JORF n°0078 du 2 avril 2011

Avis du

La Commission,

EMET L'AVIS SUIVANT :

I. ― Par lettre en date du 16 mars 2011, la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a saisi la Commission, en application des articles 3 et 4 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 susvisée, en vue d'autoriser le transfert au secteur privé de la société SNPE Matériaux énergétiques (SME), opération comportant également la vente par SNPE de sa participation dans la société Regulus.

SNPE Matériaux énergétiques (SME) est détenue à 99,99 % par la société SNPE et sa filiale intégrale SOFIGEXI. L'article 10 de la loi du 29 juillet 2009 susvisée, modifiant l'article 3 de la loi du 3 juillet 1970 susvisée, a ajouté SNPE à la liste annexée à la loi du 19 juillet 1993 susvisée de privatisation et a autorisé le transfert au secteur privé des filiales de la SNPE, « dans les conditions prévues par la loi du 6 août 1986 ». Le décret du 21 septembre 2010 a autorisé le transfert au secteur privé de la SNPE et de ses filiales.

L'objectif de l'opération présentée à la Commission étant de procéder à la consolidation de la filière française de propulsion solide à l'intérieur du groupe Safran, la cession de SME, hors sa filiale Eurenco et sa participation dans Crossject, est accompagnée de celle de la participation de 40 % que détient SNPE dans la société Regulus, les deux cessions constituant juridiquement un tout indissociable. L'opération réalise le transfert au secteur privé de l'essentiel des activités de SNPE.

Aux termes des dispositions de l'article 4 de la loi du 6 août 1986, la procédure suivie dans cette opération étant celle d'une cession de gré à gré dans le cadre d'un « accord de coopération industrielle, commerciale ou financière », la Commission est appelée à rendre un avis, dont la conformité est requise, sur le choix de l'acquéreur et sur l'ensemble des conditions de sa prise de participation. La Commission doit notamment prendre en compte les garanties accordées au cessionnaire par SNPE et la garantie accordée par l'Etat à SNPE dans le cadre de l'autorisation donnée par l'article 98 du la loi du 29 décembre 2010 susvisée.

La cession du contrôle de SME « emporte restructuration d'une ou plusieurs entreprises intéressant directement la défense nationale » au sens de l'article 1er 1° du décret du 3 septembre 1993 modifié susvisé. Un avis relatif aux objectifs de l'accord de coopération industrielle, commerciale et financière sur la propulsion solide signé par Safran et SNPE a été publié au Journal officiel du 9 mars 2011. La Commission a été informée que cette publication n'a pas suscité de proposition alternative.

Par décret du 14 mars 2011 susvisé, une action spécifique de l'Etat a été instituée au capital de SME, en application de l'article 10 de la loi du 29 juillet 2009 susvisée.

La Commission européenne a décidé le 30 mars 2011 de ne pas s'opposer à l'opération et de la déclarer compatible avec le marché intérieur et l'accord sur l'Espace économique européen.

II. ― Héritier d'une activité très ancienne exercée sous forme de Ferme dès 1665 puis de monopole d'Etat à partir de 1797, le Service des Poudres a été transformé en société en 1971, la Société Nationale des Poudres et Explosifs (SNPE), en application de la loi du 3 juillet 1970 susvisée.

Depuis plusieurs années, l'Etat poursuit l'objectif d'une consolidation de l'activité de propulsion solide en France et il a mandaté le président de SNPE pour rechercher les solutions industrielles permettant de pérenniser les activités des trois branches du groupe : matériaux énergétiques, chimie fine et spécialités chimiques.

S'agissant des matériaux énergétiques, le choix a été fait d'un rapprochement avec les activités complémentaires exercées par Safran. Il concerne les sociétés suivantes :

― SNPE Matériaux Energétiques (SME) exerce principalement deux activités, la propulsion solide (lanceurs spatiaux européens Ariane V et Vega et missiles stratégiques français) et la sécurité automobile (matériaux énergétiques utilisés dans les airbags et ceintures de sécurité). La société a réalisé en 2010 un chiffre d'affaires de 166,5 millions d'euros. Les participations de SME dans Eurenco (100 % voir ci-après) et dans Crossject (4,7 %) ont été transférées à SNPE en décembre 2010 ;

― Roxel, détenu à 50 % par SME et à 50 % par MBDA (entreprise commune de EADS et BAE Systems dans les missiles), est spécialisé dans les activités de propulsion de missiles tactiques de courte et de moyenne portée (carburants et matériaux). Avec un chiffre d'affaires de 107 millions d'euros en 2010, la société détient 54 % de part de marché en Europe et 20 % au niveau mondial ;

― PyroAlliance, détenu à 85 % par SME, à 10 % par Autoliv et à 5 % par EADS ST, fournit des pyromécanismes pour des programmes majeurs de défense (missiles stratégiques et tactiques) et aérospatiaux (Ariane V et Vega). Avec un chiffre d'affaires de 14 millions d'euros, la société détient 15 % de part de marché en Europe ;

― Structil, détenu à 80,05 % par SME et à 19,95 % par Mitsubishi Rayon, produit des matériaux composites à base de carbone destinés principalement à l'aéronautique mais aussi à l'industrie et aux sports. Avec un chiffre d'affaires de 18 millions d'euros, la société détient 6 % de part de marché en Europe ;

― Regulus, détenu à 40 % directement par SNPE et à 60 % par le groupe aéronautique italien Avio, réalise les segments principaux des moteurs des fusées Ariane V et Véga utilisant le propergol solide qu'il produit. La société réalise un chiffre d'affaires de 13 millions d'euros.

L'ensemble des activités qui précèdent, et qui font l'objet de l'opération soumise à la Commission, représentent en 2010 un chiffre d'affaires consolidé de 259 millions d'euros, une marge brute d'exploitation (EBITDA) de 45 millions et un résultat d'exploitation (EBIT) de 30,5 millions. Le chiffre d'affaires est stable depuis plusieurs années ; les agrégats de résultat sont en hausse de l'ordre de 10 % par an sur les cinq derniers exercices.

Les autres activités de SNPE ont fait ou font l'objet de recherche de solutions adaptées :

― Eurenco, spécialisé dans les poudres et explosifs, est désormais détenu à 100 % par SNPE qui a racheté les parts des différents actionnaires. L'avenir de cette société déficitaire, qui pourrait se rapprocher d'un groupe européen, est encore à l'étude ;

― Isochem, fournisseur de produits de chimie fine (pharmacie, cosmétique, agrochimie), a été cédé en février 2010 au fonds allemand Aurelius ;

― Durlin, spécialisé dans les produits pour les ongles, a été cédé en avril 2010 à la société de cosmétique italienne Chromavis ;

― Bergerac NC, site industriel de production de nitrocellulose, est en cours de reprise par la société espagnole Maxam.

SNPE détient par ailleurs un ensemble immobilier important à Paris en cours de cession et 25,9 % du capital du groupe chimique belge Tessenderlo (dont la capitalisation boursière est d'environ 700 millions d'euros).

III. ― Le groupe Safran est né du rapprochement au printemps 2005 des sociétés SNECMA (jusque là contrôlée intégralement par l'Etat) et Sagem.

Le capital de Safran est réparti de la manière suivante :

― Etat français : 30,2 % ;

― salariés : 16 % ;

― autocontrôle : 4,2 % ;

― Areva : 2 %,

― public : 47,6 %.

Safran a réalisé en 2010 un chiffre d'affaires de 11 milliards d'euros, stable depuis plusieurs années, qui se répartit en quatre métiers principaux :

― la propulsion aéronautique et spatiale (52 % du chiffre d'affaires) : moteurs d'avions civils (en particulier série CFM) et militaires ainsi que d'hélicoptères, de missiles et de lanceurs spatiaux, services de maintenance ;

― les équipements aéronautiques (26 % du chiffre d'affaires) : systèmes d'atterrissage et de câblage, nacelles, transmission de puissance ;

― la défense (12 % du chiffre d'affaires) : optronique, navigation inertielle, commandes de vols ;

― la sécurité (10 % du chiffre d'affaires) : solutions d'identification biométrique, cartes à puces.

Pour l'exercice 2010, Safran a publié un résultat opérationnel de 938 millions, en hausse significative, et un résultat net, part du groupe, de 207 millions. Au 31 décembre 2010, Safran affichait des fonds propres de 4,7 milliards d'euros et une trésorerie nette positive.

Parmi ses activités, Safran est présent de façon complémentaire à SNPE dans la propulsion solide via sa filiale SPS (SNECMA Propulsion Solide), fournissant structure, tuyère, allumeur et protection thermique des moteurs. Conscientes de cette complémentarité, les deux sociétés avaient constitué, pour gérer leurs interfaces, le GIE G2P détenu à 75 % par Safran et 25 % par SNPE. Ce GIE a notamment assuré avec succès la maîtrise d'œuvre de la propulsion des missiles balistiques français.

IV. ― Les discussions entre SNPE, l'Etat et Safran en vue de consolider la filière française de propulsion solide ont été engagées au cours du premier semestre 2009. Elles ont donné lieu aux diligences habituelles : salle d'information (data room), visite des sites et entretiens avec les dirigeants de SNPE. La Commission a été tenue informée de toutes les étapes qui se sont traduites par la signature le 1er octobre 2010 d'une lettre d'intention. Les accords ont été signés le 14 février 2011.

Ces accords comprennent trois documents qui ont été présentés à la Commission.

a) Accord de coopération industrielle, commerciale et financière sur la propulsion solide conclu entre Safran et SNPE en présence de l'Etat :

L'avis publié au Journal officiel du 9 mars 2011 résume comme suit les objectifs de l'accord.

« A travers leur projet de rapprochement, les parties visent la création de l'un des premiers acteurs occidentaux dans le domaine de la propulsion solide, sur la base d'un modèle industriel simplifié et intégré, contribuant à la consolidation européenne du secteur. Cette coopération permettra également de respecter les impératifs nationaux spécifiques, notamment relatifs aux technologies nécessaires aux moyens de dissuasion, dans la mesure où l'Etat, qui contrôle SNPE, est également le premier actionnaire de Safran, avec 30,20 % du capital, et constituera ainsi l'actionnaire de référence au sein du groupe contrôlant l'ensemble issu du rapprochement de SME et SPS.

Le rapprochement envisagé, qui s'inscrit dans le cadre d'un accord de coopération industrielle, commerciale et financière, répond à la volonté des parties de faire évoluer la coopération actuelle mise en place, dès 1972, au sein en particulier du GIE G2P.

Le périmètre du rapprochement est le suivant :

― la cession de SME et de ses filiales par SNPE à Safran ;

― la cession par SNPE à Safran de 15 998 actions de la société REGULUS, représentant 40 % du capital et des droits de vote.

Ce regroupement, au sein du groupe Safran, des activités relatives à la propulsion solide, a pour but :

― la mise en commun des bureaux d'études ;

― la simplification des interfaces ;

― l'optimisation des activités industrielles.

La réalisation de ces objectifs devant favoriser le maintien des compétences et l'accroissement des performances dans un contexte de contraintes budgétaires. »

b) Contrat de cession d'actions entre SNPE, SOFIGEXI et Safran (modifié et complété par l'avenant du 30 mars 2011) :

Dans ce contrat, les parties définissent le mode de calcul du prix de cession. A la valeur d'entreprise des actifs cédés (fixée à 296 millions d'euros) est ajoutée la trésorerie nette ajustée et sont retranchées des provisions, tous éléments déterminés à partir des comptes au 31 décembre 2010 et en tenant compte de l'éventuel effet fiscal. Le prix de l'ensemble cédé est ainsi fixé à 343 344 259 euros (dont 327 633 667 pour SME), augmenté d'un supplément forfaitaire de 1,5 millions d'euros par mois calculé prorata temporis.

La réalisation de l'opération est sujette à des conditions suspensives qui doivent être levées le plus tard le 3 avril 2011 et qui concernent principalement les autorisations par la Commission européenne et par arrêté ministériel sur avis conforme de la Commission, la garantie de l'Etat à la SNPE sur les garanties environnementales accordées à Safran (voir ci-après) et l'accord des partenaires de SNPE dans certaines des filiales (MBDA chez Roxel, Mistubishi chez Structil et Avio chez Regulus).

De plus, Safran dispose d'une faculté de renoncer à l'opération au plus tard le 3 avril 2011 si la mise en place de servitudes d'utilité publique sur certains sites industriels n'est pas encore intervenue.

La réalisation de l'opération interviendra dans les cinq jours suivant la levée des conditions suspensives, avec effet au 31 décembre 2010.

Safran reçoit les garanties usuelles en matière de cession (hors les garanties environnementales qui sont traitées dans la convention décrite ci-après) et une garantie spécifique sur une indemnité perçue en application d'un jugement. Ces garanties sont limitées dans le temps et dans leur montant (25 millions d'euros sauf en cas d'inexactitudes de déclarations).

c) Convention de garantie environnementale conclue entre SNPE et Safran en présence de SME, PyroAlliance et Structil :

La complexité des questions environnementales concernant les sites industriels compris dans la cession et qui sont exploités de longue date a conduit les parties à conclure un accord séparé sur les garanties apportées par le vendeur à l'acquéreur en cette matière. Ces garanties couvrent :

― pour une durée de 30 ans, les coûts des mesures de réhabilitation des sites dans le cadre de la poursuite d'activité ;

― pour une durée de 40 ans, les coûts des mesures de réhabilitation, pour un usage industriel du site concerné, en cas de cessation d'activité résultant de décisions des autorités publiques strictement définies par la convention ;

― pour une durée de 15 ans, les recours de tiers.

Le schéma retenu par les parties dans les différents cas est complexe, comprenant des plafonds globaux, ainsi que des plafonds par type de pollution et par site industriel, assortis de tickets modérateurs à la charge de l'acquéreur.

Le montant total et global de la garantie, fixé à 240 millions d'euros, se trouve limité de fait à 216 millions par le jeu des tickets modérateurs dont les taux sont compris entre 10 % et 50 %. A l'issue d'un délai de 15 ans, le plafond global de 240 millions est ramené à 200 millions d'euros.

La garantie environnementale accordée par SNPE à Safran fait l'objet d'une garantie de l'Etat à SNPE dans les conditions prévues par l'article 98 de la loi du 29 décembre 2010, dans la limite d'un plafond de 216 millions d'euros.

V. ― Conformément à la loi, la Commission a procédé à une évaluation multicritères des actifs cédés (SME et participation dans Regulus), prenant en compte, selon la pondération appropriée, les éléments boursiers, la valeur des actifs, les bénéfices réalisés, l'existence des filiales, les perspectives d'avenir de l'entreprise et les engagements laissés à la charge de l'Etat.

A cette fin, elle a disposé des rapports des banques conseils de l'Etat et de la SNPE.

Les banques ont procédé à l'estimation des actifs cédés selon trois méthodes :

― l'actualisation des flux nets de trésorerie pour chacune des sociétés du périmètre cédé est utilisée comme méthode d'évaluation principale. Le calcul, fondé sur le plan d'affaires 2009-2013 établi par SNPE, intègre donc les flux générés au cours des trois années 2011 à 2013. La valeur terminale, qui représente environ 80 % de la valorisation, est établie sur la base d'une année normative et d'un taux de croissance de 0,5 % à l'infini des flux de trésorerie. Les flux sont actualisés à un coût moyen pondéré du capital de 9 % ou 9,3 %. Les banques ont retenu pour Structil un taux de croissance à l'infini et un coût du capital plus élevés ;

― l'application des multiples boursiers de sociétés cotées comparables. Les banques ont retenu des échantillons très voisins d'une dizaine de sociétés comparables européennes ou nord-américaines dans les secteurs des matériaux énergétiques, des motoristes et des équipementiers généralistes de la défense. Les multiples étudiés sont ceux d'EBITDA et d'EBIT pour 2011 et 2012. La banque conseil de l'Etat a également procédé à un calcul séparé sur la base du seul échantillon des matériaux énergétiques (Safran, Alliant Techsystems, Chemring). Structil est étudié à part par les deux banques selon un échantillon spécifique de comparables ;

― l'application des multiples de transactions comparables. Les banques ont retenu des échantillons de transactions récentes ayant porté sur les secteurs des matériaux énergétiques et sur des motoristes. Les multiples étudiés sont ceux d'EBITDA et d'EBIT pour 2010. Structil est étudié à part selon un échantillon spécifique de transactions comparables.

Les banques conseils ont effectué des calculs de sensibilité de l'évaluation par actualisation des flux en fonction de variations des principaux paramètres (coût du capital, taux de croissance à l'infini).

Sur ces bases, les banques conseils présentent des fourchettes d'évaluation de la valeur d'entreprise tant de SME que de l'ensemble du périmètre cédé qui sont convergentes et dans la partie supérieure desquelles s'inscrivent les valeurs d'entreprise retenues par les parties.

La valeur des fonds propres des actifs cédés est obtenue par l'ajout de la trésorerie nette ajustée et la soustraction de provisions. L'effet fiscal éventuel est pris en compte.

Au total les banques concluent que le prix convenu pour la transaction est un peu supérieur à la valeur centrale de leur évaluation.

VI. ― La Commission observe que le rapprochement des activités de propulsion solide de SNPE avec Safran répond à une logique industrielle et à un projet souhaité depuis plusieurs années par les pouvoirs publics. La nécessité d'une coopération étroite entre les deux entités avait déjà conduit à la création du GIE G2P qui, malgré ses réels succès sur le plan technologique, ne permet pas d'éviter les surcoûts et les délais résultant de duplications de tâches et de transferts successifs entre les deux groupes dans le processus de production.

Seule l'intégration industrielle de SME dans le groupe Safran permet de réaliser l'étape supplémentaire souhaitable.

Le transfert au groupe Safran des activités de matériaux énergétiques de SNPE devrait ainsi permettre au nouvel ensemble, devenu un des premiers acteurs occidentaux, de gagner en efficacité, de se présenter sur le marché à l'instar des grandes entreprises intégrées du secteur et d'assurer la pérennité des compétences industrielles et technologiques dans le domaine stratégique des matériaux énergétiques destinés à la défense nationale et à l'espace. Le rapprochement doit conduire à rationaliser les efforts de recherche et développement destinés à mettre au point les prochaines générations de propulseurs.

La propulsion solide est une technologie cruciale pour la politique de défense de la France (missiles stratégiques) et pour le succès de l'Europe spatiale. Les intérêts stratégiques de l'Etat seront préservés d'une part par l'action spécifique instituée au capital de SME par le décret du 14 mars 2011 susvisé et d'autre part par une convention ad hoc avec la société Regulus. L'Etat, premier actionnaire de Safran dont il détient 30 % du capital, dispose aussi de droits contractuels au titre d'une convention avec Safran conclue en 2005 lors du rapprochement de Snecma et de Sagem.

Le prix convenu entre les parties, tant pour SME que pour l'ensemble des actifs cédés (SME et participation dans Regulus), est cohérent avec une évaluation pratiquée selon les méthodes usuelles. La Commission estime qu'il intègre bien la valeur des acquis technologiques et industriels des sociétés cédées ainsi qu'une fraction des synergies attendues de l'opération. Il prend en compte l'incertitude à long terme qui résulte pour les grands programmes de la dépendance vis-à-vis d'un nombre parfois très restreint de clients, et notamment de clients publics pouvant être affectés de façon durable par les contraintes budgétaires.

La Commission a observé que la version initiale du contrat de cession ne permettait pas d'assurer au prix son caractère définitif requis au moment de la publication du présent avis et de l'arrêté d'autorisation. Les parties ont apporté les modifications nécessaires par l'avenant du 30 mars 2011 susvisé.

Les garanties générales accordées par SNPE à Safran ont un caractère usuel et n'appellent pas d'observations particulières.

Les parties ont choisi de traiter la question complexe des risques environnementaux à travers une convention de garantie spécifique. Cette approche a eu l'avantage de permettre une discussion plus objective sur le prix. Le montant de la garantie, correspondant à un maximum de décaissement possible de 216 millions d'euros, élevé par rapport au prix de cession, est conforme aux conclusions des audits réalisés par deux cabinets spécialisés mandatés par les parties. Par nature, le montant des appels en garantie, et des charges qui peuvent en découler pour SNPE, est incertain, tant dans son volume que dans son occurrence dans le temps. Cette incertitude est particulièrement forte en ce qui concerne les conséquences d'éventuelles cessations d'activités sur certains sites dans les cas précis visés par la convention. Les tickets modérateurs laissent une part des coûts à la charge de Safran. Les mécanismes de mise en œuvre de la garantie paraissent raisonnables et équilibrés.

L'Etat contre-garantit SNPE dans les conditions prévues par l'article 98 de la loi du 29 décembre 2010 susvisée. La convention de garantie entre l'Etat et SNPE, dont le texte a été présenté à la Commission, est en cours de signature. La Commission souligne de plus qu'en raison de la durée très longue, jusqu'à 40 ans, sur laquelle portent la garantie de SNPE à Safran et la contre-garantie de l'Etat à SNPE, il est essentiel que soient mis en place dès à présent par l'Etat les moyens nécessaires au suivi attentif de ces garanties sur toute leur durée.

En conclusion, la Commission constate que les accords qui lui ont été présentés constituent un « accord de coopération industrielle, commerciale ou financière » au sens de l'article 1er du décret du 3 septembre 1993 susvisé, qu'ils emportent effectivement, au sens dudit article, restructuration d'une ou plusieurs entreprises intéressant directement la défense nationale, qu'ils préservent les intérêts nationaux et que les conditions de la cession respectent les intérêts patrimoniaux de l'Etat.

VII. ― Pour ces motifs, et au vu de l'ensemble des éléments qui lui ont été transmis, LA COMMISSION EMET UN AVIS FAVORABLE à l'opération qui lui a été présentée ainsi qu'au projet d'arrêté fixant les modalités du transfert au secteur privé de la société SNPE Matériaux Energétiques annexé au présent avis.