La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu la loi n° 2013-715 du 6 août 2013 tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ;
Vu le code de la santé publique, notamment les articles L. 2151-5, R. 2141-17 à R. 2141-23, et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu la demande présentée le 30 septembre 2020 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (U1251, Marseille Medical Genetics, Faculté de médecine La Timone, Marseille) aux fins d'obtenir le renouvellement de son autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 30 novembre 2020 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 26 novembre et 3 décembre 2020 ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 21 janvier 2021 ;
La demande s'inscrit dans la continuité du protocole précédemment autorisé en 2005, 2010 et 2015 par arrêté des ministres chargés de la santé et de la recherche puis par décision de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine ;
Le projet de recherche utilise les lignées de cellules souches embryonnaires humaines, dites CSEh, H9, I6 et HUES 9, provenant du Technion Institute (Israël) et de l'Université d'Harvard (Etats-Unis). Ces lignées de cellules sont déjà présentes sur le territoire national. Elles ont été importées par Michel Pucéat dans le cadre de la demande initiale d'autorisation de ce protocole de recherche, en vertu d'autorisations délivrées le 8 juillet 2005 par arrêté des ministres chargés de la santé et de la recherche dans le cadre du dispositif transitoire mis en place par la loi du 6 août 2004 (article 37). A l'occasion de la demande d'autorisation d'importation, le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande de renouvellement d'autorisation de recherche présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires. Le conseil d'orientation souligne dans son avis que l'ensemble de ces documents sont de nouveau fournis en annexe ;
Le projet de recherche de Michel Pucéat est très clairement défini, et l'objectif à terme est de proposer une thérapie cellulaire d'une pathologie cardiaque appelée tétralogie de Fallot, par injection de précurseurs cardiomyocytaires issus de lignées de cellules souches embryonnaires humaines (CSEh). En l'absence de progéniteurs cardiaques dans le tissu adulte, les CSEh sont la seule source de cellules thérapeutiques pertinentes. Cet objectif a été décliné sous deux aspects complémentaires, fondamentaux et cliniques ;
S'agissant de la partie fondamentale du protocole de recherche, l'étape d'optimisation de différenciation des CSEh en précurseurs cardiaques est à présent maîtrisée. L'équipe a montré le rôle clé de la protéine BMP2, dont la régulation dépend notamment de l'activation du gène codant la protéine Sox17 par le facteur de transcription Oct4 au sein des cellules progénitrices des cardiomyocytes (cellules dites de la « niche cardiaque »). Ces avancées permettent aujourd'hui d'obtenir de façon reproductible des précurseurs cardiaques, fonctionnels après transplantation chez le gros animal, et donc potentiellement utilisables en clinique. Par ailleurs, la compréhension du processus de différenciation a permis d'élucider les mécanismes de l'atteinte cardiaque dans certaines formes du syndrome de Cornelia de Lange. Ce mécanisme implique notamment le complexe cohésine, qui interagit directement avec Oct4 ;
S'agissant de la partie clinique du protocole, des résultats particulièrement encourageants ont été observés après inoculation chez le gros animal (porc). Cette partie du travail est réalisée en collaboration avec l'équipe de Virginie Lambert (Hôpital Marie Lanelongue) qui a mis au point un modèle expérimental de tétralogie de Fallot créé chirurgicalement. Les précurseurs de cardiomocytes sont déposés directement sur le ventricule droit par la pose d'un patch de collagène. Les premiers résultats ont montré l'implantation des précurseurs cardiaques, leur différenciation in situ et une amélioration fonctionnelle. Les résultats ont également montré la prolifération de précurseurs cardiaques endogènes, dont l'équipe a prouvé qu'ils proviennent de cellules reprogrammées in situ à la pluripotence, vraisemblablement sous l'effet de cytokines inflammatoires ;
Les objectifs du renouvellement sollicité sont d'une part, d'optimiser les conditions de traitement en vue d'une utilisation en clinique, et d'autre part, d'étudier plus précisément les mécanismes conduisant à la reprogrammation de cellules exposées aux cytokines ;
Le conseil d'orientation souligne la grande cohérence scientifique du travail de cette équipe, ainsi que la richesse de ce va-et-vient entre la recherche clinique et la recherche fondamentale. Ce travail a donné lieu à des publications dans des revues à fort facteur d'impact. Dans l'ensemble, la progression du projet suit une logique rigoureuse et cohérente. La finalité médicale ne fait aucun doute et ce projet devrait déboucher sur une application en clinique à l'issue du renouvellement ;
Le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres types de cellules souches que les cellules souches embryonnaires humaines. Les études en recherche ou cliniques avec des cellules souches adultes sans potentialité cardiogénique n'ont pas apporté de satisfaction. S'agissant des cellules souches embryonnaires murines et primates, il n'est pas envisageable d'utiliser des cellules d'origine animale alors que l'objectif général du projet est de développer un produit de thérapie cellulaire en vue d'une utilisation en clinique chez l'homme ;
Concernant les cellules souches pluripotentes induites humaines (iPSC), malgré plusieurs essais cliniques en préparation et quelques rares essais en cours, plusieurs publications avertissent sur les éventuelles modifications du génome lors de la reprogrammation et sur les différences épigénétiques, par comparaison avec les cellules souches embryonnaires humaines. Ces dernières n'ont subi aucune modification génétique contrairement aux cellules souches pluripotentes induites. Les IPs sont sujettes à des aberrations chromosomiques dues à la reprogrammation pouvant biaiser les résultats. De plus, ces cellules différenciées en cardiomyocytes demanderaient également de pratiquer une immunosuppression sur les porcs du fait de l'expression de protéines qui ne sont jamais exprimées naturellement, faisant suite à la reprogrammation cellulaire. A l'inverse, les cellules souches embryonnaires humaines sont nécessaires car elles ont une potentialité de différenciation cardiaque et n'ont subi aucune modification génétique ;
Le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part. Il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues conformément aux dispositions législatives et réglementaires ;
Les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière. L'équipe est compétente et possède toute la légitimité nécessaire pour mener ce protocole. La demande est présentée par Michel Pucéat. Le projet initial a été déposé en 2004 lorsque Michel Pucéat était à Montpellier et a été autorisé en 2005 par arrêté des ministres chargés de la santé et de la recherche. L'équipe a depuis déménagé à Evry, d'abord dans le laboratoire Istem, puis dans des locaux indépendants, où Michel Pucéat a dirigé une équipe Avenir indépendante sur le plan financier. Depuis octobre 2013, il dirige une équipe dans le centre de recherches de Nicolas Lévy à Marseille (environnement scientifique particulièrement adapté au développement de protocoles sur les cellules souches, et à la thématique cardiaque) ;
La pérennité de l'unité ne fait aucun doute, et le financement de ce projet est assuré. Le cout total de projet est estimé de 103 600 € et il sera assuré par des soutiens obtenus de différents organismes, dont une bourse de 80.000 euros de la Fédération française de cardiologie ;
Les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée. Cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des cellules embryonnaires ;
Les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrites et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine dans son rapport et à l'occasion de sa visite sur place le 13 novembre 2020. Le laboratoire dispose des équipements nécessaires à la mise en œuvre de ce protocole de recherche dans des conditions optimales,
Décide :