Le code civil est totalement muet sur la question des négociations précontractuelles. Par voie de conséquence, de nombreuses règles ont été élaborées par la jurisprudence.
Cette sous-section vise en premier lieu à fixer les principes régissant la phase précontractuelle, en codifiant les solutions jurisprudentielles établies : principe de liberté des négociations précontractuelles jusque dans leur rupture, fondé sur le principe de liberté contractuelle ; principe de bonne foi devant gouverner ces négociations précontractuelles (et rappel de son caractère d'ordre public) ; sanction de la faute commise dans l'initiative, le déroulement ou la rupture des négociations par l'engagement de la responsabilité de son auteur (article 1112). Cette responsabilité sera en principe de nature extracontractuelle, sauf aménagement conventionnel de cette phase de négociation et de sa rupture. Au regard des divergences entre les juges du fond, il est apparu préférable dans un souci de sécurité juridique, de préciser dans la loi l'étendue du préjudice réparable : est donc consacrée la jurisprudence de la Cour de cassation excluant du préjudice réparable les avantages que permettait d'espérer la conclusion du contrat, y compris la perte de chance de réaliser les gains attendus du contrat (article 1112 alinéa 2). Une telle solution se justifie pleinement : sur le plan de la causalité tout d'abord, la rupture des pourparlers est un acte juridique générateur d'un certain nombre de dommages mais pas nécessairement de la non conclusion du contrat puisque la faute sanctionnée est la faute dans l'exercice du droit de rupture et non la rupture en elle-même ; en application du principe de liberté contractuelle, ensuite, qui a pour corollaire la liberté de ne pas contracter ; enfin, indemniser le profit escompté de la conclusion du contrat, même sous la forme atténuée d'une perte de chance, conduirait à donner indirectement effet à un contrat qui n'a pas été conclu.
Est ensuite introduite l'existence d'un devoir général d'information (article 1112-1), d'ordre public. Une telle obligation précontractuelle d'information étant déjà largement admise en jurisprudence et diverses obligations d'information spécifiques figurant dans des lois spéciales (notamment en droit de la consommation), il est apparu opportun de consacrer dans le code civil de manière autonome, indépendamment du devoir de bonne foi, ce principe essentiel à l'équilibre des relations contractuelles, et d'en fixer un cadre général. Une telle obligation générale est d'ailleurs prévue dans plusieurs projets doctrinaux européens de réforme du droit des contrats. Afin de ne pas susciter une insécurité juridique et de répondre aux inquiétudes des entreprises, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation (alinéa 2). Il est en outre subordonné à plusieurs conditions : l'importance déterminante de l'information pour le consentement de l'autre partie (la notion d'information déterminante étant définie à l'alinéa 3) ; la connaissance de l'information par le créancier ; l'ignorance de l'information par l'autre partie, cette ignorance devant être légitime et pouvant tenir aux relations de confiance entre les cocontractants (ainsi le devoir de s'informer fixe-t-il la limite de l'obligation précontractuelle d'information). La règle de preuve posée au quatrième alinéa correspond à la solution dégagée en jurisprudence, les praticiens souhaitant consacrer explicitement dans la loi ce rappel du droit commun de la preuve. Le cinquième alinéa précise que le devoir d'information est une règle d'ordre public.
Le dernier alinéa précise que le manquement à ce devoir est sanctionné par l'engagement de la responsabilité de celui qui en était tenu, et qu'il peut également entraîner la nullité du contrat s'il a provoqué un vice du consentement - erreur ou dol. En effet, un tel manquement pourra dans certaines hypothèses ne pas provoquer de vice du consentement, par exemple dans celle où le contrat ne serait finalement pas conclu : une partie qui aurait négocié pendant des mois avec une autre, et découvrirait tardivement et fortuitement une information déterminante que celle-ci aurait dû lui fournir, pourrait refuser de conclure le contrat, et réclamer la réparation du préjudice subi du fait du manquement au devoir d'information (ex : frais de négociation inutiles, perte de chance de conclure un contrat avec une autre partie, etc.).
Cet alinéa permet de faire le lien avec les vices du consentement, et en particulier la réticence dolosive consacrée à l'article 1137 du texte. L'exigence que l'information retenue ait été d'une importance déterminante pour le consentement de l'autre partie, rapproche les conditions du devoir précontractuel d'information de celles du dol par réticence, mais s'en distingue par un élément essentiel : ainsi, ce n'est que si la violation de l'obligation d'information a été faite intentionnellement pour tromper l'autre contractant, qu'elle sera constitutive d'un dol entraînant la nullité du contrat, comme le prévoit l'article 1137 alinéa 2. En l'absence d'intention de tromper, le défaut d'information, qui peut ne résulter que d'une simple négligence, ne sera sanctionné que par l'octroi de dommages et intérêts. A l'inverse, le texte fait le choix de ne pas subordonner la réticence dolosive à l'existence d'un devoir d'information, conformément à une conception plus solidaire du contrat qui met l'accent sur la sanction de l'intention de tromper (l'erreur provoquée étant toujours excusable).
Il est enfin apparu important, dans le cadre d'un droit commun des contrats rénové, de poser une obligation de confidentialité pesant sur les parties négociatrices (article 1112-2), en s'inspirant des projets d'harmonisation européens. La jurisprudence l'admet d'ailleurs dans certaines circonstances, et une clarification textuelle était sollicitée des praticiens (notamment afin de viser la divulgation, c'est-à-dire l'hypothèse où l'information est en réalité utilisée par un tiers à qui le négociateur a transmis l'information).
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