JORF n°0130 du 8 juin 2010

Avis du

Saisie par le ministre de la culture et de la communication en application de l'article 7 du décret n° 93-124 du 29 janvier 1993 modifié relatif aux biens culturels soumis à certaines restrictions de circulation,
Vu le code du patrimoine, notamment ses articles L. 111-2 et L. 111-4 ;
Vu le décret n° 93-124 du 29 janvier 1993 modifié relatif aux biens culturels soumis à certaines restrictions de circulation, notamment son article 7 ;
Vu la demande de certificat d'exportation déposée le 29 janvier 2010, relative à un tableau attribué à Jean Malouel, Pietà avec saint Jean et deux anges, peinture sur bois, fin du xive-début du xve siècle ;
La Commission régulièrement convoquée et constituée, réunie le 16 avril 2010 ;
Après en avoir délibéré ;
Considérant que le bien pour lequel le certificat d'exportation est demandé représente un chef d'œuvre, récemment réapparu, de la peinture française du début du xve siècle, dite des « Primitifs français », dont le nombre d'œuvres conservées est très restreint ; que ce tableau constitue, en outre, une des très rares œuvres susceptible d'être attribuée à Jean Malouel (avant 1370-1415), originaire de Gueldre, oncle des frères Limbourg et peintre attitré à partir de 1397 du duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, puis de son successeur, Jean sans Peur ; qu'en effet seules deux autres réalisations ayant subsisté et répertoriées à ce jour sont considérées assez unanimement par les spécialistes comme étant de la main de Jean Malouel, dont la Grande Pietà ronde conservée au Louvre ; que, malgré un traitement différent du même thème, la Pietà avec saint Jean manifeste une grande parenté stylistique avec cette dernière, notamment dans le raffinement de la composition, adaptée à la forme du panneau, la douceur du modelé et la délicatesse de la touche, caractéristiques des œuvres données à Malouel et marquant la synthèse d'influences septentrionales, parisiennes et siennoises ; que la richesse du cadre, dont le décor soigné semble destiné à rivaliser avec les objets précieux prisés à l'époque, ainsi que le caractère rare du rôle dévolu à saint Jean dans la scène, pourraient être des éléments liés à l'identité du commanditaire, certainement le couple royal ou ses oncles Bourgogne et Berry ; qu'il apparaît essentiel de maintenir sur le territoire national, en dépit de son état altéré, ce rarissime témoin de la production d'un des représentants principaux du style élégant, parfois appelé franco-flamand, qui se développe dans les cours princières françaises autour de 1400 sous l'impulsion d'un mécénat fastueux ;
Qu'en conséquence cette œuvre présente un intérêt majeur pour le patrimoine national du point de vue de l'histoire et de l'art et doit être considérée comme un trésor national,
Emet un avis favorable au refus du certificat d'exportation demandé.

Pour la Commission :

Le président,

E. Honorat