JORF n°0054 du 5 mars 2015

AVIS DIVERS n°2015-A-2 du 2 mars 2015

La commission,
Vu la lettre en date du 2 mars 2015 par laquelle le ministre chargé de l'économie a saisi la commission, en application de l'article 26 (I, 2°) de l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014, en vue de la mise en œuvre d'une opération de marché sur le capital de la société Safran ;
Vu l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique et le décret n° 2014-949 du 20 août 2014 portant application de ladite ordonnance ;
Vu le décret n° 2004-1320 du 26 novembre 2004 relatif au transfert du secteur public au secteur privé de la société SNECMA ;
Vu les avis de la Commission des participations et des transferts n° 2005-AC-1 du 17 février 2005 relatif au transfert au secteur privé de la société SNECMA, n° 2011-AC-4 du 31 mars 2011 relatif au transfert au secteur privé de la société SNPE Matériaux Energétiques (SME), n° 2013-A-2 du 25 mars 2013 et n° 2013-A-3 du 27 mars 2013 relatif à une cession sur le marché de titres de Safran, n° 2013-A-6 du 12 novembre 2013 et n° 2013-A-7 du 15 novembre 2013 relatif à une cession sur le marché de titres de Safran ;
Vu les documents d'information financière publiés par Safran et en particulier :

- le communiqué de presse du 25 février 2015 sur les résultats de l'exercice 2014 intitulé « Safran affiche des performances record en 2014 » ;
- le document de présentation intitulé « résultats annuels 2014 » rendu public le 25 février 2015 sur le site internet de la société ;
- le document « bilan et compte de résultat consolidés au 31.12.2014 » rendu public le 25 février 2015 sur le site internet de la société ;

Vu le rapport d'évaluation établi par UBS, banque conseil de l'Etat, transmis à la commission le 27 février 2015, et le document complémentaire remis en séance le 2 mars 2015 ;
Vu la note de l'Agence des participations de l'Etat transmise à la commission le 27 février 2015 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Après avoir entendu le 2 mars 2015 :

  1. Conjointement :

- le ministre chargé de l'économie représenté par Mme Astrid MILSAN, directrice générale adjointe de l'Agence des participations de l'Etat (APE) et MM. François CHAMPARNAUD et Pierre JEANNIN ;
- UBS, banque conseil de l'Etat, représenté par MM. Vincent GILLET, executive director IBD France, Nicolas LE RAY et Mourad MOULAY ABDELALI ;

  1. Le ministre chargé de l'économie représenté comme ci-dessus,
    Emet l'avis suivant :
    I. - Par lettre du 2 mars 2015, le ministre chargé de l'économie a saisi la commission en vue de la mise en œuvre d'une opération de marché sur le capital de la société Safran, actuellement détenue à hauteur de 21,99 % (et 25,44 % des droits de vote) par l'Etat.
    L'opération envisagée consiste dans la cession d'une partie des actions existantes détenues par l'Etat pour un volume de 3,96 % du capital de Safran, soit 16,5 millions d'actions, pouvant être porté par exercice de l'option de surallocation à 4,55 %, soit 18,975 millions d'actions.
    La cession des actions se fera, selon la technique du livre d'ordres accéléré (dite « ABB »), sous la forme d'un placement privé auprès d'investisseurs institutionnels français et internationaux, conduit par un syndicat bancaire qui en garantit la bonne fin en termes de volume et de prix minimum.
    II. - La société Safran résulte du rapprochement opéré en 2005 entre les sociétés SNECMA, alors détenue par l'Etat à hauteur de 62 % du capital, et Sagem. Cette opération avait consisté en une offre publique initiée par Sagem sur la totalité des actions de SNECMA et qui comprenait une offre principale d'échange et une offre subsidiaire d'achat. L'Etat avait décidé d'apporter les titres qu'il détenait à cette offre publique, ce qui entraînait le transfert au secteur privé de la société SNECMA, l'Etat ne détenant qu'environ le tiers du capital du nouveau groupe et le secteur public y étant globalement minoritaire. La commission avait émis sur cette opération l'avis du 17 février 2005 susvisé.
    En vue de protéger les intérêts nationaux, l'Etat, Sagem et SNECMA avaient conclu une convention visant à protéger les actifs identifiés comme stratégiques, sensibles ou de défense. En considération de ces dispositions, l'Etat n'a pas institué d'action spécifique au capital de SNECMA.
    Le transfert de la société SNECMA au secteur privé a été autorisé par le décret du 26 novembre 2004 susvisé.
    Les cessions d'actions de Safran sont réalisées dans le cadre des articles 26 et 27 de l'ordonnance du 20 août 2014 susvisée.
    La réalisation de l'opération, pour les volumes envisagés, est susceptible de faire passer la participation de l'Etat dans le capital de Safran de 21,99 % à 18,03 % ou à 17,44 % en cas d'exercice de l'option de surallocation.
    En conséquence le montant des droits de vote détenus par l'Etat pourrait passer de 25,44 % à 22,22 % ou à 21,74 %. Cependant, l'Etat bénéficiera à compter du 24 juillet 2015 des droits de vote doubles attachés à la mise au nominatif de titres deux ans auparavant. A cette date, les droits de vote détenus par l'Etat seront par conséquent de 27,34 % ou de 26,56 % en cas d'exercice de l'option de surallocation.
    L'ensemble des salariés et anciens salariés constituent le deuxième actionnaire de Safran avec 14,4 % du capital (et 21,78 % des droits de vote, montant susceptible de diminuer au 24 juillet à 20,35 % ou 20,44 %). Le reste du capital est détenu par le public, hormis 0,14 % détenu en auto-contrôle.
    III. - Le groupe Safran organise son activité en quatre secteurs :

- le secteur « propulsion aéronautique et spatiale » (53 % du chiffre d'affaires et 72 % du résultat opérationnel courant en 2014) rassemble les activités de première monte pour les moteurs d'avions (notamment modèles CFM56 et LEAP), les activités de service et de maintenance et les turbines d'hélicoptères. Depuis 1974, l'essentiel de l'activité dans les moteurs d'avions civils est conduite en coopération avec General Electric Aircraft Engines selon un accord récemment prolongé jusqu'à 2040 ;
- le secteur « équipements aéronautiques » (29 % du chiffre d'affaires et 19 % du résultat opérationnel) réunit les activités concernant des équipements comme les systèmes d'atterrissage et de freinage, les nacelles, les inverseurs de poussée, les câblages, ainsi que les services qui y sont associés ;
- le secteur « défense » (8 % du chiffre d'affaires et 3 % du résultat opérationnel) regroupe les activités d'avionique (autodirecteurs, navigation inertielle), d'électronique, d'optronique et de logiciels critiques ;
- le secteur « sécurité » (10 % du chiffre d'affaires et 6 % du résultat opérationnel) rassemble les activités d'identification biométrique, de détection et les documents numériques (documents d'identité, cartes bancaires, cartes SIM).

La répartition géographique du chiffre d'affaires est la suivante : France 21 %, reste de l'Europe 22 %, Amérique du Nord 33 %, Asie 17 % et reste du monde 7 %.
Le groupe emploie dans le monde un effectif total de 69 000 employés, localisés en France pour 60 % d'entre eux.
IV. - L'exercice 2014 a été marqué par une croissance du chiffre d'affaires et une augmentation des résultats, en données ajustées, qui font suite à celles des années précédentes. En raison de l'impact important de l'effet de change et des instruments de couverture du dollar, le groupe Safran retraite ses comptes consolidés de ces éléments ainsi que de certains écarts d'acquisition. Le groupe communiquant sur ces comptes ajustés, ce sont leurs données qui sont résumées ci-après sauf mention contraire.
Le chiffre d'affaires consolidé s'est établi pour l'année 2014 à 15,4 milliards d'euros, en hausse de 6,9 % par rapport à l'année antérieure, grâce, comme durant les exercices précédents, à la performance de l'ensemble des activités aéronautiques (propulsion et équipements, tant pour la première monte que la maintenance). Les activités de services pour moteurs civils ont progressé de plus de 11 %. L'évolution a été moins favorable pour les activités de défense (+ 2 %) et celles de sécurité (+ 3,2 %). Le carnet de commandes a quant à lui atteint le montant record de 64 milliards d'euros, 23 milliards de nouvelles commandes ayant été enregistrées en 2014.
Le résultat opérationnel courant pour 2014 s'est élevé à 2,089 milliards d'euros, en hausse de 17,4 % par rapport à 2013. Il représente une marge de 13,6 % par rapport au chiffre d'affaires (contre 12,4 % en 2013). Cette forte progression a résulté essentiellement des activités aéronautiques de propulsion (+ 20,3 %) et d'équipements (+ 13,3 %), et dans une moindre mesure de sécurité (+ 11,7 %), tandis que le résultat de l'activité défense reculait fortement (- 15,5%) après le redressement constaté en 2013.
Le résultat net, part du groupe, pour l'exercice 2014, a été de 1,248 milliard, en hausse de 4,6 % par rapport à 2013. Il convient de noter que le résultat net consolidé, part du groupe, publié pour l'exercice 2014 consiste en une perte nette de 126 millions. En effet, la hausse du cours du dollar par rapport à l'euro conduit à enregistrer une perte financière en 2014 de 1,654 milliard d'euros sur les instruments de couverture de change, perte neutralisée dans les comptes ajustés. Dans ses comptes consolidés publiés, Safran ne pratique pas une comptabilité de couverture mais inscrit à sa « juste valeur » son portefeuille de dérivés de change.
Au titre de l'exercice 2014, Safran soumettra à son assemblée générale le versement d'un dividende de 1,20 euros par action contre 1,12 euro en 2013 et 0,96 en 2012.
Le cash flow libre généré en 2014 atteint 740 millions d'euros (+ 6 %).
Les capitaux propres du groupe s'élèvent à 6,48 milliards d'euros au 31 décembre 2014, en baisse de 4,9 % par rapport au montant publié en 2013, en raison de la perte nette comptable publiée pour 2014 et des distributions de dividendes et acomptes sur dividendes. La dette nette est restée à un faible niveau de 1 503 millions contre 1 089 en 2013 (1 220 millions après retraitement de l'impact de la comptabilisation désormais par mise en équivalence des entités détenues conjointement en application de la norme IFRS 11). Les écarts d'acquisition nets (goodwill) inscrits à l'actif du bilan sont restés stables à 3,42 milliards contre 3,40 milliards.
V. - Parmi les faits marquants des derniers mois on peut noter la constitution en 2013 d'une unité dédiée aux activités électriques à l'intérieur du secteur des équipements aéronautiques, Labinal Power Systems, à la suite de l'acquisition de Goodrich Electrical Power Systems, suivie en 2014 de celle d'activités électriques d'Eaton Aerospace. Par ailleurs, Safran et Airbus Group ont créé une entreprise commune destinée à rassembler à terme leurs activités respectives de systèmes de propulsion spatiale et de lanceurs ; elle est entrée en phase opérationnelle en janvier 2015 et imposera un effort de capitalisation significatif.
Pour l'avenir du groupe, la progression du programme de nouveau moteur LEAP, destiné à remplacer le CFM56, est un élément déterminant. Le moteur a tourné de façon satisfaisante pour la première fois au sol le 13 juin 2014 puis en banc d'essai volant le 1er octobre 2014 en Californie. La certification du moteur LEAP-1A/1C devrait intervenir en 2015. Le carnet de commandes du moteur LEAP comprend déjà 8 500 unités, dont 2 700 commandes enregistrées en 2014. Le groupe vise une part de marché d'au moins 70 % sur les avions de taille moyenne. La préparation de la mise en production est désormais en cours, imposant un important investissement dans l'outil industriel.
VI. - Lors de l'annonce le 25 février 2015 des résultats de l'exercice 2014, le groupe Safran a indiqué comme perspectives pour 2015 (sur la base d'hypothèses quant à la parité entre le dollar américain et l'euro) :

- une hausse du chiffre d'affaires ajusté comprise entre 7 % et 9 % ;
- une augmentation du résultat opérationnel courant ajusté légèrement supérieure à 10 % ;
- un cash flow libre représentant 35 % à 45 % du résultat opérationnel courant ajusté sous réserve des incertitudes subsistant quant au rythme des paiements de plusieurs clients.

Ces perspectives se fondent sur l'augmentation soutenue des livraisons de moteurs en première monte, sur la croissance des activités de service pour les moteurs civils (d'environ 10 %), sur un niveau soutenu d'investissements corporels de l'ordre de 700 millions d'euros (requis par la transition de production et la montée en cadence) ainsi que sur la poursuite de la démarche d'amélioration des coûts directs et de réduction des frais généraux.
Dans sa communication financière de l'automne 2014, Safran a de plus précisé ses perspectives d'investissement visant la modernisation et l'internationalisation de ses sites de production ainsi que des acquisitions en vue d'accélérer ou d'établir des positions dans des domaines critiques à des prix justifiés. Il a indiqué les critères de performance à remplir à ce titre par ces acquisitions et souligné qu'il pourrait résulter de ces opérations un ratio maximal dette nette/EBITDA de 2 à 2,5 pour une période limitée.
En ce qui concerne le volume des investissements, les prévisions communiquées à l'automne 2013 par le groupe sont les suivantes :

- des investissements entre 3 % et 4 % du chiffre d'affaires dans les années à venir ;
- après un sommet en 2013-2014, un retour progressif de la R&D à un niveau normatif de 6 % à 7 % du chiffre d'affaires à la fin de la décennie.

VII. - Conformément à la loi, la commission a procédé à l'évaluation de Safran en recourant à une analyse multicritères qui prend en compte les éléments boursiers, la valeur des actifs, les bénéfices réalisés, l'existence des filiales et les perspectives d'avenir. Elle a disposé à cet effet d'un rapport établi par la banque conseil de l'Etat.
Dans ce rapport, la banque conseil étudie tout d'abord l'évolution du cours de bourse de Safran sur plusieurs périodes (un an, six mois, trois mois, un mois). Elle présente aussi les études des analystes financiers qui suivent la valeur et leurs objectifs de cours.
La banque conseil développe trois approches d'évaluation :

- les multiples boursiers consolidés : le groupe est évalué de façon globale selon cette méthode. Les multiples moyens valeur d'entreprise/EBIT (résultat d'exploitation) des sociétés cotées comparables sont appliqués aux agrégats financiers correspondants de Safran pour les années 2015 et 2016. L'EBIT étant le solde intermédiaire sur lequel communique Safran, il est utilisé de préférence à l'EBITDA. La banque conseil retient comme comparables cinq groupes principalement européens présents dans la propulsion ou plus généralement l'aéronautique civile : Meggitt, MTU, Rolls Royce, United Technologies et Zodiac Aerospace. Une difficulté dans l'application de cette méthode à Safran résulte de l'importance du niveau de recherche-développement du groupe (lié à son cycle de programmes en cours) et à sa pratique comptable comportant un montant élevé de capitalisation de cette R&D. La banque présente deux calculs retraitant la capitalisation de la R&D ;
- la somme des parties (par les multiples boursiers) : selon cette méthode, les quatre secteurs de l'activité de Safran sont évalués séparément puis agrégés. Pour chaque secteur, les multiples moyens valeur d'entreprise/EBIT (résultat d'exploitation) des sociétés cotées comparables du secteur sont appliqués aux agrégats financiers correspondants de Safran pour les années 2015 et 2016. Pour les deux secteurs principaux, les comparables retenus sont : MTU et Rolls Royce (propulsion), B/E Aerospace, Esterline, Meggitt, Moog, TransDigm, Wesco Aircraft et Zodiac Aerospace (équipements). Ajustements et corrections sont réalisés comme dans la méthode précédente ;
- l'actualisation des flux (DCF) : la banque conseil a construit un plan d'affaires par agrégation des perspectives de chacun des quatre secteurs du groupe. Elle a utilisé à cette fin un consensus de projections pour la période 2015-2020 sur la base d'une sélection de documents d'analystes financiers établissant de telles projections ainsi que sur des éléments complémentaires résultant des recherches propres à la banque, notamment en ce qui concerne l'hypothèse de taux de change dollar/euro. La valeur terminale est calculée à partir d'une année normative sur la base du flux attendu en 2020 et d'une hypothèse de croissance perpétuelle annuelle de 2 %. Les flux sont actualisés au coût moyen pondéré du capital estimé dans une fourchette de 8 % à 9 %. Dans le calcul du taux d'actualisation, le taux sans risque est déterminé à partir de la moyenne sur deux ans du taux de l'OAT 10 ans. Une analyse de sensibilité est menée en fonction de variations du taux d'actualisation et de l'hypothèse de croissance perpétuelle.

Au total, la banque conseil conclut que les évaluations ainsi obtenues sont cohérentes et qu'elles sont en ligne avec le niveau actuel du cours de l'action Safran.
Dans son document complémentaire présenté à la commission, la banque conseil souligne que l'excellente performance publiée par Safran pour 2014 a été conforme aux attentes du marché. La forte progression du titre au cours de la période récente doit être aussi mise en lien avec l'évolution favorable de la parité dollar/euro et avec la hausse générale du marché, soutenu par les annonces fin janvier de la BCE quant aux opérations de quantitative easing.
VIII. - La commission a analysé l'appréciation de Safran par les marchés ainsi que les forces et faiblesses du groupe.
Depuis le précédent avis publié de la commission sur la valeur de Safran du 12 novembre 2013, le cours de bourse de l'action a connu plusieurs phases. Il a tout d'abord poursuivi son orientation à la hausse des mois précédents, passant de 47,4 € le 12 novembre 2013 à plus de 54 € dans la deuxième quinzaine de janvier 2014. La tendance s'est ensuite inversée jusqu'à fin juillet, le cours de l'action descendant au-dessous de 44 €. L'annonce des résultats très favorables du premier semestre 2014, et la révision conséquente à la hausse des objectifs du management, a entraîné une reprise vigoureuse du titre, qui a dépassé 51 € dans la première quinzaine de septembre. Le cours a ensuite globalement suivi l'évolution du marché (indice CAC 40) avec ses aléas jusqu'à la fin de l'année 2014. Depuis le début de l'année 2015, Safran a été en forte hausse, bénéficiant tant du dynamisme général du marché qui a suivi les annonces de la BCE fin janvier que de ses perspectives propres. A la date du présent avis, le cours est de 63,3 €. Il a enregistré une hausse de 24 % depuis le 2 janvier, alors que l'indice CAC 40 progressait de 15 % et que les comparables de Safran n'enregistraient des hausses que de 5 % à 16 %.
L'action Safran bénéficie d'une liquidité suffisante, avec un volume journalier moyen de 800 000 actions et un flottant d'environ 64 % de la capitalisation boursière représentant aux alentours de 320 jours de marché. Le cours de Bourse apparaît donc un élément de référence important dans le cadre de l'analyse de la valeur de la société. Sa signification est renforcée par la confiance des investisseurs et des analystes dans les perspectives annoncées par la société et dans sa capacité à réaliser les objectifs concernés.
L'action Safran est suivie régulièrement par un nombre important d'analystes des grands établissements financiers. Leur opinion est favorable dans un contexte jugé porteur pour l'aviation civile. Dans son secteur, Safran est souvent la valeur préférée des analystes. A horizon de 12 mois, la moyenne des objectifs de cours revus depuis le début de l'année est de 64,4 €.
L'activité de Safran n'est certes pas exempte de risques, parmi lesquels :

- l'incertitude quant à la conjoncture économique générale à venir et quant à l'éventuel retournement du cycle aéronautique ;
- la dépendance à l'égard des commandes publiques (28 % environ du chiffre d'affaires en 2013) dans un contexte de contraintes budgétaires croissantes, qui peuvent se traduire par des retards de paiement ou de programmes ;
- les risques de réalisation qui demeurent sur les importants programmes en cours (spécialement le moteur LEAP, qui va entrer dans sa phase industrielle) ;
- les incertitudes sur l'activité et la rentabilité des secteurs défense et sécurité.

L'analyse de Safran fait cependant apparaître de nombreux éléments favorables, que les annonces successives de résultats confirment :

- l'environnement porteur du secteur de l'aviation civile favorable, tant à la propulsion qu'aux équipements aéronautiques ;
- l'importance du parc de moteurs CFM56 en maintenance ;
- l'avancée conforme aux prévisions du programme du nouveau moteur LEAP, qui se substituera au CFM56 ;
- la lisibilité que procure l'importance du carnet de commandes ;
- la hausse du cours du dollar américain par rapport à l'euro ;
- la fiabilité que manifeste la réalisation régulière par la société des objectifs qu'elle a annoncés ;
- la mise en place de la nouvelle gouvernance du groupe.

Safran apparaît au total comme un groupe de haute technologie incontesté au niveau mondial, qui détient des positions concurrentielles de premier plan sur tous ses marchés. L'action Safran est une des valeurs les plus recherchées de l'indice CAC 40.
Comme il a été exposé au point II ci-dessus, la commission observe que la cession conduit dans un premier temps à une diminution des droits de vote dont dispose l'Etat dans Safran. La mise au nominatif d'actions effectuée en juillet 2013 doit permettre de restaurer à 26 % au moins le niveau de ces droits de vote, grâce à l'obtention de droits de vote double en juillet 2015, conformément aux statuts de la société. La diminution des droits de vote est sans conséquence du point de vue des intérêts nationaux, compte tenu des droits spécifiques dont dispose conventionnellement l'Etat.
L'opération présentée à la commission consiste en un placement privé garanti par un syndicat bancaire quant à sa bonne fin et à son prix, ainsi qu'il avait déjà été procédé en 2013 pour les précédentes cessions. Le recours à cette procédure paraît approprié dans le contexte de marché actuel.
IX. - Compte tenu de l'ensemble de ces éléments et au vu des informations qui lui ont été communiquées ainsi que des données les plus récentes du marché, la commission estime que la valeur de Safran ne saurait être inférieure à 58 euros par action, soit globalement à environ 24,2 milliards d'euros pour 417 029 585 actions composant le capital social.
Adopté dans la séance du 2 mars 2015 où siégeaient MM. Bertrand SCHNEITER, président, Pierre ACHARD, Daniel DEGUEN, Philippe MARTIN, Mme Inès MERCEREAU et M. Jean SÉRISÉ, membres de la commission.

Le président,

B. Schneiter