Synthèse
Le Haut Conseil constate que les prévisions macroéconomiques et de finances publiques pour 2018 sont inchangées dans le scénario du Gouvernement par rapport à celles présentées fin septembre dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2019.
Au vu des informations les plus récentes et notamment des comptes nationaux du 3e trimestre publiés par l'INSEE postérieurement à la saisine du Gouvernement, le Haut Conseil considère que l'hypothèse de croissance de 1,7 % est un peu élevée et qu'une croissance de 1,6 % est plus vraisemblable.
En matière de finances publiques, les aléas paraissent équilibrés : les recettes de TVA pourraient être légèrement inférieures à la prévision et les dépenses de fonctionnement des collectivités locales un peu moins dynamiques que prévu. Des incertitudes subsistent comme chaque année notamment sur le rendement du 5e acompte d'impôt sur les sociétés et sur l'investissement des collectivités locales.
Le Haut Conseil estime au total que la prévision de solde public de - 2,6 points de PIB pour 2018 est plausible au regard des informations portées à sa connaissance.
Le Haut Conseil observe que le déficit structurel estimé pour 2018 est proche de la trajectoire de la loi de programmation (- 2,2 points de PIB contre - 2,1). Il relève qu'après avoir été négatif en 2017, l'effort structurel sera pratiquement nul en 2018, alors même que le chemin à parcourir pour ramener le solde structurel à l'objectif de moyen terme reste important.
En application de l'article 15 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, le Haut Conseil a été saisi par le Gouvernement le 25 octobre 2018 pour rendre un avis sur les prévisions macroéconomiques associées au projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2018 et sur la cohérence de ce projet de loi avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel.
Les prévisions macroéconomiques pour 2018
Les hypothèses économiques retenues dans le PLFR pour 2018 sont inchangées par rapport à celles du projet de loi de finances pour 2019 présenté fin septembre, avec notamment une croissance du PIB en volume de 1,7 %, une hausse des prix à la consommation de 1,8 % en moyenne annuelle, une progression de la masse salariale privée de 3,5 % en valeur (annexes 1 et 2).
Dans son avis du 19 septembre 2018 sur le PLF pour 2019, le Haut Conseil avait estimé que ces hypothèses étaient crédibles (1).
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La publication par l'INSEE, le 30 octobre, d'une progression du PIB de 0,4 % au 3e trimestre donne toutefois à penser que l'hypothèse de 1,7 % retenue par le Gouvernement pour la croissance annuelle moyenne de 2018 est un peu élevée. L'acquis de croissance au 3e trimestre - c'est-à-dire la moyenne annuelle qui serait constatée en 2018 si le PIB était stable au 4e trimestre - est en effet de 1,5 %. Sous réserve des révisions ultérieures par l'INSEE des estimations de croissance, la prévision de 1,7 % suppose une croissance au 4e trimestre d'au moins 0,6 % que les enquêtes de conjoncture d'octobre ne laissent pas attendre. Dans ces conditions, le Haut Conseil considère qu'une croissance de 1,6 % en 2018 est plus vraisemblable.
La prévision de la masse salariale privée (3,5 % en valeur) est en ligne avec les dernières informations en provenance de l'ACOSS.
La prévision de hausse de l'indice des prix à la consommation (1,8 %) est plausible. La hausse du prix du pétrole au cours des dernières semaines (80 $/baril pour une hypothèse de 73 $ retenue dans la prévision de septembre) pourrait toutefois, si elle persiste, se traduire par une inflation légèrement plus élevée en 2018.
Les prévisions de recettes, de dépenses et de solde des finances publiques
Les prévisions de recettes et de dépenses publiques du PLFR connaissent des modifications limitées par rapport aux prévisions associées au PLF pour 2019.
Les recettes font l'objet d'ajustements à la hausse pour les droits de mutation à titre onéreux et pour les recettes non fiscales et à la baisse pour les droits de succession et de donation ainsi que pour l'impôt sur la fortune immobilière (IFI).
Les recettes de TVA encaissées sur les neuf premiers mois de l'année sont en retrait par rapport à la prévision. Un rattrapage important est attendu par le Gouvernement d'ici la fin d'année, en lien notamment avec le rebond prévu de la consommation des ménages et un rythme moins élevé des remboursements et dégrèvements qu'en fin 2017. Le Haut Conseil considère que l'ampleur de ce rattrapage pourrait être plus modérée.
La prévision des autres recettes est globalement en ligne avec les informations disponibles (encaissement des recettes fiscales, prévision de masse salariale de l'ACOSS).
Enfin, une incertitude forte porte, comme chaque année, sur le montant du dernier acompte d'impôt sur les sociétés.
L'augmentation globale des dépenses publiques (hors crédits d'impôts) affichée dans le PLFR pour 2018 est de 1,6 % en valeur. Elle est de 0,7 % en volume déflatée par le prix du PIB et de 0,0 % corrigée par l'indice des prix à la consommation hors tabac. Ces évolutions sont identiques à celles présentées pour 2018 dans le PLF pour 2019.
La prévision des dépenses de l'Etat pour 2018 est identique à celle présentée dans le cadre du PLF pour 2019. L'incertitude sur cette prévision est faible à ce moment de l'année.
Les prévisions de dépenses des administrations de sécurité sociale sont conformes aux dernières informations disponibles (notamment l'avis d'octobre du comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie).
Les dépenses de fonctionnement des administrations publiques locales constatées sur les neuf premiers mois de 2018 sont légèrement inférieures à la prévision. Comme chaque année, une incertitude importante demeure sur leurs dépenses d'investissement.
Le solde public se redresserait légèrement entre 2017 et 2018, de 0,1 point de PIB, pour atteindre - 2,6 points de PIB.
Le Haut Conseil estime au total que ces prévisions de recettes, de dépenses et de solde pour 2018 sont plausibles au regard des informations portées à sa connaissance.
La cohérence avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel
Le redressement du solde nominal de 0,1 point de PIB recouvrirait une amélioration des composantes conjoncturelle (0,2 point) et structurelle (0,1 point) du déficit, partiellement compensée par une forte contribution négative des mesures ponctuelles et temporaires (- 0,2 point) liée au remboursement de la taxe de 3 % sur les dividendes (2).
Cette décomposition du solde public pour 2018 est la même, en points de PIB, que dans le PLF pour 2019. Le déficit structurel estimé pour 2018 est proche de la trajectoire de la loi de programmation pour les années 2018 à 2022 (- 2,2 points de PIB en 2018 contre - 2,1).
L'ajustement structurel, c'est-à-dire la variation du solde structurel, s'établirait en 2018 à 0,1 point de PIB (après 0,3 point en 2017). Il bénéficierait encore d'un léger effet positif de l'élasticité des prélèvements obligatoires au PIB. Cet ajustement structurel n'est pas conforme aux règles du Pacte budgétaire européen (3), qui prévoient un ajustement supérieur à 0,5 point de PIB.
L'effort structurel, c'est-à-dire la partie de l'ajustement structurel directement liée à un effort en dépense ou à des mesures nouvelles de prélèvements obligatoires, sera pratiquement nul en 2018, l'effort réalisé sur la dépense étant compensé par l'impact des baisses de prélèvements.
Décomposition du solde public
| En points de PIB |PLFR pour 2018
(nov. 2018)|LPFP 2018-2022
(janv. 2018)| | |
|----------------------------------|----------------------------------|-----------------------------------|------|------|
| | 2017 | 2018 | 2017 | 2018 |
| Solde public | - 2,7 | - 2,6 |- 2,9|- 2,8|
| Composante conjoncturelle | - 0,3 | - 0,1 |- 0,6|- 0,4|
|Mesures ponctuelles et temporaires| - 0,1 | - 0,2 |- 0,1|- 0,2|
| Solde structurel | - 2,3 | - 2,2 |- 2,2|- 2,1|
Note : les chiffres étant arrondis au dixième, il peut en résulter de légers écarts dans le résultat des opérations.
Source : Projet de loi de finances rectificative pour 2018 et LPFP 2018-2022
Ajustement structurel et effort structurel
| En points de PIB |PLFR pour 2018
(nov. 2018)|LPFP 2018-2022
(janv. 2018)| | |
|-----------------------------------------------------|----------------------------------|-----------------------------------|------|------|
| | 2017 | 2018 | 2017 | 2018 |
|Ajustement structurel = variation du solde structurel| 0,3 | 0,1 | 0,3 | 0,1 |
| Effort structurel | - 0,1 | 0,0 | 0,0 | 0,2 |
| dont effort en dépense (hors crédits d'impôt) | - 0,1 | 0,2 | 0,0 | 0,4 |
| dont mesures nouvelles en recettes | - 0,1 | - 0,2 |- 0,1|- 0,3|
| dont traitement des crédits d'impôt | 0,1 | 0,0 | 0,1 | 0,0 |
| Composante non discrétionnaire | 0,4 | 0,1 | 0,3 |- 0,1|
| dont effets d'élasticité des PO | 0,5 | 0,1 | | |
| dont recettes hors PO | - 0,1 | - 0,1 | | |
Note : les chiffres étant arrondis au dixième, il peut en résulter de légers écarts dans le résultat des opérations.
- Crédits d'impôt : les prélèvements obligatoires sont généralement enregistrés au moment des encaissements, mais il n'en est pas de même pour les crédits d'impôt qui sont enregistrés en droits constatés. L'écart entre les flux de trésorerie et les droits constatés est retracé dans la ligne « traitement des crédits d'impôt ».
- Effort en dépense : correspond à l'écart entre l'évolution des dépenses en volume (déflatée par le prix du PIB) et le PIB potentiel.
- Effort en recettes : correspond au montant des mesures nouvelles en prélèvements obligatoires.
Source : Projet de loi de finances rectificative pour 2018 et LPFP 2018-2022
Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française et joint au projet de loi de finances rectificative pour 2018 lors de son dépôt à l'Assemblée nationale.
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