Article Annexe
Paris, le 30 janvier 2008.
Monsieur le président,
Vous avez bien voulu accepter de présider la commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration.
La politique française de l'immigration a été définie, jusqu'alors, à droit constitutionnel constant. C'est l'œuvre du législateur ainsi que celle du Gouvernement, négociant avec les autorités étrangères des accords bilatéraux de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement, et exerçant son pouvoir réglementaire.
La transformation de la politique d'immigration que le Président de la République appelle de ses vœux fait apparaître, aujourd'hui, la nécessité d'une réflexion sur le cadre constitutionnel des réformes envisagées par le Gouvernement afin de :
― définir des quotas d'immigration ;
― simplifier la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction, voire unifier le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers.
Il appartient à votre commission de préciser le cadre juridique actuel avant de proposer, si cela apparaît nécessaire, les termes d'un projet de révision de la Constitution.
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- En premier lieu, la commission envisagera les adaptations nécessaires à la définition de quotas d'immigration, à caractère normatif.
La commission examinera, d'abord, les différentes expériences conduites à l'étranger afin de mettre en œuvre une régulation quantitative des flux migratoires, c'est-à-dire une politique de quotas ou de plafonds d'immigration.
Elle envisagera, ensuite, le cadre juridique nécessaire à la définition de quotas d'immigration en France. Je vous précise qu'en tout état de cause le Gouvernement exclut que soit défini un quota limitant le nombre des demandeurs d'asile et des réfugiés politiques.
La commission précisera, en particulier, quels pourraient être les rôles respectifs du Gouvernement et du Parlement.
La définition de quotas d'immigration comporterait deux éléments. Elle permettrait, d'une part, une maîtrise globale de l'immigration en France par la fixation du nombre annuel des migrants admis à entrer et séjourner en France, conformément aux besoins et aux capacités d'accueil de la Nation. La définition de quotas permettrait à la France, ensuite, de choisir les différentes composantes de l'immigration, avec comme objectif que l'immigration économique ― elle-même analysée par grandes catégories professionnelles ― représente 50 % du flux total des entrées en vue d'une installation durable. Vous étudierez la possibilité de décliner ce quota global et ces quotas catégoriels selon les grandes régions de provenance des flux migratoires.
Ces orientations, envisagées pour des motifs d'intérêt national, doivent être notamment étudiées au regard de la protection de la vie familiale (telle qu'elle découle de la Constitution, mais aussi de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales), de la liberté du mariage et du principe d'égalité.
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- La commission, en second lieu, étudiera la possibilité de simplifier la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction, voire d'unifier, au profit de l'un d'entre eux, le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers.
L'organisation actuelle ― qui confie aux deux ordres de juridiction et parfois, en leur sein, à des juridictions spécialisées le soin de contrôler les décisions administratives prises en ces matières ― entraîne par sa complexité des inconvénients tant pour les étrangers intéressés que pour la bonne exécution des mesures d'éloignement les concernant.
Je souhaite qu'après un examen attentif des expériences étrangères pertinentes la commission examine, dans le respect des droits de la défense, l'hypothèse d'une simplification, voire d'une unification de ce contentieux et, le cas échéant, de la création d'une juridiction spécialisée. Votre réflexion pourra utilement s'étendre à l'articulation entre le contentieux de droit commun des étrangers et celui des refus de reconnaissance de la qualité de réfugié.
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Je vous saurais gré de bien vouloir me rendre vos conclusions à la fin du mois de mai.
En vous remerciant pour le précieux concours que vous avez bien voulu accepter d'apporter à la définition du cadre juridique de la nouvelle politique d'immigration, je vous prie de croire, Monsieur le président, à l'assurance de mes sentiments les meilleurs.
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