JORF n°0224 du 27 septembre 2022

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Analyse de la croissance potentielle et du scénario macroéconomique pour 2022-2027

Résumé Le Haut Conseil pense que les prévisions de croissance du gouvernement sont trop optimistes et risquées.
  1. La prévision de croissance potentielle du Gouvernement, fixée à 1,35 % sur toute la période 2022-2027, est identique à celle qui avait été retenue en fin de période par la LPFP 2018-2022. La décomposition des contributions à la croissance potentielle de 1,35 % à partir de 2022 prend acte du ralentissement de la productivité globale des facteurs (PGF) constaté avant la crise sanitaire. La contribution de la PGF passe ainsi de 0,6-0,7 point dans la précédente LPFP à 0,4-0,5 point dans le projet actuel, une estimation conforme aux tendances antérieures à la crise sanitaire.
  2. En revanche, la contribution du facteur travail est attendue en hausse, passant de 0,1 à 0,2 point avant la crise sanitaire à une fourchette de 0,3-0,4 point entre 2023 et 2027 dans le projet de LPFP. Le Gouvernement fait l'hypothèse que l'impact d'un ensemble de réformes (revenu de solidarité active, retraites, assurance-chômage, apprentissage…) ferait plus que compenser le net ralentissement de la population active projeté par l'Insee. Comme il l'avait énoncé dans son avis sur le programme de stabilité, le Haut Conseil considère que l'impact de ces réformes, sur lesquelles le Gouvernement n'a pas fourni plus d'information que dans le programme de stabilité, est surestimé, en particulier dans les premières années de programmation puisque, même en les supposant rapidement mises en œuvre, ces réformes ne devraient faire sentir leurs effets que progressivement.
  3. De même, la contribution du capital est attendue en hausse, à 0,5 %/0,6 %, 0,1 point au-dessus de sa tendance d'avant-crise, alors même que les conditions de financement, exceptionnellement favorables avant-crise, sont en train de se durcir.
  4. L'évaluation de la croissance potentielle par le Gouvernement est proche de celle du FMI (1,3 %) et de celle de l'OFCE (1,5 % en 2023, 1,4 % en 2024 et 1,3 % après 2025), mais nettement supérieure à celles de la Commission européenne (1,0 %), de l'OCDE (1,0 %) et de Rexecode, qui estime que la croissance potentielle sera inférieure à 1 % après 2023. Une réplication de la méthodologie utilisée par le Gouvernement conduirait à une estimation proche de 1 %, en s'appuyant sur les dernières projections de population active de l'Insee et en tenant notamment compte des effets d'un recul progressif de l'âge légal de départ à la retraite (2).
  5. Il en résulte qu'à la fin de la période de programmation, le PIB potentiel prévu par le Gouvernement est supérieur à celui de la Commission européenne (+2,1 % en 2026) et du FMI (+0,5 % en 2027).
  6. Des risques baissiers importants entourent en outre l'ensemble des estimations de croissance potentielle : possibles conséquences de la crise sanitaire sur le tissu productif et le niveau de compétences de la main-d'œuvre, nouvelles crises susceptibles d'affecter durablement le PIB potentiel, coûts de la transition écologique et de l'assainissement de l'endettement public et privé.
  7. Le Haut Conseil renouvelle donc son appréciation selon laquelle, d'une part, l'hypothèse d'écart de production en 2022 (-1,1 point de PIB), d'autre part celle de croissance potentielle (1,35 % par an de 2022 à 2027) sont optimistes, notamment parce que cette dernière suppose des effets importants et immédiats de réformes (du revenu de solidarité active, des retraites, de l'assurance-chômage, de l'apprentissage…) dont ni les modalités, ni les impacts, ni le calendrier ne sont documentés.
  8. Le Haut Conseil estime que ces hypothèses rendent particulièrement fragile la trajectoire de finances publiques présentée par le Gouvernement sur la période 2023-2027.

II. - Observations sur le scénario macroéconomique pour les années 2023 à 2027

  1. Le scénario du Gouvernement

  2. Selon la saisine du Gouvernement, « La croissance effective sur la période 2024-2027 serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % et l'écart de production ainsi refermé en 2027. La croissance s'établirait à 1,7 % en moyenne sur 2024-2027, avec un rythme un peu plus important en fin (1,8 % en 2027) qu'au début de période (1,6 % en 2024), reflétant la dissipation progressive des contraintes liées à la crise sanitaire et au conflit en Ukraine. »

  3. « L'inflation refluerait progressivement vers son niveau de long terme estimé à 1,75 %, au fur et à mesure de la fin de la transmission des hausses passées de prix de matières premières et de la dissipation des tensions d'approvisionnement. Elle reviendrait en 2026 à +1,75 % au sens de l'IPC, un niveau cohérent avec la cible de la BCE de 2 % pour la zone euro au sens de l'IPCH. »

  4. Appréciation du Haut Conseil

  5. Les observations relatives aux prévisions macroéconomiques du Gouvernement pour les années 2022 et 2023 sont présentées dans le détail dans l'avis n° 2022-4 sur le PLF et le PLFSS pour 2023.

  6. Le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement pour les années 2024 à 2027 présenté dans le projet de LPFP est très proche de celui inscrit dans le Programme de stabilité 2022-2027, sur lequel le Haut Conseil s'est prononcé dans l'avis n° 2022-3.

  7. Les hypothèses de croissance du PIB de 2024 à 2027 sont inchangées par rapport à celles du Programme de stabilité. Le Gouvernement prévoit ainsi une croissance supérieure à la croissance potentielle dès 2024 et ce jusqu'à 2027 : la croissance du PIB est attendue à 1,6 % en 2024, 1,7 % en 2025 et 2026, puis 1,8 % en 2027, contre une croissance potentielle estimée à 1,35 % par an sur la même période. Dans ce contexte, l'écart de production, estimé à -1,1 % du PIB potentiel en 2022, se réduirait graduellement et serait refermé en 2027.

  8. Cette fermeture de l'écart de production sur la période repose à la fois sur une baisse anticipée du taux d'épargne des ménages, le maintien à un niveau élevé du taux d'investissement des entreprises et une contribution positive du commerce extérieur, chaque année, jusqu'en 2027. Aucune de ces hypothèses ne peut être exclue a priori, mais elles sont toutes entourées d'aléas baissiers, si bien que le scénario présenté par le Gouvernement repose sur une combinaison d'hypothèses favorables.

  9. Le taux d'épargne des ménages est prévu en baisse sur toute la période. Son repli serait même un peu plus fort en 2024 et en 2025 qu'anticipé dans le Programme de stabilité. Les nouveaux risques géopolitiques et sanitaires apparus ces dernières années peuvent pourtant inciter les ménages à maintenir durablement une épargne accrue par rapport à la période antérieure ; l'érosion du pouvoir d'achat de leurs actifs entraînée par la forte inflation apparue en 2022 pourrait avoir le même effet. Une baisse temporaire plus forte du taux d'épargne des ménages est toutefois également possible, compte tenu de l'excès d'épargne accumulé en 2020 et 2021 et de la possibilité que les ménages puisent dans leur épargne pour maintenir leur consommation.

Graphique 2 : taux d'épargne des ménages en France
Vous pouvez consulter l'image dans le fac-similé du
JOnº 0224 du 27/09/2022, texte nº 77

Sources : Insee, projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027.


Historique des versions

Version 1

14. La prévision de croissance potentielle du Gouvernement, fixée à 1,35 % sur toute la période 2022-2027, est identique à celle qui avait été retenue en fin de période par la LPFP 2018-2022. La décomposition des contributions à la croissance potentielle de 1,35 % à partir de 2022 prend acte du ralentissement de la productivité globale des facteurs (PGF) constaté avant la crise sanitaire. La contribution de la PGF passe ainsi de 0,6-0,7 point dans la précédente LPFP à 0,4-0,5 point dans le projet actuel, une estimation conforme aux tendances antérieures à la crise sanitaire.

15. En revanche, la contribution du facteur travail est attendue en hausse, passant de 0,1 à 0,2 point avant la crise sanitaire à une fourchette de 0,3-0,4 point entre 2023 et 2027 dans le projet de LPFP. Le Gouvernement fait l'hypothèse que l'impact d'un ensemble de réformes (revenu de solidarité active, retraites, assurance-chômage, apprentissage…) ferait plus que compenser le net ralentissement de la population active projeté par l'Insee. Comme il l'avait énoncé dans son avis sur le programme de stabilité, le Haut Conseil considère que l'impact de ces réformes, sur lesquelles le Gouvernement n'a pas fourni plus d'information que dans le programme de stabilité, est surestimé, en particulier dans les premières années de programmation puisque, même en les supposant rapidement mises en œuvre, ces réformes ne devraient faire sentir leurs effets que progressivement.

16. De même, la contribution du capital est attendue en hausse, à 0,5 %/0,6 %, 0,1 point au-dessus de sa tendance d'avant-crise, alors même que les conditions de financement, exceptionnellement favorables avant-crise, sont en train de se durcir.

17. L'évaluation de la croissance potentielle par le Gouvernement est proche de celle du FMI (1,3 %) et de celle de l'OFCE (1,5 % en 2023, 1,4 % en 2024 et 1,3 % après 2025), mais nettement supérieure à celles de la Commission européenne (1,0 %), de l'OCDE (1,0 %) et de Rexecode, qui estime que la croissance potentielle sera inférieure à 1 % après 2023. Une réplication de la méthodologie utilisée par le Gouvernement conduirait à une estimation proche de 1 %, en s'appuyant sur les dernières projections de population active de l'Insee et en tenant notamment compte des effets d'un recul progressif de l'âge légal de départ à la retraite (2).

18. Il en résulte qu'à la fin de la période de programmation, le PIB potentiel prévu par le Gouvernement est supérieur à celui de la Commission européenne (+2,1 % en 2026) et du FMI (+0,5 % en 2027).

19. Des risques baissiers importants entourent en outre l'ensemble des estimations de croissance potentielle : possibles conséquences de la crise sanitaire sur le tissu productif et le niveau de compétences de la main-d'œuvre, nouvelles crises susceptibles d'affecter durablement le PIB potentiel, coûts de la transition écologique et de l'assainissement de l'endettement public et privé.

20. Le Haut Conseil renouvelle donc son appréciation selon laquelle, d'une part, l'hypothèse d'écart de production en 2022 (-1,1 point de PIB), d'autre part celle de croissance potentielle (1,35 % par an de 2022 à 2027) sont optimistes, notamment parce que cette dernière suppose des effets importants et immédiats de réformes (du revenu de solidarité active, des retraites, de l'assurance-chômage, de l'apprentissage…) dont ni les modalités, ni les impacts, ni le calendrier ne sont documentés.

21. Le Haut Conseil estime que ces hypothèses rendent particulièrement fragile la trajectoire de finances publiques présentée par le Gouvernement sur la période 2023-2027.

II. - Observations sur le scénario macroéconomique pour les années 2023 à 2027

1. Le scénario du Gouvernement

22. Selon la saisine du Gouvernement, « La croissance effective sur la période 2024-2027 serait supérieure à son rythme potentiel de 1,35 % et l'écart de production ainsi refermé en 2027. La croissance s'établirait à 1,7 % en moyenne sur 2024-2027, avec un rythme un peu plus important en fin (1,8 % en 2027) qu'au début de période (1,6 % en 2024), reflétant la dissipation progressive des contraintes liées à la crise sanitaire et au conflit en Ukraine. »

23. « L'inflation refluerait progressivement vers son niveau de long terme estimé à 1,75 %, au fur et à mesure de la fin de la transmission des hausses passées de prix de matières premières et de la dissipation des tensions d'approvisionnement. Elle reviendrait en 2026 à +1,75 % au sens de l'IPC, un niveau cohérent avec la cible de la BCE de 2 % pour la zone euro au sens de l'IPCH. »

2. Appréciation du Haut Conseil

24. Les observations relatives aux prévisions macroéconomiques du Gouvernement pour les années 2022 et 2023 sont présentées dans le détail dans l'avis n° 2022-4 sur le PLF et le PLFSS pour 2023.

25. Le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement pour les années 2024 à 2027 présenté dans le projet de LPFP est très proche de celui inscrit dans le Programme de stabilité 2022-2027, sur lequel le Haut Conseil s'est prononcé dans l'avis n° 2022-3.

26. Les hypothèses de croissance du PIB de 2024 à 2027 sont inchangées par rapport à celles du Programme de stabilité. Le Gouvernement prévoit ainsi une croissance supérieure à la croissance potentielle dès 2024 et ce jusqu'à 2027 : la croissance du PIB est attendue à 1,6 % en 2024, 1,7 % en 2025 et 2026, puis 1,8 % en 2027, contre une croissance potentielle estimée à 1,35 % par an sur la même période. Dans ce contexte, l'écart de production, estimé à -1,1 % du PIB potentiel en 2022, se réduirait graduellement et serait refermé en 2027.

27. Cette fermeture de l'écart de production sur la période repose à la fois sur une baisse anticipée du taux d'épargne des ménages, le maintien à un niveau élevé du taux d'investissement des entreprises et une contribution positive du commerce extérieur, chaque année, jusqu'en 2027. Aucune de ces hypothèses ne peut être exclue a priori, mais elles sont toutes entourées d'aléas baissiers, si bien que le scénario présenté par le Gouvernement repose sur une combinaison d'hypothèses favorables.

28. Le taux d'épargne des ménages est prévu en baisse sur toute la période. Son repli serait même un peu plus fort en 2024 et en 2025 qu'anticipé dans le Programme de stabilité. Les nouveaux risques géopolitiques et sanitaires apparus ces dernières années peuvent pourtant inciter les ménages à maintenir durablement une épargne accrue par rapport à la période antérieure ; l'érosion du pouvoir d'achat de leurs actifs entraînée par la forte inflation apparue en 2022 pourrait avoir le même effet. Une baisse temporaire plus forte du taux d'épargne des ménages est toutefois également possible, compte tenu de l'excès d'épargne accumulé en 2020 et 2021 et de la possibilité que les ménages puisent dans leur épargne pour maintenir leur consommation.

Graphique 2 : taux d'épargne des ménages en France

Vous pouvez consulter l'image dans le fac-similé du

JOnº 0224 du 27/09/2022, texte nº 77

Sources : Insee, projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027.