II. - Sur la régularité de la procédure
d'adoption de certains amendements
Selon la saisine, les articles 1er, 4, 18, 19 et 20, issus d'amendements parlementaires, auraient été adoptés en méconnaissance des règles régissant l'exercice du droit d'amendement. Mais si les requérants reprochent indifféremment à ces articles de constituer des « cavaliers », il convient, en réalité, compte tenu des règles que la jurisprudence a déduites des articles 39, 44 et 45 de la Constitution, de distinguer suivant la nature des dispositions en cause et le stade de la discussion auquel elles ont été introduites dans la loi déférée.
On relèvera d'abord que les articles contestés ont une portée limitée, de sorte qu'ils satisfont, en tout état de cause, à l'une des conditions posées par la jurisprudence issue de la décision no 86-221 DC du 29 décembre 1986, suivant laquelle les adjonctions ou modifications apportées au texte en cours de discussion ne sauraient dépasser, par leur objet et leur portée, les limites inhérentes à l'exercice du droit d'amendement.
La seule question est donc celle du respect des autres conditions : les articles issus d'amendements ne doivent pas être dépourvus de tout lien avec les autres dispositions de la loi (no 85-191 DC du 10 juillet 1985) et, pour ceux qui interviennent après la réunion de la commission mixte paritaire, il est en outre nécessaire qu'ils soient en relation directe avec une disposition du texte en discussion ou qu'ils assurent la coordination avec un autre texte en cours d'examen au Parlement (no 98-402 DC du 25 juin 1998).
Sur le premier point, il ressort de la jurisprudence issue de la décision du 10 juillet 1985 que, pour que la condition qu'elle pose soit remplie, il suffit que les amendements en cause puissent se rattacher à l'une des matières ou à l'un des thèmes traités par le texte initialement déposé, sans qu'il s'agisse nécessairement d'une parenté proche avec des dispositions précises du projet.
C'est ainsi que, par exemple, l'existence d'un lien suffisant a été reconnue dans le cas d'un projet de loi dont le contenu concernait des aspects variés du droit de l'urbanisme, et dans lequel avait été inséré un amendement relatif à l'expropriation en vue de la réalisation de voies de chemin de fer (no 89-256 DC du 25 juillet 1989). De même ont été jugés réguliers des amendements se rattachant à la fiscalité directe des collectivités locales, qui avaient été introduits dans un projet de loi relatif à la révision générale des évaluations cadastrales, qui comportait aussi des dispositions relatives aux règles d'assiette des impositions directes locales (no 90-277 DC du 25 juillet 1990).
Au regard de ces critères, il est clair que l'article 1er de la loi adoptée, qui abaisse de 3 500 habitants à 2 500 le seuil d'application du mode de scrutin municipal issu de la loi du 19 novembre 1982, n'est pas sans lien avec les dispositions du projet relatives à l'élection des conseillers municipaux.
S'agissant de l'article 4, qui tend à appliquer la parité dans les candidatures au Conseil supérieur des Français de l'étranger, il n'est pas non plus douteux qu'il présente un lien avec le projet déposé : d'une part, il porte également sur la parité dans les candidatures aux élections ; d'autre part, il concerne, tout comme l'article 3 qui figurait dans ce projet, l'élection des sénateurs, dans la mesure où ce Conseil constitue le collège qui élit les sénateurs représentant les Français de l'étranger. On relèvera que l'amendement qui est à l'origine de cet article 4 a été déposé en première lecture au Sénat, ce qui, à ce stade, était a priori régulier, au regard de la jurisprudence issue de la décision du 10 juillet 1985.
Il se trouve cependant qu'il a alors été rejeté, et n'a finalement été adopté qu'en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, après l'échec de la commission mixte paritaire. Dans la mesure où le Conseil constitutionnel estimerait devoir appliquer à une telle hypothèse les exigences posées par la décision du 25 juin 1998, il lui appartiendrait alors d'apprécier si le lien qui existe incontestablement entre cet amendement et le projet de loi peut être regardé comme suffisamment direct, au sens de cette jurisprudence.
La régularité des articles 18 et 19, qui clarifient la procédure de démission d'office des conseillers généraux en l'harmonisant avec celle qui régit les conseillers municipaux et régionaux, doit être appréciée au regard de chacune des deux branches de la jurisprudence. En effet, le premier a été introduit avant la réunion de la commission mixte paritaire, alors que le second n'est intervenu qu'après. Au regard des conditions posées par la décision du 25 juin 1998, il est clair que l'article 19, qui concerne le cas où survient une cause d'incompatibilité, est en relation directe avec l'article 18, qui n'avait envisagé que l'inéligibilité. Quant à l'article 18, on peut considérer qu'il n'est pas dépourvu de tout lien avec le texte, si l'on tient compte de ce qu'il s'agit, dans les deux cas, de droit électoral.
Enfin, il est vrai que l'on peut davantage s'interroger sur la régularité de l'introduction, par voie d'amendement, des dispositions de l'article 20 relatif aux conditions d'éligibilité des membres du conseil consultatif d'une commune associée.
1 version