a demandé à RTE, gestionnaire du réseau public de transport de l'électricité, de proposer un devis pour le raccordement de sa future centrale au réseau public de transport.

La proposition technique et financière que RTE lui a adressée le 8 février 2001 prévoyait la réalisation d'un nouveau poste RAG en coupure sur le tronçon de la ligne 63 kV reliant Châteauneuf à Fugerolles. Le montant des travaux à réaliser s'élevait à 10 450 000 FRF 10 % (soit 1 593 092,20 EUR).

ALSTOM Contracting a signé cette proposition technique et financière et l'a retournée à RTE le 26 avril 2001, en versant 3,5 % du prix à titre d'acompte, soit 365 750 FRF (55 758,23 EUR).

Fin 2001, le promoteur éolien a décidé, pour bénéficier du régime de l'obligation d'achat établi par l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, de constituer deux sites de production au lieu d'un seul, qui seraient gérés par deux sociétés d'exploitation distinctes créées le 18 décembre 2001 : la Société du parc éolien de Montjoyer et la Société du parc éolien de Rochefort-en-Valdaine.

La centrale éolienne de Montjoyer, d'une capacité de production de 9,75 MW, et la centrale éolienne de Rochefort-en-Valdaine, d'une capacité de production de 10,5 MW, ont toutes deux obtenu les titres administratifs nécessaires, à savoir un arrêté d'autorisation d'exploiter, délivré le 15 février 2002, et un certificat ouvrant droit à l'obligation d'achat de l'énergie électrique produite, délivré le 25 mars 2002.

Par courrier du 2 août 2002, Electricité de France, en sa qualité d'acheteur soumis à l'obligation d'achat régie par les dispositions de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, a imposé la création d'un point de livraison au réseau public de distribution pour chaque centrale de production. Afin de se conformer à cette demande, les sociétés d'exploitation ont saisi le gestionnaire de réseau public de distribution d'une demande de raccordement.

Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, a donc établi, le 2 décembre 2002, une nouvelle proposition technique et financière pour chaque site, assortie de la mention « projet », qui a été transmise aux sociétés d'exploitation le 6 décembre 2002. Cette proposition prévoyait la création d'un poste-source commun aux deux installations de production, avec un transformateur 63/20 kV de 36 MVA, et la construction de deux tronçons de raccordement en HTA. Cette proposition technique et financière indiquait un prix de raccordement de 1 012 800,87 EUR pour la centrale de Montjoyer et de 7 800,87 EUR pour la centrale de Rochefort-en-Valdaine, soit un montant global de 1 020 601,74 EUR.

Le courrier qui accompagnait cette proposition indiquait que « certains points techniques sont à définir et à valider ensemble ». Ces précisions ont été données le 18 décembre 2002, au cours d'une réunion à laquelle a fait suite un courrier du 23 décembre 2002 des sociétés d'exploitation, indiquant qu'elles étaient disposées à signer les propositions techniques et financières complétées des remarques formulées dans le compte-rendu de la réunion.

Une nouvelle proposition technique et financière, datée du 13 janvier 2003 et comportant la mention « ne constitue aucunement un engagement d'EDF », a été adressée par Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, pour la centrale de Montjoyer. Le montant de cette nouvelle proposition était de 491.589,87 EUR et faisait explicitement référence au raccordement de l'installation de Rochefort-en-Valdaine dans les termes suivants : « afin de répartir le coût des travaux de construction du poste-source de Montjoyer sur les deux propositions techniques et financières, le montant de création du poste-source sera réparti suivant le nombre d'éoliennes sur chaque site. Ainsi, le coût de création du poste-source de Montjoyer dans la proposition technique et financière de Montjoyer sera de 483 889 EUR HT et dans la proposition technique et financière de Rochefort de 521 111 EUR HT (le total est ainsi de 483 889 + 521 111 = 1 005 000 EUR HT, coût total de création du poste-source). Le montant de cette proposition technique et financière de Montjoyer (491 689,87 EUR HT) est valable uniquement à condition que l'autre proposition (Rochefort-en-Valdaine) soit signée en même temps par le producteur ». Le montant total des travaux, raccordement des deux installations de production en 20 kV et création d'un poste-source, soit 1 020 601,74 EUR, restait donc analogue aux propositions d'Electricité de France du 2 décembre 2002.

Le 22 janvier 2003, par des courriers adressés à Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, les sociétés d'exploitation ont donné leur accord à cette proposition du 13 janvier 2003.

Le 14 février 2003, une nouvelle proposition technique et financière a été élaborée pour la centrale de Rochefort-en-Valdaine, pour un montant de 2 080 926,48 EUR, avec un coût supplémentaire de 1 551 000 EUR au titre des infrastructures du poste-source réalisées par RTE. Cette nouvelle proposition indiquait que son montant était valable à condition que la proposition technique et financière relative à la centrale de Montjoyer soit signée en même temps.

Au cours d'une réunion tenue le 13 mars 2003, les sociétés d'exploitation ont fait part de leur désaccord avec Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, sur le nouveau montant de 2 572 616,35 EUR pour le raccordement des deux installations de production.

Le 26 mars 2003, Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, a pris acte de ce désaccord et a indiqué à chaque société d'exploitation que : « toute interprétation contraire de la Commission de régulation de l'énergie [le] conduirait à revoir immédiatement [sa] proposition technique et financière ».

Le 31 mars 2003, la Société du parc éolien de Rochefort-en-Valdaine a indiqué à Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, que : « devant l'impossibilité de trouver un accord et compte tenu des délais, ensemble, nous nous sommes mis d'accord pour porter ce dossier devant la Commission de régulation de l'énergie. Si cette dernière se rendait à nos propres arguments, il a été convenu que le coût facturé aux deux sites serait adapté en conséquence ». Sous cette réserve, et afin de ne pas retarder la réalisation des raccordements, les sociétés ont signé et retourné à Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, les deux propositions techniques et financières.

Le 17 avril 2003, Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, a adressé aux sociétés d'exploitation des projets de convention de raccordement de leurs installations au réseau public de distribution HTA, dont le montant correspondait à la proposition du 14 février 2003, soit un montant global de 2 572 616,35 EUR. Ces conventions répartissaient la charge des travaux du poste-source et du raccordement entre les deux sociétés d'exploitation, soit un coût global de 1 237 985,87 EUR pour la centrale de Montjoyer et de 1 334 630,48 EUR pour la centrale de Rochefort-en-Valdaine.

Le 24 juin 2003, les deux sociétés d'exploitation ont signé ces conventions de raccordement en rappelant à Electricité de France que : « dans l'hypothèse où la Commission de régulation de l'énergie ferait droit à notre position sur le coût du raccordement de l'installation, la convention de raccordement serait modifiée conformément à sa décision ».

Sur la projection par Electricité de France, en séance publique, de diapositives non versées au dossier au cours de l'instruction :

Les diapositives présentées par Electricité de France en séance publique ne faisaient qu'illustrer les observations du représentant d'Electricité de France, sur la base des pièces et arguments échangés au cours de l'instruction, et n'apportaient aucun élément nouveau au débat.

En conséquence, le principe du contradictoire n'a pas été remis en cause.

Sur le bien-fondé de l'obligation faite par Electricité de France de raccorder directement les installations de production au réseau public de distribution :

Le projet des sociétés d'exploitation prévoyait le raccordement des installations de production au réseau public de transport d'électricité. C'est Electricité de France, en sa qualité d'acheteur soumis à l'obligation d'achat, qui, par lettre du 2 août 2002, a subordonné l'achat de l'énergie électrique produite par les sociétés d'exploitation au titre de l'obligation légale au raccordement direct au réseau public de distribution de chacune des installations de production d'électricité concernées.

Or, ni la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, notamment son article 10 (dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, comme d'ailleurs dans celle issue de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003), ni aucun des textes réglementaires, invoqués par Electricité de France n'ont pour objet ou pour effet de rendre obligatoire le raccordement direct d'une installation de production bénéficiant de l'obligation légale d'achat au réseau public de distribution, ni d'interdire son raccordement direct au réseau public de transport.

La circonstance invoquée par Electricité de France que les « modèles indicatifs de contrats d'achat d'électricité » approuvés par le ministre chargé de l'énergie prévoient une obligation de raccordement direct au réseau public de distribution est, par elle-même, sans influence sur les conditions, fixées par la loi et les textes réglementaires, dans lesquelles Electricité de France doit raccorder une installation de production.

Il résulte également du dossier que le raccordement direct des installations de production considérées au réseau public de distribution n'était pas une condition technique nécessaire à l'exercice effectif des droits des producteurs à faire jouer l'obligation d'achat.

La Commission de régulation de l'énergie relève d'ailleurs que la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement Rhône-Alpes (DRIRE) a considéré que les installations de production d'électricité satisfaisaient aux prescriptions réglementaires en accordant, le 25 mars 2002, des certificats ouvrant droit à l'obligation d'achat de l'énergie électrique produite par les installations de production d'électricité des sociétés d'exploitation de moins de 12 MW chacune raccordées au réseau public de transport.

Il ressort des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas contesté que, sans le courrier d'Electricité de France, pôle clients, du 2 août 2002, les sociétés d'exploitation auraient poursuivi leurs relations avec RTE, gestionnaire du réseau public de transport, et n'auraient pas contracté avec Electricité de France, en tant que gestionnaire du réseau public de distribution. C'est donc bien du seul fait d'Electricité de France, pôle clients, que cette solution a été mise en oeuvre.

Compte tenu du fait que la solution technique initiale de la société CEGELEC, de raccordement d'un poste privé au réseau public de transport, n'était pas incompatible avec l'exercice des droits relatifs à l'obligation d'achat, les sociétés d'exploitation requérantes auraient pu persévérer dans la réalisation de cette solution et faire valoir leur droit devant la Commission de régulation de l'énergie. Elles ne se sont cependant pas engagées dans cette voie.

Quoi qu'il en soit, et compte tenu du fait que le raccordement au réseau public de distribution ne s'imposait pas, le coût global du raccordement au réseau public de transport, égal à la somme des coûts résultant de la proposition technique et financière de RTE en date du 8 février 2001 et de la réalisation du poste privé, constitue le coût maximal pouvant être imputé, au cas présent, aux sociétés d'exploitation.

Sur l'établissement des propositions techniques et financières d'Electricité de France et leurs évolutions :

En application de l'article 8.3 du cahier des charges du RAG, approuvé par le décret du 23 décembre 1994, il appartient à Electricité de France, gestionnaire de réseaux publics, lorsqu'il est saisi d'une demande de raccordement au réseau public d'électricité, de produire une proposition technique et financière dans un délai de trois mois. Le fait pour Electricité de France, gestionnaire de réseaux publics, de ne pas produire une telle proposition technique et financière dans ce délai de trois mois pourrait être considéré comme un refus de raccordement.

Toutefois, dans le cas d'espèce, la Commission de régulation de l'énergie constate que, le 26 juin 2003, date à laquelle elle a été saisie, les sociétés requérantes avaient bien reçu une proposition technique et financière, que d'ailleurs elles ont approuvée, sous la seule réserve de l'appréciation par la Commission de régulation de l'énergie de son montant.

Contrairement à ce que soutient Electricité de France, RTE lui a transmis, dès le 21 novembre 2002, comme cela ressort notamment du message électronique échangé entre eux, une première estimation pour la création du nouveau poste-source de Montjoyer, avec une liste de coûts précisant les actifs à la charge d'Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, dans le cadre du protocole 114 qui le lie à RTE.

Avant la transmission aux sociétés d'exploitation des premières propositions techniques et financières du 2 décembre 2002 et du 13 janvier 2003, Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, avait donc connaissance des actifs physiques qui seraient mis à sa charge au titre du protocole 114.

Electricité de France a, dès lors, manqué à ses devoirs d'information et de transparence en négligeant d'informer les sociétés d'exploitation de l'existence de coûts supplémentaires, puisque, connaissant sa contribution au titre du protocole 114, il lui appartenait d'en informer officiellement les sociétés d'exploitation.

Toutefois, dans le cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que les sociétés d'exploitation ne pouvaient pas ignorer la nécessité de créer un poste-source. En effet, la société ALSTOM Contracting (à laquelle se sont substituées les sociétés d'exploitation) avait accepté, dès le 26 avril 2001, de prendre à sa charge la réalisation du raccordement, au réseau public de transport, de son poste privé. En conséquence, les sociétés d'exploitation ne peuvent sérieusement soutenir qu'elles n'auraient pas pu avoir connaissance en temps utile, du fait que les dépenses correspondantes du poste-source seraient à leur charge.

Il convient donc, pour la Commission de régulation de l'énergie, de rechercher, indépendamment du retard pris par Electricité de France pour produire une proposition technique et financière prenant en compte l'ensemble des dépenses qui devaient être facturées aux sociétés d'exploitation, quelle est la solution de moindre coût qui doit leur être imputée au titre du raccordement au réseau public de leurs installations de production.

Sur le prix de raccordement au réseau public de distribution qu'il convient de retenir :

La participation financière du producteur aux dépenses engagées par les gestionnaires de réseaux publics pour réaliser son raccordement au réseau public d'électricité doit, en application des principes mentionnés au quatrième alinéa de l'article 1er de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, être calculée sur la base d'un schéma de raccordement de moindre coût réalisable pour satisfaire sa demande, dans le respect de la réglementation technique applicable à ce type de raccordement. Si le raccordement d'une installation de production nécessite la création d'un poste-source, le gestionnaire du réseau public de distribution doit choisir une solution technique minimale correspondant au strict besoin de puissance exprimé par le producteur sur la base de la réglementation et des paliers techniques en vigueur.

La solution retenue par Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, comprenant la création d'un nouveau poste-source situé au plus près des installations de production, est d'un coût inférieur, d'une part, au montant du raccordement direct, en HTA, des deux installations de production au poste électrique existant le plus proche, d'autre part, à la solution initiale de la société CEGELEC de raccordement d'un poste privé au réseau public de transport.

En conséquence, la solution retenue par Electricité de France, gestionnaire du réseau public de distribution, pour le raccordement des deux installations de production apparaît, au vu des pièces produites par les parties, la solution de moindre coût qu'il convient d'imputer aux sociétés d'exploitation. Le montant de cette solution doit être réparti entre les sociétés d'exploitation au prorata de la puissance maximale installée de chaque installation de production.

Les prix spécifiés dans les conventions de raccordement conclues entre les sociétés d'exploitation et Electricité de France étant conformes à la solution de moindre coût, il n'y a pas lieu de les modifier.

Sur les frais engagés au titre de la présente procédure :

Les sociétés d'exploitation demandent à la Commission de régulation de l'énergie de condamner Electricité de France au remboursement des frais exposés par la présente procédure de règlement de différend. Or, si l'article 38 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 habilite la Commission de régulation de l'énergie à préciser les conditions d'ordre financier dans lesquelles l'accès aux réseaux doit être assuré, il ne lui donne pas en revanche, ni aucun autre texte, compétence pour condamner la partie perdante à rembourser les frais de procédure exposés par l'autre partie. Par suite, la demande des sociétés d'exploitation tendant à cette fin ne peut qu'être rejetée,

Décide :