JORF n°0189 du 17 août 2014

DÉCISION du 11 juillet 2014

Le directeur général par intérim de l'Agence de la biomédecine,

Vu le code de la santé publique, notamment les articles L. 2151-5, R. 2141-17 à R. 2141-23, et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;

Vu la loi n° 2013-715 du 6 août 2013 tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ;

Vu l'arrêté de laministre des affaires sociales et de la santé du 17 juin 2014 portant nomination du directeur général par intérim de l'Agence de la biomédecine à compter du 4 juillet 2014 ;

Vu la décision du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionné à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;

Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 26 juin 2014 ;

Vu la demande présentée le 31 mars 2014 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (UMR 1064) aux fins d'obtenir une autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;

Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;

Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 19 mai 2014 ;

Vu les rapports d'expertise en date des 6 et 28 mai 2014,

Considérant que la greffe de foie apparaît dans certaines pathologies chroniques ou aiguës comme étant la seule thérapeutique pouvant être envisagée (maladies hépatiques héréditaires, hépatites fulminantes…) ; que, dans un contexte de pénurie des foies prélevés à partir de donneurs décédés, la transplantation d'hépatocytes primaires allogéniques se heurte également à la rareté des organes et aux difficultés liées à l'amplificationin vitro des hépatocytes isolés, qui supportent en outre mal la congélation ;
Considérant que la demande a pour objectif, dans une approche préclinique translationnelle, de tester et d'utiliser les cellules souches embryonnaires humaines en tant que source d'hépatocytes de qualité, disponibles en quantité suffisante et développées dans des conditions GMP (« Good Manufacturing Practices », équivalent des « Bonnes Pratiques de Fabrication » (BPF) françaises nécessaires à l'utilisation d'un produit de thérapie cellulaire chez des patients) permettant leur transfert en clinique ; qu'il s'agit d'obtenir, entre autres, la restauration d'au moins 5 % à 10 % de l'activité de l'enzyme défaillant dans les pathologies métaboliques afin d'obtenir une amélioration clinique de 10 % à 30 % de la masse de foie pour appuyer transitoirement la régénération du foie endogène dans les hépatites fulminantes ;
Considérant que l'équipe de M. Tuan Huy Nguyen souhaite valider l'efficacité in vitro de la capacité de différenciation des cellules souches embryonnaires humaines en hépatocytes dérivées en condition GMP, notamment par la sélection de lignées dérivées dans ces conditions et utilisées dans d'autres projets précliniques (RC-9, I6 et ESI-017) en se fondant sur les protocoles mis au point dans le cadre des autorisations de recherche délivrées aux équipes d'Anne Weber/Anne Dubart et Anne Corlu, d'une part, tester l'efficacité et la sécurité des précurseurs hépatocytaires issus de la lignée de CSEH sélectionnée une fois greffés dans les deux modèles animaux utilisés, d'autre part, et, enfin, produire des lots GMP de précurseurs hépatocytaires (2 à 10 milliards par lot) et, par prolongement, afin d'éviter la culture des cellules souches embryonnaires humaines, développer des lignées d'hépatoblastes, cellules progénitrices des hépatocytes matures ;
Qu'il s'agit en conséquence d'un protocole de recherche s'inscrivant dans une finalité médicale ;
Considérant que, en l'état des connaissances scientifiques, elle ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines ; que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres cellules souches ; que l'objectif même de la recherche envisagée explique la nécessité de recourir à des cellules souches embryonnaires humaines dans la mesure où il s'agit d'obtenir des hépatocytes transplantables et de sécuriser la production et la stabilité génétique de telles cellules ; qu'il n'existe pas à ce jour de lignée de cellules souches pluripotentes induites établie en condition GMP ; que l'utilisation des CSEH apparaît dans ce projet indispensable afin de permettre une progression rapide des stratégies thérapeutiques envisagées ; qu'il est à souligner que les recherches sur les IPS et leur utilisation dans des stratégies thérapeutiques sont conduites en parallèle dans le réseau européen auquel collabore l'équipe de M. Tuan Huy Nguyen, mais que, pour autant, de l'avis de la communauté scientifique, des lignées d'IPS GMP permettant un passage en clinique ne seront pas disponibles avant plusieurs années ;
Considérant en conséquence que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche, d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques, d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus aux articles 16 à 16-8 du code civil, avec le consentement préalable du couple géniteur et sans qu'aucun paiement, quelle qu'en soit la forme, leur ait été alloué ; que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée,

Décide :

Article 1

L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (UMR 1064) est autorisé à mettre en œuvre, dans les conditions décrites dans le dossier de demande d'autorisation, le protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ayant pour finalité l'étude de la thérapie cellulaire des maladies du foie avec des hépatocytes générés à partir de cellules souches embryonnaires humaines de grade GMP. Ces recherches sont placées sous la responsabilité de M. Tuan Huy Nguyen.

Article 2

La présente autorisation est accordée pour une durée de quatre ans. Elle peut être suspendue à tout moment pour une durée maximale de trois mois, en cas de violation des dispositions législatives ou réglementaires, par le directeur général de l'Agence de la biomédecine. L'autorisation peut également être retirée, selon les modalités prévues par les dispositions du code de la santé publique susvisées.

Article 3

Toute modification des éléments figurant dans le dossier de demande d'autorisation doit être portée à la connaissance du directeur général de l'Agence de la biomédecine.

Article 4

Le directeur général adjoint chargé des ressources de l'Agence de la biomédecine est chargé de l'exécution de la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait le 11 juillet 2014.

Pour le directeur général par intérim :

Le directeur médical et scientifique,

K. Laouabdia-Sellami