JORF n°82 du 8 avril 2005

Paris, le 5 avril 2005.
Le Premier ministre
à Mesdames et Messieurs les ministres

  1. Les forêts tropicales sont considérées comme le premier réservoir mondial de diversité biologique. Elles sont principalement situées en Amazonie tropicale, dans le bassin du Congo et en Asie du Sud-Est.
    Depuis plusieurs décennies, ces forêts régressent régulièrement sous l'effet conjugué de la pression démographique, de l'utilisation des terres à des fins agricoles ou d'élevage et d'une exploitation qui n'est pas toujours raisonnée des ressources ligneuses. La surface des forêts tropicales diminue de près de 1 % par an, soit l'équivalent de la couverture forestière de la France métropolitaine, et de nombreux écosystèmes forestiers se dégradent, souvent de façon irréversible.
    Cette situation fait peser des menaces économiques, environnementales, sociales et culturelles sur de nombreuses populations qui ne disposent pas, aujourd'hui, d'autres ressources que celles qu'elles tirent des forêts. Par ailleurs, la préservation et la gestion durable des forêts tropicales constituent un enjeu majeur à l'échelle de la planète et, pour notre pays, une préoccupation particulière à plusieurs titres. La France dispose d'un patrimoine de plus de huit millions d'hectares de forêts dans ses collectivités d'outre-mer. Elle figure parmi les plus importants importateurs européens de bois tropicaux et compte de nombreuses entreprises implantées dans la filière. Enfin, elle entretient, de longue date, des relations de coopération et d'aide au développement en matière forestière avec de nombreux pays, notamment avec les pays du bassin du Congo.
    Le Président de la République s'est engagé, le 24 janvier 2005, lors de l'ouverture de la conférence internationale « Biodiversité : science et gouvernance » qui s'est tenue à l'UNESCO, à ce que notre pays prenne toute sa part dans la lutte contre le commerce illégal des bois tropicaux, notamment des bois protégés, en renforçant les contrôles. Par ailleurs, comme le chef de l'Etat l'a rappelé à Brazzaville le 5 février 2005, la France travaille avec ses partenaires africains pour les aider à développer des filières de bois écocertifiés provenant de forêts gérées de manière durable. Dans le cadre de cette coopération, elle entend accentuer le dialogue entre les acteurs du bassin du Congo et favoriser le renforcement des capacités nécessaires à une gestion durable de ce bassin.
  2. Conscient de la valeur du bois en termes de développement durable, le Gouvernement a annoncé, le 7 avril 2004, un plan d'action en faveur des forêts tropicales. Un des volets de ce plan est consacré aux achats publics. En effet, les acheteurs publics hésitent souvent à se fournir en bois tropical, estimant ne pas disposer de garanties suffisantes sur l'origine du matériau d'un point de vue juridique et écologique. Cela se traduit par une baisse de la demande publique de ce type de bois aussi bien dans la construction que dans les autres utilisations. Or le bois constitue un matériau renouvelable et favorable à la protection de l'environnement dès lors que les forêts dont il est issu sont gérées durablement.
    Le plan d'action arrêté par le Gouvernement vise à accroître progressivement la part, dans les achats publics de bois, des bois tropicaux dont l'origine licite est garantie et qui sont issus d'exploitations forestières engagées dans un processus de gestion durable. Cette part devra être, en 2007, d'au moins 50 % des achats de bois. L'objectif visé pour 2010 est que la totalité des achats publics de produits à base de bois réponde à cette exigence.
    Ces mesures s'inscrivent dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable adoptée par le Gouvernement le 3 juin 2003. L'Etat s'est en effet engagé à donner l'exemple en intégrant dans ses politiques publiques, ainsi que dans son fonctionnement quotidien, les comportements qu'il entend voir adopter par les autres acteurs de la société. C'est pourquoi les acheteurs publics doivent adopter une démarche éco-responsable tendant à promouvoir la gestion durable des forêts tropicales et à lutter contre leur destruction.
  3. Le code des marchés publics permet de fixer des spécifications prenant en compte la protection de l'environnement dans les marchés publics, dès lors que celles-ci sont liées à l'objet du marché et n'ont pas d'effet discriminatoire vis-à-vis des candidats potentiels.
    Au niveau communautaire, la directive 2004/18/CE relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, en cours de transposition encourage également l'intégration de l'environnement dans les marchés publics.
    Chaque fois que l'état de l'offre le permet, les acheteurs publics doivent donc s'assurer, lors du lancement de toute nouvelle procédure de passation de marchés publics de travaux, de fournitures ou de services impliquant des produits à base de bois, quel que soit le mode de passation retenu, que les bois utilisés pour l'exécution du marché proviennent de sources présentant des garanties d'exploitation et de transformation durables. Lors de la conférence internationale « Biodiversité : science et gouvernance », le Président de la République a demandé que l'Etat utilise dans ses grands travaux immobiliers, dès cette année, des bois comportant ces garanties et, notamment, des bois écocertifiés.
    Je vous demande de veiller tout particulièrement à la mise en oeuvre rapide de cette orientation.
    L'annexe à la présente circulaire précise les modalités à mettre en oeuvre, aux trois stades clés de passation des marchés publics, pour atteindre les objectifs précédemment rappelés. Elle fait également état des outils existants auxquels les acheteurs publics peuvent se référer.
  4. J'attire tout particulièrement votre attention sur le fait que l'approche arrêtée par le Gouvernement s'inscrit dans un processus graduel tenant compte de la réalité des pratiques de gestion forestière dans les pays producteurs et de l'état actuel du marché du bois. Des exigences précipitées ou mal adaptées à ce que les exploitants forestiers et les professionnels de la filière bois sont en mesure de fournir, en termes de documents justificatifs ou de produits, pourraient conduire à des substitutions aboutissant à un effet contraire à celui recherché.
    Si la sauvegarde des forêts tropicales constitue la préoccupation majeure, les dispositions formant l'annexe sont à appliquer à l'ensemble des achats publics de produits à base de bois, quelle que soit l'origine des bois, afin de promouvoir une gestion et une valorisation durables de tous les types de forêts.
    Vous voudrez bien veiller à ce que les services et les établissements publics placés sous votre tutelle se conforment à ces dispositions et inciter les collectivités territoriales à s'y référer.
    Un bilan de la mise en oeuvre de ces dispositions sera effectué début 2006.

Historique des versions

Version 1

Paris, le 5 avril 2005.

Le Premier ministre

à Mesdames et Messieurs les ministres

1. Les forêts tropicales sont considérées comme le premier réservoir mondial de diversité biologique. Elles sont principalement situées en Amazonie tropicale, dans le bassin du Congo et en Asie du Sud-Est.

Depuis plusieurs décennies, ces forêts régressent régulièrement sous l'effet conjugué de la pression démographique, de l'utilisation des terres à des fins agricoles ou d'élevage et d'une exploitation qui n'est pas toujours raisonnée des ressources ligneuses. La surface des forêts tropicales diminue de près de 1 % par an, soit l'équivalent de la couverture forestière de la France métropolitaine, et de nombreux écosystèmes forestiers se dégradent, souvent de façon irréversible.

Cette situation fait peser des menaces économiques, environnementales, sociales et culturelles sur de nombreuses populations qui ne disposent pas, aujourd'hui, d'autres ressources que celles qu'elles tirent des forêts. Par ailleurs, la préservation et la gestion durable des forêts tropicales constituent un enjeu majeur à l'échelle de la planète et, pour notre pays, une préoccupation particulière à plusieurs titres. La France dispose d'un patrimoine de plus de huit millions d'hectares de forêts dans ses collectivités d'outre-mer. Elle figure parmi les plus importants importateurs européens de bois tropicaux et compte de nombreuses entreprises implantées dans la filière. Enfin, elle entretient, de longue date, des relations de coopération et d'aide au développement en matière forestière avec de nombreux pays, notamment avec les pays du bassin du Congo.

Le Président de la République s'est engagé, le 24 janvier 2005, lors de l'ouverture de la conférence internationale « Biodiversité : science et gouvernance » qui s'est tenue à l'UNESCO, à ce que notre pays prenne toute sa part dans la lutte contre le commerce illégal des bois tropicaux, notamment des bois protégés, en renforçant les contrôles. Par ailleurs, comme le chef de l'Etat l'a rappelé à Brazzaville le 5 février 2005, la France travaille avec ses partenaires africains pour les aider à développer des filières de bois écocertifiés provenant de forêts gérées de manière durable. Dans le cadre de cette coopération, elle entend accentuer le dialogue entre les acteurs du bassin du Congo et favoriser le renforcement des capacités nécessaires à une gestion durable de ce bassin.

2. Conscient de la valeur du bois en termes de développement durable, le Gouvernement a annoncé, le 7 avril 2004, un plan d'action en faveur des forêts tropicales. Un des volets de ce plan est consacré aux achats publics. En effet, les acheteurs publics hésitent souvent à se fournir en bois tropical, estimant ne pas disposer de garanties suffisantes sur l'origine du matériau d'un point de vue juridique et écologique. Cela se traduit par une baisse de la demande publique de ce type de bois aussi bien dans la construction que dans les autres utilisations. Or le bois constitue un matériau renouvelable et favorable à la protection de l'environnement dès lors que les forêts dont il est issu sont gérées durablement.

Le plan d'action arrêté par le Gouvernement vise à accroître progressivement la part, dans les achats publics de bois, des bois tropicaux dont l'origine licite est garantie et qui sont issus d'exploitations forestières engagées dans un processus de gestion durable. Cette part devra être, en 2007, d'au moins 50 % des achats de bois. L'objectif visé pour 2010 est que la totalité des achats publics de produits à base de bois réponde à cette exigence.

Ces mesures s'inscrivent dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable adoptée par le Gouvernement le 3 juin 2003. L'Etat s'est en effet engagé à donner l'exemple en intégrant dans ses politiques publiques, ainsi que dans son fonctionnement quotidien, les comportements qu'il entend voir adopter par les autres acteurs de la société. C'est pourquoi les acheteurs publics doivent adopter une démarche éco-responsable tendant à promouvoir la gestion durable des forêts tropicales et à lutter contre leur destruction.

3. Le code des marchés publics permet de fixer des spécifications prenant en compte la protection de l'environnement dans les marchés publics, dès lors que celles-ci sont liées à l'objet du marché et n'ont pas d'effet discriminatoire vis-à-vis des candidats potentiels.

Au niveau communautaire, la directive 2004/18/CE relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, en cours de transposition encourage également l'intégration de l'environnement dans les marchés publics.

Chaque fois que l'état de l'offre le permet, les acheteurs publics doivent donc s'assurer, lors du lancement de toute nouvelle procédure de passation de marchés publics de travaux, de fournitures ou de services impliquant des produits à base de bois, quel que soit le mode de passation retenu, que les bois utilisés pour l'exécution du marché proviennent de sources présentant des garanties d'exploitation et de transformation durables. Lors de la conférence internationale « Biodiversité : science et gouvernance », le Président de la République a demandé que l'Etat utilise dans ses grands travaux immobiliers, dès cette année, des bois comportant ces garanties et, notamment, des bois écocertifiés.

Je vous demande de veiller tout particulièrement à la mise en oeuvre rapide de cette orientation.

L'annexe à la présente circulaire précise les modalités à mettre en oeuvre, aux trois stades clés de passation des marchés publics, pour atteindre les objectifs précédemment rappelés. Elle fait également état des outils existants auxquels les acheteurs publics peuvent se référer.

4. J'attire tout particulièrement votre attention sur le fait que l'approche arrêtée par le Gouvernement s'inscrit dans un processus graduel tenant compte de la réalité des pratiques de gestion forestière dans les pays producteurs et de l'état actuel du marché du bois. Des exigences précipitées ou mal adaptées à ce que les exploitants forestiers et les professionnels de la filière bois sont en mesure de fournir, en termes de documents justificatifs ou de produits, pourraient conduire à des substitutions aboutissant à un effet contraire à celui recherché.

Si la sauvegarde des forêts tropicales constitue la préoccupation majeure, les dispositions formant l'annexe sont à appliquer à l'ensemble des achats publics de produits à base de bois, quelle que soit l'origine des bois, afin de promouvoir une gestion et une valorisation durables de tous les types de forêts.

Vous voudrez bien veiller à ce que les services et les établissements publics placés sous votre tutelle se conforment à ces dispositions et inciter les collectivités territoriales à s'y référer.

Un bilan de la mise en oeuvre de ces dispositions sera effectué début 2006.